• Channel Crossings
    Exilés à la frontière franco-britannique : recherche sur les tentatives et les traversées de la Manche par voie maritime, 2018-2021
    http://www.exils.org/channel-crossings

    INTRODUCTION

    Si l’ampleur du phénomène est sans-précédent, les traversées de la Manche par voie maritime sont anciennes. Plusieurs tentatives ont été observées lors de la période de la Jungle de Calais (2014-2016), voire antérieurement. La Plate-forme inter-agences pour le partage d’informations sur le trafic de migrants par voie maritime[1] montre que la France avait rapporté une tentative de traversée par 6 personnes, en juin 2001. Depuis 2018, l’augmentation du nombre de personnes traversant la Manche par la voie maritime est forte, mais « leur nombre reste faible et maîtrisable » [2], comme le rappelaient l’OIM et l’UNHCR l’été dernier. Et même si l’attention médiatique sur les tentatives de passage via des camions ou des véhicules a diminué, ces dernières sont encore très importantes et reste le principal moyen de passage irrégulier : en 2019, « 24 000 migrants » ont été détectés « dans des camions à l’entrée du tunnel sous la Manche ou dans le port de Calais ».[3]

    Le changement d’une modalité de passage à une autre a déjà été observé sur d’autres frontières, et le recours à des bateaux pour traverser une frontière maritime est aussi observé en Méditerranée centrale et orientale, ainsi que sur certains territoires d’outre-mer français comme Mayotte. Mais un tel phénomène entre des pays d’Europe reste rare, et le littoral nord est la seule façade maritime métropolitaine à y être confrontée.

    En 2019, première année où l’ampleur de ces traversées a fortement augmenté, aucuns travaux de recherche sur ces traversées n’existaient alors. Elles ont rapidement suscité de fortes inquiétudes et réactions des pouvoirs publics, des 2 côtés de la Manche. La prise de risques supplémentaires par cette voie de passage est réelle : entre 2018 et 2020, 11 décès sont formellement liés à des accidents survenus lors d’une tentative de traversée en bateau. Mais malgré les différents plans mis en place par les autorités, les tentatives de traversées persistent, voire s’étalent sur le littoral. Il semble alors pertinent d’essayer de mieux comprendre ce phénomène afin d’adapter les réponses des différents acteurs à la situation.

    Le premier but de cette recherche était ainsi de pouvoir faire un premier état des lieux sur ces traversées et de quantifier ce phénomène, en réalisant une collecte de données (voir plus bas) et en étudiant différentes thématiques :

    La manière dont sont réalisées ces traversées, les opérations de secours, ainsi que la prise en charge des naufragés à terre ;
    Le droit et les réglementations maritime en vigueur dans la Manche ;
    Les actions menées par les autorités à la suite de ces traversées (plan d’actions, accords bilatéraux…) ;
    Les risques de ces traversées et les accidents qui se sont produits ;
    Les profils et les parcours des personnes ayant réalisées ces traversées ;
    Les facteurs à l’origine de ce nouveau mode de passage.

    Le deuxième objectif était de garder une trace écrite et centralisée des différents événements relatifs à ces traversées, notamment les accidents qui se sont produits ces 2 dernières années. Le troisième est de définir des recommandations ou des pistes de travail afin d’éviter de nouveaux accidents dans la Manche, de mieux cerner la situation des personnes présentes sur le littoral et leur proposer des solutions qui leur permettraient d’exercer leurs droits sans avoir à prendre ces risques.

    #exils #migrations #frontieres