• #Italie : un secrétaire d’Etat démissionne après avoir voulu baptiser un parc « #Mussolini »

    Les appels au départ de #Claudio_Durigon, fidèle parmi les fidèles de Matteo Salvini, se sont multipliés après qu’il a voulu donner le nom du frère du dictateur italien à un #jardin_public de #Latina, une ville côtière près de Rome.

    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/27/italie-un-secretaire-d-etat-demissionne-apres-avoir-voulu-baptiser-un-parc-m
    #parc #parc_Mussolini #toponymie #toponymie_politique
    #démission

    ping @cede

  • L’Iran fait le pari des talibans
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/26/l-iran-fait-le-pari-des-talibans_6092409_3210.html

    Avant la chute de Kaboul, le 15 août, Téhéran s’est rapproché des fondamentalistes afghans et se réjouit de la défaite américaine.

    Et c’est quand qu’on le lit quelque part que les américains ont fait le parti des talibans dès février 2020 ?

    https://seenthis.net/messages/927217

  • L’été fructueux de la coopération militaire russo-chinoise
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/25/l-ete-fructueux-de-la-cooperation-militaire-russo-chinoise_6092289_3210.html


    Vue générale du champ de tir lors des Jeux internationaux de l’armée 2021 près de Moscou, le 24 août 2021.
    MAXIM SHEMETOV / REUTERS

    Moscou et Pékin ont mis en scène le caractère opérationnel d’exercices conjoints, notamment dans le cadre de « Zapad Interaction 2021 » lancé avec fanfare et drapeaux dans le désert de Gobi.

    L’été 2021 restera comme une bonne saison pour la relation militaire russo-chinoise. Le 22 août, les deux armées se sont alignées, côte à côte, en position de favorites parmi les concurrents pour l’épreuve de « biathlon des tanks ». Celle-ci a marqué le coup d’envoi des Jeux internationaux militaires annuels organisés par Moscou pour la septième fois. Jusqu’au 4 septembre, ils rassemblent 2 000 soldats de 17 pays dont la Serbie, le Kazakhstan ou l’Ouzbékistan, pour des épreuves destinées à renforcer la confiance mutuelle. L’Armée populaire de libération (APL) y participe avec ses blindés, mais aussi une dizaine d’avions - bombardiers, chasseurs et transporteurs chinois. Dans les précédentes éditions de ces olympiades, Pékin vantait davantage sa relation avec le Pakistan ; elle met aujourd’hui en avant son partenaire russe.

    Lundi 23 août, l’ambassadeur de Russie à Téhéran a, lui, annoncé par l’intermédiaire de l’agence RIA que les deux marines organiseraient ensemble des manœuvres antipirateries avec l’Iran, dans le Golfe : une première. Ces exercices auraient lieu à la fin de 2021 ou au début de 2022. Par ailleurs, la Chine a vanté dans ses médias officiels sa participation à un exercice bilatéral russe appelé « Zapad Interaction 2021 », du 9 au 13 août, sur une base de la région autonome du Ningxia.

  • En Ukraine, découverte des restes de milliers de victimes des purges staliniennes
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/25/en-ukraine-decouverte-des-restes-de-milliers-de-victimes-des-purges-stalinie

    Des fosses contenant les restes de quelque 5 000 à 8 000 personnes ont été localisées sur un terrain de presque cinq hectares situé près de l’aéroport d’Odessa.

    Des fosses communes contenant les dépouilles de milliers de personnes massacrées dans les années 1930 lors de purges staliniennes ont été découvertes à Odessa, dans le sud de l’Ukraine, ont annoncé les autorités, mercredi 25 août. Il s’agit de l’un des plus vastes sites de ce type en Ukraine, qui fut membre de l’Union soviétique.

    A ce jour, vingt-neuf fosses contenant les restes de quelque 5 000 à 8 000 personnes ont été localisées sur un terrain de presque 5 hectares situé près de l’aéroport d’Odessa, a détaillé Sergui Goutsaliouk, chef de l’antenne régionale de l’Institut de la mémoire nationale. Ce nombre pourrait encore augmenter, les opérations étant toujours en cours.

    Les restes ont été découverts après que les autorités municipales ont ordonné des fouilles exploratoires en vue d’autoriser des travaux d’élargissement de l’aéroport, car des fosses communes avaient déjà été mises au jour par le passé dans cette zone.

    Plusieurs centaines de milliers de victimes
    Selon M. Goutsaliouk, la plupart des victimes, des habitants de la région, ont été tuées d’une balle dans la nuque par le NKVD, la police secrète soviétique et ancêtre du KGB. Ces exécutions remontent aux années 1937-1939, pendant la Grande terreur stalinienne. Toujours d’après M. Goutsaliouk, il ne sera pas possible d’identifier les victimes, les documents concernant ces purges étant classés secrets et conservés à Moscou, « qui ne les donnera pas » à l’Ukraine en raison des relations tendues entre les deux pays.

  • Conflit en Afghanistan : l’Ouganda prêt à accueillir des réfugiés afghans — La Libre Afrique
    https://afrique.lalibre.be/63044/conflit-en-afghanistan-louganda-pret-a-accueillir-des-refugies-afgha

    L’Ouganda est prêt à accueillir temporairement des réfugiés afghans, dont le pays est passé sous contrôle des talibans, a annoncé mardi le ministère ougandais des Affaires étrangères, indiquant avoir répondu favorablement à une demande américaine. Le ministère n’a fourni aucun détail sur le nombre de personnes concernées. « Les discussions se poursuivent », indique-t-il, alors que des médias ougandais évoquent le nombre de 2.000 réfugiés.

    « À la suite des événements du week-end dernier en Afghanistan, le gouvernement des États-Unis d’Amérique a contacté plusieurs de ses partenaires internationaux, dont l’Ouganda, pour aider dans la probable nécessité d’héberger temporairement certains Afghans et citoyens internationaux qui pourraient être évacués », affirme le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

    Le président Yoweri Museveni « a exprimé la disponibilité de l’Ouganda pour fournir une assistance, y compris (pour) l’hébergement temporaire de certaines des personnes touchées par la crise actuelle », ajoute le texte, évoquant « la longue histoire et tradition d’accueil » de réfugiés.

    Un responsable du Haut comité aux réfugiés (UNHCR) dans le pays a indiqué à l’AFP que l’agence onusienne n’avait pas été impliquée dans les discussions, tout en se disant « prêt à soutenir » toute arrivée.

    L’Ouganda est un des pays qui abrite le plus de réfugiés au monde : près d’1,5 million de réfugiés et demandeurs d’asile y vivent, la majorité venant du Soudan du Sud et de RDC.

    Les agences humanitaires soulignent régulièrement le manque de financement pour l’aide aux réfugiés dans ce pays d’environ 44 millions d’habitants.

    L’Albanie et le Kosovo se sont également dit prêts dimanche à accueillir, à la demande des États-Unis, des centaines d’Afghans, dont des femmes dirigeantes, des fonctionnaires et d’autres personnes potentiellement menacées par les talibans.

    #afghanistan #usa #migrants #réfugiés

  • Liban : au moins 28 morts dans l’explosion d’un camion-citerne
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/15/au-moins-20-morts-dans-l-explosion-d-un-camion-citerne-au-liban_6091474_3210


    Créateur : OMAR IBRAHIM, OMAR IBRAHIM
    Crédits : REUTERS

    L’Agence nationale d’information a annoncé que le camion-citerne, confisqué par l’armée, avait explosé après des heurts entre des résidents, qui s’étaient attroupés autour pour se procurer de l’essence.

    Au moins 28 personnes ont été tuées et plusieurs dizaines d’autres blessées dans la nuit de samedi 14 à dimanche 15 août par l’explosion d’un camion-citerne à Altalil, dans la région d’Akkar, dans le nord du Liban, selon le ministère de la santé.
    Le drame s’est produit alors que l’armée s’est déployée dans les stations-service et qu’un grand hôpital du pays redoute un « désastre imminent » en raison de la pénurie de carburant. L’Agence nationale d’information (ANI, officielle) a annoncé que le camion-citerne que l’armée avait confisqué avait explosé après des heurts entre des résidents. Ils s’étaient attroupés autour pour se procurer de l’essence. L’armée n’était pas présente sur les lieux quand l’explosion s’est a eu lieu, a-t-elle ajouté.

    Au moins sept corps et des dizaines de personnes brûlées ont été transférés dans un hôpital d’Akkar, a précisé l’un de ses employés, Yassine Metlej. L’hôpital a dû refuser la plupart des blessés car il n’est pas équipé pour soigner les grands brûlés, a-t-il ajouté. Certains ont été conduits à 25 km de là, à l’hôpital Al-Salam, à Tripoli, le seul équipé dans la région pour prendre en charge les brûlés.

  • Le réalisateur britannique #Ken_Loach exclu du Parti travailliste
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/15/le-realisateur-britannique-ken-loach-exclu-du-parti-travailliste_6091470_321

    D’après l’auteur de l’article ce que Loach reprochait à Blair c’est son « positionnement trop centriste »

    [Ken Loach] n’était […] redevenu membre du Parti travailliste qu’après la victoire de [Corbyn] en 2015. Deux décennies plus tôt, il en avait claqué la porte en critiquant le positionnement trop centriste de Tony Blair.

    #langage

  • « Le retour des talibans est le coup de grâce » : dans l’est de la Turquie, le périple des réfugiés venus d’Afghanistan
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/09/le-retour-des-talibans-est-le-coup-de-grace-dans-l-est-de-la-turquie-le-peri

    Le retour des talibans est le coup de grâce » : dans l’est de la Turquie, le périple des réfugiés venus d’Afghanistan
    Selon l’Organisation internationale pour les migrations, avec le retrait des forces américaines et de l’OTAN et le début de l’offensive islamiste, environ 30 000 personnes fuient le pays chaque semaine vers l’Iran puis vers la Turquie.

    Originaire de Ghazni, le jeune homme ne se voit aucun avenir en Afghanistan. « Il n’y a pas de travail, la pandémie n’a rien arrangé. Le retour des talibans est le coup de grâce. » « Ils vont prendre Kaboul, c’est sûr », prévient Rahmatollah, un jeune adolescent arrivé clandestinement il y a quelques jours de Mazar-e-Charif avec sa sœur, son beau-frère et leurs quatre enfants.Muhammet, 26 ans, le père de famille, se ronge les sangs. Rester à Van, à 40 kilomètres de la frontière iranienne, c’est s’exposer à être renvoyé vers l’Iran, ce qu’il ne veut à aucun prix. Il prévoyait d’aller, non pas en Europe, mais à Konya, où il est sûr de trouver du travail. Il a déjà fait le voyage une fois, il y a quelques années, jusqu’à cette ville de l’Anatolie profonde où, grâce à l’aide de migrants amis, il a réussi à se faire embaucher comme journalier sur des chantiers de construction. Après avoir amassé un petit pécule, il est rentré à Mazar-e-Charif chercher sa femme, Maryam, leurs quatre enfants ainsi que deux adolescents, ses beaux-frères, pour les ramener en Turquie, qu’il voit comme un pays de cocagne.
    Son rêve s’est brisé à Van. Il craint d’être condamné à rester là, entre le square et la mosquée, jusqu’à ce que la police les appréhende, lui et sa famille, pour les placer dans un centre de rétention. Après, c’est l’inconnu. Ils seront soit renvoyés en Iran, ce que les migrants craignent plus que tout, ou rendus à leur sort de clandestins, peu enviable.Contrairement aux réfugiés syriens, qui jouissent d’une protection en Turquie, les Afghans n’ont droit à rien. « Nous sommes des êtres sans destin », résume Zuleyha, une représentante de la minorité chiite hazara. Installée depuis six ans à Van, elle a obtenu un permis de séjour et se sent désormais à peu près en sécurité. « L’époque était plus favorable, aujourd’hui, c’est différent », dit-elle.
    Chaque année, des dizaines de milliers de réfugiés afghans traversent clandestinement la frontière entre l’Iran et la Turquie, en quête d’un emploi et d’une vie plus stable. Depuis l’offensive fulgurante des talibans sur les capitales provinciales, ce flux n’a fait qu’augmenter. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), avec le retrait des forces américaines et de l’OTAN, et le début de l’offensive talibane, environ 30 000 personnes fuient l’Afghanistan chaque semaine vers l’Iran, puis vers la Turquie. Adossée à l’Iran, la province de Van sert de porte d’entrée. Guidés par les passeurs, des Afghans, mais aussi des Pakistanais et des Iraniens traversent la frontière à pied la nuit par des sentes de montagne. Le périple tourne parfois au cauchemar. Certains racontent s’être fait rosser et détrousser en chemin par des brigands. En hiver, de nombreux candidats au passage meurent de froid ou sont dévorés par les loups. A chaque fonte des neiges, des cadavres sont retrouvés, examinés par des médecins légistes puis inhumés sous un numéro dans le cimetière des « kimsesizler », ce qui signifie « ceux qui n’ont personne ».En été, la traversée est plus facile, mais il faut tout de même souvent s’y prendre à plusieurs fois pour atteindre l’autre côté. Une fois la frontière franchie, beaucoup sont appréhendés par les forces turques, qui les refoulent au débotté vers l’Iran. Le temps de se regrouper et les migrants recommencent.« Les réseaux de passeurs sont incroyablement mobiles. Ils ont leurs guetteurs, leurs informateurs, changent les itinéraires sans arrêt. Ils connaissent très bien le terrain, parfois mieux que nos forces de sécurité. Et puis, la géographie escarpée de la région rend la surveillance particulièrement difficile », décrit Semih Nargül, enseignant au département de géographie de l’Université du centenaire, à Van.Tout un pan d’économie grise a émergé, qui implique aussi bien des Afghans que des Turcs, des Iraniens ou des Kurdes. « Ces réseaux travaillent comme des agences de voyages, ils proposent différents itinéraires, différentes villes d’arrivée, avec plus ou moins de confort selon le prix », explique l’universitaire. A Van, les migrants sont quasiment introuvables. « A cause de la pandémie, le gouvernement ne veut pas qu’ils soient visibles », affirme Suvat Parin, qui enseigne la sociologie à l’Université du centenaire. Les autorités turques assurent que le nombre d’illégaux ayant franchi récemment la frontière iranienne – 499 kilomètres en tout – n’a guère augmenté ces dernières semaines, contrairement à ce qu’avaient pu affirmer certains médias, soupçonnés d’avoir exagéré sciemment l’ampleur du phénomène. A la mi-juillet, 3 000 représentants des forces spéciales, policiers et militaires, ont quand même été déployés, avec beaucoup de matériel, pour mieux lutter contre les passages clandestins. Sur les routes, les points de contrôle ont été renforcés, les véhicules sont scrutés de près.
    Face à l’imminence de nouveaux flux migratoires, Ankara a récemment érigé de hauts murs en béton le long de sa frontière orientale avec l’Iran, après avoir fait de même au sud, le long d’une partie de sa frontière avec la Syrie. Une fois terminé, le mur s’étendra sur 295 kilomètres, sera bordé par de larges fossés et doté d’une centaine de tours d’observation. Mais, pour le moment, la barrière de béton n’est pas encore achevée et c’est à travers elle qu’Hossein et ses compagnons disent s’être frayé un chemin pour pénétrer sur le territoire turc.
    « La situation devient ingérable », assure Orhan Deniz, le doyen de la faculté de littérature de l’Université du centenaire à Van, qui suit de près les questions migratoires. La Turquie, qui accueille déjà 3,7 millions de Syriens et des centaines de milliers d’Afghans, n’est pas en mesure d’assumer un nouvel afflux de réfugiés. « Il ne faut pas prendre cette situation à la légère. Sans une politique intelligente à long terme, on ne va jamais s’en sortir », prévient le doyen. Idéalement, l’Union européenne, la Turquie et l’Iran « devraient pouvoir s’entendre » pour créer des infrastructures d’accueil à destination des migrants, en particulier des Afghans, dont les arrivées risquent d’augmenter dans les mois qui viennent.

    #Covid-19#migrantmigration#afghanistan#turquie#UE#iran#pandemie#sante#guerre#crise#flux#politique#sante#frontiere#mur#invisibilite

  • La Russie bloque des sites liés à l’opposant Mikhaïl Khodorkovski, à l’approche des élections législatives
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/05/la-russie-bloque-des-sites-lies-a-l-opposant-mikhail-khodorkovski-a-l-approc


    Mikhaïl Khodorkovski, lors de son second procès, le 14 octobre 2010, à Moscou.
    TATYANA MAKEYEVA / REUTERS

    Pour asseoir l’autorité du président russe, Vladimir Poutine, en vue du scrutin, qui aura lieu à la mi-septembre, les pouvoirs publics jugulent un nombre croissant de ses adversaires.

    A la suite de la répression d’Alexeï Navalny et de ses proches, c’est au tour de Mikhaïl Khodorkovski de faire les frais du tour de vis mené par le régime russe contre ses opposants. Les autorités ont bloqué l’accès aux sites Web de deux médias et d’une organisation de défense des droits, liés à l’ex-oligarque en exil, a annoncé ce dernier, dans la nuit de mercredi 4 août à jeudi 5 août.

    « Après que toutes les organisations de [l’opposant Alexeï] Navalny ont été déclarées “extrémistes”, les autorités ont également bloqué MBKh Media, Open Media et l’organisation d’aide juridique » Pravozachita Otkritki, a affirmé, sur Twitter, cet adversaire de longue date du président russe, Vladimir Poutine.

    Jeudi matin, les sites des deux médias ne pouvaient être consultés depuis la Russie qu’au moyen d’un VPN, un réseau privé virtuel, tandis que le site de l’organisation de défense des droits semblait ne plus exister. L’agence russe de régulation des médias, Roskomnadzor, a déclaré à l’agence de presse Interfax avoir procédé au blocage à la demande du procureur général.

    « Les autorités ne veulent pas de projets médiatiques ayant un regard critique sur ce qu’il se passe dans le pays », a écrit le compte d’Open Media, sur Twitter. Le site a expliqué avoir reçu une subvention pour cinq ans de M. Khodorkovski, en 2017. « Nous avons, avec l’investisseur, décidé d’arrêter le travail, car les risques pour le personnel du projet sont trop grands », a précisé le média.

    Une loi pour exclure des législatives les opposants
    De nombreux médias indépendants et des groupes critiques du pouvoir ont été bannis récemment en Russie, dans le cadre d’une répression croissante de l’opposition, à l’approche des élections législatives de septembre. Une loi, votée récemment par les députés, devrait aboutir à l’exclusion du scrutin de l’essentiel des détracteurs du pouvoir en place, en particulier les partisans de l’opposant emprisonné Alexeï Navalny, bête noire du Kremlin.

    L’organisation Open Russia de Mikhaïl Khodorkovski avait été classée « indésirable » en 2017, après quoi elle s’était autodissoute en 2019. Elle a ensuite ouvert une autre structure du même nom, qui n’a jamais été enregistrée par le ministère de la justice. Cette dernière s’est à son tour autodissoute en mai 2021, par crainte de poursuites contre ses membres.

    Mikhaïl Khodorkovski est un oligarque qui a passé dix ans en prison, à la suite de son arrestation, en 2003. Gracié en 2013, il s’est exilé en Europe, où il a fondé plusieurs mouvements d’opposition à Vladimir Poutine.

  • Israël mène des bombardements dans le sud du Liban, une première depuis 2014
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/05/israel-mene-des-bombardements-dans-le-sud-du-liban-en-represailles-a-des-tir


    Près des villages libanais d’Ibl Al-Saqi et de Kfar Hamam, dans le sud du pays, le 4 août.
    MAHMOUD ZAYYAT / AFP

    L’armée israélienne a revendiqué ces attaques menées en représailles à des tirs de roquettes. L’armée libanaise a dénombré pas moins de 92 tirs d’artillerie en provenance d’Israël. Quant aux trois tirs depuis le Liban, aucun groupe armé ne les a revendiqués.

    L’armée israélienne a revendiqué, jeudi 5 août, une série de bombardements sur le territoire du Liban, les premières attaques de ce genre depuis des années. Les cibles, frappées dans la nuit de mercredi à jeudi, étaient « des sites de lancement et des infrastructures d’où des roquettes ont été tirées au Liban », selon un communiqué de l’armée.

    Mercredi, trois roquettes avaient été, en effet, tirées depuis le sud du Liban vers le nord d’Israël, dont deux qui étaient tombées sur le sol israélien, sans faire de victime. Aucun groupe armé n’avait revendiqué ces tirs depuis ce territoire, où se trouvent notamment des membres du Hezbollah.

    Selon la chaîne du Hezbollah, les bombardements israéliens ont touché les environs de la ville de Mahmoudiyah, près de la frontière entre les deux pays et n’ont également fait aucune victime. L’armée libanaise a dénombré pas moins de 92 tirs d’artillerie en provenance d’Israël.

    L’armée de l’air israélienne bombarde régulièrement des positions présumées du mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza, ainsi qu’en Syrie voisine, mais de telles attaques sur le territoire libanais sont rares ces dernières années. La dernière remonte à 2014, selon un porte-parole militaire israélien.

    Des paroles critiques contre le Liban et la Finul
    Dans la foulée de ces attaques, des responsables israéliens ont émis des critiques à la fois contre le gouvernement libanais et contre la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), déployée dans le sud du Liban.

    Pour un porte-parole de l’armée israélienne, cité par l’Associated Press, le gouvernement libanais était responsable de ce qui se déroulait sur son territoire, le mettant en garde contre de futurs tirs sur le territoire israélien. De fait, le Liban est sans gouvernement depuis la démission d’Hassan Diab au lendemain de l’explosion dans le port de Beyrouth, il y a un an. L’armée libanaise, elle, assure mener des patrouilles régulières dans la région frontalière. Elle annonce une enquête pour déterminer l’origine exacte des tirs.

    Benny Gantz, ministre de la défense du gouvernement de coalition constitué il y a à peine deux mois, a demandé qu’un « message ferme » soit adressé à la Finul. Le général Stefano Del Col, commandant de la mission de l’ONU, a répondu en appelant « les parties » à « cesser le feu et faire preuve d’une retenue maximale pour éviter une escalade ».

    Présente au Liban depuis 1978, la Finul surveille depuis 2006 la frontière israélienne en coordination avec l’armée libanaise, en application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, adoptée après la guerre ayant opposé Israël au Hezbollah.

  • Des millions d’Américains menacés d’expulsion, en pleine flambée du variant Delta
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/07/31/des-millions-d-americains-menaces-d-expulsion-en-pleine-flambee-du-variant-d

    Des millions de familles américaines qui n’ont pas pu payer leur loyer depuis des mois à cause de la crise risquent d’être expulsées de leur #logement à partir de samedi 31 juillet, alors qu’expire le moratoire qui les protégeait.

    Selon le Center on Budget and Policy Priorities , un institut de recherche indépendant, ce sont plus de 10 millions d’Américains qui sont en retard sur le paiement de leur loyer. Et quelque 3,6 millions de locataires estiment qu’ils risquent de se faire expulser dans les deux mois, selon une étude du bureau des statistiques (Census) réalisée au début de juillet auprès de 51 millions de locataires.

    Aide financière bloquée

    Cette suspension des #expulsions avait été mise en place en septembre 2020, par les centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC), la principale agence de santé publique des Etats-Unis, puis prolongée à plusieurs reprises.
    « Garder les gens chez eux et hors des lieux surpeuplés ou de rassemblement – comme les refuges pour sans-abri – en empêchant les expulsions est une étape-clé pour contribuer à arrêter la propagation du #Covid-19 », argumentent les CDC sur leur site Internet. Mais une décision de la Cour suprême, en juin dernier, stipule que la reconduction devra être adoptée par le Congrès, et non plus décidée par les centres.

    Ce moratoire succédait à celui prévu en mars 2020 par l’administration Trump, pour éviter aux millions de personnes qui avaient perdu leur emploi à cause de la pandémie de se retrouver à la rue. Mais, selon les CDC, il « ne concernait pas tous les locataires ».

    Pour ajouter à cette situation kafkaïenne, l’argent prévu par le gouvernement fédéral pour aider les #locataires en difficulté à payer leur #loyer peine à arriver sur leurs comptes en banque. Il est versé aux Etats et collectivités locales, chargés ensuite de distribuer l’aide aux ménages. Or, cela nécessite la mise en place de systèmes complexes pour recueillir les demandes, vérifier les situations, verser l’argent… Ainsi, sur les 46 milliards de dollars prévus par le gouvernement, dont 25 milliards déboursés au début de février, 3 milliards seulement sont arrivés à destination.

    • Etats-Unis : face aux protestations, Joe Biden fait promulguer un nouveau moratoire sur les expulsions locatives
      https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/04/etats-unis-face-aux-protestations-joe-biden-fait-promulguer-un-nouveau-morat

      L’administration Biden s’est montrée incapable de distribuer les 47 milliards de dollars d’aides réservées aux locataires en difficulté avant l’échéance du moratoire, le 31 juillet. Celui-ci a finalement été prolongé en raison de la propagation du variant Delta.

      Ce mardi 3 août, Anne Wright, qui gère un observatoire sur les expulsions locatives dans le comté d’Allegheny, qui abrite Pittsburgh, ancienne cité sidérurgique de Pennsylvanie, a fait son décompte : il y a eu la veille 73 demandes d’expulsion déposées au tribunal. Quatre fois plus qu’en moyenne la semaine précédente. Explication : le moratoire fédéral est arrivé à échéance le 31 juillet et la machine judiciaire a pu se remettre en place. Dans l’agglomération de 1,2 million d’habitants, c’est la panique. « Nous voyons chez les gens une augmentation du désespoir, de la colère, de la peur de perdre leur logement, alors qu’ils n’en sont pas nécessairement responsables », déplore son collègue, l’avocat Kyle Webster, secrétaire général d’Action Housing, une société de logements locatifs pour les plus modestes de la ville.

      Depuis le début de la pandémie de Covid-19, l’Amérique avait évité le cortège des expulsions qui accompagne habituellement les crises. En raison d’une interdiction totale décidée par le Congrès sous l’égide de Donald Trump jusqu’en août 2020, puis, à partir de septembre 2020, par les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), qui ont estimé qu’il s’agissait d’un sujet de santé publique et avaient prolongé ce moratoire.

      Lire aussi Aux Etats-Unis, les parlementaires démocrates vent debout contre les risques d’expulsions massives
      La donne a changé en juin : saisie par une association de propriétaires, la Cour suprême des Etats-Unis a décidé qu’une prolongation ne pouvait pas se faire sans un vote du Congrès. Ce dernier n’a pas agi, et laissé passer la date du 31 juillet. L’affaire a suscité un tollé à gauche du Parti démocrate. La représentante du Missouri, Cori Bush, a mené la contestation. Cette pasteure, qui fut, comme de nombreuses mères afro-américaines seules, sans domicile dans sa vie, occupe, jour et nuit, les marches du Capitole : « Il est 2 heures du matin dimanche. Nous n’avons pas dormi depuis jeudi soir. Le moratoire sur les expulsions a expiré (…). Onze millions de personnes risquent désormais de perdre leur logement à tout moment. La Chambre doit se réunir et mettre fin à cette crise », a twitté Mme Bush dans la nuit du 1er août.

      8,2 millions de ménages américains en retard

      Elle a reçu le soutien des figures de gauche, comme le sénateur du Vermont, Bernie Sanders, ou la représentante de New York Alexandria Ocasio-Cortez, alors que 8,2 millions de ménages américains étaient en retard de paiement de loyer début juillet et, donc, susceptibles d’être expulsés. En réalité, la voie du Congrès était impraticable. Comme l’a concédé sur la chaîne CNN le représentant démocrate de New York Hakeem Jeffries, si un vote de la Chambre était possible, il semblait quasi impossible de convaincre dix sénateurs républicains pour atteindre la majorité requise de 60 %.

      C’est donc une autre voie qui a été utilisée : le variant Delta qui a permis mardi soir aux CDC d’invoquer de nouveau des raisons sanitaires. Le moratoire de soixante jours couvrira les comtés à haut degré d’infection, à savoir 80 % du territoire et 90 % de la population, selon le Wall Street Journal, jusqu’au 3 octobre. La décision des CDC ne concerne pas les régions qui avaient décidé d’elles-mêmes un moratoire, comme les Etats de la côte Pacifique, New York ou le New Jersey. Deuxième argument invoqué par les CDC, le besoin d’un nouveau délai pour distribuer l’aide aux locataires en difficulté.

      Car ce nouveau moratoire vise surtout à pallier l’incapacité de l’administration Biden à apporter l’aide promise aux populations. Deux plans votés par le Congrès, l’un en décembre 2020 pendant l’interrègne entre les présidents Trump et Biden, le second en mars 2021 sous Joe Biden, ont alloué 47 milliards de dollars (39,6 milliards d’euros) pour l’aide aux locataires en difficulté. Mais l’argent est resté bloqué : seuls 3 milliards de dollars avaient été distribués fin juin, selon un rapport du Trésor.

      A Pittsburgh, ce sont Kyle Webster et Action Housing qui se sont vu déléguer par les autorités locales le soin de distribuer les aides pour rembourser les arriérés. Les sommes à disposition sont immenses : « En rythme annuel, les aides sont habituellement de l’ordre de 2,5 millions à 3 millions de dollars. Là, nous avons reçu 80 millions de dollars », explique M. Webster. « Les Etats, les comtés devaient mettre en place les infrastructures pour les distribuer. Nous avons distribué près de 20 millions, dont la moitié en juillet, cela fonctionne assez bien », ajoute-t-il. « Si on avait eu un mois de moratoire en plus, cela aurait été bien », espérait-il mardi matin, avant la décision des CDC. Depuis cet hiver, M. Webster a reçu 12 400 demandes d’aides, qui ont conduit à un versement de fonds dans 27 % des cas : 5 400 dollars en moyenne, soit près de cinq mois d’arriérés.

      Les femmes afro-américaines en première ligne

      La loi prévoit de rembourser jusqu’à douze mois de loyers, d’en avancer trois, ainsi que les factures d’eau et de chauffage. Mais il faut prouver que l’on a perdu du revenu, que l’on est menacé d’expulsion et, surtout, que l’on gagne moins de 80 % du revenu médian de la région. « C’est ce qui s’est révélé le plus difficile à montrer, il a fallu aller chercher les déclarations d’impôts 2020 », poursuit Kyle Webster. Sous pression, la Maison Blanche assure qu’elle a simplifié le système. « Nous avons entendu les inquiétudes [des collectivités locales et de la communauté du logement]. Le 7 mai et le 24 juin, nous avons publié des directives pour avoir des formulaires simplifiés. Vous n’avez plus besoin d’avoir de justificatifs de revenus (…) ou de prouver vos difficultés », déclarait, lundi 2 août, Gene Sperling, responsable fédéral du programme d’aide.

      Comme le montre Anne Wright sur les cartes de Pittsburgh, qui valent pour toute l’Amérique, les expulsions frappent avant tout les zones où vivent des femmes afro-américaines élevant seules une famille. Dans le détail, les demandeurs de Pittsburgh sont des femmes (71 %), des Afro-Américains (58 %, alors qu’ils représentent 13 % de la population du comté), des personnes âgées de 25 à 45 ans (59 %), gagnant 1 450 dollars par mois (contre 5 000 dollars de revenu médian).
      La crise financière de 2008 avait été marquée par les expulsions de propriétaires incapables de rembourser leur emprunt immobilier (1,17 million de maisons saisies en 2010). Mais en réalité, les expulsions locatives, elles, sont une constante : 14 000 demandes sont déposées chaque année dans le comté d’Allegheny, soit un ordre de grandeur comparable à celui des personnes actuellement en difficulté. « L’expulsion est un business model », confie Anne Wright. Avant crise, quelque 2,4 millions d’expulsions étaient demandées chaque année aux Etats-Unis, selon l’Eviction Lab de l’université de Princeton, et près de 1 million étaient mises en œuvre. Le but est d’éviter ce retour à la « normale ».

       ».

  • "Réfugiés", « migrants », « exilés » ou « demandeur d’asile » : à chaque mot sa fiction, et son ombre portée

    Alors que les violences policières contre un campement éphémère de personnes exilées font scandale, comment faut-il nommer ceux dont les tentes ont été déchiquetées ?

    Nombreuses et largement unanimes, les réactions qui ont suivi l’intervention de la police, lundi 23 novembre au soir, place de la République à Paris, condamnent la violence des forces de l’ordre. De fait, après cette intervention pour déloger le campement éphémère installé en plein Paris dans le but de donner de l’écho à l’évacuation récente d’un vaste camp de réfugiés sur les contreforts du périphérique, les images montrent les tentes qui valsent, les coups qui pleuvent, des matraques qui cognent en cadence, et de nombreux soutiens nassés en pleine nuit ainsi que la presse. Survenu en plein débat sur la loi de sécurité globale, et après de longs mois d’un travail tous azimuts pour poser la question des violences policières, l’épisode a quelque chose d’emblématique, qui remet au passage l’enjeu de l’accueil migratoire à la Une des médias.

    Une occasion utile pour regarder et penser la façon dont on nomme ceux qui, notamment, vivent ici dans ces tentes-là. Durant toute la soirée de lundi, la réponse policière à leur présence sur la place de la République a été amplement commentée, en direct sur les réseaux sociaux d’abord, puis sur les sites de nombreux médias. Si certains utilisaient le mot “migrants” désormais ordinaire chez les journalistes, il était frappant de voir que d’autres termes prenaient une place rare à la faveur de l’événement à chaud. Et en particulier, les mots “réfugiés” et “exilés”.

    En ligne, Utopia56, le collectif à l’origine de l’opération, parle de “personnes exilées”. Chez Caritas France (ex-Secours catholique), c’est aussi l’expression qu’utilise par exemple, sur la brève bio de son compte twitter, la salariée de l’humanitaire en charge des projets “solidarité et défense des droits des personnes exilées”. Ce lexique n’a rien de rare dans le monde associatif : la Cimade parle aussi de longue date de “personnes exilées”, la Fédération des acteurs de solidarités qui chapeaute 870 associations de même, et chez chez Act up par exemple, on ne dit pas non plus “migrants” mais “exilés”. Dans la classe politique, la nuit de violences policières a donné lieu à des déclarations de protestation où il n’était pas inintéressant d’observer l’usage des mots choisis dans le feu de l’action, et sous le projecteur des médias : plutôt “exilés” chez les écologistes, via le compte twitter “groupeecoloParis”, tandis qu’Anne Hidalgo, la maire de Paris, parlait quant à elle de “réfugiés”.

    Du côté des médias, le terme poussé par le monde associatif n’a sans doute jamais aussi bien pris qu’à chaud, dans l’épisode de lundi soir : sur son compte Twitter, CNews oscillait par exemple entre “migrants” et “personnes exilées”... au point de se faire tacler par ses abonnés - il faudrait plutôt dire “clandestins”. Edwy Plenel panachait pour sa part le lexique, le co-fondateur de Médiapart dénonçant au petit matin la violence dont avaient fait l’objet les “migrants exilés”.

    Peu suspect de gauchisme lexical, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, affirmait de son côté saisir l’IGPN pour une enquête sur cette évacuation d’un “campement de migrants”, tandis que le mot s’affichait aussi sur la plupart des pages d’accueil des sites de médias. Comme si le terme “migrants” était devenu un terme générique pour dire cette foule anonyme de l’immigration - sans que, le plus souvent, on interroge en vertu de quels critères ? Cet épisode de l’évacuation violente de la place de la République est en fait l’occasion idéale pour regarder la façon dont le mot “migrants” s’est disséminé, et remonter le film pour comprendre comment il a été forgé. Car ce que montre la sociologue Karen Akoka dans un livre qui vient justement de paraître mi-novembre (à La Découverte) c’est que cette catégorie est avant tout une construction dont la sociogenèse éclaire non seulement notre façon de dire et de penser, mais surtout des politiques publiques largement restées dans l’ombre.
    Les mots de l’asile, ces constructions politiques

    L’Asile et l’exil, ce livre formidable tiré de sa thèse, est à mettre entre toutes les mains car précisément il décortique en quoi ces mots de l’immigration sont d’abord le fruit d’un travail politique et d’une construction historique (tout aussi politique). Les acteurs de cette histoire appartiennent non seulement à la classe politique, mais aussi aux effectifs des officiers qui sont recrutés pour instruire les demandes. En centrant son travail de doctorat sur une sociohistoire de l’Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides, créé en 1952, la chercheuse rappelle qu’il n’est pas équivalent de parler d’exil et d’asile, d’exilés, de demandeurs d’asile, de migrants ou de réfugiés. Mais l’ensemble de sa démonstration éclaire en outre toute la part d’artifice que peut receler ce raffinage lexical qui a permis à l’Etat de construire des catégories d’aspirants à l’exil comme on labelliserait des candidats plus ou moins désirables. Face aux "réfugiés", légitimes et acceptables depuis ce qu’on a construit comme une forme de consensus humaniste, les "migrants" seraient d’abord là par émigration économique - et moins éligibles. Tout son livre consiste au fond en une déconstruction méthodique de la figure du réfugié désirable.

    Les tout premiers mots de l’introduction de ce livre (qu’il faut lire en entier) remontent à 2015 : cette année-là, Al-Jazeera annonçait que désormais, celles et ceux qui traversent la Méditerranée seront pour de bon des “réfugiés”. Et pas des “migrants”, contrairement à l’usage qui était alors en train de s’installer dans le lexique journalistique à ce moment d’explosion des tentatives migratoires par la mer. Le média qatari précisait que “migrants” s’apparentait à ses yeux à un “outil de deshumanisation”. On comprenait en fait que “réfugié” était non seulement plus positif, mais aussi plus légitime que “migrant”.

    En droit, c’est la Convention de Genève qui fait les “réfugiés” selon une définition que vous pouvez consulter ici. Avant ce texte qui remonte à 1951, on accueillait aussi des réfugiés, quand se négociait, au cas par cas et sous les auspices de la Société des nations, la reconnaissance de groupes éligibles. Mais le flou demeure largement, notamment sur ce qui, en pratique, départirait le “réfugié” de “l’étranger”. A partir de 1952, ces réfugiés répondent à une définition, mais surtout à des procédures, qui sont principalement confiées à l’Ofpra, créé dans l’année qui suit la Convention de Genève. L’autrice rappelle qu’à cette époque où l’Ofpra passe d’abord pour une sorte de “consulat des régimes disparus”, il y a consensus pour considérer que l’institution doit elle-même employer des réfugiés chargés de décider du sort de nouveaux candidats à l’asile. A l’époque, ces procédures et ces arbitrages n’intéressent que très peu de hauts fonctionnaires. Ca change progressivement à mesure que l’asile se politise, et la décennie 1980 est une bonne période pour observer l’asile en train de se faire. C’est-à-dire, en train de se fabriquer.

    La construction du "réfugié militant"

    Sur fond d’anticommunisme et d’intérêt à relever la tête après la guerre coloniale perdue, la France décidait ainsi au début des années 80 d’accueillir 130 000 personnes parmi celles qui avaient fui l’un des trois pays de l’ex-Indochine (et en particulier, le Vietnam). On s’en souvient encore comme des “boat people”. Ils deviendront massivement des “réfugiés”, alors que le mot, du point de vue juridique, renvoie aux critères de la Convention de Genève, et à l’idée de persécutions avérées. Or Karen Akoka rappelle que, bien souvent, ces procédures ont en réalité fait l’objet d’un traitement de gros. C’est-à-dire, qu’on n’a pas toujours documenté, dans le détail, et à l’échelle individuelle, les expériences vécues et la position des uns et des autres. Au point de ne pas trop chercher à savoir par exemple si l’on avait plutôt affaire à des victimes ou à des bourreaux ? Alors que le génocide khmer rouge commençait à être largement connu, l’idée que ces boat people massivement arrivés par avion camperaient pour de bon la figure du “bon réfugié” avait cristallisé. La chercheuse montre aussi que ceux qui sont par exemple arrivés du Vietnam avaient fait l’objet d’un double tri : par les autorités françaises d’une part, mais par le régime vietnamien d’autre part… et qu’il avait été explicitement convenu qu’on exclurait les militants politiques.

    Or dans l’imaginaire collectif comme dans le discours politique, cette représentation du réfugié persécuté politiquement est toujours très active. Elle continue souvent de faire écran à une lecture plus attentive aux tris opérés sur le terrain. Et empêche par exemple de voir en quoi on a fini par se représenter certaines origines comme plus désirables, par exemple parce qu’il s’agirait d’une main-d’œuvre réputée plus docile. Aujourd’hui, cette image très puissante du "réfugié militant" reste arrimée à l’idée d’une histoire personnelle légitime, qui justifierait l’étiquetage de certains “réfugiés” plutôt que d’autres. C’est pour cela qu’on continue aujourd’hui de réclamer aux demandeurs d’asile de faire la preuve des persécutions dont ils auraient fait l’objet.

    Cette enquête approfondie s’attèle à détricoter ce mirage du "bon réfugié" en montrant par exemple que, loin de répondre à des critères objectifs, cette catégorie est éminemment ancrée dans la Guerre froide et dans le contexte post-colonial. Et qu’elle échappe largement à une approche empirique rigoureuse, et critique. Karen Akoka nous dépeint la Convention de Genève comme un cadre qui se révèle finalement assez flou, ou lâche, pour avoir permis des lectures et des usages oscillatoires au gré de l’agenda diplomatique ou politique. On le comprend par exemple en regardant le sort de dossiers qu’on peut apparenter à une migration économique. Sur le papier, c’est incompatible avec le label de “réfugié”. Or dans la pratique, la ligne de partage entre asile d’un côté, et immigration de l’autre, ne semble plus si étanche lorsqu’on regarde de près qui a pu obtenir le statut dans les années 1970. On le comprend mieux lorsqu’on accède aux logiques de traitement dans les années 70 et 80 : elles n’ont pas toujours été les mêmes, ni été armées du même zèle, selon l’origine géographique des candidats. Edifiant et très pédagogique, le sixième chapitre du livre d’Akoka s’intitule d’ailleurs “L’Asile à deux vitesses”.

    L’autrice accorde par exemple une attention particulière à la question des fraudes. Pas seulement à leur nombre, ou à leur nature, mais aussi au statut que les institutions ont pu donner à ces fraudes. Ainsi, Karen Akoka montre l’intérêt qu’a pu avoir l’Etat français, à révéler à grand bruit l’existence de “filières zaïroises” à une époque où la France cherchait à endiguer l’immigration d’origine africaine autant qu’à sceller une alliance avec le Zaïre de Mobutu. En miroir, les entretiens qu’elle a menés avec d’anciens fonctionnaires de l’Ofpra dévoilent qu’on a, au contraire, cherché à dissimuler des montages frauduleux impliquant d’ex-Indochinois.

    Les "vrais réfugiés"... et les faux

    Entre 1970 et 1990, les chances de se voir reconnaître “réfugié” par l’Ofpra ont fondu plus vite que la banquise : on est passé de 90% à la fin des années 70 à 15% en 1990. Aujourd’hui, ce taux est remonté (de l’ordre de 30% en 2018), mais on continue de lire que c’est le profil des demandeurs d’asile qui aurait muté au point d’expliquer que le taux d’échec explose. Ou que la démarche serait en quelque sorte détournée par de “faux demandeurs d’asile”, assez habiles pour instrumentaliser les rouages de l’Ofpra en espérant passer entre les gouttes… au détriment de “vrais réfugiés” qu’on continue de penser comme tels. Karen Akoka montre qu’en réalité, c’est plutôt la manière dont on instruit ces demandes en les plaçant sous l’égide de politiques migratoires plus restrictives, mais aussi l’histoire propre de ceux qui les instruisent, qui expliquent bien plus efficacement cette chute. Entre 1950 et 1980 par exemple, nombre d’officiers instructeurs étaient issus des mêmes pays que les requérants. C’était l’époque où l’Ofpra faisait davantage figure de “consulat des pays disparus”, et où, par leur trajectoire personnelle, les instructeurs se trouvaient être eux-mêmes des réfugiés, ou les enfants de réfugiés. Aujourd’hui ce sont massivement des agents français, fonctionnaires, qui traitent les dossiers à une époque où l’on ne subordonne plus les choix au Rideau de fer, mais plutôt sous la houlette d’une politique migratoire et de ce qui a sédimenté dans les politiques publiques comme “le problème islamiste”.

    Rassemblé ici au pas de course mais très dense, le travail de Karen Akoka est un exemple vibrant de la façon dont l’histoire, et donc une approche pluridisciplinaire qui fait la part belle aux archives et à une enquête d’histoire orale, enrichit dans toute son épaisseur un travail entamé comme sociologue. Du fait de la trajectoire de l’autrice, il est aussi un exemple lumineux de tout ce que peut apporter une démarche réflexive. Ca vaut pour la façon dont on choisit un mot plutôt qu’un autre. Mais ça vaut aussi pour la manière dont on peut déconstruire des façons de penser, ou des habitudes sur son lieu de travail, par exemple. En effet, avant de soutenir sa thèse en 2012, Karen Akoka a travaillé durant cinq ans pour le HCR, le Haut commissariat aux réfugiés des Nations-Unies. On comprend très bien, à la lire, combien elle a pu d’abord croire, et même nourrir, certaines fausses évidences. Jusqu’à être “mal à l’aise” avec ces images et ces chimères qu’elle entretenait, depuis son travail - qui, en fait, consistait à “fabriquer des réfugiés”. Pour en éliminer d’autres.

    https://www.franceculture.fr/societe/refugies-migrants-exiles-ou-demandeur-dasile-a-chaque-mot-sa-fiction-e

    #asile #migrations #réfugiés #catégorisation #catégories #mots #terminologie #vocabulaire #Ofpra #France #histoire #légitimité #migrants_économiques #réfugié_désirable #déshumanisation #Convention_de_Genève #politisation #réfugié_militant #Indochine #boat_people #bon_réfugié #Vietnam #militants #imaginaire #discours #persécution #persécution_politique #preuves #guerre_froide #immigration #fraudes #abus #Zaïre #filières_zaïroises #Mobutu #vrais_réfugiés #faux_réfugiés #procédure_d'asile #consulat_des_pays_disparus #politique_migratoire
    #Karen_Akoka
    ping @isskein @karine4 @sinehebdo @_kg_

    • ...même jour que l’envoi de ce post on a discuté en cours Licence Géo le séjour d’Ahmed publié en forme de carte par Karen Akoka dans l’atlas migreurop - hasard ! Et à la fin de son exposé un étudiant proposait par rapport aux catégories : Wie wäre es mit « Mensch » ? L’exemple du campement à Paris - des pistes ici pour approfondir !

    • Ce qui fait un réfugié

      Il y aurait d’un côté des réfugiés et de l’autre des migrants économiques. La réalité des migrations s’avère autrement complexe souligne la politiste #Karen_Akoka qui examine en détail comment ces catégories sont historiquement, socialement et politiquement construites.

      L’asile est une notion juridique précieuse. Depuis le milieu du XXe siècle, elle permet, à certaines conditions, de protéger des individus qui fuient leur pays d’origine en les qualifiant de réfugiés. Mais l’asile est aussi, à certains égards, une notion dangereuse, qui permet paradoxalement de justifier le fait de ne pas accueillir d’autres individus, les rejetant vers un autre statut, celui de migrant économique. L’asile devenant alors ce qui permet la mise en œuvre d’une politique migratoire de fermeture. Mais comment faire la différence entre un réfugié et un migrant économique ? La seule manière d’y prétendre consiste à s’intéresser non pas aux caractéristiques des personnes, qu’elles soient rangées dans la catégorie de réfugié ou de migrant, mais bien plutôt au travail qui consiste à les ranger dans l’une ou l’autre de ces deux catégories. C’est le grand mérite de « #L’Asile_et_l’exil », le livre important de Karen Akoka que de proposer ce renversement de perspective. Elle est cette semaine l’invitée de La Suite dans Les Idées.

      Et c’est la metteuse en scène Judith Depaule qui nous rejoint en seconde partie, pour évoquer « Je passe » un spectacle qui aborde le sujet des migrations mais aussi pour présenter l’Atelier des artistes en exil, qu’elle dirige.

      https://www.franceculture.fr/emissions/la-suite-dans-les-idees/ce-qui-fait-un-refugie

      #livre #catégorisation #catégories #distinction #hiérarchisation #histoire #ofpra #tri #subordination_politique #politique_étrangère #guerre_froide #politique_migratoire #diplomatie

    • La fabrique du demandeur d’asile

      « Il y a les réfugiés politiques, et c’est l’honneur de la France que de respecter le droit d’asile : toutes les communes de France en prennent leur part. Il y a enfin ceux qui sont entrés illégalement sur le territoire : ceux-là ne sont pas des réfugiés, mais des clandestins qui doivent retourner dans leur pays », disait déjà Gerald Darmanin en 2015. Mais pourquoi risquer de mourir de faim serait-il moins grave que risquer de mourir en prison ? Pourquoi serait-il moins « politique » d’être victime de programmes d’ajustement structurels que d’être victime de censure ?

      Dans son livre L’asile et l’exil, une histoire de la distinction réfugiés migrants (La découverte, 2020), Karen Akoka revient sur la construction très idéologique de cette hiérarchisation, qui est liée à la définition du réfugié telle qu’elle a été décidée lors de la Convention de Genève de 1951, à l’issue d’âpres négociations.

      Cette dichotomie réfugié politique/migrant économique paraît d’autant plus artificielle que, jusqu’aux années 1970, il suffisait d’être russe, hongrois, tchécoslovaque – et un peu plus tard de venir d’Asie du Sud-Est, du Cambodge, du Laos ou du Vietnam – pour décrocher le statut de réfugié, l’objectif premier de la France étant de discréditer les régimes communistes. Nul besoin, à l’époque, de montrer qu’on avait été individuellement persécuté ni de nier la dimension économique de l’exil.

      Aujourd’hui, la vaste majorité des demandes d’asile sont rejetées. Qu’est ce qui a changé dans les années 1980 ? D’où sort l’obsession actuelle des agents de l’OFPRA (l’Office français de protection des réfugiés et apatrides) pour la fraude et les « faux » demandeurs d’asile ?

      Plutôt que de sonder en vain les identités et les trajectoires des « demandeurs d’asile » à la recherche d’une introuvable essence de migrant ou de réfugié, Karen Akoka déplace le regard vers « l’offre » d’asile. Avec la conviction que les étiquettes en disent moins sur les exilés que sur ceux qui les décernent.

      https://www.youtube.com/watch?v=bvcc0v7h2_w&feature=emb_logo

      https://www.hors-serie.net/Aux-Ressources/2020-12-19/La-fabrique-du-demandeur-d-asile-id426

    • « Il n’est pas possible d’avoir un système d’asile juste sans politique d’immigration ouverte »

      La chercheuse Karen Akoka a retracé l’histoire du droit d’asile en France. Elle montre que l’attribution de ce statut a toujours reposé sur des intérêts politiques et diplomatiques. Et que la distinction entre les « vrais » et les « faux » réfugiés est donc discutable.

      Qui étaient les personnes qui ont été violemment évacuées du camp de la place de la République, il y a quatre semaines ? Ceux qui les aident et les défendent utilisent le mot « exilés », pour décrire une condition qui transcende les statuts administratifs : que l’on soit demandeur d’asile, sans-papiers, ou sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français, les difficultés restent sensiblement les mêmes. D’autres préfèrent le mot « illégaux », utilisé pour distinguer ces étrangers venus pour des raisons économiques du seul groupe que la France aurait la volonté et les moyens d’accueillir : les réfugiés protégés par le droit d’asile. Accordé par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) depuis 1952, ce statut permet aujourd’hui de travailler et de vivre en France à celles et ceux qui peuvent prouver une persécution ou une menace dans leur pays d’origine. Pour les autres, le retour s’impose. Mais qui décide de l’attribution du statut, et selon quels critères ?

      Pour le savoir, Karen Akoka a retracé l’histoire de l’Ofpra. Dressant une galerie de portraits des membres de l’institution, retraçant le regard porté sur les Espagnols, les Yougoslaves, les boat-people ou encore les Zaïrois, elle montre dans l’Asile et l’Exil (La Découverte) que l’asile a toujours été accordé en fonction de considérations politiques et diplomatiques. Elle remet ainsi en cause l’idée que les réfugiés seraient « objectivement » différents des autres exilés, et seuls légitimes à être dignement accueillis. De quoi prendre conscience (s’il en était encore besoin) qu’une autre politique d’accueil est possible.
      Comment interprétez-vous les images de l’évacuation du camp de la place de la République ?

      Quand on ne connaît pas la situation des personnes exilées en France, cela peut confirmer l’idée que nous serions en situation de saturation. Il y aurait trop de migrants, la preuve, ils sont dans la rue. Ce n’est pas vrai : si ces personnes sont dans cette situation, c’est à cause de choix politiques qui empêchent toute forme d’intégration au tissu social. Depuis les années 90, on ne peut plus légalement travailler quand on est demandeur d’asile. On est donc dépendant de l’aide publique. Avec le règlement européen de Dublin, on ne peut demander l’asile que dans le premier pays de l’Union européenne dans lequel on s’enregistre. Tout cela produit des illégaux, qui se trouvent par ailleurs enfermés dans des statuts divers et complexes. Place de la République, il y avait à la fois des demandeurs d’asile, des déboutés du droit d’asile, des « dublinés », etc.
      Y a-t-il encore des groupes ou des nationalités qui incarnent la figure du « bon réfugié » ?

      Aujourd’hui, il n’y a pas de figure archétypale du bon réfugié au même titre que le dissident soviétique des années 50-60 ou le boat-people des années 80. Il y a tout de même une hiérarchie des nationalités qui fait que les Syriens sont perçus le plus positivement. Mais avec une différence majeure : alors qu’on acheminait en France les boat-people, les Syriens (comme beaucoup d’autres) doivent traverser des mers, franchir des murs… On fait tout pour les empêcher d’arriver, et une fois qu’ils sont sur place, on les reconnaît à 90 %. Il y a là quelque chose de particulièrement cynique.
      Vos travaux reviennent à la création de l’Ofpra en 1952. Pourquoi avoir repris cette histoire déjà lointaine ?

      Jusqu’aux années 80, l’Ofpra accordait le statut de réfugié à 80 % des demandeurs. Depuis les années 90, environ 20 % l’obtiennent. Cette inversion du pourcentage peut amener à la conclusion qu’entre les années 50 et 80, les demandeurs d’asile étaient tous de « vrais » réfugiés, et que depuis, ce sont majoritairement des « faux ». Il était donc important d’étudier cette période, parce qu’elle détermine notre perception actuelle selon laquelle l’asile aurait été dénaturé. Or il apparaît que cette catégorie de réfugié a sans cesse été mobilisée en fonction de considérations diplomatiques et politiques.

      La question de l’asile n’a jamais été neutre. En contexte de guerre froide, le statut de réfugié est attribué presque automatiquement aux personnes fuyant des régimes communistes que l’on cherche à décrédibiliser. Lorsqu’on est russe, hongrois ou roumain, ou plus tard vietnamien, cambodgien ou laotien, on est automatiquement reconnu réfugié sans qu’il soit nécessaire de prouver que l’on risque d’être persécuté ou de cacher ses motivations économiques. Ce qui apparaît comme de la générosité est un calcul politique et diplomatique. Les 80 % d’accords de l’époque sont autant pétris de considérations politiques que les 80 % de rejets aujourd’hui.
      Ces considérations conduisent alors à rejeter les demandes émanant de certaines nationalités, même dans le cas de régimes communistes et/ou autoritaires.

      Il y a en effet d’importantes différences de traitement, qui s’expliquent principalement par l’état des relations diplomatiques. La France est réticente à accorder l’asile aux Yougoslaves ou aux Portugais, car les relations avec Tito ou Salazar sont bonnes. Il n’y a d’ailleurs même pas de section portugaise à l’Ofpra ! Mais au lieu de les rejeter massivement, on les dirige vers les procédures d’immigration. La France passe des accords de main- d’œuvre avec Belgrade, qui permettent d’orienter les Yougoslaves vers la régularisation par le travail et de faire baisser le nombre de demandeurs d’asile.

      Grâce aux politiques d’immigration ouvertes on pouvait donc diriger vers la régularisation par le travail les nationalités rendues « indésirables » en tant que réfugiés en raison des relations diplomatiques. On pouvait prendre en compte les questions de politique étrangère, sans que cela ne nuise aux exilés. Aujourd’hui, on ne peut plus procéder comme cela, puisque la régularisation par le travail a été bloquée. Les rejets ont donc augmenté et la question du « vrai-faux » est devenu le paradigme dominant. Comme il faut bien justifier les rejets, on déplace la cause des refus sur les demandeurs en disséquant de plus en plus les biographies pour scruter si elles correspondent ou non à la fiction d’une identité de réfugié supposée neutre et objective.

      Cela montre qu’il n’est pas possible d’avoir un système d’asile juste sans politique d’immigration ouverte, d’abord parce que les catégories de réfugiés et de migrants sont poreuses et ne reflètent qu’imparfaitement la complexité des parcours migratoires, ensuite parce qu’elles sont largement façonnées par des considérations politiques.
      Vous identifiez les années 80 comme le moment où change la politique d’asile. Comment se déroule cette évolution ?

      Les changements de cette période sont liés à trois grands facteurs : la construction de l’immigration comme un problème qui arrime la politique d’asile à l’impératif de réduction des flux migratoires ; la fin de la guerre froide qui diminue l’intérêt politique à l’attribution du statut ; et la construction d’une crise de l’Etat social, dépeint comme trop dépensier et inefficace, ce qui justifie l’austérité budgétaire et la rigueur juridique dans les institutions en charge des étrangers (et plus généralement des pauvres). L’Ofpra va alors passer d’un régime des réfugiés, marqué par un fort taux d’attribution du statut, des critères souples, une activité tournée vers l’accompagnement des réfugiés en vue de leur intégration, à un régime des demandeurs d’asile orienté vers une sélection stricte et la production de rejets qui s’appuient sur des exigences nouvelles. Désormais, les demandeurs doivent montrer qu’ils risquent d’être individuellement persécutés, que leurs motivations sont purement politiques et sans aucune considération économique. Ils doivent aussi fournir toujours plus de preuves.
      Dans les années 80, ce n’était pas le cas ?

      La particularité de la décennie 80 est qu’elle voit coexister ces deux régimes, en fonction des nationalités. Les boat-people du Laos, du Cambodge et du Vietnam reçoivent automatiquement le statut de réfugié sur la seule base de leur nationalité. Et pour cause, non seulement on retrouve les questions de guerre froide, mais s’ajoutent des enjeux postcoloniaux : il faut que la figure de l’oppresseur soit incarnée par les anciens colonisés et non plus par la France. Et n’oublions pas les besoins de main- d’œuvre, toujours forts malgré les restrictions de l’immigration de travail mises en place dès les années 70. L’arrivée de ces travailleurs potentiels apparaît comme une opportunité, d’autant qu’on les présume dociles par stéréotype. Au même moment, les Zaïrois, qui fuient le régime du général Mobutu, sont massivement rejetés.
      Pourquoi ?

      Après les indépendances, la France s’efforce de maintenir une influence forte en Afrique, notamment au Zaïre car c’est un pays francophone où la France ne porte pas la responsabilité de la colonisation. C’est également un pays riche en matières premières, qui fait figure de rempart face aux Etats communistes qui l’entourent. Les Zaïrois qui demandent l’asile doivent donc montrer qu’ils sont individuellement recherchés, là où prévalait auparavant une gestion par nationalité. L’Ofpra surmédiatise les fraudes des Zaïrois, alors qu’il étouffe celles des boat-people. On a donc au même moment deux figures absolument inversées. Dans les années 90, la gestion de l’asile bascule pour tous dans le système appliqué aux Zaïrois. Cette rigidification entraîne une augmentation des fraudes, qui justifie une nouvelle surenchère d’exigences et de contrôles dans un cercle vicieux qui perdure jusqu’aujourd’hui.
      Il faut ajouter le fait que l’Ofpra devient un laboratoire des logiques de management.

      L’Ofpra est longtemps resté une institution faible. Il était peu considéré par les pouvoirs publics, en particulier par sa tutelle, les Affaires étrangères, et dirigé par les diplomates les plus relégués de ce ministère. Au début des années 90, avec la construction de l’asile comme « problème », des sommes importantes sont injectées dans l’Ofpra qui s’ennoblit mais sert en retour de lieu d’expérimentation des stratégies de management issues du secteur privé. Les agents sont soumis à des exigences de productivité, de standardisation, et à la segmentation de leur travail. On leur demande notamment de prendre un certain nombre de décisions par jour (deux à trois aujourd’hui), faute de quoi ils sont sanctionnés.

      Cette exigence de rapidité s’accompagne de l’injonction à justifier longuement les décisions positives, tandis qu’auparavant c’était davantage les rejets qui devaient être motivés. Cette organisation productiviste est un facteur d’explication du nombre grandissant de rejets. La division du travail produit une dilution du sentiment de responsabilité qui facilite cette production des rejets. Ce n’est pas que les agents de l’Ofpra fassent mal leur travail. Mais les techniques managériales influent sur leurs pratiques et elles contribuent aux 80 % de refus actuels.
      Quelle est l’influence de la question religieuse sur l’asile ?

      Pour aborder cette question, je suis partie d’un constat : depuis la fin des années 90, un nouveau groupe, composé de femmes potentiellement victimes d’excision ou de mariage forcé et de personnes homosexuelles, a accès au statut de réfugié. Comment expliquer cette ouverture à un moment où la politique menée est de plus en plus restrictive ? On pense bien sûr au changement des « mentalités », mais cette idée, si elle est vraie, me semble insuffisante. Mon hypothèse est que c’est aussi parce que nous sommes passés du problème communiste au problème islamiste comme soubassement idéologique de l’attribution du statut. Par ces nouvelles modalités d’inclusion se rejoue la dichotomie entre un Occident tolérant, ouvert, et un Sud global homophobe, masculiniste, sexiste.

      Cette dichotomie a été réactualisée avec le 11 septembre 2001, qui a donné un succès aux thèses sur le choc des civilisations. On retrouve cette vision binaire dans la façon dont on se représente les guerres en Afrique. Ce seraient des conflits ethniques, flous, irrationnels, où tout le monde tire sur tout le monde, par opposition aux conflits politiques de la guerre froide. Cette mise en opposition permet de sous-tendre l’idée selon laquelle il y avait bien par le passé de vrais réfugiés qui arrivaient de pays avec des problèmes clairs, ce qui ne serait plus le cas aujourd’hui. Cette vision culturaliste des conflits africains permet également de dépolitiser les mouvements migratoires auxquels ils donnent lieu, et donc de délégitimer les demandes d’asile.

      https://www.liberation.fr/debats/2020/12/20/il-n-est-pas-possible-d-avoir-un-systeme-d-asile-juste-sans-politique-d-i

    • Le tri aux frontières

      En retraçant l’histoire de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides, Karen Akoka montre que l’accueil des migrants en France relève d’une distinction non assumée entre « bons » réfugiés politiques et « mauvais » migrants économiques.
      « Pourquoi serait-il plus légitime de fuir des persécutions individuelles que des violences collectives ? Pourquoi serait-il plus grave de mourir en prison que de mourir de faim ? Pourquoi l’absence de perspectives socio-économiques serait-elle moins problématique que l’absence de liberté politique ? »

      (p. 324)

      Karen Akoka, maîtresse de conférences en sciences politique à l’Université Paris Nanterre et associée à l’Institut des sciences sociales du politique, pose dans cet ouvrage des questions essentielles sur les fondements moraux de notre société, à la lumière du traitement réservé aux étrangers demandant une forme de protection sur le territoire français. Les institutions publiques concernées – principalement le ministère des Affaires Étrangères, l’ Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), le ministère de l’Intérieur – attribuent depuis toujours aux requérants un degré variable de légitimité : ce dernier, longtemps lié à la nationalité d’origine, s’incarne en des catégories (réfugié, boat people, demandeur d’asile, migrant…) qui sont censées les distinguer et les classer, et dont le sens, les usages, et les effets en termes d’accès aux droits évoluent dans le temps. Cet ouvrage a le grand mérite de dévoiler les processus organisationnels, les rapports de force, les intérêts politiques, et les principes moraux qui sous-tendent ces évolutions de sens et d’usage des catégories de l’asile.

      Ce dévoilement procède d’une entreprise socio-historique autour de la naissance et du fonctionnement de l’Ofpra, entre les années 1950 et les années 2010, et notamment des pratiques de ses agents. Dans une approche résolument constructiviste, la figure du « réfugié » (et en creux de celui qui n’est pas considéré « réfugié ») émerge comme étant le produit d’un étiquetage dont sont responsables, certes, les institutions, mais qui est finalement délégué aux agents chargés de la mise en œuvre des règles et orientations politiques.

      Comment est-on passé d’une reconnaissance presque automatique du statut de réfugié pour des communautés entières de Russes, Géorgiens, Hongrois dans les années 1960 et 1970, à des taux de rejets très élevés à partir des années 1990 ? À quel moment et pourquoi la preuve d’un risque individuel (et non plus d’une persécution collective) est devenue un requis ? À rebours d’une explication qui suggérerait un changement de profil des requérants, l’auteure nous invite à rentrer dans les rouages de la fabrique du « réfugié » et de ses alter ego : le « demandeur d’asile » et le « migrant économique ». Pour comprendre à quoi cela tient, elle se penche sur le travail des agents qui sont appelés à les ranger dans une de ces multiples catégories, et sur les éléments (moraux, organisationnels, économiques, et politiques) qui influencent leurs arbitrages.
      Un voyage dans le temps au sein de l’OFPRA

      En s’appuyant à la fois sur les archives ouvertes et sur de nombreux entretiens, son livre propose un éclairage sur l’évolution des décisions prises au sein de l’Ofpra, au plus près des profils et des expériences des hommes et femmes à qui cette responsabilité a été déléguée : les agents.

      Karen Akoka propose une reconstruction chronologique des événements et des logiques qui ont régi l’octroi de l’asile en France à partir de l’entre-deux-guerres (chapitre 1), en s’attardant sur la « fausse rupture » que représente la création de l’Ofpra en 1952, à la suite de la ratification de la Convention de Genève (chapitre 2). Elle montre en effet que, loin de représenter un réel changement avec le passé, la protection des réfugiés après la naissance de cette institution continue d’être un enjeu diplomatique et de politique étrangère pendant plusieurs décennies.

      Les chapitres suivants s’attachent à montrer, de façon documentée et parfois à rebours d’une littérature scientifique jusque-là peu discutée (voir Gérard Noiriel, Réfugiés et sans-papiers, Paris, Hachette, 1998), que la création de l’Ofpra n’est pas exemplaire d’un contrôle « purement français » de l’asile : le profil des agents de l’Ofpra compte, et se révèle déterminant pour la compréhension de l’évolution des pourcentages de refus et d’acceptation des demandes. En effet, entre 1952 et la fin des années 1970, des réfugiés et des enfants de réfugiés occupent largement la place d’instructeurs de demandes de leurs compatriotes, dans une période de guerre froide où les ressortissants russes, géorgiens, hongrois sont reconnus comme réfugiés sur la simple base de leur nationalité. Les contre-exemples sont heuristiques et ils montrent les intérêts français en politique étrangère : les Yougoslaves, considérés comme étant des ressortissants d’un régime qui s’était désolidarisé de l’URSS, et les Portugais, dont le président Salazar entretenait d’excellents rapports diplomatiques avec la France, étaient pour la plupart déboutés de leur demande ; y répondre positivement aurait été considéré comme un « acte inamical » vis-à-vis de leurs dirigeants.

      Les années 1980 sont une décennie de transition, pendant laquelle on passe d’un « régime des réfugiés » à un « régime des demandeurs d’asile », où la recherche d’une crainte individuelle de persécution émerge dans les pratiques des agents. Mais toujours pas vis-à-vis de l’ensemble des requérants : des traitements différenciés continuent d’exister, avec d’évidentes préférences nationales, comme pour les Indochinois ou boat people, et des postures de méfiance pour d’autres ressortissants, tels les Zaïrois. Ce traitement discriminatoire découle encore des profils des agents chargés d’instruire les demandes : ils sont indochinois pour les Indochinois, et français pour les Zaïrois. La rhétorique de la fraude, pourtant bien documentée pour les ressortissants indochinois aussi, est largement mobilisée à charge des requérants africains. Elle occupe une place centrale dans le registre gouvernemental dans les années 1990, afin de légitimer des politiques migratoires visant à réduire les flux.

      L’entrée par le profil sociologique des agents de l’Ofpra et par les changements organisationnels internes à cet organisme est éclairante : la proximité culturelle et linguistique avec les publics n’est plus valorisée ; on recherche des agents neutres, distanciés. À partir des années 1990, l’institution fait évoluer les procédures d’instruction des demandes de façon à segmenter les compétences des agents, à déléguer aux experts (juristes et documentaristes), à réduire le contact avec les requérants ; l’organisation introduit progressivement des primes au rendement selon le nombre de dossiers traités, et des sanctions en cas de non remplissage des objectifs ; des modalités informelles de stigmatisation touchent les agents qui accordent trop de statuts de réfugié ; le recrutement d’agents contractuels permet aux cadres de l’Ofpra d’orienter davantage leur façon de travailler. Il apparaît alors qu’agir sur le profil des recrutés et sur leurs conditions de travail est une manière de les « contrôler sans contrôle officiel ».

      L’approche socio-historique, faisant place à différents types de données tels les mémoires, le dépouillement d’archives, et les entretiens, a l’avantage de décrire finement les continuités et les ruptures macro, et de les faire résonner avec les expériences plus micro des agents dans un temps long. Aussi, l’auteure montre que leurs marges de manœuvre sont largement influencées par, d’un côté, les équilibres politiques internationaux, et de l’autre, par l’impact du new public management sur cette organisation.

      Le retour réflexif de l’auteure sur sa propre expérience au sein du HCR, où elle a travaillé entre 1999 et 2004, est aussi le gage d’une enquête où le sens accordé par les interlocuteurs à leurs pratiques est pris au sérieux, sans pour autant qu’elles fassent l’objet d’un jugement moral. Les dilemmes moraux qui parfois traversent les choix et les hésitations des enquêté.e.s éclairent le continuum qui existe entre l’adhésion et la résistance à l’institution. Mobiliser à la fois des extraits d’entretiens de « résistants » et d’« adhérents », restituer la puissance des coûts de la dissidence en termes de réputation auprès des collègues, faire de la place aux bruits de couloirs : voilà les ingrédients d’une enquête socio-historique se rapprochant de la démarche ethnographique.
      Pour en finir avec la dichotomie réfugié/migrant et la morale du vrai/faux

      Une des contributions essentielles de l’ouvrage consiste à déconstruire l’édifice moral de l’asile, jusqu’à faire émerger les paradoxes de l’argument qui consisterait à dire que protéger l’asile aujourd’hui implique de lutter contre les fraudeurs et de limiter l’attribution du statut aux plus méritants. Karen Akoka aborde au fond des enjeux politiques cruciaux pour notre société, en nous obligeant, si encore il en était besoin, à questionner la légitimité de distinctions (entre réfugié et migrant) qui ne sont pas sociologiquement fondées, mais qui servent en revanche des intérêts et des logiques politiques des plus dangereuses, que ce soit pour maquiller d’humanitarisme la volonté cynique de davantage sélectionner les candidats à l’immigration, ou pour affirmer des objectifs populistes et/ou xénophobes de réduction des entrées d’étrangers sur le territoire sous prétexte d’une prétendue trop grande diversité culturelle ou encore d’une faible rentabilité économique.

      Ce livre est une prise de position salutaire contre la rhétorique des « vrais et faux réfugiés », contre la posture de « autrefois c’était différent » (p. 27), et invite à arrêter de porter un regard moralisateur sur les mensonges éventuels des demandeurs : ces mensonges sont la conséquence du rétrécissement des cases de la protection, de la surenchère des horreurs exigées pour avoir une chance de l’obtenir, de la réduction des recours suspensifs à l’éloignement du territoire en cas de refus de l’Ofpra… La portée politique d’une sociohistoire critique des étiquetages est en ce sens évidente, et l’épilogue de Karen Akoka monte en généralité en mettant en perspective la dichotomie réfugié/migrant avec d’autres populations faisant l’objet de tri : le parallèle avec les pauvres et les guichetiers étudiés par Vincent Dubois (La vie au guichet. Relation administrative et traitement de la misère, Paris, Economica, 2003) permet de décloisonner le cas des étrangers pour montrer comment le système justifie la (non)protection des (in)désirables en la présentant comme nécessaire ou inévitable.

      https://www.icmigrations.cnrs.fr/2021/05/25/defacto-026-08

    • Karen Akoka : « Le statut de réfugié en dit plus sur ceux qui l’attribuent que sur ceux qu’il désigne »

      Alors que l’accueil d’exilés afghans divise les pays de l’Union européenne, l’interprétation par la France du droit d’asile n’a pas toujours été aussi restrictive qu’aujourd’hui, explique, dans un entretien au « Monde », la sociologue spécialiste des questions migratoires.

      (#paywall)

      https://www.lemonde.fr/international/article/2021/08/30/karen-akoka-le-statut-de-refugie-en-dit-plus-sur-ceux-qui-l-attribuent-que-s