Pressions, menaces de mort : deux médecins bretons racontent les affres de la vaccination - Coronavirus

/pressions-menaces-de-mort-deux-medecins

  • Pressions, menaces de mort : deux médecins bretons racontent les affres de la vaccination - Coronavirus - Le Télégramme
    https://www.letelegramme.fr/coronavirus/pressions-menaces-de-mort-deux-medecins-bretons-racontent-les-affres-de

    La vaccination contre la covid-19 est le sujet brûlant du moment. Les médecins, en première ligne, sont le réceptacle des incompréhensions, de la colère et, parfois, de menaces, notamment sur les réseaux sociaux comme Twitter. Deux généralistes bretons témoignent.

    « Ce poison que tu injectes dans les veines, on te le fera payer. Tu mérites de recevoir trois balles dans la tête et j’espère qu’un taré sautera le pas d’aller tous vous zigouiller dans ces camps de la mort que vous appelez centre de vaccination. Tu mérites pas de vivre. » Ce sinistre message privé (dont nous avons corrigé les nombreuses fautes d’orthographe) a été envoyé le 30 juillet au Docteur Pepper, un médecin généraliste breton très suivi sur Twitter. Il l’a ensuite partagé sur le réseau social, en guise de preuve de la dérive de certains utilisateurs. L’auteur de la missive ? Un compte créé pour l’occasion et supprimé dans la foulée.

    La crise sanitaire en direct
    Le cas n’est pas isolé, d’autres médecins vaccinateurs ont aussi révélé avoir reçu le même type de menace de mort. Certains portant plainte, d’autres préférant simplement les transférer vers la plateforme Pharos, qui recueille les signalements de contenus et comportements en ligne illicites.

    Ces événements extrêmes restent tout de même rares, dans un contexte rendu brûlant par l’instauration du passe sanitaire et de la vaccination obligatoire des soignants contre la covid-19.

    « Cas de conscience »
    Suivi par plus de 26 000 personnes, Docteur Pepper privilégie l’anonymat sur Twitter afin de jouir d’« une liberté de parole plus grande ». Il fait partie du club des 200 à 300 médecins qui ont fait de ce réseau social, un terrain de discussions, parfois animées, de diffusion d’information scientifique, souvent sourcée, et de blagues potaches, toujours assumées. Le médecin breton y raconte aussi ses expériences de vie dans un centre de vaccination de la région. « Emmanuel (sic) a dit que l’on était en guerre, alors j’ai enfilé mon petit costume de soldat », sourit-il. Au bilan : 4 000 vaccinés au compteur et quelques histoires à partager, comme ce « cas de conscience » face à un ado de 16 ans, accompagné par son frère étudiant en médecine, dont les parents, antivaccins, ne voulaient pas signer l’autorisation…

    Je pense que prochainement, on connaîtra des agressions, le climat est vraiment délétère.

    Avec d’autres médecins présents sur Twitter, il a aussi lancé une initiative « afin de répondre aux questions des gens qui n’osent plus en poser sur la vaccination. Car, à chaque fois, ils se font harceler par des antivaxx ». Pour recevoir ces questions, les médecins volontaires ont ouvert leur boîte de messages privés à tous. « J’en ai reçu plus de 200 avec, hélas, dans le lot, des insultes et des menaces de mort », souffle Docteur Pepper.

    Le médecin s’inquiète de cette « violence grandissante, certains sont en train de se radicaliser. On commence à voir des centres de vaccination vandalisés. Je pense que, prochainement, on connaîtra des agressions, le climat est vraiment délétère ». En vaccinodrome, l’arrivée de personnes qui pestent contre l’obligation d’être immunisées, occasionne des situations déontologiquement compliquées. « Je dois même en reconduire certains à la porte… », soupire le médecin généraliste.

    « Semi-gourou »
    Un confrère des Côtes-d’Armor, le docteur Yvon Le Flohic, connaît aussi les turpitudes de Twitter, qui le poussent, parfois, à quitter momentanément le réseau social. « À un moment, je subissais beaucoup de contestation violente, mais maintenant, je suis un peu surpris, car j’ai l’impression d’avoir acquis un statut de semi-gourou », rigole-t-il. Il faut dire que le médecin, suivi par près de 20 000 « followers », a eu le nez creux sur quelques sujets, dès le début de la pandémie, comme le rôle des aérosols dans la transmission du virus et celui des hôpitaux dans les contaminations, les fameux cas nosocomiaux.

    Sur les vaccins, Yvon Le Flohic, alias @DrGomi, n’est pourtant pas du genre tiède : archi-convaincu de leur efficacité, il garde le souvenir amer de cette « patiente décédée récemment qui ne voulait pas se faire vacciner ». Il est également en faveur de l’obligation vaccinale pour les soignants. « Nous, médecins, avons vu des personnes aller à l’hôpital pour une prothèse de hanche, ou tout autre chose, et attraper la covid là-bas. Et ça s’est mal passé par la suite… »

    Mais Yvon Le Flohic ne veut pas rajouter d’huile sur le feu de Twitter. Il affirme même s’être déjà trouvé « vraiment en désaccord avec certains confrères qui étaient extrêmement agressifs et insultants vis-à-vis de personnes paumées. Elles sont perdues par tant de messages contradictoires depuis le début de l’épidémie ». En revanche, le médecin costarmoricain en veut « à certains leaders qui tiennent des discours déconnectés de la science et de la réalité. Ils le font de manière tout à fait consciente et envoient les gens dans le mur ». Toutefois, selon lui, les « antivaxx primaires sentent qu’ils perdent la main. Avec la vaccination, on commence à aprecevoir des signaux épidémiques positifs dans plusieurs pays. Et on ne voit personne tomber dans la rue ni mourir du vaccin... ».