• « Je dois être patient, attendre que les touristes reviennent » : en Egypte, les commerçants espèrent le retour des beaux jours
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    Une poignée de clients fait face aux trois pyramides de Gizeh veillées par le Sphinx, assis au café situé sur le toit d’un hôtel sans cachet, dans une odeur de chicha. Sur le site archéologique, les touristes sont peu nombreux, loin de la foule d’avant la pandémie de Covid-19. Mais les habitudes ne changent pas : un selfie devant ces célèbres effigies de l’Egypte, une photo à dos de dromadaire… Les habitants du quartier des pyramides, qui dépendent du tourisme, disent avoir tenu le coup ces derniers mois grâce aux visiteurs égyptiens. « Et, depuis le début de l’année, on voit un peu d’étrangers : des Russes, des Ukrainiens… », détaille Islam Abou Taleb, le jeune patron de l’hôtel Cleopatra.C’est à l’automne 2019 qu’il a inauguré l’établissement. Il a eu quelques bons mois, puis vint le coronavirus. « Tout s’est écroulé. J’ai ouvert le café en janvier pour la clientèle locale. Mais la différence entre ce que dépensent Egyptiens et étrangers est semblable à celle entre la terre et le ciel. » Avec le début, mardi 13 avril, du ramadan, mois de jeûne et de célébration peu propice aux excursions, le nombre de promeneurs locaux va diminuer.
    Hormis les guides, le tourisme à proximité du Sphinx fait vivre vendeurs de souvenirs, chameliers… : toute une économie informelle – comme 50 % des emplois en Egypte – dont dépendent la plupart des 50 000 habitants du faubourg de Nazlet El-Semman, un quartier aux ruelles de sable jouxtant le site archéologique. « Une année de perdue crée des dommages pour plusieurs années », soupire Salah Awian, 51 ans, dans la vaste boutique familiale où sont exposés des flacons d’huiles essentielles ou de copies de fragrances connues. Les canapés, où les touristes se voyaient autrefois offrir thé ou café tandis que les prix se marchandaient, sont vides.
    Une chute des revenus de plus de 69 %
    L’Egypte a reçu 500 000 touristes au cours de ce premier trimestre, contre plus de 2,8 millions sur la même période en 2019. Cette année-là, le pays avait presque renoué avec les chiffres d’avant la révolution de 2011. L’activité est l’une des principales mannes du pays. L’année 2020 s’annonçait prometteuse : mais la pandémie a entraîné une chute des revenus de plus de 69 %, et une augmentation des licenciements. Des facilités – comme des prêts à taux réduit – ont été proposées à certains acteurs du tourisme, tels les hôtels. Un fonds d’urgence pour une aide ponctuelle aux travailleurs informels avait été créé en 2020 ; mais les interlocuteurs rencontrés affirment n’avoir compté que sur eux-mêmes.
    « Quand il y a des étrangers, ce sont des individus, pas des groupes. Le virus a sapé les règles du tourisme », déplore M. Awian. Comprendre : du tourisme de masse. Il ne veut pas d’un autre modèle, qui fait la joie actuelle des allergiques à la foule, mais le retour des tour-opérateurs. Aussi surveille-t-il la réponse sanitaire en Europe, d’où provient d’ordinaire le principal contingent de voyageurs. Lui est convaincu qu’une « bonne alimentation et le climat » le préservent de la maladie. « On est impuissants. Notre gouvernement aura beau dire “venez en Egypte”, cela n’aura pas d’impact tant que les pays limiteront les mouvements de leurs ressortissants. On guette. »Il est peu probable qu’un véritable redémarrage touristique ait lieu avant la fin de l’année – le temps que la vaccination avance en Europe. Dans l’intervalle, l’Egypte soigne son image de terre au riche passé : les autorités ont organisé, samedi 3 avril, une fastueuse « parade » de momies royales, en lui assurant un retentissement international. Des découvertes archéologiques sont régulièrement annoncées. Le tourisme domestique est en outre encouragé, avec des offres sur les vols internes.

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