• « Les enjeux sanitaires ne doivent pas être instrumentalisés au service d’une politique anti-migratoire »
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    « Les enjeux sanitaires ne doivent pas être instrumentalisés au service d’une politique anti-migratoire »
    L’arrêt des tests Covid pour les personnes migrantes à Briançon a pour conséquence de les empêcher de poursuivre leur voyage, faute de passe sanitaire, dénoncent, dans une tribune au « Monde », la présidente de Médecins du Monde Carine Rolland et le professeur de médecine Alfred Spira.
    Tribune. A Briançon (Hautes-Alpes), tous les moyens sont utilisés pour entraver le parcours des personnes exilées, souvent des familles avec des enfants en bas âge. Comme c’est le cas pour l’ensemble des personnes, leurs déplacements sont en partie conditionnés par la réalisation de tests Covid témoignant de leur négativité ou de leur protection par la vaccination. Ces pratiques aujourd’hui élémentaires de santé publique de protection individuelle et collective sont particulièrement difficiles à réaliser pour des personnes qui sont en train de voyager dans des conditions précaires.
    La stratégie mise en place depuis plusieurs mois en France est basée sur la réalisation de tests Covid dans les lieux d’hébergement et la délivrance aux personnes négatives d’un passe sanitaire anonyme valable 72 heures, qui leur permet de poursuivre leur route jusqu’à leur stabilisation dans un lieu permettant leur vaccination. Les personnes testées positivement se voient proposer un isolement pendant sept jours.
    Indépendamment de la position politique concernant la liberté de chacun de choisir un pays de résidence, cette stratégie est exclusivement basée sur des considérations épidémiologiques et sanitaires. Il s’agit de protéger les personnes, leurs proches et toutes celles et ceux qu’elles peuvent côtoyer.
    On n’oserait imaginer que cette stratégie de santé publique devienne un moyen de contrer la libre circulation des personnes, en les privant des possibilités d’accès aux droits élémentaires de protection de la santé individuelle et collective. C’est pourtant ce qui est en train de se passer sur la frontière italienne, à Briançon.Environ 50 à 70 personnes par jour, traversent la frontière entre l’Italie et le France. Ceci en toute légalité, la réglementation les autorisant à entrer en France pour y demander l’asile. Des refuges solidaires associatifs les accueillent, alors même que leur capacité d’accueil est limitée, pour pallier l’absence d’accueil institutionnel minimal par les services de l’Etat.Le Refuge solidaire de Briançon peut accueillir au maximum 80 personnes par nuit. Depuis son ouverture en août 2021, cette capacité a été dépassée, ce qui constitue une source de risques pour la sécurité des personnes et des structures. Ne pouvant accueillir les personnes dans des conditions dignes, les associations gestionnaires des lieux ont décidé de suspendre l’accueil pour alerter les pouvoirs publics sur l’urgence de la situation.L’une des premières conséquences de cette fermeture provisoire a été l’arrêt de la réalisation des tests Covid confiée jusqu’alors par l’Etat à la Croix-Rouge française. L’effet immédiat a été l’impossibilité pour les personnes qui le souhaitaient, c’est-à-dire quasiment toutes, de poursuivre leur voyage, faute de passe sanitaire. Ou de les contraindre à voyager sans test, ce qui entraîne d’importants risques de santé pour les personnes elles-mêmes et pour l’ensemble de la population qu’elles côtoient.En procédant de la sorte, il y a risque d’instrumentalisation des mesures de santé publique à des fins de politique migratoire.

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