• Données de connexion : la cour de justice européenne juge à nouveau la pratique illégale ; le gouvernement s’en tamponne

    https://www.mediapart.fr/journal/france/100321/donnees-de-connexion-la-justice-europeenne-met-la-france-au-pied-du-mur

    La CJUE a estimé contraire au droit européen l’utilisation à des fins pénales des données collectées en dehors d’enquêtes pour « criminalité grave » et « menaces contre la sécurité publique ». Cet arrêt s’inscrit dans une jurisprudence ayant déjà jugé illégale l’obligation généralisée de conservation de ces données. Le gouvernement a demandé au Conseil d’État de passer outre.
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    Après ces quatre arrêts de la CJUE, le Conseil d’État est désormais au pied du mur. Soit il applique la jurisprudence européenne et donne raison aux associations de défense des libertés dans plusieurs recours actuellement pendants. Mais, ce faisant, c’est tout un pan des dispositifs de surveillance administratifs et policiers qui tombe, obligeant le gouvernement à lancer une réforme législative en urgence.

    Soit il décide de passer outre l’avis de la CJUE et d’ouvrir une crise entre le droit français et le droit européen. Et c’est cette dernière option que le gouvernement français semble avoir choisie. Mercredi 3 mars, plusieurs médias ont en effet rapporté que l’exécutif avait transmis en janvier 2021 au Conseil d’État un mémoire lui demandant de s’opposer à la jurisprudence européenne au nom du concept d’« identité constitutionnelle de la France ».
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    L’idée de faire primer le droit national sur le droit européen n’est pas nouvelle. Comme le rappelle le site Next INpact, le député Les Républicains Guillaume Larrivé avait déjà estimé, dans un rapport sur la loi renseignement publié au mois d’août 2020, qu’« on n’aurait sans doute d’autre solution que de considérer que la primauté du droit européen cesse quand on se retrouve au cœur du cœur de la souveraineté nationale et de notre droit constitutionnel ».

    Une hypothèse qui fait bondir le magistrat déjà cité. « Quand j’entends ça, je réponds tout de suite “arrêt Jacques Vabre” de 1975 [l’arrêt de la Cour de cassation reconnaissant la primauté du droit communautaire – ndlr] et article 55 de la Constitution qui affirme l’autorité supérieure des traités et conventions sur les lois. »

    « Il serait beaucoup plus intelligent de chercher à rentrer dans le cadre de cette décision, poursuit-il. On pourrait par exemple définir ce qu’est une infraction grave, en précisant par exemple qu’il s’agit de celles pour lesquelles une peine de plus d’un an d’emprisonnement peut être requise. On pourrait également préciser qu’il ne peut y avoir de grief lorsque les éléments ont été débattus dans le cadre du contradictoire. »

    Contactés par Mediapart, ni le ministère de la justice ni celui de l’intérieur n’ont répondu à nos questions. Également contactés, les deux principaux syndicats de magistrats, l’Union syndicale des magistrats (USM) et le Syndicat de la magistrature (SM) n’avaient quant à eux pas encore de position officielle sur le sujet. Quant à la décision du Conseil d’État sur le recours de La Quadrature du Net, elle est attendue dans les mois à venir.

    #libertes_publiques
    #traçage

    • Recours en annulation

      Avec le recours en annulation, selon les articles 263 et 264 du TFUE, les organes ainsi que les autres institutions de l’UE peuvent être surveillés. Les États membres, les organes de l’UE, les personnes physiques et morales peuvent faire constater par une plainte qu’un acte juridique est illégal. Les personnes individuelles doivent avoir été directement et individuellement affectées pour obtenir le droit de déposer une plainte. La plainte doit être formulée avant un délai de deux mois selon l’article 263 alinéa 6 du TFUE. Selon l’article 256 du TFUE le tribunal de l’UE décide en première instance et la cour de justice de l’UE en deuxième instance5.

      Selon le modèle français, seules sont recevables les raisons suivantes (art. 263 alinéa 2 du TFUE) : « incompétence, violation des formes substantielles, violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir ». Le plaignant ne se doit pas d’expliquer exactement les raisons de la plainte, mais son placet doit apporter la preuve du défaut avec des faits et, au moins, laisser entrevoir la raison de la contestation5.

      Pour les recours en annulation qui ne sont pas liés à des institutions comptant parmi les organes de l’UE on peut – d’après le statut de l’institution – prévoir un pré-processus (comme l’obligation de laisser la commission de l’UE s’occuper du cas avant une plainte)5.

      (Source WP : https://fr.wikipedia.org/wiki/Cour_de_justice_de_l'Union_europ%C3%A9enne)