Minage du Bitcoin : « Ce qui se passe en Chine est pour nous une opportunité folle », Cryptomonnaies

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    Eclairage de Sébastien Gouspillou, cofondateur de l’entreprise de minage de bitcoin Bigblock.

    Qu’est-ce qu’un mineur ?

    Un mineur, c’est un serveur qui fait des calculs pour sécuriser le réseau bitcoin. Ce sont les fameux ordinateurs qui consomment de l’énergie, les asics.

    Et c’est un sujet de préoccupation en Chine ?

    La consommation et la pollution, apparemment, ce n’est pas le problème. Parce que dernièrement, les autorités ont coupé le minage dans la province du Sichuan où les mineurs sont essentiellement alimentés en hydro-électricité et avec des surplus. Donc en termes d’écologie, il n’y a aucun intérêt à arrêter le minage dans cette région. On est là, à mon avis, plus dans une chasse aux sorcières.

    On a entendu parler plusieurs fois d’une « interdiction du bitcoin en Chine », mais quelle est la réalité de cette interdiction ?

    C’est très difficile à cerner, même les Chinois ont du mal à comprendre la politique du gouvernement. On a eu par le passé beaucoup d’informations pour lesquelles il était difficile de démêler le vrai du faux et sans comprendre quelle autorité s’exprimait, cela fait des années que ça dure. Mais on a vu malgré tout un développement du minage en Chine.

    A priori, aujourd’hui, il y a deux tendances qui dominent au sein du parti communiste : la première selon laquelle bitcoin est positif pour l’économie chinoise parce que le pays en mine l’essentiel et qu’il fabrique l’intégralité des matériels de minage ; et une seconde pour laquelle, le bitcoin ce n’est pas bien, comme ce qu’on entend de la part de notre banque centrale. Et pour le moment, cette seconde tendance reprend les rênes.

    Il y a eu plusieurs restrictions dès 2014. En 2017, la Chine a carrément interdit les exchanges sur son territoire. Mais il n’y a pas eu de nouvelle interdiction prononcée récemment.

    Alors quelle est la nouvelle ?

    C’est un rappel à la loi. Mais en fait, s’il y a bien un pays où le bitcoin est très échangé, c’est la Chine. La banque centrale rappelle aujourd’hui aux banques qu’elles ne doivent pas faire de trading de cryptomonnaies, qu’elles ne doivent pas avoir d’activité dans ce domaine-là. En faisant pression sur les compagnies d’électricité, en tout cas dans quatre provinces, il est espéré que les mineurs ne pourront plus produire de bitcoins [les mineurs sont récompensés par des nouveaux bitcoins pour leur travail, NDLR]. Car on ne parle pas de toutes les provinces chinoises, mais des principales productrices.

    Le minage en soi n’est pas interdit, les autorités ont simplement enjoint les compagnies d’électricité de ne plus alimenter cette activité dans quatre provinces. Il n’y a pas de loi d’Etat qui interdit le minage.

    Mais, il y a bien quelque chose qui se passe cette fois-ci. Je ne sais pas où cela va mener. Je suis convaincu toutefois que les producteurs d’électricité du Sichuan vont rendre compte aux autorités de leur manque à gagner considérable et que les restrictions finiront par s’assouplir.

    Donc le minage continue en Chine ?

    La puissance de calcul qui est actuellement utilisée sur le réseau montre bien que tous les mineurs chinois ne se sont pas arrêtés, sinon on aurait dû observer une baisse beaucoup plus forte, même si une grosse partie a effectivement été touchée.

    Le bitcoin va-t-il arrêter d’être miné si la Chine cesse totalement le minage ?

    Non, même avec cette hypothèse extrême, le bitcoin ne cesserait pas d’être miné pour autant. Les acteurs se repositionneraient. On observerait une redistribution des cartes, comme on a l’habitude de le voir. Dans les pays qui sévissent, les mineurs partent, les machines voyagent.

    On a vu cela en 2018. C’était alors dû au retournement du marché : on est passé de 20.000 dollars à 3.500 dollars le bitcoin. Beaucoup d’entreprises n’étaient alors plus rentables, et celles qui étaient présentes en Europe (hors Islande) sont parties au Kazakhstan, en Russie, au Canada, etc. Les machines voyagent très bien donc elles peuvent être dispatchées ailleurs dans le monde.

    Comment faites-vous avec votre entreprise ?

    Nous avons une petite production en Sibérie, une plus grosse au Kazakhstan et l’essentiel de notre activité se trouve en Afrique, notamment au Congo.

    Cela fait des années que notre travail consiste à trouver des mégawatts perdus dans le monde et à installer des fermes à proximité. On a des projets actuellement dans sept pays différents et ce qui se passe actuellement en Chine est pour nous une opportunité folle.

    Comment feriez-vous si vous deviez changer de région d’un coup ?

    Nos fermes sont installés dans des conteneurs parce qu’il faut que le minage soit mobile. Nous avons vraiment intégré ce paramètre parce que le minage n’est utile pour une compagnie ou une région que temporairement. Il y a souvent davantage d’offre que de demande au moment de la mise en marche d’une nouvelle centrale. Or, le minage a du sens dès lors qu’il vient pomper de l’électricité qui ne peut pas être vendue ; le prix du KWh est alors au plus bas. Dès que la demande locale se développe, le minage a moins de raisons d’être : le mining s’efface et laisse la place à une clientèle traditionnelle, qui achète l’électricité au prix. Donc on est vraiment le client de dernier recours pour le producteur d’électricité. Mais il faut être souple et en capacité de bouger une partie de sa mine tous les trois ou quatre ans.

    Est-ce un modèle intégré par les autres mineurs ?

    Pas en Chine, les mineurs travaillaient tous dans du dur, dans des grosses fermes créées à cet effet parce qu’ils avaient accès à de l’électricité très bon marché, depuis longtemps. Ils n’ont peut-être pas ressenti l’intérêt d’être mobile.

    Vaut-il mieux être dans une région froide ?

    Il n’est pas nécessaire d’être dans des pays froids. Le grand froid est presque aussi difficile à gérer que les grandes chaleurs. Sur les notices des asics, la plage d’utilisation indiquée est en général -10° C +30° C .

    Si jamais nous avons une panne d’électricité en Sibérie, par exemple, avec du -35° C ? nous ne pouvons pas redémarrer sans préparation : c’est-à-dire qu’on est obligé de réchauffer les locaux avant de pouvoir remettre les serveurs en route.

    Dans l’autre sens, au-delà de 40° C, les machines chauffent et finissent par se mettre en sécurité. En Afrique, au niveau de l’Equateur, on est à 25° C toute l’année et c’est l’idéal.

    A partir de quel niveau le prix de l’électricité est intéressant pour vous ?

    De 0,01 à 0,03 dollars par kW/h (de moins d’1 centime à 2,5 centimes d’euros), tout dépend du niveau d’investissement nécessaire et du risque pays/région. C’est un prix bas, parceque cette électricité ne peut être vendue ailleurs mais aussi parce que le mining est un client dont la consommation est régulière et continue.