Une partie de la communauté scientifique s’étrangle. Alors que les variants indien ou brésilien menacent de tout faire dérailler, que les hôpitaux restent débordés, les critères utilisés pour justifier le déconfinement leur paraissent bien légers. « Les Japonais se démènent pour ralentir une épidémie afin qu’elle ne dépasse pas les 40 cas pour 100 000 habitants sur sept jours. En France c’est 400. Leur niveau d’exigence est au moins dix fois plus strict ! », souligne Antoine Flahault, directeur de l’institut de santé globale à l’université de Genève. « Je crois que tout le monde attendait un gouvernement qui dise “plus jamais cela !” A la place, le président a déclaré s’accommoder d’un virus qui peut causer 40 000 cas et 300 décès par jour, ce n’est pas acceptable. Le problème de la stratégie du “vivre avec” est qu’elle n’a été qu’une série d’échecs jusqu’à présent », insiste l’épidémiologiste.
Risque de devenir le mauvais élève de l’Europe
Les experts ne s’expliquent pas que le gouvernement ait abandonné l’objectif qu’il s’était fixé à l’automne dernier de descendre à 5 000 cas de contamination par jour. Beaucoup d’entre eux vantent la stratégie du « zéro Covid » qui, en agissant vite et fort contre le virus, doit éviter les incessants stop-and-go des confinements et déconfinements. A leurs yeux, la France risque de devenir le mauvais élève de l’Europe et faciliter la fabrique de nouveaux variants. La décision chinoise de suspendre, le 30 avril, les vols reliant Paris et Shanghaï pour deux semaines est déjà, selon certains, un signal à ne pas négliger.
La stratégie « zéro Covid-19 » ? « Ça n’est pas soutenable avec nos standards démocratiques », a balayé le chef de l’Etat en préambule à son entretien auprès des titres de la presse quotidienne régionale, le 30 avril. « Ceux qui l’ont mise en place étaient soit des îles, soit des régimes autoritaires. On n’est ni l’un ni l’autre. Il y a toujours des Cassandre pour prédire le pire, mais il faut aussi faire preuve d’optimisme ! », abonde un conseiller ministériel, estimant que les critères de surveillance de l’épidémie sont loin d’être laxistes.