• Crise sanitaire, Brochure du Silure pour le 1er mai 2021 - Renversé
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    Dans cette brochure distribuée dans le cortège du 1er mai à Genève, le Silure explique pourquoi il ne faut pas perdre son sens critique en temps de crise sanitaire. On revient ensuite sur quelques expériences de luttes en Suisse romande et quels enseignements on peut en tirer pour l’avenir.

    And either way you turn
    I’ll be there

    Radiohead, Climbing up the walls

    Comme dans la chanson de Radiohead, le Covid-19 est incontournable et nous obsède à la manière de la maladie psychique dont parle le groupe dans son morceau. La mort rôde au tournant et la situation est pleine d’ambivalences. Pour ce 1er mai 2021, le centre de luttes autonomes Silure souhaite revenir sur la situation pandémique et avancer quelques propositions pour la phase actuelle.

    SOMMAIRE

    Un an de pandémie et un bilan social dégradé
    Conflit social et pandémie
    Dimension de classe et mouvements sociaux
    Renouveau antiraciste
    La Cité Léopard sort les griffes
    Une colline d’expérience
    Sale époque et opportunité

    UN AN DE PANDÉMIE ET UN BILAN SOCIAL DÉGRADÉ

    Le Covid a gravement touché Genève durant l’automne dernier, en particulier au mois de novembre où les chiffres des contaminations ont atteint des sommets inégalés en Europe. Des centaines de personnes sont décédées alors qu’elles auraient pu vivre encore plusieurs années, mais apparemment, on n’y pouvait rien. On nous dit qu’elles seraient mortes de toute façon, car lorsque l’on est « faible », d’une certaine manière, on est toujours suspecté d’être un poids pour la société. Ainsi, des personnes exploitées toute leur vie par le capital se sont fait bouffer leur retraite par le virus. Après avoir perdu sa vie à la gagner, on la perd avec une pandémie. Il y a du progrès ! En réalité, depuis la fin du premier semi-confinement, la politique choisie par les autorités suisses a été de laisser courir le virus afin de ne pas péjorer la place du pays dans les relations capitalistes mondiales. Le patronat craignait d’avoir trop d’employéExs en quarantaine et voulait éviter de potentielles hausses d’impôts s’il y avait trop de boîtes à indemniser. Le virus a donc été considéré comme un « risque systémique » de plus au même titre que les intempéries ou les pannes informatiques. Fin novembre, un conseiller fédéral UDC a dit très clairement que le laisser-faire s’expliquait par une « pesée d’intérêts » économiques. Cette situation est terrible mais en même temps elle a le mérite de clarifier les fronts. Elle montre la force du conservatisme dans ce pays autant à gauche qu’à droite, tant il est parfois difficile ou futile de les distinguer vu leur alignement commun sur les intérêts patronaux. Il faut le dire avec force, les véritables corona-relativistes ne sont ni les gens qui défilent contre le port du masque et la « dictature sanitaire », mais les pouvoirs en place et le PS en premier chef, en tant que gestionnaire des questions de santé au sein du Conseil fédéral.

    CONFLIT SOCIAL ET PANDÉMIE

    A Genève, la situation n’est toujours pas bonne avec un taux d’incidence qui n’est pas descendu en dessous de 100 cas pour 100’000 habitantExs depuis le mois de septembre 2020. Certains disent qu’on ne peut rien faire contre cela, que les pandémies ont toujours existé dans l’histoire de l’humanité. On répondra sans doute à ces personnes qui dépolitisent la question du virus d’aller bosser quelques jours en réanimation ! D’une certaine manière, la situation pandémique n’est qu’un chapitre supplémentaire de la guerre sociale qui se menait déjà avant l’arrivée du Covid. Le passe-droit dont a bénéficié le patron du groupe de luxe Richemont pour se faire vacciner avant tout le monde au mois de janvier en Thurgovie a fait grand bruit, et il y aurait aussi beaucoup à dire sur le rôle des Big Pharma dans la stagnation vaccinale. D’une façon générale, il paraît clair que l’exposition au virus est directement liée à la position dans les rapports de production. Les professions qui ne peuvent pas télé-travailler sont souvent celles qui passent du temps dans des locaux exigus et subissent de grands regroupements de personnes pour rentabiliser le « capital humain ». On préfère ainsi disserter sur les jeunes fêtards plutôt que sur les foyers de circulation du virus sur les chantiers. Ou alors, on préfère ne plus en parler du tout. Pourtant, ce n’est pas en espérant pieu- sement un « retour à la normale » que la situation va s’améliorer. D’ailleurs la normalité n’est pas un critère pertinent pour nous, étant donné que les luttes auxquelles notre groupe participe depuis plusieurs années dans ce canton ont précisément pour but de subvertir et d’interroger la fausse normalité d’une société dominée par l’Etat et le capital. Même si le contexte n’est pas favorable, il est nécessaire de critiquer la situation actuelle : l’absence de plans de protection pour que les gens n’attrapent pas le Covid au travail, la faiblesse de la prévention ou l’absence totale de communication sur la diffusion du Covid par aérosol.