• Dans les hôpitaux d’Idlib, en Syrie, des médecins débordés par la pandémie de Covid-19 et des patients désespérés
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/09/23/syrie-les-hopitaux-d-idlib-sont-debordes-par-la-flambee-des-cas-de-covid-19_

    Dans les hôpitaux d’Idlib, en Syrie, des médecins débordés par la pandémie de Covid-19 et des patients désespérés. La poussée épidémique survient alors que les bombardements de l’armée ont repris. Le système de santé, qui ne tenait déjà plus qu’à un fil, s’effondre.
    Dans l’unité anti-Covid de l’hôpital de campagne de Kafr Takharim, dans la province d’Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie, le personnel soignant est au bord de l’épuisement. « Parfois, je suis désespéré face au manque de moyens pour faire face à l’épidémie », confie au téléphone, la voix éteinte, le docteur Ahmad Saado, mercredi 22 septembre. Depuis deux mois, le Syrien de 29 ans, huit autres docteurs et vingt infirmiers se relaient jour et nuit pour accueillir et prendre en charge un flux continu de malades du Covid-19. Après avoir été relativement épargnée par les précédentes vagues épidémiques, la poche rebelle d’Idlib connaît depuis l’été une flambée de cas de contamination, alimentée par la forte contagiosité du variant Delta.Le système de santé ne tenait déjà plus qu’à un fil dans l’enclave surpeuplée, théâtre de combats meurtriers entre les forces loyales au président Bachar Al-Assad, soutenues par la Russie, et l’insurrection armée, appuyée par la Turquie. La moitié des hôpitaux et des centres de soins ont été endommagés, systématiquement ciblés par le régime syrien et l’aviation russe. Une grande partie du personnel soignant s’est jointe au flot de réfugiés. En dépit de la trêve décrétée en mars 2020 entre Ankara et Moscou, les 4 millions d’habitants de l’enclave (dont 2,5 millions de déplacés) vivent sous la perfusion de l’aide internationale, qui arrive au compte-gouttes par la frontière turque. Les autorités locales, sous le contrôle du groupe djihadiste Hayat Tahrir Al-Cham (HTS), peinent à répondre à la crise économique qui sévit à Idlib, comme dans le reste du pays.
    Les structures anti-Covid mises en place depuis le printemps 2020 par les soignants syriens, avec le soutien à distance d’ONG étrangères et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ne suffisent plus. Le 21 septembre, les provinces d’Idlib et d’Alep ont enregistré 1 312 cas de Covid-19 et 8 morts. Les experts jugent les chiffres officiels sous-estimés. Avec quelque 2 470 tests effectués ce jour-là, le taux de positivité s’établit à plus de 50 %. Les mesures prises par le « gouvernement de salut national » emmené par HTS – report de la rentrée scolaire, fermeture des marchés – sont insuffisantes aux yeux des soignants. Le syndicat des médecins d’Idlib a alerté cette semaine sur la catastrophe sanitaire en cours : à défaut d’une aide d’urgence internationale, il a estimé que le système de santé s’effondrera. A Kafr Takharim, les 10 lits dotés de respirateurs de l’unité de soins intensifs et les 25 lits du centre d’isolement, installés avec le soutien de l’Association médicale des expatriés syriens (SEMA) basée en France, sont déjà tous occupés, en permanence. « Plus de cent malades se présentent chaque jour. On envoie des malades ailleurs dans l’attente qu’un lit se libère. On a reçu une fois un malade de Ariha, une ville à 55 kilomètres d’ici. Du fait du manque d’hôpitaux dans la province, les malades sont pris en charge quand ils sont déjà dans un état très critique. Et on manque de médicaments et d’oxygène pour les prendre en charge », déplore le docteur Saado, qui dénombre entre un à trois morts par jour dans sa structure.« Le taux d’occupation de la plupart des structures de santé dépasse 100 %. Dans la province d’Idlib, il n’y a que six hôpitaux dotés d’unités de soins intensifs et une quinzaine de centres d’isolement. Il y en avait trente-deux en 2020, la moitié a fermé par manque de financement. Les hôpitaux manquent de tout, et surtout d’oxygène. L’OMS a du mal à trouver de nouveaux financements », explique le docteur Nasser Mhawish de l’Assistance coordination unit (ACU), une ONG basée en Turquie.Or, le pic épidémique pourrait ne pas être encore atteint. Du fait de la forte transmissibilité du variant Delta, toutes les classes d’âge sont touchées, dont de nombreux enfants. Le nombre de morts grimpe en flèche – 34 ont été répertoriés dimanche.
    Situation alarmante dans les camps de déplacés. La campagne de vaccination marque le pas. Seuls 2,5 % de la population ont été vaccinés, selon l’OMS. Quelques centaines de milliers de doses de vaccins AstraZeneca et Sinovac ont été livrées dans la province d’Idlib, dans le cadre de l’initiative Covax. « Les équipes de vaccination sont confrontées à l’hésitation de la population et à des antivax actifs. Certains arguent des effets secondaires de l’AstraZeneca, d’autres du manque de recul sur les vaccins ou de leur inefficacité face au variant Delta », indique le docteur Mhawaish. Les mesures de distanciation sociale et le port du masque sont peu respectés par la population. Un confinement est inenvisageable pour une majorité d’entre eux, obligés de travailler pour assurer leur subsistance.
    La situation est encore plus alarmante dans les camps de déplacés, où le nombre de cas commence à exploser. « C’est impossible pour les gens dans les camps de respecter les mesures de distanciation sociale et les gestes d’hygiène, par manque d’eau. Il y a une extrême pauvreté, les gens sont laissés à l’abandon et se fichent pas mal de mourir du Covid-19 ou d’autre chose. Ils sont désespérés », décrit Farid, le photojournaliste. Tous craignent une nouvelle vague de déplacement massif. Les médias du régime de Damas annoncent une nouvelle offensive pour reprendre le dernier bastion rebelle après la rencontre prévue le 29 septembre entre le président turc Recep Tayyip Erdogan et ses homologues russe et iranien, Vladimir Poutine et Ebrahim Raïssi. Depuis plusieurs semaines, les bombardements de l’artillerie syrienne et de l’aviation russe ont repris le long de la ligne de front, entraînant un nouveau flot de réfugiés du djébel Al-Zawiya vers les camps proches de la frontière turque.

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  • En Lituanie, le ministère de la défense recommande de jeter les téléphones chinois
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    Le centre national de cybersécurité a relevé des vulnérabilités et des risques de censure à distance sur les appareils 5G de Huawei, Xiaomi et OnePlus.

    Des téléphones Xiaomi Mi 10T 5G, Huawei P40 5G et OnePlus 8T 5G, dans un laboratoire du ministère lituanien de la défense, sur une photo non datée. LITHUANIA DEFENSE MINISTRY / VIA REUTERS

    L’affaire ne devrait pas arranger les relations entre la Chine et la Lituanie. Le pays balte subit les foudres de Pékin depuis qu’il a décidé mi-août d’accueillir sur son sol un bureau de représentation commerciale de « Taïwan », et non de « Taipei » – du nom de la capitale de l’île démocratique – comme la Chine en a imposé l’usage.

    Il s’agit cette fois de cybersécurité. « Notre recommandation est de ne pas acheter de nouveaux smartphones chinois et de se débarrasser de ceux déjà acquis aussi vite que possible. » Le ministre adjoint lituanien de la défense, Margiris Abukevicius, a lancé cette alerte en présentant mercredi 22 septembre depuis Vilnius à la presse un rapport technique du centre national pour la cybersécurité sur les appareils 5G vendus dans le pays par Huawei, Xiaomi et OnePlus.

    Quelque 200 administrations ou entités publiques de Lituanie ont acheté ces téléphones, et plus de 4 500 sont en service, ce qui, selon le ministre, « augmente les risques », a rapporté l’agence Associated Press. L’enquête du centre cyber, datée du 23 août et disponible en ligne a identifié « quatre risques cyber liés à la sécurité générale des applications installées par défaut sur les appareils, des menaces de fuites de données personnelles, et des restrictions à la liberté d’expression ». Selon la défense lituanienne, sont concernés les appareils de Huawei et de Xiaomi (qui toutes deux ont démenti ces risques), mais pas ceux de OnePlus.
    « Fonctionnalités malveillantes »

    Pour les premiers, ainsi, « une part des applications mobiles contenue sur les plates-formes de distribution sont des imitations d’applications originales, porteuses de fonctionnalités malveillantes ou de virus ». Pour les seconds, notamment, « le système envoie des données statistiques sur l’activité de certaines applications installées par défaut, à des serveurs du fournisseur du cloud chinois Tencent ».
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Pékin veut punir la Lituanie pour sa relation privilégiée avec Taïwan

    Les téléphones Xiaomi, assurent les experts lituaniens, peuvent filtrer les contenus de recherche contenant au moins 449 mots-clés en anglais liés aux sujets jugés sensibles pour Pékin, tels que « Tibet libre », « Mouvement démocratie 89 » (qui se réfère à la répression de Tiananmen), « La voix de l’Amérique » ou « Longue vie à l’indépendance de Taïwan ». Quand l’enquête a été faite, la fonction de filtrage était désactivée sur les appareils pour la zone européenne, et aucune censure n’a été constatée. Mais « il est important de souligner que cette fonctionnalité peut être activée à distance par le fabricant », note le rapport.

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