• « Avec sa faible gravité, Mars est incapable de retenir une atmosphère et personne, ni M. Musk ni le pape n’y pourra rien changer »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/08/08/elon-musk-don-quichotte-d-un-nihilisme-planetaire-adule-par-l-ignorance-d-un

    L’astrophysicien Louis d’Hendecourt, dans une tribune au « Monde », réduit à néant les ambitions du patron de Space X de vouloir coloniser Mars et d’en faire une planète habitable.

    Ces derniers temps, avec le succès de petits vols suborbitaux de milliardaires défiscalisés souhaitant développer un tourisme spatial de (très) petite niche, l’ensemble des médias s’est emballé pour ces réussites considérées comme spectaculaires. Pourtant de tels vols existent depuis… 1960 ( !) avec l’avion X15 de l’US Air Force, certes réservé à des pilotes chevronnés, dont Neil Armstrong, premier « touriste » lunaire il y a 52 ans.
    L’innovation technologique des engins actuels est donc fort modeste, le besoin de moteurs fusée est toujours d’actualité : impossible de quitter la planète sans une débauche de moyens technologiques, mais à un coût environnemental désastreux à tous les niveaux (financements, ressources naturelles et… pollution).

    Pourtant, nous avons tous rêvé de devenir des astronautes, de nous échapper de la Terre et de découvrir de nouveaux mondes, les romans de science-fiction sont à cet égard porteurs d’un imaginaire puissant ! Mais il s’agit de romans de (science)-fiction et non de science, faut-il le rappeler ?

    Promesses « illimitées »

    Si Elon Musk, avec sa société Space X, largement aidée par la NASA, et ses nombreux succès, est le plus avancé, et dirige la plus sérieuse de ces entreprises – Falcon réutilisable ; capsule Crew Dragon ravitaillant en astronautes et matériel la station spatiale internationale ; contrat pour le retour d’astronautes américains sur la Lune –, on remarquera que le tout se fait dans une démarche parfaitement classique, celle de l’exploration spatiale développée par les Etats depuis maintenant soixante ans, à des fins en partie commerciales, mais somme toute assez classiques, les satellites commerciaux ayant toujours existé.

    Or, le but avoué et répété d’Elon Musk n’est autre que la planète Mars, non pas pour quelques voyages à finalités technique et scientifique comme l’étaient ceux d’Apollo sur la Lune, mais bien à des fins d’installation et surtout de colonisation (mot pourtant fortement connoté à l’heure actuelle !) de la Planète rouge, sous-tendant l’idée que, après l’épuisement des ressources sur la Terre, Mars nous tendrait les bras, dans une sorte de nouveau Far West aux promesses « illimitées ».

    Mais Mars n’est pas, loin s’en faut, une planète habitable. Notons au passage que la notion d’habitabilité, très utilisée par les astrophysiciens et astrobiologistes, est une notion fourre-tout largement contestée dans la communauté scientifique et qu’aucune définition précise ne saurait en être donnée. Habitable par qui ou par quoi ? Habitable à quel stade de l’évolution planétaire voire de l’évolution biologique ? Chimie prébiotique, bactéries unicellulaires puis pluricellulaires, plantes, animaux ?

    Strictement personne ne le sait ni ne peut prévoir un tel phénomène, indécidable par nature, tant il est vrai que l’origine du vivant, au niveau moléculaire par nécessité, reste totalement incomprise. Tout au plus fait-on appel à la notion très basique de zone habitable autour d’une étoile où la présence d’eau liquide à la surface de la planète serait possible, simultanément à la présence de composés organiques et de lumière… Un retour bien ironique à la suggestion originale de Charles Darwin (1809-1882) dans sa correspondance de 1871 au botaniste Joseph D. Hooker (1817-1911). Rien de plus ni de réellement mieux n’a été proposé depuis lors !

    Par définition inhabitable

    La colonisation de Mars prônée par Musk suppose que la planète soit habitable de manière durable pour nous, êtres humains, et ceci bien évidemment grâce à la présence d’un environnement souvent surnommé la biosphère, un nom particulièrement signifiant et qui ne s’applique en ce moment qu’à une seule planète, la nôtre.
    Sans eau (ou si peu), sans atmosphère (ou si peu), sans volatiles et organiques (ou franchement si peu), sans tectonique des plaques contrôlant le cycle du dioxyde de carbone sur Terre, sans champ magnétique protecteur d’un rayonnement cosmique féroce et avec des températures qui feraient prendre le sommet de l’Everest pour un sauna tropical, Mars est par définition une planète inhabitable, certainement à des êtres aussi complexes que nous, au sens large, mais probablement tout autant à des bactéries qui n’ont à ce jour pas encore été découvertes.

    Certes, l’être humain s’adapte à toutes les conditions. Il a exploré les fosses sous-marines, séjourné dans les hivers antarctiques et même passé quelques jours sur la Lune. Mais il est à noter que son environnement immédiat et (très) temporaire a été intégralement importé de sa planète, à grand renfort de moyens et de technologies innovantes et remarquables mais n’assurant aucunement la pérennité de ces habitats précaires. Même la station spatiale internationale (ISS) est ravitaillée par des vaisseaux (de Musk !) apportant vivres, eau et… oxygène !

    Mais Mars pourrait-elle être rendue habitable selon le grand rêve et la promesse du fondateur de Space X qui souhaite la « terraformer », un des mythes fondateurs de la science-fiction du XXe siècle. Cela suppose que le nécessaire (pour combien de personnes ?) soit évidemment présent et pérenne sur la planète. Or, il n’y a rien sur Mars.

    Radiations implacables

    L’eau en est partie dans sa grande majorité il y a 3,3 milliards d’années ; du basalte et aucune terre arable ; les radiations implacables ont balayé la surface de la planète, la rendant totalement stérile et empêchant le développement possible d’une vie hypothétique qui aurait alors mis des milliards d’années pour arriver à une vie potentiellement similaire à la nôtre (ce qui reste d’ailleurs à démontrer) où nous pourrions nous adapter.

    En d’autres termes, « terraformer » Mars prendrait des millions d’années avec un résultat connu à l’avance : avec sa faible gravité, Mars est tout simplement incapable de retenir une atmosphère et personne, ni M. Musk ni le pape n’y pourra rien changer, Mars est désormais une planète morte (si ce mot a une signification pour une planète).

    Mais au-delà de cette banale réalité scientifique et en négligeant le problème éthique qui consisterait à ne sauver que quelques privilégiés, se pose avec force une interrogation vertigineuse et ô combien cruciale à laquelle Elon Musk n’accorde qu’une attention de façade : est-il possible de re-terraformer la Terre ? Est-il possible, par exemple, de simplement ramener le taux de dioxyde de carbone dans l’air, responsable du réchauffement climatique, de 440 ppm [parties par million] actuellement à sa concentration préindustrielle de l’ordre de 280 ppm et ce en un minimum de temps (une génération ?) ?

    Bien évidemment la réponse est simplement non, du moins pas sans un effort considérable qui dépasserait nettement tous les budgets que M. Musk pourrait placer dans son illusoire colonisation de Mars. La physique est dans ce cas implacable puisque retransformer ce trop-plein atmosphérique de CO2 nécessiterait une dépense d’énergie au moins égale (et certainement supérieure) à l’ensemble des énergies fossiles produites depuis 1750. Un défi nettement plus intéressant que celui proposé par Elon Musk, Don Quichotte d’un nihilisme planétaire, adulé par l’ignorance et la crédulité d’une société en totale déconnexion avec la réalité scientifique.

    Louis d’Hendecourt est directeur de recherche émérite au CNRS et Aix-Marseille-Université.

    Le Monde publie en tribune un contrepoint à une hagiographie de Arnaud Leparmentier : Visionnaire, ambitieux, transgressif... Elon Musk, portrait d’un électron libre https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/07/19/visionnaire-ambitieux-transgressif-elon-musk-portrait-d-un-electron-libre_60

  • Cyrille, Yannick et les autres… Les héritiers Bolloré à l’ombre du patriarche
    https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/07/25/cyrille-yannick-et-les-autres-les-heritiers-bollore-a-l-ombre-du-patriarche_

    Alors que sa chaîne CNews se fait le porte-voix des antivax, en bon papa poule, [Vincent Bolloré] s’est démené pour faire vacciner contre le Covid-19 toute la famille dès les premières doses disponibles.

    (juste une des anecdotes révélatrices de ce portrait)

  • « Le racisme a des effets corporels multiples », Magali Bessone
    https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/07/13/le-racisme-a-des-effets-corporels-multiples_6088076_3451060.html

    ENTRETIEN « Les nouveaux destins du corps » (2/5). Spécialiste des théories critiques des races et du racisme, Magali Bessone revient, dans un entretien au « Monde », sur la place fluctuante du corps et de la couleur de peau chez les penseurs de la question raciale.

    « Voilà ce que je voudrais que tu saches : en Amérique, c’est une tradition de détruire le corps noir – c’est un héritage. » Une colère noire (Autrement, 2016), de l’essayiste Ta-Nehisi Coates, accompagne le renouveau du mouvement antiraciste américain. Vendu à 4 millions d’exemplaires, il est centré sur l’expérience subjective du « corps noir » – l’expression est employée 82 fois dans ce court texte adressé à son fils – dans cette Amérique que l’on espérait encore « postraciale » quelques années auparavant. Le vaste mouvement de protestation qui a suivi la mort de George Floyd a vu se diffuser cette rhétorique du « black body » pris dans des statistiques attestant qu’un siècle et demi après la fin de l’esclavage, habiter un corps noir façonne encore les vies, signe un destin, pire, expose à la fatalité.

    Mais au contraire de l’antiracisme des droits civiques, tel qu’exprimé par Martin Luther King – qui aspirait à ce qu’un homme noir soit jugé comme les autres –, l’achèvement de l’égalité nécessite ici, au contraire, de regarder la race, de prendre conscience du « privilège blanc  ». Cette lutte antiraciste, en invitant à considérer les races, fussent-elles sociales, recrédite-t-elle cette notion de race ?

    Professeure de philosophie politique à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, Magali Bessone travaille sur les théories critiques de la race et du racisme, ainsi que sur les théories contemporaines de la justice et de la démocratie. Elle a écrit Faire justice de l’irréparable. Esclavage colonial et responsabilités contemporaines (Vrin, 2019). Elle revient sur la place fluctuante du corps et de la couleur de peau chez les penseurs de la question raciale en invitant à sortir de la distinction catégorique entre social et biologique.

    Le renouveau du discours antiraciste s’appuie beaucoup sur la rhétorique du « corps noir ». De quelle manière W. E. B. Du Bois, penseur majeur de l’inégalité raciale, qui publie « Les Ames du peuple noir » en 1903, s’est-il emparé de cette question du corps ?

    Du Bois insiste sur l’idée que la question noire s’est construite politiquement et administrativement, d’abord par l’esclavage, puis par la mise en place de la ségrégation officielle et ce qu’on appelle la règle de la « one-drop rule », qui veut que l’on soit assigné à la catégorie administrative « Noir », indépendamment de son apparence, si l’on compte une goutte de sang « noir » parmi ses ancêtres. Ainsi, pour Du Bois, il faut bien distinguer cette catégorie administrative et la couleur de la peau. Dans Les Ames du peuple noir, il décrit les personnes qu’il rencontre avec des adjectifs très variés – or, cuivre, fauve, beige, marron foncé… On trouve tout une palette de couleurs, qui correspondent à l’étiquette administrative « Noir ». Mais ça ne veut pas dire pour autant que « Noir » désigne quelque chose de totalement artificiel ou théorique, car l’assignation à cette catégorie a des effets très concrets, matériels et physiques, y compris de vie et de mort – je pense notamment au chapitre dans lequel il décrit comment meurt son fils de 18 mois, parce qu’il n’a pas réussi à trouver un médecin noir pour le sauver. Plus tard, dans son autobiographie, Du Bois en vient à penser que la race ne peut être un concept, mais plutôt un groupe de forces, de faits et de tendances, parmi lesquelles quelque chose de l’ordre du ressenti, de physique. Il établit un lien avec l’Afrique et avec la traite et l’esclavage.

    Comment le mouvement de la négritude propose-t-il de penser les corps noirs ?

    La négritude est un mouvement francophone anticolonial rassemblant des intellectuels et des écrivains noirs des colonies françaises, créé avant la seconde guerre mondiale et qui prend de l’ampleur dans l’immédiat après-guerre : le contexte est ici très différent du contexte américain. Il y a une forte dimension culturelle – la négritude est une valorisation des valeurs noires contre leur minorisation ou leur effacement par les colons – et une forte dimension politique, liée à la culture : une demande d’émancipation et de « reconnaissance du fait d’être noir », selon les mots d’Aimé Césaire. C’est une manière de penser « l’être dans le monde » des Noirs, comme le dit Sartre dans Orphée noir (1948), le fait d’exister et d’entrer en relation avec le monde, d’agir dans le monde, en tant que Noir – vu comme tel et assigné à son corps.

    Opposé à la négritude, Frantz Fanon dit que « la peau noire n’est pas dépositaire de valeurs spécifiques ». Il achève « Peaux noires, masques blancs » sur cette phrase : « Ô mon corps, fais de moi toujours un homme qui interroge ! » Que veut-il dire ?

    Fanon a suivi les cours du philosophe Maurice Merleau-Ponty à Lyon : il entre dans cet univers philosophique qu’est la phénoménologie, c’est-à-dire l’idée que nous sommes, nous les êtres humains, situés par nos corps dans notre monde. Et comme Beauvoir se demande ce qu’un corps « féminin » fait à ce rapport au monde, Fanon se demande si la racialisation du corps produit des effets spécifiques. Sa réponse est radicale : on n’est pas construit comme sujet dans le monde de la même manière selon que l’on est blanc ou noir. Le regard blanc chosifie l’individu noir, réduit le Noir à son corps, et même juste à sa surface : sa peau. C’est ce qu’il appelle le « schéma épidermique racial ». Pour parvenir à devenir un sujet, « un homme parmi d’autres hommes », il faut donc en passer par la colère, la révolte, puis la fierté, qui est le moment de la négritude, pour, peut-être, penser en d’autres termes. « Ô mon corps, fais de moi toujours un homme qui interroge » signifie que nous partons des corps mais qu’on ne saurait s’y arrêter : interroger, ne jamais tenir pour acquis ce donné auquel l’homme noir est assigné, déconstruire les évidences. Tout ce que nous voyons est déjà tissé de valeurs, d’interprétations. Le regard n’est pas une pure passivité devant le monde qui s’offre à nous, c’est quelque chose d’actif de et de théorisé.

    On parle aujourd’hui de « biais implicites » : l’idée que le racisme peut être inconscient, que l’on peut être raciste « malgré soi ». C’est ce qui fait que l’on appelle à regarder à nouveau la couleur ?

    Oui, sous l’effet de Black Lives Matter, ce qui est venu à la conscience publique de manière beaucoup plus globale, c’est justement le fait qu’il demeure dans nos sociétés une pertinence de la catégorisation raciale en raison de notre histoire, et que la color blindness est, au mieux, une illusion sur nous-mêmes : nous vivons dans un monde social où les corps traduisent (imparfaitement) les appartenances raciales et où ces appartenances nous positionnent socialement, économiquement… Pour autant, une fois qu’on a pris conscience de la présence de ces catégorisations, c’est à nous de travailler pour qu’elles deviennent non signifiantes sur le plan politique et économique. Dans un monde idéal, il n’y aurait pas de corrélation entre les caractéristiques phénotypiques et des données socio-économiques.

    Le racisme « déloge les cerveaux, bloque les voies respiratoires, déchire les muscles, extrait les organes, fend les os, brise les dents », écrit Ta-Nehisi Coates, l’intellectuel afro-américain le plus influent de sa génération. Peut-on considérer que l’insistance sur le corps sert aussi à rappeler la nature viscérale du racisme, et qu’alors que plus grand monde ne se revendique raciste, les corps témoignent de ses effets de façon tangible ?

    C’est très juste. Il a pu exister, en effet, une tendance à estimer que le racisme, ça n’était « que » du discours, des paroles ou une opinion fausse sur des groupes humains absurdement distingués et hiérarchisés. A l’inverse, on peut aussi penser le racisme avec des déterminations structurelles globales trop abstraites. Mais le racisme « bloque les voies respiratoires ». Pour prendre un exemple récent, indépendamment des violences policières et du slogan « I can’t breathe » (« je ne peux pas respirer ») repris par le mouvement BLM, on a bien vu les effets physiques du racisme structurel avec la crise due au Covid-19, qui n’a pas créé, mais révélé, des inégalités préexistantes, parmi lesquelles des inégalités de santé.

    Aux Etats-Unis, où le recensement pose la question de l’appartenance raciale des habitants, on a constaté que les Noirs étaient statistiquement plus touchés par le Covid-19, qu’ils contractaient des formes plus graves, et qu’il y avait proportionnellement plus de décès dans la population noire que dans la population blanche. C’est le résultat de nombreux facteurs sociopolitiques, dont on peut faire l’histoire, parmi lesquels la surreprésentation des Noirs chez les travailleurs de « première ligne » ou dans les populations avec comorbidités, notamment surpoids et obésité. Le racisme a des effets corporels multiples, pas seulement les dents brisées ou les os fendus à la suite d’une ratonnade ou à des coups de matraque, mais des effets de long terme dans les corps fragilisés.

    Plusieurs histoires de femmes blanches se faisant passer pour noires, dont la plus célèbre est Rachel Dolezal, ont suscité une indignation à peu près unanime aux Etats-Unis. Si l’on admet que la race est une construction sociale, pourquoi le transracialisme est-il tellement tabou ?

    Il est intéressant de voir que lorsque les parents de Rachel Dolezal [alors présidente d’un chapitre de la National Association for the Advancement of Colored People, ses parents ont révélé en 2015 à un média local que leur fille mentait sur son identité ethnique] ont publiquement fait connaître son appartenance raciale « blanche », parce qu’elle était leur fille et qu’eux-mêmes étaient blancs, la preuve par la filiation a immédiatement été admise comme définitive. Et même des chercheurs qui se situent du côté des « constructivistes » (qui estiment que la race est une construction sociale et non pas un donné biologique) ont estimé qu’elle s’était fait passer pour noire de manière frauduleuse et inadmissible.

    Cette indignation peut s’expliquer par le fait qu’elle n’a jamais justifié son geste par contrainte économique ou oppression politique, mais toujours par choix de cohérence avec une identité personnelle ressentie. « Je me suis toujours sentie noire », dit-elle. Elle s’est fait passer pour noire parce que c’était son « identité subjective » et qu’elle voulait mettre le regard des autres en conformité avec son propre regard sur elle-même. Il y a, dans ce transracialisme, une manière de dire que je suis ce que je choisis d’être, en toute liberté et autonomie. Alors que toute l’histoire de la construction raciale implique des groupes en relation avec d’autres groupes, qui sont pris dans des rapports de pouvoir et de domination, qui imposent, négocient ou résistent aux appartenances collectives. C’est ce qu’elle nie en disant : « Je me sens noire. » La race n’est pas une question de sensation, mais d’assignation, de stigmatisation – et, parfois, de retournement du stigmate.

    #racisme #racialisation #Noir.e

    • Cette indignation peut s’expliquer par le fait qu’elle n’a jamais justifié son geste par contrainte économique ou oppression politique, mais toujours par choix de cohérence avec une identité personnelle ressentie. « Je me suis toujours sentie noire », dit-elle. Elle s’est fait passer pour noire parce que c’était son « identité subjective » et qu’elle voulait mettre le regard des autres en conformité avec son propre regard sur elle-même. Il y a, dans ce transracialisme, une manière de dire que je suis ce que je choisis d’être, en toute liberté et autonomie. Alors que toute l’histoire de la construction raciale implique des groupes en relation avec d’autres groupes, qui sont pris dans des rapports de pouvoir et de domination, qui imposent, négocient ou résistent aux appartenances collectives. C’est ce qu’elle nie en disant : « Je me sens noire. » La race n’est pas une question de sensation, mais d’assignation, de stigmatisation – et, parfois, de retournement du stigmate.

      et par contre pour l’auto-identification de genre, ça pose de problème à moins de monde…

      #identité #trans (transracial vs transgenre)