Une victime des peurs et des préjugés
Un recul nécessaire, car pour l’instant, l’origine de la pandémie reste incertain. Pourtant, dans certains pays, dont la France, les réactions ne se sont pas faites attendre. A Chauve-Souris Auvergne, les appels ont augmenté. L’une des questions récurrentes : « J’ai des chauves-souris chez moi, que dois-je faire, comment m’en débarrasser ? » D’autant que le confinement est arrivé au printemps, avec la sortie d’hibernation de ces mammifères qui ont rejoint leurs gîtes d’été pour mettre au monde leurs petits. « Il a fallu rassurer, expliquer qu’il n’y avait rien à craindre. Mais certains propriétaires de granges où se réfugient des chauves-souris ont eu des lettres de menaces pour déplacer ou détruire ces colonies... Je crois d’ailleurs qu’une grange a été incendiée. Là, il ne s’agit plus de psychose, c’est du pénal. » En effet, en France, les chauves-souris mais aussi leurs habitats sont protégés par la loi : leur élimination, mais aussi l’altération ou la destruction de leurs gîtes sont illégales et peuvent être punis d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
Dans le monde, d’autres actions choc ont eu lieu contre ces animaux nocturnes. En Chine, des habitants ont déplacé des colonies de chauves-souris en pleine hibernation, au risque de les tuer, pour les éloigner de leurs habitations. Au Pérou, des paysans ont décidé de brûler un certain nombre de colonies de chauves-souris avant d’en être empêchés par le gouvernement. Ces deux réactions de peur, relayées dans la presse, ont poussé Tanguy Stoecklé à réagir. Cinéaste animalier, réalisateur et passionné de chiroptères, il a décidé de mettre son film « Une vie de grand rhinolophe » en ligne gratuitement pendant le confinement, et au moins jusqu’à septembre, pour la Nuit Européenne des chauves-souris. Ce film, il lui a fallu 4 ans pour le tourner dans le cadre d’un programme de protection des chauves-souris. Il a porté son choix sur le grand-rhinolophe, une espèce que l’on trouve en Camargue, mais aussi en Auvergne, et nous fait partager sa vie à travers l’histoire d’une femelle et de sa fille. Au final, ce documentaire plusieurs fois primé saisit par la qualité de ses images, son côté pédagogique sur des créatures trop méconnues, mais aussi par la tendresse qui s’en dégage.