Inventer un nouveau service public de l’information, par Jacques Rosselin (Politis)
▻https://www.politis.fr/articles/2021/10/inventer-un-nouveau-service-public-de-linformation-43649
C’est pourquoi la collectivité devrait repenser son rôle dans le financement du journalisme et plus précisément, celui de ce qu’il est convenu d’appeler le « service public de l’information ». J’écris « repenser » parce que ce financement est déjà là, et bien là. Pour le quantifier, il suffit de faire l’addition de ce que l’État dépense aujourd’hui dans ce domaine : au moins un milliard de subventions à la presse (qui représentent aujourd’hui près du quart de ses revenus, selon le Spiil), le budget consacré à l’information dans les radios et télévisions publiques, que j’évalue à 500 millions. Il faut ajouter à cela les financements des médias régionaux par les collectivités territoriales, par le biais de subventions ou de publicités, ainsi que le budget de l’AFP, une agence presse qui emploie 1 700 journalistes dans le monde entier, sans compter la défiscalisation des investissements dans les entreprises de presse… Au total, plusieurs milliards d’euros par an donc, disons trois.
L’arithmétique est simpliste mais peut faire réfléchir : je persiste et signe, si l’on partageait cet argent public entre les 30 000 journalistes français qui ont la carte de presse, on arriverait au chiffre de 100 000 euros par personne… Une rémunération largement supérieure à la moyenne de celles de la profession. Il y a donc de la marge. Financé par la collectivité, chaque journaliste ferait son travail d’enquête, sans l’encombrante et coûteuse hiérarchie, sans contrainte économique ou politique, libre à lui de diffuser son travail lui-même ou de le vendre au diffuseur qui s’y intéresse. Les médias ne cesseraient pas pour autant d’exister. Ils joueraient leur rôle d’éditeur, de diffuseur en achetant l’information à des journalistes libres, indépendants, enfin à même de prendre le temps de produire une information de qualité.