• Le récit d’un petit fait curieux. De McFly et Carlito à Zemmour et Papacito.

    Ou comment l’#anecdotisation médiatique du fait politique étouffe notre démocratie...
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2021/06/le-recit-dun-petit-fait-curieux.html

    À l’aide de trois anecdotes, on peut faire le portrait d’un homme. (Nietzsche)

    ... L’anecdote c’est l’arrière-plan qui s’installe en premier plan. Du vase de Soissons aux problèmes gastriques de Napoléon, et bien avant d’ailleurs, l’anecdote aujourd’hui n’a plus uniquement pour fonction de construire une image des personnalités politiques.

    L’anecdote sature aujourd’hui l’espace politique de 2 manières : soit par le récit des anecdotes elles-mêmes, soit par l’anecdotisation des faits politiques au service d’un agenda (au mieux) ou de l’occupation d’un vide (au pire). Anecdotiser un fait ou une déclaration politique c’est y déceler ou y plaquer « un petit fait curieux » et s’agiter pour que du fait ou de la déclaration on ne conserve plus que cette curiosité là.

    Mais l’anecdote est également un mode de récit qui joue sur une connivence souvent invérifiable. Et qui permet aussi, de manière paradoxale, d’euphémiser les discours les plus violents, ou tout au contraire de muscler les récits les plus lénifiants. Telle est la force de l’anecdote. Entre le brouhaha et l’hallali. McFly et Carlito. Zemmour et Papacito...

    Il est assez effarant de constater aujourd’hui, corrélativement à l’augmentation massive de l’abstention lors de différents scrutins, que le fait politique est essentiellement traité au prisme de l’anecdote par la majorité des chroniqueurs et éditorialistes. Plus qu’une éditocratie aux errances audimateuses et à la langue eczémateuse, c’est peut-être à une nouvelle « anecdocratie » que nous faisons face actuellement. La version « face » d’une monnaie dont le côté « pile » serait celui de la technocratie déjà tant condamnée. L’anecdocratie pour nous sauver de la technocratie. La vieille histoire du remède pire que le mal.

    Moralité.

    Le stade ultime de la politique, ou son degré zéro, n’est plus le storytelling. Les récits sont épuisants et nous sommes épuisés.

    Le stade ultime de la politique, ou son degré zéro, n’est même plus le clash. Toutes les outrances ont déjà été énoncées et dénoncées.

    Le stade ultime de la politique, ou son degré zéro, c’est donc l’anecdote. La politique n’apparaît plus aujourd’hui que comme « le court récit de petits faits curieux » qui n’existent que dans leurs commentaires. « Subordonnant les personnages aux circonstances. » Julien Odoul est un playboy qui a tourné des vidéos de charme. Jean-Luc Mélenchon est un complotiste. Emmanuel Macron est cool sait reconnaître l’odeur de « substances ».

    L’anecdote, le mot vient du grec [anekdotos] désignant « ce qui n’est pas publié, inédit ». Or la démocratie est un espace de rendu public. L’anecdote quand elle devient le moteur de tout le cycle politique et de son commentaire, c’est l’inverse de la démocratie. De manière anecdotique, on appellera ça une époque pré-fasciste.

  • Parcoursup2021 Sucks. Encore plus que d’habitude.
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2021/06/parcoursup2021-sucks.html

    Donc comme les collègues l’expliquent eux-mêmes lors des (rares) portes-ouvertes, avec une honnêteté navrée, bah cette année ça va encore plus être la loterie que d’habitude. Voilà. Et tout cela n’est pas le fruit du hasard ou de l’incompétence. Tout cela est sciemment organisé, de manière structurelle. Non pas parce que les gens sont méchants mais parce que les gens, ces gens-là en tout cas, ont un projet et un agenda politique qui est d’éparpiller façon puzzle le service public d’enseignement (supérieur). Et qu’ils savent parfaitement comment y arriver. Pas à pas. La réforme Blanquer du bac n’a pas pour objectif d’en finir avec les filières et la sur-représentation des disciplines scientifiques. Elle a pour objet de casser toute possibilité de repères stables et collectifs et d’atomiser les parcours individuels. Alors et alors seulement, on pourra, sous prétexte d’égalité et à grands renforts d’algorithmes changeants et de procédures toujours plus fragmentées, opaques et incohérentes, vous mettre exactement là où le patronat aura besoin, ou là où le secteur privé (de l’enseignement supérieur) aura le plus d’intérêts. Il n’est qu’à observer depuis déjà trois ans l’explosion des recrutements (et des écoles) « hors procédure » liés à Parcoursup pour s’en convaincre.

    Ensuite du côté des enseignants du supérieur. Là encore les choses sont variables selon les formations et les filières mais la constante cette année c’est que la plupart des formations et des filières ont reçu un peu ou beaucoup plus de dossiers de candidatures que les années précédentes (puisque les jeunes n’ont de toute façon pas d’autre choix comme je vous l’expliquais précédemment). Cette augmentation totalement artificielle pèse très lourdement sur les processus de recrutement et achève de saborder même les meilleures volontés. A force d’avoir chaque année davantage de dossiers à traiter et toujours moins de postes de titulaires pour le faire, on finit par avoir la tentation d’aller au plus simple, c’est à dire au plus injuste, c’est à dire à la seule sélection sur la base des notes. Et c’est en effet ce que font de plus en plus de formations tout en entretenant le mensonge structurel consistant à affirmer que « oui oui on regarde les dossiers ».

    Comme l’objectif de ce système est politique et assumé, il s’agit de décourager y compris les plus radicalisés de la bonne volonté, les gens et les équipes qui continuent de penser que le minimum que l’on doit à ces jeunes gens et ces jeunes filles c’est d’examiner leur dossier et de prendre en compte autre chose que simplement leurs notes. Nous par exemple ;-) Alors pour ces gens-là cette année, le ministère a sorti une nouvelle version de Parcoursup, percluses d’autant de bugs et d’incohérences qu’une étude sur la chloroquine pilotée par Didier Raoult. Je vous raconte...

    • Ensuite du côté des enseignants du supérieur. Là encore les choses sont variables selon les formations et les filières mais la constante cette année c’est que la plupart des formations et des filières ont reçu un peu ou beaucoup plus de dossiers de candidatures que les années précédentes (puisque les jeunes n’ont de toute façon pas d’autre choix comme je vous l’expliquais précédemment). Cette augmentation totalement artificielle pèse très lourdement sur les processus de recrutement et achève de saborder même les meilleures volontés. A force d’avoir chaque année davantage de dossiers à traiter et toujours moins de postes de titulaires pour le faire, on finit par avoir la tentation d’aller au plus simple, c’est à dire au plus injuste, c’est à dire à la seule sélection sur la base des notes. Et c’est en effet ce que font de plus en plus de formations tout en entretenant le mensonge structurel consistant à affirmer que « oui oui on regarde les dossiers ».

      Je confirme l’abominable constat.