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  • Jean-Luc Mélenchon : « Je demande aux Français de m’élire premier ministre » en votant pour « une majorité de députés “insoumis” » aux législatives
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/19/jean-luc-melenchon-demande-aux-francais-de-l-elire-premier-ministre-en-votan

    Par cette déclaration d’intention, Jean-Luc Mélenchon vise ainsi à imposer une cohabitation au futur vainqueur de l’élection présidentielle et veut ainsi faire des élections législatives des 12 et 19 juin un « troisième tour ».

    Si cette cohabitation « ne convient pas au président, il peut s’en aller, moi je ne m’en irai pas », a-t-il prévenu, affirmant qu’il souhaite une fois à ce poste « appliquer [son] programme », car « c’est le premier ministre qui signe les décrets », a-t-il affirmé.

    « Je ne négocie avec personne », a-t-il souligné en expliquant ne pas avoir répondu à l’appel lancé par Emmanuel Macron en direction des candidats malheureux du premier tour, formulé le soir de sa qualification au second tour et depuis lors.

    Contrairement à ce qu’il a pu affirmer au début de sa campagne présidentielle, M. Mélenchon a lancé : « Là ce n’est pas un trou de souris, il y a une porte qui est là, vous la prenez ou vous choisissez l’autre », pour tenter de convaincre ses précédents adversaires.

    Rassemblement aux législatives autour de son programme

    Alors que des négociations en vue d’une alliance pour les législatives ont été lancées à l’issue du premier tour par LFI avec EELV, le PCF et le NPA et ont commencé lundi, le député des Bouches-du-Rhône a donc appelé « tous ceux qui veulent rejoindre L’Union populaire à se joindre à nous pour cette belle bataille ». Il a notamment cité le NPA ou encore le candidat centriste Jean Lassalle, qui a obtenu 3,13 % des voix lors du premier tour du scrutin.

    Depuis ce premier tour et leur position hégémonique obtenue à gauche, les « insoumis » ont proposé une union autour de leur programme et du mouvement de L’Union populaire aux autres forces politiques. Leurs conditions : plus d’attaques envers leur mouvement et leur chef de file et une répartition des sièges de députés au prorata des résultats obtenus par chaque formation politique lors du premier tour de la présidentielle.

    si je dis "tribun", c’est une attaque. si je dis "bon tribun", ou mieux "excellent tribun" c’est ok. je me demande quelle type de divergence ou de crique reste sans importance (et sans suite...) en interne, et ce qui y est considéré comme "une attaque".

    #UP #LFI #législatives

  • Emmanuel Macron promet à Marseille un mandat où chacun recevra un lingot d’or enrobé de papier de soie vert
    https://ricochets.cc/Macron-promet-a-Marseille-un-mandat-ou-chacun-recevra-un-lingot-d-or-enrob

    C’est Noël avant l’heure avec Macron. Subitement, entre les deux tours, il decouvre le bon vieux discours « social » et « écologiste » standarisé par la civilisation industrielle. Du coup, les multiples promesses qui n’engagent que lui pleuvent comme vache qui pisse, sortez vos petits souliers au pied de la cheminée ça va ruisseler grave du lingot d’or en barre et des macarons bios fourrés aux biftons. L’Emmanuel Macron 2022 a eu semble-t-il de grandes révélations depuis le 10 avril, a-t-il entendu des (...) #Les_Articles

    / Humour, ironie, satire..., Autoritarisme, régime policier, démocrature...

    #Humour,_ironie,_satire... #Autoritarisme,_régime_policier,_démocrature...
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/16/emmanuel-macron-promet-a-marseille-un-second-mandat-qui-sera-ecologique-ou-n

  • D’ ordinaire , l’élection présidentielle suscite, si ce n’est de l’espoir, au moins un semblant d’enthousiasme. Tous les cinq ans, dans la tradition césariste de la Ve République, les Français s’efforcent de croire au mythe du candidat providentiel, qui réussira là où son prédécesseur a échoué. Un état de grâce plus ou moins long s’installe après sa victoire, puis la magie s’évanouit.

    ça m’a paru très approprié pour évoquer le quart d’heure d’enthousiasme chez les partisans et simples votants de LFi dimanche dernier. c’est extrait d’un article qui cause d’autre chose : Emmanuel Macron et Marine Le Pen, au second tour d’une présidentielle marquée par l’animosité (et encore, ils se rendent pas bien compte à Le Monde)

    D’ordinaire, l’élection présidentielle suscite, si ce n’est de l’espoir, au moins un semblant d’enthousiasme. Le débat, en 2022, est réduit à deux candidats qui jouent sur la diabolisation de l’adversaire.

    [...]

    Certes, il est de tradition que l’électeur choisisse au premier tour son candidat favori, puis élimine au second celui qui lui déplaît. Or, cette fois, « l’adage célèbre s’est trouvé inversé », note le politologue Jérôme Jaffré dans un entretien au Figaro. « Au premier tour, les électeurs ont éliminé massivement », si bien qu’Emmanuel Macron, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon cumulent trois quarts des suffrages à eux seuls. Le « vote utile » a conduit les Français à rééditer un duel dont ils assuraient ne pas vouloir, à en croire les sondages. Avec quelles conséquences ?

    Une ministre qui multiplie les porte-à-porte dans cette campagne s’inquiète du nihilisme dont une partie de l’électorat semble désormais frappée. « Il y a beaucoup de gens qui sont dans la détestation de leur vie, dans la colère, et qui attribuent ça aux politiques, souligne-t-elle. Ils me disent : “On fera avec si Marine Le Pen est élue ; de toute façon, la politique ne change rien à ma vie.” Pourtant, on a devant nous deux bulletins de vote qui nous emmènent dans des mondes très différents. »

    Depuis dimanche, les étudiants qui bloquent certaines universités, à Paris et en province, crient, comme en écho : « Ni Macron ni Le Pen ! » Semblant enlever toute pertinence au vote.

    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/15/emmanuel-macron-et-marine-le-pen-face-a-la-presidentielle-du-rejet_6122247_6

  • Election présidentielle 2022 : les Français d’Israël ont voté à plus de 50 % pour Eric Zemmour
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/12/election-presidentielle-2022-les-francais-d-israel-ont-vote-a-plus-de-50-pou

    Les Français d’Israël ont porté Eric Zemmour en tête du premier tour de la présidentielle, dimanche 10 avril, avec 53,59 % des voix. C’est une aberration au regard du vote national (le candidat d’extrême droite a obtenu 7,07 % des suffrages), le cas paraît unique au monde. Emmanuel Macron arrive second, avec 31,72 %, selon ce premier décompte non officiel.

    • Il faut relever le manque de représentativité de ce vote, auquel ont pris part à peine plus de 10 % de cette vaste communauté (environ 180 000 personnes et 59 000 inscrits) , l’une des plus nombreuses hors d’Europe et d’Amérique du Nord. A 80 % binationaux, juifs ayant quitté la France pour s’établir en Israël, nombre d’entre eux ne souhaitent plus depuis longtemps voter dans leur pays d’origine, ou ne s’y sentent plus légitimes. En 2017, la participation s’élevait à 14,5 % à peine, hors Jérusalem. Reste que ce résultat était attendu de longue date, et qu’il pèse au sein de la communauté juive française, que M. Zemmour a profondément divisée.

      Le Pen obtient 3,3 % des voix

      Ces électeurs sont passés outre les réécritures de l’histoire du polémiste, qui s’est interrogé sur l’innocence du capitaine Dreyfus, et qui a tenté d’exempter le régime de Vichy de sa responsabilité dans l’extermination des juifs de France, durant la seconde guerre mondiale. Ils ont souffert qu’il qualifie d’« étrangers avant tout » des enfants juifs tués en 2012 par Mohammed Merah à Toulouse, parce que leurs familles avaient choisi de les enterrer en Israël.

      Ils n’ont pas écouté les appels du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et du grand rabbin de France, ce « rabbin de cour », selon M. Zemmour, qui demandaient à la communauté de ne pas voter pour lui. Parmi les digues qu’a fait sauter ce candidat juif d’origine algérienne, il y a donc celle-ci : les Français d’Israël ont libéré une parole et un vote d’extrême droite, eux qui n’ont jamais accepté la « normalisation » de Marine Le Pen.

      Trop associée à son père et au Front national, ex-Rassemblement national, la candidate d’extrême droite obtient 3,3 % des voix, à peine moins qu’en 2017. Cela fait douter d’un report massif en sa faveur au second tour, de la part d’une communauté qui avait voté en 2017 à 60 % pour François Fillon (Les Républicains), puis à plus de 90 % pour M. Macron au second tour.

      Discours banalisé en Israël

      Eric Zemmour a séduit en déployant, en France, un discours depuis longtemps banalisé en Israël. Sa dénonciation d’un supposé « grand remplacement » des Français par des populations arabes et noires et son obsession de la sécurité ne sont pas l’apanage des extrêmes en Israël. Elles recoupent le discours de la droite de gouvernement israélienne, de l’ex-premier ministre Benyamin Nétanyahou.

      Il fait aussi écho aux craintes particulières d’une communauté qui cite majoritairement l’absence de sécurité en France comme la première raison de son alya (son émigration vers Israël). En fin de campagne, M. Zemmour s’était rapproché de la famille de Jeremie Cohen, un jeune homme juif ­renversé, le 16 février, par un tramway à Bobigny alors qu’il fuyait un groupe d’une quinzaine d’agresseurs. M. Zemmour avait touché en Israël, en se demandant si M. Cohen était tombé sous les coups de « barbares (…) parce que juif », alors que sa mort avait jusque-là reçu peu d’écho.

      M. Zemmour séduit enfin de nouveaux Israéliens souvent mal intégrés, parlant mal l’hébreu, appauvris depuis leur départ. Peu au fait de la réalité palestinienne, ils lisent le conflit et l’occupation des territoires, en vigueur depuis 1967, au prisme de leur propre histoire familiale : celle des colonies françaises du Maghreb, et de la disparition des communautés juives après les indépendances arabes.

      Les conditions de cette fin de campagne auraient pu augurer d’un vote plus important en sa faveur. Elle s’est déroulée au rythme de quatre attaques terroristes perpétrées par des Palestiniens dans des villes israéliennes, qui ont fait 14 morts depuis le 22 mars, dont une conscrite franco-israélienne, Shirel Aboukrat, originaire de Nétanya, au centre du pays.

      Il est donc question ici d’environ 3200 électeurs. _Le Monde continue son tardif battage contre Le Pen et Z. (dans cet article en foutant la honte aux juifs votant ou tenté de voter extrême droite : Dreyfus, Vichy, même pas besoin de rappel que la fondation du FN s’est faite avec d’authentiques nazis).
      Leur report de voix compte pour que dalle, sauf si la suite de la campagne mobilise davantage les juifs d’extrême droite, ici (j’espérais un aperçu sur l’inquiétant vote des juifs de France), et là-bas.

      #Israéliens #extrême_droite #Zemmour #racisme #pestilentielle

    • Alors même en minimisant et en insistant sur « pas représentatif », ce sont déjà les électeurs qui expédient à l’assemblée nationale un député d’extrême-droite. Donc non seulement cette cohérence est très pénible au niveau symbolique (le sionisme serait-il donc un racisme ?), mais ça a déjà un effet tout a fait pratique : un député taré aligné sur le Likoud siège à l’Assemblée nationale (lequel député a une certaine influence dans notre paysage politique).

    • Dans les gros scores Le Pen + Zemmour : Bangkok, Miami, Monaco (nan mais ça va ?), Djibouti, Moscou (ah, tiens, pourquoi je suis pas étonné ?)…

      Je te dis pas les scores de Macron, c’est juste déprimant (les « expats » aiment Macron dans des proportions assez hallucinantes).

    • le vote des « français de l’étranger » est traditionnellement plus réac et plus légitimiste (plus riche) que dans l’hexagone

      (...) les résultats du scrutin du 10 mai [1981], pour les Français inscrits dans des centres de vote (...) à l’étranger (...) sont les suivants :
      Inscr., 132 141 ; vot., 104 112 Abst., 28 028 (21,21 %)
      Suffr. expr, 102 231
      Giscard : 71246 (69,69 %).
      Mitterrand : 30 985 (30,30 %).
      https://www.lemonde.fr/archives/article/1981/05/14/le-vote-des-francais-de-l-etranger_2721389_1819218.html

  • Dans les quartiers populaires de Marseille, l’islamophobie de la campagne a dopé le vote pour Jean-Luc Mélenchon

    Les discours radicaux des candidats d’extrême droite ont contribué à mobiliser des électeurs déjà attirés par le candidat de La France insoumise.

    Il est 20 heures, dimanche 10 avril et, alors que les premières estimations présidentielles tombent dans les QG de campagne, une soixantaine d’électeurs attendent encore de voter à l’école de La Solidarité (15e), imposante cité tout au nord de Marseille. Hedi Ramdane, le président du bureau 1 587, adjoint municipal à la jeunesse, vient de verrouiller les grilles et pousse à l’intérieur les derniers arrivés. Tous voteront avant que le bureau ne ferme, à 20 h 44.

    Dans ce quartier populaire, où les Marseillais de confession musulmane sont majoritaires et le ramadan très suivi, cette affluence tardive surprend même l’élu, originaire de la « Soli » et habitué du bureau. « Pour que ces gens restent là alors qu’ils devraient rompre le jeûne, c’est qu’ils sont très motivés », glisse-t-il, en tentant d’accélérer les votes. Dans la file d’attente, femmes, hommes, jeunes adultes, affichent des motivations claires. « On ne va pas se mentir, il y a des racistes qui se présentent. Si Zemmour n’était pas candidat, je ne serais pas là », assure Karim Rhali, grand gaillard de 18 ans qui vote pour la première fois. Son copain Malek Seddi, 21 ans, ne s’est pas déplacé aux régionales de 2021. Aujourd’hui, comme Karim, il vient voter Mélenchon. « C’est le seul qui est avec les plus pauvres. Le seul qui nous a défendus quand Zemmour et Le Pen ont attaqué les musulmans », assure-t-il.

    « Dans cette campagne, il y a eu des mots très violents dits contre notre religion, nos pratiques, nos origines », se livre d’une voix douce Soraya Chachoua, 43 ans, agente dans les écoles. Venue plusieurs fois dans la journée, elle a reculé devant l’attente. Mais à 19 h 30, elle est restée. Et patiente depuis une heure. « Je n’ai pas le choix, il faut que je vote », insiste-t-elle.

    « Un agrégat de raisons »

    En 2017 à La Solidarité, Jean-Luc Mélenchon était arrivé en tête avec 29 % des voix. Ce dimanche soir, il dépasse les 66 %. Un score qui aurait même pu être plus élevé. Derrière le bureau où sont assis les assesseurs, une pile d’enveloppes est remisée. « Ce sont les votes de gens venus spontanément, sans savoir qu’ils devaient d’abord s’inscrire sur les listes électorales », explique Hedi Ramdane. Il ouvre une enveloppe au hasard. Un bulletin Mélenchon apparaît.

    Leader sur l’ensemble de Marseille, avec 17 576 voix de plus qu’en 2017, le candidat « insoumis » a su mobiliser toutes les strates de son électorat. Mais c’est dans les quartiers populaires qu’il explose littéralement ses plafonds électoraux, malgré une participation en baisse . 63 % à Air-Bel (11e), 79,83 % à Saint-Mauront au pied de la cité Felix-Pyat (3e) dont les bureaux ont aussi fermé tardivement, 84,24 % à Font-Vert (14e). Cités du nord et de l’est comme zones paupérisées de l’hypercentre dont il est député, ont plébiscité Jean-Luc Mélenchon.

    « On sentait des signes ostentatoires d’adhésion », ironise Mohamed Bensaada, membre du « parlement » de l’Union populaire, qui, trois semaines plus tôt, prédisait déjà un succès à Marseille. Ce militant acharné des quartiers défavorisés refuse qu’on réduise l’adhésion à son candidat dans ces territoires à « un réflexe communautaire ». « Ici comme ailleurs, le vote Mélenchon est un agrégat de raisons : sa personnalité, son programme écologiste, sa fibre sociale, sa campagne remarquable, la meilleure de tous les candidats », enchaîne-t-il. Les « insoumis », rappelle-t-il également, ont mené un travail de fond pour inscrire des jeunes sur les listes électorales. « Combien ? Difficile à dire. Mais sur les 20 000 électeurs supplémentaires à Marseille, beaucoup sont venus grâce à nous », estime-t-il.

    « Une question de dignité »

    S’il le relativise, Mohamed Bensaada n’élude pas l’électrochoc provoqué par l’irruption d’Eric Zemmour, chez les électeurs issus des immigrations de la fin du XXe siècle. Qu’ils soient musulmans pratiquants ou non. « Il a tellement fait péter tous les tabous que ça a troublés beaucoup d’entre nous. Et face aux stigmatisations, Mélenchon a été le seul à dire : “laissez ces Français tranquilles” », affirme-t-il.

    « Un élément commun du vote Mélenchon dans nos quartiers, c’est la peur créée par la parole islamophobe de Zemmour et Le Pen », confirme la sociologue Karima Berriche, ancienne directrice du centre social de la cité de la Busserine (14e). Pour preuve de cette émotion, elle évoque un appel qui a beaucoup circulé sur les réseaux sociaux avant le vote. Un texte dont l’origine reste inconnue mais qui, intitulé « communiqué des imams et prédicateurs », appelle « les citoyens français de confession musulmane à voter pour le moins pire des candidats : Jean-Luc Mélenchon. Le seul à avoir abordé la question de la liberté des musulmans (…) ».

    « J’ai reçu moi aussi ce communiqué, mais personne ne sait qui en est à l’origine », sourit presque l’imam marseillais Abdessalem Souiki. Lui assure n’avoir donné aucune consigne, mais estime que le vote Mélenchon a été « une question de dignité » pour les musulmans marseillais. « C’est le seul candidat à ne pas les avoir stigmatisés », observe-t-il. « Certaines mosquées ont donné des indications claires », confie, sans vouloir les citer, Nassurdine Haidari, imam originaire de la cité Felix-Pyat. « A l’heure où l’extrême droite fait 30 % et la loi sur le séparatisme met les musulmans dans une position très inconfortable, Mélenchon est apparu aux yeux de la communauté comme le seul candidat dont le discours républicain pouvait la défendre », conclut-il.

    Gilles Rof

    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/12/dans-les-quartiers-populaires-de-marseille-l-islamophobie-de-la-campagne-dop

    #racisme #vote

    • catéchisme réconfortant. les pros LFI qui attribuent la responsabilité des voix manquantes au Printemps républicain viandard de Roussel s’évitent toute auto-analyse de l’orientation politique et des pratiques de l’ « union populaire ». la performativité de l’appellation reste plus que limitée. c’est qu’ils ont de drôle d’idées sur « le peuple » (la touche antiraciste a été de dernière minute, le fétiche de l’emploi c’est leur ADN, même si usé jusqu’à la corde et pas archi payant, etc.).
      taper sur Roussel, ça distrait et conforte pour pas cher. personne d’autre que les stratèges du sommet n’est supposé lire la situation politique et déterminer les axes mis en avant. si ce n’est que d’aucuns réclament que l’organisation ne parachute pas ses candidats aux législatives, ce qui n’est pas facile à faire valoir dans un courant aussi centraliste, et qui les coupe de multiples réalités sociales, forcément locales.
      tout arrive ? le temps de rares descentes sur terre, JLM a peut-être appris quelque chose de la ville arabe (et populaire) où il s’était parachuté, lui qui propriétaire vit depuis un temps infini dans le confort accordé aux rentiers de la république.

      comme pour MLP, la candidature Z., lui aura servi de faire valoir, que serait-il arrivé à la LFI sans cela ?

    • Oui et non.

      Sur l’antiracisme en particulier, je ne crois pas qu’il soit « de dernière minute ». Mélenchon a des discours clairs sur le sujet, depuis plusieurs années. Pour les événements qui ont « marqué » l’opinion (et notamment les français arabes), tu as eu la participation à la marche contre l’islamophobie (qui lui a été beaucoup reprochée, donc très médiatisée, et sans doute perçue favorablement dans les quartiers), et aussi le refus de participer à la marche pour les flics (ce qui lui a aussi été très reproché).

      Sur l’effet Zemmour, je suis d’accord, ça a certainement beaucoup joué. À l’école, mes petits (dont leurs copains sont largement des enfants de l’immigration arabe) ont focalisé à fond sur l’idée qu’on allait leur faire changer de prénoms. C’est réducteur, mais c’est à ce moment-là que les gamins de l’école ont commencé à systématiquement verbaliser leur peur des discours racistes. Avant, c’était plus diffus je suppose.

      Ce que je veux dire, c’est que possiblement, oui, on a un peut-être un effet de mobilisation des quartiers, ou de « vote utile », par réaction à la sur-médiatisation des horreurs de Zemmour. Mais dans le même temps, cette mobilisation en faveur de LFI ne me semble pas illégitime (sur ce thème-là), les discours de Méluche sur le sujet ne me semblant pas « de dernière minute ».

      À la rigueur, la relative constance de LFI (sauf quand Ruffin fait bruyamment savoir qu’il préfère aller au foot) sur le sujet, ça a même été un aspect des attaques systématiques de leurs adversaires (ie. l’islamo-gauchisme supposé des insoumis), qui ont ainsi, sur ce sujet, contribué à la légitimation de la LFI comme premier parti antiraciste depuis des années.

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      Après, plus généralement, c’est toujours difficile de savoir pourquoi les gens votent ou ne votent pas pour eux. Par exemple, de notre côté on serait plutôt pour penser que leur jeu de con à la marge du complotisme anti-vax (je suis gentil) les a desservis. Mais p’têt que c’est exactement le contraire (le déroulement de la campagne des différents candidats suggérant que le populisme pas-trop-vax a le vent en poupe dans l’opinion).

    • Oui, pour le populisme pas-trop-vax, la confusion est totale, on sait à qui on le doit, ça vient de très très haut (géopolitiquement parlant, j’entends), et sincèrement, le discours de protection n’est pas du tout audible, dans toutes les franges de la population, me semble-t-il, j’en suis quotidiennement consterné dans ma banlieue bourgeoise. Alors en faire des tonnes sur le sujet, c’est un coup à se prendre une shitstorm pour pas un rond, alors même qu’on n’y peut pas grand chose tant l’état a décidé de s’en contrefoutre.
      « On » dégoisait sur les LFI qui distribuent des FFP2 dans les meetings, en expliquant que c’était pas assez, trop tard, pas assez longtemps, et j’en passe. Mais n’empêche qu’ils furent les seuls. Tout comme Mélenchon avec son FFP2 a été un des seuls à s’affubler de ce type de masque pour ainsi dire.
      Je comprends qu’on puisse souhaiter un candidat idéal, avec des idées idéales, entouré de gens qui jamais ne se plantent quand ils doivent répondre aux questions pièges et/ou nulles qu’on leur pose. Mais dans la vraie vie, on se plante tous, on n’est jamais au courant de tout, et au quotidien, on n’a jamais le niveau d’écoute nécessaire de la part des autres pour pouvoir se permettre de tenir un discours complexe. Je ne dis pas qu’il faut être indulgent. Je dis que bordel, dans la période qu’on vit, avec le nivellement intello à tous niveaux, faut s’accrocher pour attirer les suffrages sur la durée.

    • Bien sûr qu’à l’exception de NPA LO, c’est LFI qui tient lieu de parti antiraciste. Oui, il y a mémoire des moments que tu cites (je retrouverais peut-être le dernier accent donné de ce côté durant la campagne), dont l’hommage, contraint à la grosse manif anti raciste appelée l’an dernier par le comité Adama, hommage destiné à faire oublier Ruffin, ou les sorties de JLM sur les Ouighours, les Tchétchènes, et aussi à propos de diverses escarmouches plus ou mois sanglantes ici entre des "jeunes quartiers" et la police (qu’il aime, non sans finir par promettre une réforme de l’IGPN, etc). Et la scène de la perquise a pour certains joué en sa faveur (il proteste et "résiste").

      Mais tout le monde sait, sur place, que ce parti dont le leader ne cesse de répéter que leur capacité à réformer une fois au pouvoir sera tributaire des mobilisations populaires, n’agit pas comme ça actuellement. Ce machin ne s’appuie pas sur les pratiques sociales, au mieux, il cherche à les récupérer.

      Février 2022 :

      Dans une tribune publiée dans Libération, qui ne fait pas mention de la présidentielle, Assa Traoré écrit ainsi : « Les cinq prochaines années sont les vôtres, les cinq prochaines années sont les nôtres. »
      Interrogée par Mediapart à ce sujet, elle développe : « Les années à venir vont être difficiles, mais ce n’est pas parce qu’on n’est pas à l’Élysée qu’on n’a pas de pouvoir. On occupera encore plus l’espace et on prendra encore plus la parole. »

      Sur le vote du 10 avril en lui-même, en revanche, un brin de scepticisme semble avoir gagné les rangs du noyau dur du comité.

      Youcef Brakni, qui fait campagne à titre individuel pour le candidat de Révolution permanente (scission du NPA), Anasse Kazib, regrette que la gauche ne se soit « pas donnée à fond pour relayer massivement » l’appel à manifester du 12 février. C’est la raison pour laquelle, selon lui, la population manifestante est « éloignée des organisations politiques ».
      « La présidentielle est finie, estime-t-il même. Il reste 60 jours, aucun candidat ne s’est montré prêt à mettre le racisme au centre du débat. Le meilleur, c’est sans doute Jean-Luc Mélenchon, mais ça reste très fragile, malgré les bonnes volontés. On se prépare donc à résister, à faire de la structuration politique sur le long terme. Cette marche n’est que le début. »
      https://www.mediapart.fr/journal/france/120222/notre-parole-ne-sera-pas-muselee-l-appel-du-comite-adama

      Les mouvements sociaux peuvent-ils porter Mélenchon jusqu’au second tour ?
      https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/les-mouvements-sociaux-peuvent-ils-porter-melenchon-jusqu-au-second-tour-9

      À ce jour, le Parlement de l’Union Populaire n’a pas le pouvoir d’infléchir significativement la campagne de Jean‑Luc Mélenchon, il l’alimente en propositions et prête main-forte sur le terrain, mais c’est bien l’entourage proche du candidat qui tranche les questions stratégiques. Si alliance entre parti et mouvements il y a, elle reste asymétrique et à l’avantage du premier.

      Lorsqu’il salue des images « impressionnantes de calme " à propos de la manif de juin dernier, Mélenchon rappel sans détour le genre de flic qu’il est, toujours prêt à dénoncer les "faux manifestants qui sont des casseurs" (cf. ZAD, Tesquet). quant à ceux qui n’ont pas pour eux la qualité de militants ou de politique, cela peut-être pire encore. Et, faut pas prendre les gens pour des couillons, le coups de ripolin ne remplace pas une orientation claire que pour qui éprouve le besoin d’être complaisant.

      Si l’antiracisme, ou l’antifasciste avait été plus consistant, la baisse de la participation signalée parmi ceux pour qui ces enjeux ont un caractère immédiatement vital, aurait-elle eu lieu ? Je ne crois pas.

      L’autocrate est pas juste mal conseillé. Il est tributaire du moule SFIO (la grande France coloniale, "présente dans tous les océans", comme il dit), OCI (manipulations politiques anti ouvrières), Mitterrandisme (pas de politique sans Prince) et républicain (toujours être prêt à faire donner la police pour maintenir l’ordre social contre l’autonomie). Il y a des séquelles qui ne passent pas.

      –------

      Bien sûr que c’est aussi un calcul électoral que de ne rien clarifier sur la réduction des risques, et le vaccin ("On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment" disait l’autre). Et il a été payant, (cf, le vote en Guadeloupe). Un scientisme en carton contre le savoir collectif. Or si on veut contribuer à construire un peuple "populaire", comme il y eu un peuple "communiste", une politisation critique de la gestion de la pandémie aurait du s’imposer (avec moments d’"éducation populaire", floraisons d’initiatives de base), mais le parti a une toute autre fonction, fondamentalement verticale, quoi qu’ils en disent, électorale, donc opportuniste, sans capacité à prendre l’initiative autrement que pour faire mousser la boutique. Alors ça court après la volatilité électorale et la confusion.

      S’agit en rien d’espérer un candidat idéal, il s’agit de savoir à quel point on peut se servir d’un candidat. L’imaginaire est une une chose, mais face à la violence sociale, c’est avant tout de force qu’il est question. C’est ce que la modalité autocratique hypothèque. Donc le calculs et le pari politique est complexe pour chacun selon ses coordonnées (liens, expériences). Voilà ce que la LFI n’a pas su simplifier, or c’est le rôle de la politique, non pas de dénaturer, de nier la complexité, mais de rendre lisible et clair ce qui permet d’agir.

      LFi n’est qu’à la marge une machine d’empowerment, pour l’essentiel c’est une forme de délégation qui exige un degré de passivité élevé (demandez à une partie des militants à quel point l’intelligence collective est bridée, le débat interne relégué, les décisions tombent du ciel).

      #pestilentielle #LFI

    • @olaf : parution des 5 et 6 février derniers. C’est une dynamique très « verticale », si ça réponds à ta question.

      https://lafranceinsoumise.fr/2022/02/18/elections-legislatives-2022-les-premiers-200-binomes-de-chefs-de-f

      À cette étape, nous rappelons que notre mouvement désigne des chef·fes de file, avec les missions mentionnées ci-dessus, et non des candidat·es aux élections législatives. Par conséquent, aucune personne ne peut se déclarer publiquement candidat·e, notamment par voie de presse.
      Conformément au texte d’orientation, « Une majorité de l’Union populaire pour réaliser l’Avenir en commun », adopté par la Coordination des espaces, les investitures définitives de nos candidat·es aux élections législatives interviendront à l’issue d’une Convention législative qui sera organisée au lendemain de l’élection présidentielle.
      Dans la perspective de la constitution d’une majorité de l’Union populaire, nous pourrons alors ouvrir nos investitures au-delà de nos rangs à celles et ceux qui auront fait le choix de soutenir la candidature de Jean-Luc Mélenchon et le programme l’Avenir en commun.

    • oki donc faut voir la convention législative LFI à venir pour avoir une idée de la dynamique réelle et de la capacité à présenter des listes efficaces à gagner - sans les traîtres verts, PS et coco, sans doute. Déjà, de base, dans la publi du 18.02.2022, y a une liste de 222 binomes (2 personnes / circo) ; ça présente a priori pas dans toutes les circo, mais quand même, 444 personnes.

      y a aussi leur doc de présentation générale « législatives » sur le site LFI, qui indique qu’ils calculent depuis [au moins] novembre :
      https://lafranceinsoumise.fr/elections-legislatives-2022

      la dernière fois, en 2017, je crois qu’il y avait une partie des candidats (?) tirés au sort ; là, ça parle plutôt du commité de sélection, partiellement tiré au sort.

    • oublier LFI : j’ai, par exception, voté LFI en passant outre de très profonds désaccords, et je ne pratique aucun sport, surtout pas national.
      ce n’est pas « dans le vide » que l’on juge des rapports de pouvoir dont un parti est porteur et de ses orientations, bien avant qu’il tienne le manche.

      attendre ce qui ne viendra pas « pour voir », ça évite juste de prendre position, sous couvert de générosité ou d’humilité.

      les 5 ans de casse (MLP ou Macron) ce sera pas en silence mais, et le quinquennat Hollande en donnait déjà une idée, dans une ambiance de guerre civile plus ou moins larvée et de violence sociale.

      si MLP était élue, ce qui est ennuyeux pour le RN c’est que cette victoire devrait se traduire par une embuche institutionnelle de taille, avec il me semble la nécessité d’un gouvernement de cohabitation (le gang de Z. a commencé le marchandage en annonçant ne pas rejoindre cette majorité potentielle).
      je les vois pas obtenir assez de députés pour arriver à une alliance avec des bouts de LR et je sais pas quoi qui leur donne une majorité à l’A.N. en outre, je crains en que pas mal d’électeurs tiennent compte de cette hypothèse pour exprimer un vote de classe (MLP) qui ne soit pas un blanc-seing au RN (une marche après le vote protestataire, mais pas encore le gouffre, peut-on espérer).
      innovation, ce serait la première cohabitation post-bipartisme. un pire bordel pour la Veme, et peut-être une voie vers une VIe, arrivant non pas gentiment comme la réalisation d’un programme mais comme voie de sortie d’une crise sans précédent.

      Si c’est Macron, il trouvera une combinaison, les conditions sont réunies, même en cas de baffe aux législatives pour ses divers paltoquets.

      Edit @arno @olaf je ne vois que maintenant votre échange supprimé... mes excuses @olaf je pensais que tes remarques concernaient ce que je disais, et c’est pas vraiment le cas, il me semble.

    • pfff... j’essaie de piger en quoi le risque d’un renfort suffisant à Le Pen est possible, à quel point qui a subi les avatars du PS jusqu’à Macron peut se trouver conduit à ce choix pour tenter de sortir de la souricière, de quels raisonnements pourraient s’étayer ceux qui viendraient ainsi finir de casser toutes les représentations politiques. je te prie de croire que ça ne m’amuse pas du tout cette carence générale de toute perpective.

      j’ai voté LFI sans jamais pouvoir inciter quiconque à le faire car sans gros bâtons populaires, on a du mal faire obéir les chefs et que dans ce cas il est logique de leur conférer le moins de légitimé possible, car l’expérience de 81 a bien montré que l’exemple de 36 un gouvernement qui doit la^cher du lest bien adula de ce qu’il avait conçu. mais il y a diverses sortes d’ennemis et j’ai rien à voir avec la politique du pire qui consisterait à voter RN.

      on verra le 25 combien d’électeurs LFI auront voté RN, malgré la belle insistance de JLM dimanche dernier pour n’en rien faire, par exemple.

      #vote_de_classe

  • les paris sur les canassons du 1er tour, avec une photo floutée (sondages) et un journaliste de gauche (si si...) : Présidentielle 2022 : Emmanuel Macron stable, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon progressent

    Selon un sondage Ispos-Sopra Steria pour « Le Monde » réalisé vendredi, le président sortant reste en tête des intentions de vote (26,5 %), suivi de la candidate d’extrême droite (22,5 %) et du leader « insoumis » (17,5 %) .

    A moins de 48 heures du premier tour de l’élection présidentielle, les écarts au sein du trio de tête ont tendance à se resserrer. C’est le principal enseignement de l’enquête réalisée le 8 avril, par Ipsos-Sopra Steria pour Le Monde. Pour ce sondage, 10 425 personnes ont été interrogées, selon la méthode des quotas. Les intentions de vote pour le 10 avril sont calculées à partir des sondés « certains d’aller voter ayant exprimé une intention de vote », soit 7 321 personnes. Les marges d’erreur pour le premier tour sont très faibles, comprises entre 0,2 et 1 point.

    Quatre points séparent désormais Emmanuel Macron (stable avec 26,5 % des intentions de vote, marge d’erreur de plus ou moins 1 point) de Marine Le Pen (qui gagne un point et atteint 22,5 %, même marge d’erreur). Jean-Luc Mélenchon, solide troisième homme de cette élection, poursuit sa dynamique. Le candidat de l’Union populaire progresse ainsi de 1,5 point en quatre jours et passe de 16 % à 17,5 %.
    Loin derrière se trouvent l’autre candidat d’extrême droite, Eric Zemmour (9 %, marge d’erreur de plus ou moins 0,7 point), la candidate des Républicains, Valérie Pécresse (8,5 %, marge d’erreur de plus ou moins 0,6 point), puis l’écologiste Yannick Jadot (5 %, marge d’erreur de plus ou moins 0,5 point).

    Tous les autres candidats recueillent moins de 5 % des intentions de vote. Il s’agit, dans l’ordre, de Fabien Roussel (3 %, marge d’erreur de plus ou moins 0,4 point), Nicolas Dupont-Aignan (2,5 %, même marge d’erreur), Anne Hidalgo et Jean Lassalle (2 %, marge d’erreur de plus ou moins 0,3 point) et enfin les trotskistes Philippe Poutou et Nathalie Arthaud (respectivement 1 et 0,5 point, marge d’erreur de plus ou moins 0,2 point).

    Ces résultats confirment plusieurs choses. Tout d’abord, Jean-Luc Mélenchon a su incarner un « vote utile » à gauche. Le député des Bouches-du-Rhône a depuis longtemps théorisé « le trou de souris » pour se qualifier au second tour. Comprendre : une addition de circonstances favorables. Et c’est le cas cette année. L’« insoumis » a fait une bonne campagne, ses adversaires de gauche sont faibles et divisés et le président sortant est entré tardivement dans la course. Surtout, la véritable aubaine pour lui a été la division de l’extrême droite qui, mécaniquement, abaisse le ticket d’entrée pour le second tour. Toute l’énergie des « insoumis » a donc été, depuis le retrait début mars de Christiane Taubira faute des parrainages nécessaires (et qui a déclaré vendredi qu’elle voterait pour M. Mélenchon), de présenter le candidat de l’Union populaire comme le seul capable de coiffer l’extrême droite au poteau et de déjouer tous les pronostics. Car l’électorat de gauche semble épuisé des querelles intestines et aspire non seulement à l’union mais aussi à peser dans le débat politique national.

    Ainsi, dans la dernière ligne droite, les militants mélenchonistes n’ont pas été avares d’efforts pour essayer de montrer que le salut de la gauche passait par l’ancien sénateur socialiste. Depuis plusieurs jours, ils répètent à l’envi que seul leur candidat était capable de faire l’unité dans les urnes autour de son programme. Cependant, pour créer une surprise de dernière minute, M. Mélenchon devra tout de même combler un retard de 5 points sur Marine Le Pen. La marche semble très haute en aussi peu de temps. Mais les « insoumis » y croient encore.

    L’abstention, donnée fondamentale

    De son côté, Marine Le Pen finit sa campagne sur une note inédite pour elle puisque lors de ses deux précédentes présidentielles, en 2012 et 2017, elle s’était essoufflée dans la dernière ligne droite. Cette fois-ci, ce n’est pas le cas. Mieux préparée qu’il y a cinq ans, la candidate du Rassemblement national a su notamment tirer profit de la radicalité d’Eric Zemmour, qui lui a permis d’apparaître, par effet de contraste, comme plus modérée que l’ancien chroniqueur du Figaro, alors même que sa ligne et le fond de ses idées, notamment sur l’immigration et l’islam, demeurent inchangés. De plus, sa campagne centrée sur le pouvoir d’achat lui a permis d’être en résonance avec la principale préoccupation des Français.

    Emmanuel Macron, quant à lui, paye une entrée tardive et laborieuse en campagne et lui-même paraît distant, porteur de mesures peu populaires (l’âge du départ à la retraite repoussé à 65 ans ou encore les contreparties exigées au revenu de solidarité active). Début mars, le déclenchement de la guerre en Ukraine avait renforcé la candidature du chef de l’Etat, ce dernier apparaissant comme garant de la stabilité, puisque déjà au pouvoir. Il avait atteint plus de 30 % des intentions de vote. En un peu plus d’un mois, cette avance a fondu. Son score reste cependant dans un étiage assez haut.

    Une autre donnée aura une importance fondamentale lors du scrutin de dimanche : l’abstention. Selon le sondage de ce soir, la participation est estimée entre 70 et 74 % (contre 77,8 % au premier tour de 2017). Il semble donc que l’on se dirige vers un niveau d’abstention qui pourrait se rapprocher du record de la présidentielle de 2002 (28,4 %). Cela pourrait potentiellement handicaper deux candidats : Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. La première parce qu’elle est forte chez les ouvriers et les employés, deux des catégories socioprofessionnelles qui votent le moins. Le second parce que beaucoup de moins de 30 ans votent pour lui et que ce sont eux les plus abstentionnistes.

    https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/08/presidentielle-2022-emmanuel-macron-stable-marine-le-pen-et-jean-luc-melench

    marrant comme un avantage (2 fafs, ça les divise) se renverse en inconvénient : MLP parait moins exaltée que Zemmerde, mais aussi plus posée que Macron ("c’est notre projet !" ). j’avais tout faux. est-ce que EZ allait faire chuter MLP ? non, il lui sert de faire valoir. une alliance de dernière minute des deux (sauver la France !) allait changer la donne ? ben, non, on verra entre les deux tours ce que fait Zob et si on nous promet un gouvernement union nationale, et lequel.

    bon, on peut voter JLM au 1er tour, par adhésion, « ah qu’il est beau notre programme », ou/et « qu’il est grand notre tribun qui rehausse la France rien que comme il cause », ou bien raisons et dégouts mêlés (on regarde pas les dents du cheval, surtout si on vise le barbeuc.
    jusqu’au 24 avril ça devrait être trouillomètre à zéro dans plus de chaumières encore, pas toutes pauvres ou étrangères par un bout ou un autre.
    à suivre puisque a priori voter Macron (ou pas !) va nous revenir dans le ciboulot et les échanges ici ou là. pour ma part, à cette heure, c’est la première fois que j’envisage de me poser une telle question. jamais l’épouvantail FN/RN n’a été en mesure de gagner au second tour. et il n’était pas de bonne politique pour la suite de contribuer à légitimer un vainqueur assuré de l’être.

    cette république, elle mérite des accidents. un scandale ! un scandale ! c’est mal parti. Mc Kinsey fait parler mais semble ne rien devoir changer. le populo sait que c’est, « copains et coquins », et que rien de neuf sous le soleil qui n’est pas pour nous, rasons les murs pour pas prendre une balle (expulsion, licenciement, coupure de minima, prison,..., ...) baissons la tête pour ne pas être vus (pas vu pas pris !). dans l’avalanche de merde, tout devient indifférent.

    je reviens à la votation. la culpabilisation de qui ne votera pas JLM (de Guillon aux disciples de notre autocrate nationaliste républicain, on nous dit que c’est voter MLP) pour faire voter des jeunes, d’autres abstentionnistes, de rares votes LO, NPA, PCF, PS. trop pénible.

    ils auraient dû en trouver d’autre des comme ça
    https://www.youtube.com/watch?v=7SYuP98Delw


    sans doute mystifié par l’idée du rap conscient, désireux de voir se dire des « soutiens » radicalement critiques qui n’existent pas, le "on aime pas la police comme Jean-Luc Mélenchon", ce « comme » sonnait par chez moi comme la revendication d’un calcul où le mot comme signifiait ni, ou, et, de même que. C’était une erreur. C’est une position.

    #abstention #pestilentielle #élections

    • "N’oublions pas que l’électorat jeune pèse infiniment moins que les 50 ans et plus" (...) « Il y a 8 millions de 18-30 ans, 4 millions de 18-24 ans, et encore cela comprend ceux qui ne sont pas inscrits, or il y a 24 millions de 50 ans et plus. » (...) "si les jeunes vont moins voter pour [EM], il lui restera les vieux, les plus mobilisés au moment d’aller voter".

      "Parce que leurs électorats sont plus âgés, plus bourgeois, plus diplômés et plus votants, Emmanuel Macron, Valérie Pécresse et Eric Zemmour ont moins à craindre de l’abstention. Contrairement à Marine Le Pen et à Jean-Luc Mélenchon, dont l’électorat, issu de milieux populaires, est plus sujet à l’abstention", explique dans Politis le professeur de science politique Jean-Yves Dormagen. "Les plus mobilisés, ce sont les modérés, des électeurs qui se reconnaissent dans les candidats du centre [?], principalement Emmanuel Macron aujourd’hui. Auxquels s’ajoutent les libéraux, plutôt élitistes et pro-système."

      https://www.tf1info.fr/politique/election-presidentielle-a-qui-pourrait-profiter-l-indice-de-participation-en

    • « Si je m’abstiens, j’intéresserai au moins les chercheurs !

      L’action oui, les urnes non : paroles d’une jeunesse engagée mais abstentionniste.

      Ils sont mobilisés dans la défense d’une cause ou au sein d’une association. Pourtant, en avril, Jessim, Marine, Arthur, Selja ou Maëlys n’iront probablement pas voter à l’élection présidentielle de 2022. Un drôle de paradoxe qui concerne de plus en plus de jeunes très critiques envers des élus qui les ont déçus et dont ils se sentent ignorés.

      Les locaux de l’association Vaulx Académia sont encore vides à l’heure du rendez-vous. Pas de panique, ce n’est que « le quart d’heure vaudais », paraît-il. Quinze minutes plus tard débarque Jessim Hamza, cheveux bien rasés sur le côté, jogging gris et sweat noir à capuche. Le jeune homme de 22 ans, habitant de Vaulx-en-Velin, en périphérie de Lyon, a lancé l’association Vaulx Académia en mars 2021. La structure, qui compte une quinzaine de bénévoles, se veut « une école de la ­deuxième chance » pour accompagner des mineurs en difficulté. L’idée est de les aider à trouver un stage en entreprise, à s’inscrire à Pôle emploi, à ne pas sombrer…

      Ce matin de janvier, le fondateur est vite rejoint par quelques volontaires. Maroua Absati, 19 ans, étudie en deuxième année de droit à Lyon, Adem Chaïeb, 22 ans, apprend la finance à l’école de commerce EMLyon, et Amine Boughanmi, 23 ans, est un professionnel d’e-sport qui représente cette saison l’AS Monaco Esports en Ligue 1. « A Vaulx-en-Velin, les jeunes sont trop souvent mis à l’écart, explique le joueur.J’ai été dans ce cas de figure aussi : délaissé, nul à l’école, que j’ai quittée à 16 ans, pour faire des bêtises. Je ne veux pas que d’autres jeunes répètent ces erreurs. »

      Après avoir été animateur périscolaire pendant trois ans, Jessim Hamza, aujourd’hui au chômage, consacre tout son temps à l’association. Il tient à « aider les jeunes à se revaloriser ». Dans la salle, le groupe se met à parler politique, et soudain le volume sonore grimpe. Philippe Poutou, Eric Zemmour, Emmanuel Macron, le système électoral, le temps de travail… Sur nombre de sujets, les quatre membres de Vaulx Académia ont des avis très tranchés. Mais pas question pour autant de les exprimer dans les urnes.

      A l’image de Vaulx-en-Velin, ville qui bat les records d’abstention en France (88,3 % aux régionales de 2021 contre 65,7 % sur le plan national), trois d’entre eux ont déjà décidé de ne pas voter à la présidentielle en avril.

      Jessim Hamza avoue n’avoir jamais mis un bulletin dans l’urne de sa vie. Dans sa famille, « les adultes votent, on parle politique de temps en temps, mais ce n’est pas un sujet de tous les jours ». Est-il inscrit sur les listes électorales ? « Tiens, bonne question », réagit-il. Il ne s’en est jamais soucié. « S’il y avait un classement des actes citoyens les plus importants dans l’existence, lance-t-il, je mettrais le vote en dernière position. »

      Une génération très mobilisée

      Engagés pour une cause ou dans une association, mais abstentionnistes… Un drôle de paradoxe, qui concerne de plus en plus de jeunes. Lors des élections départementales et régionales de juin 2021, 87 % des Français de 18 à 24 ans ne sont pas allés voter au premier tour. Au second tour de la présidentielle de 2017, ils étaient 31 % à s’abstenir (contre 25 % tous âges confondus). Un chiffre record qui, dans cette campagne pour l’instant peu mobilisatrice, pourrait de nouveau être battu les 10 et 24 avril prochains.

      Une étude de l’Institut Montaigne (« Une jeunesse plurielle, enquête auprès des 18-24 ans », Olivier Galland et Marc Lazar), publiée le 3 février, a eu un fort retentissement médiatique : réalisée auprès de 8 000 jeunes, elle pointe une « impressionnante désaffiliation politique », illustrée, entre autres phénomènes, par le fait que 43 % des 18-24 ans ne se positionnent pas sur l’échelle gauche-droite. Une désaffiliation bien plus marquée que dans les générations de leurs parents et des baby-boomeurs au sein desquelles, respectivement, 25 % et 20 % des personnes ne se positionnent pas.

      « Tous les élus, ici, n’en ont rien à faire de cette ville. Ils sont là pour se faire bien voir et gratter une place dans un ministère, là-haut, à Paris, dès qu’ils le peuvent. » Jessim Hamza

      Pourtant, de nombreux jeunes, comme Jessim Hamza et ses amis, se passionnent pour la politique au sens premier du terme, la vie de la cité. Une étude de la Fondation Jean Jaurès (« Les Français et l’engagement », publiée en juillet 2021 et réalisée par Internet sur un échantillon de 3 000 Français) contredit ainsi le cliché souvent brandi d’une jeunesse dépolitisée. Parmi la population, ce sont les 18-24 ans qui se considèrent comme les plus fortement engagés (selon une définition large, qui va de la pétition au don à une association), à 72 %, contre 55 % chez les 65 ans et plus.

      La nouvelle génération est de toutes les mobilisations collectives : urgence climatique, racisme, migrants, LGBTQ +, féminisme, violences sexuelles, cause animale… Plus diplômés que leurs parents et grands-parents, ces jeunes se disent exigeants sur les programmes proposés et intransigeants sur les causes qu’ils défendent. Mais, surtout, ils ne croient plus que l’acte de voter puisse être utile. Après tout, pourquoi se déplacer un dimanche pour mettre une enveloppe dans une boîte quand une pétition, une manifestation, une maraude ou même un post sur les réseaux sociaux sont jugés plus efficaces ?

      Un monde politique jugé déconnecté

      « Malhonnêteté », « magouilles », « manque de transparence »… Voilà les termes que les bénévoles de l’association Vaulx Académia emploient pour parler du monde politique.

      Jessim Hamza garde un souvenir amer de la visite du premier ministre, Jean Castex, à Vaulx-en-Velin, le 12 novembre 2021. Non informés de sa venue, lui et quelques bénévoles de l’association ont tourné en voiture dans la ville pour tenter de le rencontrer. « On ne pouvait pas l’approcher, regrette le jeune homme. Apparemment, il était venu pour parler aux Vaudais. Je ne sais pas à qui il a parlé, pas à nous en tout cas. Si on nous prend pour des cons, on coupe le contact, c’est normal. »

      Sa fréquentation des élus locaux ne l’a pas davantage incité à voter. Le jeune Vaudais assure être ressorti plusieurs fois déçu de discussions avec eux. « On essaye de faire bouger les choses, mais on ne nous calcule pas plus, se plaint-il.Je peux citer plein de jeunes qui ont fait des demandes de subventions pour des projets, on ne leur a même pas répondu. Ou alors on leur a dit “oui”, mais ils n’ont jamais vu l’argent. »

      Une défiance sans limites. « Tous les élus, ici, n’en ont rien à faire de cette ville. Ils sont là pour se faire bien voir et gratter une place dans un ministère, là-haut, à Paris, dès qu’ils le peuvent. » A ses yeux, le simple terme « politique a perdu toute valeur : « C’est devenu un gros mot. » Et pourtant, Jessim Hamza le reconnaît, « beaucoup de jeunes engagés vont se dire apolitiques, alors que ce qu’ils font est évidemment politique. »

      Cette déconnexion entre engagement et politisation n’étonne pas Marc Lazar, ­professeur d’histoire et de sociologie politique à Sciences Po, elle est même un syndrome de l’époque. « Des jeunes peuvent être mobilisés pour une cause, sans pour autant se tourner vers un parti qui l’incarne ou voter pour lui », explique le coauteur de l’étude de l’Institut Montaigne. Le cas d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) est, selon lui, symptomatique de cette situation : alors que les jeunes sont 62 % à dire que l’écologie est un sujet très important, ils ne sont que 11 % à se sentir proche d’EELV (parti qui arrive toutefois en tête de leurs réponses).

      « Aujourd’hui, l’association n’est plus la salle d’attente pour entrer en politique, remarque le chercheur. Les jeunes qui sont impliqués dans une cause ne se reconnaissent pas dans les politiques, qu’ils jugent, à 69 %, corrompus. Ils ne peuvent donc pas franchir le pas de se dire qu’ils font de la politique ni se positionner face aux partis. » Ces jeunes à la fois investis dans une cause et éloignés du vote, « sans être majoritaires, représentent une part notable de leur génération », observe-t-il.

      Grands discours et mesurettes sur l’environnement

      Sirotant sa limonade dans un café parisien au pied du Grand Rex, Selja Lamouri a beau avoir participé à la convention citoyenne pour le climat, elle s’avoue, elle aussi, peu à l’aise pour parler de politique. « Je me dois d’être honnête et de vous dire que je n’ai que très peu de connaissances sur le sujet et donc très peu de choses à dire », nous a prévenu par SMS la jeune femme de 18 ans à l’allure un peu rebelle, mèches blondes sur cheveux bruns, veste et mitaines en cuir noir, multiples boucles d’oreilles et piercing au nez.

      Pourtant, l’­étudiante en première année de licence de langue et culture anglaise s’implique fortement dans la lutte contre le changement climatique. Son combat est né en Islande, pays dont sa mère, directrice d’une école d’hôtellerie, est originaire et où elle se rend souvent. Selja Lamouri a pu y constater le dérèglement climatique et les conséquences du tourisme de masse, qui a transformé « des ­paysages sauvages en terrains de construction ».

      En passant son année de 3e à La Réunion, où elle a vécu chez son oncle et sa tante, elle s’est aussi intéressée à la cause animale. Le déclic s’est produit quand on lui a proposé du kangourou à la cantine. De retour dans sa ville natale de Champigny-sur-Marne, dans le Val-de-Marne, la jeune femme s’est peu à peu renseignée sur les questions climatiques et a décidé de devenir végétarienne. Le 15 mars 2019, elle a participé à sa première manifestation des jeunes pour le climat à Paris, fière de brandir sa pancarte « Arrête de niquer ta mer ».

      Selja Lamouri a ensuite fait partie des 150 personnes tirées au sort pour définir des mesures visant à réduire drastiquement les gaz à effet de serre. A l’époque, elle se réunissait avec les autres membres trois jours par mois à Paris. « On avait un groupe WhatsApp et les messages s’enchaînaient. C’était une implication de tous les jours », se souvient-elle.

      A la convention, elle croise des scientifiques, des patrons, l’ex-ministre de la transition écologique Nicolas Hulot, l’actrice Marion Cotillard et, bien sûr, le président Emmanuel Macron. Mais Selja Lamouri confie que le résultat l’a déçue et n’a fait qu’augmenter sa méfiance à l’égard du corps politique. « Le gouvernement a fait des grands discours autour de cette convention, on a beaucoup travaillé et la réponse apportée n’a pas été à la hauteur. Ça va avec la politique ­d’aujourd’hui : on nous promet des choses, mais, à la fin, il n’y a même pas la moitié de ces promesses qui sont tenues. »

      Elle se dit sceptique face aux propositions écologiques des candidats à la présidentielle : « J’ai vu que Marine Le Pen s’intéressait à la protection animale. Même Eric Zemmour veut privilégier les circuits courts. Forcément, ça touche les gens sensibles à ces thèmes, mais est-ce que, derrière, ce n’est pas que de la manipulation ? »

      L’étudiante n’est pas sûre de voter en avril, elle ne sait pas si elle est prête pour « ce truc de parents ». « Je n’ai jamais vraiment parlé de politique au collège ou au lycée par exemple_, remarque-t-elle. Je me dis que c’est compliqué et que j’ai besoin de connaître tous les programmes et le passé des candidats pour pouvoir voter. Je préfère m’abstenir plutôt que de glisser le nom de quelqu’un, juste parce que je l’ai trouvé drôle sur les plateaux de télé. » Elle ne garde pas un grand souvenir de ses cours d’éducation civique, souvent bâclés, quand ils n’étaient pas tout simplement zappés pour que le professeur ait le temps de finir le programme d’histoire-géographie.

      La lassitude du barrage contre les extrêmes

      « Notre système éducatif n’apprend pas aux jeunes à être des citoyens, regrette Vincent Tiberj, professeur des universités à Sciences Po Bordeaux et coauteur du livre Extinction de vote ? (PUF). L’éducation morale et civique reste l’éducation de l’obéissance. On dit aux élèves : “Voilà les institutions, voilà la devise de la République et il faut y adhérer.” » De même, la vie démocratique au lycée pourrait être amé­liorée, selon le sociologue. « Les lycéens ont le droit d’élire des représentants, qui sont peut-être écoutés, mais cela ne va jamais beaucoup plus loin. A la limite, on leur laisse choisir s’ils veulent un baby-foot ou une table de ping-pong dans leur foyer. En revanche, les vrais sujets comme les inégalités, le harcèlement scolaire, les relations filles-garçons sont rarement discutés. »

      Marine Vengeon, étudiante à l’université Côte-d’Azur, raconte pourtant s’être engagée dès le lycée, grâce à un projet humanitaire au Sénégal. Depuis, cette Niçoise de 23 ans, militante féministe et antiraciste, organise des manifestations au sein de son collectif, Uni.e.s Nice, monté avec une amie après la marche Black Lives Matter à Nice, en juin 2020. Ses combats vont des mobilisations contre la proposition de loi de sécurité globale (promulguée en mai 2021) – des mesures sécuritaires jugées liberticides par ses opposants – à des marches de soutien aux soignants, en passant par des défilés à la mémoire de Maïcol Goncalves-Furtado, tué, à 20 ans, lors d’une course-poursuite avec la police à Nice, le 10 janvier 2021.

      Quand la militante ne manifeste pas, elle tracte, discute, débat dans les médias locaux, rédige des communiqués de presse. Elle participe aussi à des collages féministes. Sur ses réseaux sociaux, elle partage certaines informations, fait le point sur les mobilisations à venir et joue les vulgarisatrices. « J’ai la chance d’être en master 2 de sciences politiques et de maîtriser un certain vocabulaire technique, explique-t-elle. Rendre accessible à toutes et tous certains points d’un projet de loi contesté fait aussi partie de mon militantisme. »

      Mais Marine Vengeon ne vote pas à chaque élection, lassée par les éternels duels avec le Rassemblement national (RN) : « A chaque fois, on fait comme nos parents, on vote pour faire barrage aux idées d’extrême droite. Et ça sert à quoi ? A se retrouver avec Le Pen et Zemmour en 2022 ? » Elle dit préférer s’investir dans les actions militantes. « J’ai une marge de manœuvre plus grande, l’impression de changer les choses à mon échelle. Et même au-delà, parfois, on l’a vu avec les mobilisations transnationales autour du climat ou de Black Lives Matter. Autour de moi, le vote n’est plus érigé comme participation politique par excellence. Comme s’il avait fait son temps. » Selon l’étude de l’Institut Montaigne, seulement 51 % des jeunes ont un attachement très important à la démocratie, contre 59 % des parents et 71 % des baby-boomeurs.

      Points de désaccords

      Jugé peu utile, le vote en devient presque ringard. Ami de Marine Vengeon, Arthur Hamant, étudiant, 22 ans, ne jurait que par la présidentielle il y a cinq ans. Cet habitant de Périgny-sur-Yerres, dans le Val-de-Marne, vient d’une famille dont les parents – un père professeur de sport et une mère professeure d’histoire – ont célébré en 2012 le retour des socialistes au pouvoir, avec l’élection de François Hollande. Mais, politiquement, « ils ont eu l’habitude d’être déçus tout au long de leur vie », assure-t-il.

      Son livre de ­chevet en 2017 : L’Avenir en commun (Seuil), le programme de Jean-Luc Mélenchon. Mais Arthur Hamant n’a pas pu voter, il a eu 18 ans juste après la présidentielle. « C’était une grosse frustration, se remémore-t-il. J’ai voté aux législatives. Ma circonscription était clairement à droite, mon bulletin ne servait pas à grand-chose, mais j’avais envie de m’exprimer. » Cinq ans plus tard, attablé à un café du 12e arrondissement parisien où il a l’habitude de refaire le monde avec ses amis autour d’une pinte de bière, le jeune homme tient un discours bien différent.

      Cheveux mi-longs, enchaînant les cigarettes roulées, l’étudiant en communication politique et publique à l’université Paris-Est Créteil a perdu sa motivation : « Je peux faire les deux, voter ou m’abstenir. » Son envie de se déplacer les dimanches électoraux a diminué au fil du temps. « Déjà parce que celui que je choisissais n’était jamais élu, plaisante le jeune homme, déçu par la gauche. Et puis, je suis rarement 100 % d’accord avec un candidat. Il y a toujours un point qui me fait tiquer et sur lequel je ne suis pas prêt à faire des concessions. Je suis plus souvent en accord total avec les mouvements militants. Je vais à beaucoup de manifs et j’ai alors l’impression de faire partie de quelque chose. »

      Engagé à l’Association de la fondation étudiante pour la ville, puis aux Restos du cœur, Arthur Hamant est en stage à Nightline, un service d’écoute consacré aux étudiants et géré par des étudiants. « Cela peut aller du jeune qui vient de se faire larguer par sa copine à un autre qui a des pensées suicidaires », détaille-t-il, critiquant au passage un quinquennat « dont les jeunes sont les grands oubliés », depuis le début de la pandémie. Le ­militant a voulu un stage « qui ait un minimum de sens », cohérent avec la « société à laquelle [il] aspire ». Un besoin de concret, qu’il ne retrouve plus dans le vote.

      Arthur Hamant rejette le cliché des jeunes dépolitisés, désintéressés, désenchantés. L’affaire est plus compliquée. Pour preuve, ­malgré son abstention régulière, son amie Marine s’est présentée sur une liste citoyenne aux dernières élections départementales, en juin 2021.

      « On entend souvent que le premier parti chez les jeunes est l’abstention, je ne suis pas d’accord, assène celle-ci. Les jeunes refusent la participation politique par le biais du vote, car les institutions ne leur plaisent pas. » Pour autant, l’étudiante n’a pas de solution miracle. Mais tous les deux, Marine Vingeon et son ami Arthur Hamant, défendent une­ « #abstention_militante ».

      Une abstention politique

      L’abstention serait-elle pour cette jeunesse engagée la seule façon d’exprimer son ras-le-bol ? A Dun­kerque (Nord), Maëlys Cossart, diplômée d’une école de commerce en recherche d’emploi, 25 ans, se pose beaucoup la question ces derniers temps. Il y a trois ans, elle a décidé de s’engager pour venir en aide aux réfugiés de Grande-Synthe. « Je passe devant les camps depuis que je suis toute petite, alors forcément cette cause me touche particulièrement », souligne-t-elle. Au sein de son association Solidarity Border, elle organise des maraudes chaque soir de la semaine et une permanence de douches le dimanche.

      Ces derniers jours, la campagne présidentielle est venue à elle. Le 19 janvier, Eric Zemmour était en déplacement à quelques kilomètres de là, sur le site de l’ancienne « jungle » de Calais (Pas-de-Calais), où il a parlé d’« une immigration folle ». La jeune militante préfère ne pas commenter cette actualité et prévoit déjà de bouder l’isoloir. « Je ne veux pas me sentir responsable de ce qui va arriver, tout simplement parce que je ne sens rien de bon, quel que soit le résultat de cette présidentielle, indique-t-elle. Je préfère m’abstenir pour montrer mon mécontentement. C’est le seul moyen de me faire entendre. »

      Plutôt que le vote blanc, qui en France n’est pas pris en compte – ce que tous les jeunes rencontrés regrettent –, la Dunkerquoise espère que l’abstention fera, au moins quelques jours, la « une » des médias. « En lisant qu’il risque d’y avoir un record d’abstention à cette présidentielle, cela m’encourage encore plus sur cette voie », explique-t-elle.

      Pour autant, la jeune femme n’est pas convaincue qu’il s’agisse de la solution parfaite. Une forte abstention invalidera-t-elle les résultats de la prochaine élection ? Elle sait que non. « Le problème est que nous, abstentionnistes réfléchis, sommes confondus avec les abstentionnistes qui ne s’intéressent pas du tout à la politique », déplore Arthur Hamant. Marine Vengeon sourit : « Si je m’abstiens, j’intéresserai au moins les chercheurs ! »

      https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/02/11/l-action-oui-les-urnes-non-paroles-d-une-jeunesse-engagee-mais-abstentionnis

    • Neuilly et ses amis. La grande bourgeoisie, ça l’emmerde depuis le début du FN ce parti de petits com et de contremaitres qui a réussi, grâce aux gouvernements successifs, à capter un vote de classe ("protestataire", disent les journalistes).
      La « droite tradi » du CAC 40 leur a offert Z. Pas certain qu’ils soient nombreux à prendre au deuxième tour le risque de déstabiliser leurs affaires et positions avec MLP, vote ici non pas protestataire mais disciplinaire : ce que l’on commande déjà on le commandera mieux, continuer à faire fond sur le racisme. Tant que ce n’est pas trop risqué, peu importe qui s’en charge. Macron le fera très bien.

      Prolétariat. On ne nait pas raciste, on le devient, déterminations matérielles et subjectives mêlèes. La préférence nationale est déjà là, dans le RMI(PS)/RSA, pour ne prendre que seul exemple. La rareté organisée conduit à défendre des miettes (de revenu emploi logement) qu’on espère voir croître en augmentant le tri xénophobe.

    • au moins 75% des inscrits n’auront pas voté pour le prochain président (ou MLP) au premier tour tour.

      au 1er tour en 2017, les 8 656 346 voix de Macron, c’était 18% des #inscrits (et non 11, comme j’ai du l’écrire ailleurs ici)
      https://www.interieur.gouv.fr/Elections/Les-resultats/Presidentielles/elecresult__presidentielle-2017/(path)/presidentielle-2017/FE.html

      or les pourcentages généralement cités se réfèrent aux suffrage exprimés (belle gonflette pour la Vème assurée)

    • Emmanuel Macron donné gagnant au second tour avec 55 % des voix
      https://www.lesechos.fr/elections/sondages/sondage-exclusif-emmanuel-macron-donne-gagnant-au-second-tour-avec-55-de-vo

      Selon le baromètre quotidien OpinionWay-Kéa Partners pour « Les Echos » publié ce lundi, le président sortant l’emporterait avec 55 % des voix face à la candidate du RN (45 %) au second tour. Concernant la participation, 71 % des électeurs seraient décidés à se rendre aux urnes.

      Sauf évènement, le débat télé de candidats mercredi 20 avril est supposé décisif. Il y a aura des sondages publics jusqu’au 22 avril.

  • « Si Macron ne fait pas d’urgence un geste social fort, alors son arrogance peut lui faire perdre un second tour contre Le Pen », Thomas Piketty

    Pour que la gauche retrouve le pouvoir à l’issue de l’élection présidentielle, il lui faudra réconcilier les classes populaires de différentes origines, aujourd’hui profondément divisées, observe l’économiste dans sa chronique.

    Chronique. Lors du premier tour de la présidentielle de 2017, quatre candidats avaient réalisé entre 20 % et 24 % des voix : autant dire que de nombreux seconds tours étaient possibles et auraient pu se produire, au sein d’un paysage politique et idéologique profondément morcelé. Jusqu’au dernier moment, les électeurs de 2022 ont, eux aussi, à faire face à des incertitudes considérables, et en particulier à un choix entre un second tour entre l’extrême droite et la droite (Le Pen contre Macron, que la grande majorité des électeurs placent désormais et assez logiquement à droite) ou entre la droite et la gauche (Macron contre Mélenchon). Ce choix est tout sauf anodin, et il emporte avec lui des conséquences considérables sur le type de délibération publique qui occupera le pays pendant deux semaines (et peut-être davantage) : un débat centré sur la chasse aux immigrés et aux musulmans dans le premier cas, ou bien l’espoir d’une discussion portant sur les salaires et les conditions de travail, la santé et l’éducation, la justice sociale et fiscale, les énergies renouvelables et les services publics dans le second.

    Pour autant, quelle que soit l’issue de l’élection, on peut déjà être sûr d’une chose : nous n’assisterons pas au paisible retour d’un rassurant clivage gauche-droite. D’abord parce que la droitisation générale du paysage politique et l’émergence d’un puissant bloc électoral antimigrants correspondent à une tendance lourde, que le macronisme au pouvoir a dangereusement accentuée. Ensuite, car il faudra un long travail pour que les forces de gauche parviennent à s’unir et à accéder au pouvoir.

    Tropisme fondamental

    Commençons par le premier point. Les choses sont maintenant écrites. En s’appropriant le programme économique de la droite, le centrisme macronien a aussi contribué à droitiser le pays, en poussant la droite républicaine à une course-poursuite sans issue avec l’extrême droite sur les questions identitaires. Le plus dangereux est l’arrogance du président candidat, qui prétend être réélu sans débat ni programme, ou bien avec des mesures bâclées trahissant son tropisme fondamental : gouverner d’abord et toujours pour les premiers de cordée, en misant sur les divisions de ses adversaires.

    La palme du cynisme a été atteinte avec la question des retraites. Rappelons que, pour avoir droit à une retraite à plein taux, il faut remplir deux conditions : atteindre l’âge légal minimum (actuellement 62 ans) et valider la durée requise de cotisations, qui augmente régulièrement et atteindra bientôt quarante-trois annuités (à partir de la génération 1973). Autrement dit, pour tous ceux qui font des études supérieures et commencent à travailler à 22 ans ou au-delà, le fait de porter l’âge légal à 65 ans n’aura strictement aucun effet : dans la législation actuelle, ils devront déjà attendre 65 ans ou au-delà pour avoir une retraite pleine.

    En revanche, pour ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans, il faudra désormais attendre 65 ans, soit 47 années de cotisations, alors même que leur espérance de vie est plus faible que celle des premiers. Proposer une telle réforme, tout en prétendant que les carrières longues seront épargnées, alors même que ce sont par définition les seules qui seront touchées, constitue un grossier mensonge. En se comportant de la sorte, Macron permet à Le Pen de se présenter à peu de frais comme défenseuse des classes populaires et de ceux qui travaillent dur.

    Même chose quand Le Pen propose de réintroduire (à dose homéopathique) l’impôt sur la fortune financière. La mesure est largement hypocrite, puisqu’elle prévoit dans le même temps d’exonérer entièrement les résidences principales : les multimillionnaires possédant un château à Saint-Cloud auront droit à une forte baisse de leur impôt sur la fortune immobilière, alors que les Français ordinaires subissent des hausses de taxe foncière. Mais tant que Macron se refusera à réimposer les hauts patrimoines financiers, cela permet là aussi à Le Pen de se présenter à bas coût comme candidate populaire.

    Mea culpa sincère

    Ce cocktail politique détonnant, à base de violents discours antimigrants et de mesures sociales pour les classes populaires blanches, a déjà fonctionné avec succès en Pologne et en Hongrie. Plus loin de nous, c’est aussi ce qui a permis aux démocrates de retrouver le pouvoir après la guerre civile aux Etats-Unis, avec une plate-forme ségrégationniste vis-à-vis des Noirs, mais plus sociale que les républicains vis-à-vis des Blancs (y compris face aux migrants irlandais et italiens). Le risque aujourd’hui est qu’une telle posture sociale-différentialiste (ou sociale-raciste) l’emporte en France. Concrètement, si Macron ne fait pas d’urgence un geste social fort, sur les retraites et la justice fiscale, alors son arrogance peut lui faire perdre un second tour contre Le Pen.

    Venons-en au second point. Pour que la gauche retrouve le pouvoir, il lui faudra réconcilier les classes populaires de différentes origines, aujourd’hui profondément divisées, et donc ramener vers elles ceux qui ne croient plus aux promesses sociales et économiques et qui s’en remettent à des mesures antimigrants pour changer leur sort. Cela passera par un programme ambitieux de redistribution des richesses et un mea culpa enfin sincère sur les errements au pouvoir. Cela prendra du temps, car la rupture avec les classes populaires vient de loin. Les différents partis (« insoumis », socialistes, écologistes, communistes, etc.) devront dépasser leurs rancœurs et se retrouver dans une nouvelle fédération populaire, démocratique et internationaliste. On ne peut pas critiquer le présidentialisme tout en refusant la démocratie interne quand il s’agit de choisir son candidat. On ne peut pas prôner l’internationalisme tout en limitant sa défense de la démocratie aux frontières nationales. Raison de plus pour s’y atteler dès maintenant.
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/08/thomas-piketty-si-macron-ne-fait-pas-d-urgence-un-geste-social-fort-alors-so

    méthode : faire précéder in extremis une tribune à venir par des articles qui confèrent une consistance au pluralisme équilibré dont la démocratie et ses organes se parent. on pourra exhiber tel ou tel sommet de l’iceberg (ben non, tout se décide pas chez Mc Kinsey) :

    Election présidentielle 2022 : comment le lobby des grandes entreprises a influencé les programmes des candidats
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/04/07/presidentielle-2022-comment-le-lobby-des-grandes-entreprises-a-influence-les

    Baisse des impôts de production, refonte des lycées professionnels, pouvoir d’achat… Les promesses des prétendants à l’Elysée ont pour certaines été fortement colorées par les organisations patronales.

    Les patrons s’en félicitent : on a peu parlé des entreprises dans cette campagne. Même les superprofits de Total, cible idéale dans un contexte de flambée des prix du pétrole, ont suscité assez peu de réactions chez les responsables politiques. Geoffroy Roux de Bézieux, le président du #Medef, l’admet lui-même : « On est moins attaqués qu’en 2017, l’entreprise est moins attaquée. Ce n’est pas elle qui a servi de ligne de partage des eaux. » Les batailles idéologiques ont été moins clivantes que lors des deux derniers scrutins, juge-t-il, citant la taxe à 75 % sur les très hauts revenus de François Hollande en 2012 ou les 500 000 suppressions de postes de fonctionnaire de François Fillon en 2017. Une « voie médiane » se serait dégagée.

    Pour autant, les #entreprises ont, comme à chaque élection, veillé à défendre au plus près leurs intérêts ces derniers mois. Le Medef et la Confédération des petites et moyennes entreprises, mais aussi les très grandes entreprises, réunies dans l’Association française des entreprises privées (#AFEP), organisation plus discrète et moins connue du grand public, mais très influente dans la sphère publique : tous ont joué un rôle dans la fabrication et l’évolution des programmes des candidats en matière économique.

    C’est à l’issue d’un effort de lobbying important que les entreprises ont ainsi obtenu la promesse d’une nouvelle baisse des impôts de production. Cet ensemble de taxes et cotisations représente plusieurs dizaines de milliards d’euros, et les différents impôts qui le composent, plus élevés en France qu’ailleurs en Europe, sont décrits comme pénalisants pour l’industrie, parce qu’ils pèsent sur le chiffre d’affaires, le foncier ou la valeur ajoutée. Un argument très puissant dans le contexte post-Covid, qui a remis les questions de souveraineté industrielle au cœur du débat, même si la nocivité de ces impôts pour l’industrie est débattue entre économistes. L’exécutif actuel a déjà commencé à les réduire de 10 milliards d’euros par an à l’occasion du plan de relance de l’automne 2020.

    Relais au Parlement

    Il y a cinq ans pourtant, aucun candidat n’en parlait, à l’exception de François Fillon, qui l’évoquait de façon un peu vague. La priorité était à la réduction de l’impôt sur les sociétés, censée répondre à un objectif de compétitivité – le taux a depuis été ramené de 33 % à 25 %. Cette année, à droite et à l’extrême droite, tous ont repris l’idée de la baisse des impôts de production, dans des configurations variées.

    C’est aussi le cas d’Emmanuel Macron, alors que son programme en 2017 n’en faisait pas mention, qui propose en 2022 de supprimer la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), l’un des impôts les plus décriés par les entreprises et qui rapporte 7 milliards d’euros par an. « C’est curieux d’avoir retenu la CVAE, car elle ne cible pas plus spécifiquement l’industrie que d’autres impôts sur la production, commente l’économiste Clément Malgouyres. C’est un impôt qui a été peu évalué, mais qui, a priori, a peu d’incidence sur le comportement des entreprises ». Ses travaux pour l’Institut des politiques publiques montrent que tous les secteurs paient la CVAE, y compris les services, les banques et les assurances, et que les petites entreprises en sont pour l’essentiel exonérées puisqu’elle n’est due qu’à partir de 500 000 euros de chiffres d’affaires et que son taux est progressif.

    Si les organisations patronales crient victoire, elles n’avaient pas toutes les mêmes objectifs en début de campagne. Seule l’AFEP avait ciblé explicitement la CVAE, dont elle espère la suppression dès le budget 2023. L’organisation, qui fuit la lumière, est connue pour sa capacité à faire avancer son agenda grâce à des relais au Parlement et dans les administrations, et à sa capacité à formuler des demandes qui tiennent compte des contraintes de l’Etat, notamment budgétaires. Certaines de ses propositions, comme les baisses de charges sur les salaires des cadres, ont séduit le ministre de l’économie, Bruno Le Maire. Mais, sentant l’Elysée peu allant, l’organisation lui a préféré la voie plus consensuelle des baisses d’impôts. Les charges sociales attendront.

    Mesure amendée

    L’AFEP, comme les autres, militait aussi pour une refonte des lycées professionnels, qui a été retenue par Emmanuel Macron, candidat à sa réélection. Avant la campagne, elle avait en outre plaidé pour un relèvement du plafond des donations défiscalisées de 100 000 à 150 000 euros par enfant et par parent – un seuil poussé par les chefs d’entreprise à titre personnel. L’idée, d’abord écartée par l’exécutif, a finalement été portée par le candidat, qui en a fait une mesure « classes moyennes ». Le rôle du lobby patronal dans la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) – un sujet très important pour ses adhérents, dont près de la moitié sont des entreprises familiales – avait aussi été souligné au début du quinquennat.

    Selon plusieurs sources, c’est enfin l’AFEP, avec le Medef, qui est à l’origine de la correction apportée à l’une des mesures-phares du projet de Valérie Pécresse : la promesse d’une augmentation de 10 % des salaires inférieurs à 2,2 smic. Une proposition qui supposait de contraindre les entreprises à des augmentations. Après intervention des organisations patronales, la mesure a été amendée et, dans sa dernière version, était financée intégralement par des fonds publics.
    Les grandes entreprises n’ont toutefois pas gagné sur toute la ligne. Le « dividende salarié » promu par Emmanuel Macron inquiète ces dernières. Même si elles ont toutes des dispositifs d’intéressement et de participation, elles en redoutent l’idée sous-jacente, visant à conditionner la rémunération du #capital à un effort financier spécifique en direction des salariés. Le message a été passé avant l’annonce du programme. En vain, pour l’instant.

    #pestilentielle #droits_sociaux #fiscalité #retraites #salaire #entreprise_France #économie #État

    • Conseils d’intellectuels de gauche et d’humanistes prodigués dans le journal de l’extrême-centre, suite : « Il incombe à Emmanuel Macron de faire refluer l’abstention qui menace de faire passer Marine Le Pen »

      Une quinzaine d’intellectuels de gauche parmi lesquels la directrice de la revue « Esprit » Anne-Lorraine Bujon et l’historien Benjamin Stora, affirment, dans une tribune au « Monde », qu’ils voteront pour Emmanuel Macron au second tour, mais l’appellent à revoir son programme pour éviter « la catastrophe ».

      Tribune. Le Rassemblement national est aux portes du pouvoir. Dimanche 24 avril, Marine Le Pen peut gagner l’élection présidentielle. On peut aussi craindre que le second tour soit marqué par un fort taux d’abstention. Bien entendu, on peut comprendre les motivations de celles et ceux que cet affrontement ne passionne pas, et qui voudraient se retirer du jeu. Mais, qu’ils ou elles le veuillent ou non, ils ou elles en sont partie prenante, et l’abstention viendra mécaniquement renforcer le score du mieux placé des deux candidats. C’est pourquoi si, comme le dit justement Jean-Luc Mélenchon, « pas une voix ne doit aller à Marine Le Pen », cela ne suffit néanmoins pas. C’est pourquoi nous voterons Emmanuel Macron au deuxième tour de l’élection présidentielle.

      Mais c’est à ce dernier qu’il incombe au premier chef de faire refluer l’abstention qui menace de faire passer Marine Le Pen : en 2002, Jacques Chirac a fait mine de ne pas voir que son immense succès du second tour ne valait pas soutien à sa personne et à son programme, mais signifiait le rejet de son adversaire. Même chose avec Emmanuel Macron en 2017, qui a cru pouvoir confondre légitimité institutionnelle du président élu et soutien à son programme. Il ne peut en être de même en 2022, sauf à courir à la catastrophe.

      S’adresser à tous

      Dans tous les pays démocratiques, c’est à une large coalition des démocrates que l’on assisterait, comme on l’a vu plusieurs fois en Allemagne notamment. La logique institutionnelle française n’étant pas la même, une telle coalition n’est pas possible. Mais il faut que le candidat s’adresse à toutes et tous, alors que les gauches toutes confondues font 30 % des votants.

      En revanche, s’enferrer dans la défense de « son » projet, comme c’est le cas d’Emmanuel Macron et de ses représentants, c’est être aveugle à la nécessité de rassembler bien au-delà de son camp, pour la défense des valeurs de la démocratie et de l’Etat de droit. Pourtant, c’est la seule base sur laquelle peuvent se rassembler toutes celles et tous ceux qui refusent la perspective néfaste d’une victoire du Rassemblement national.

      Cela veut dire mettre l’accent sur la démocratisation de nos institutions, la reconnaissance du Parlement (ce qui signifie en finir avec l’absurde calendrier électoral actuel qui place les législatives dans la foulée de l’élection présidentielle, et revenir d’une manière ou d’une autre à des législatives à mi-mandat), faire confiance aux diverses collectivités territoriales, et faire vivre la démocratie sociale, en s’appuyant sur des partenaires sociaux, et/ou en inventant des formes nouvelles de consultation, comme aurait pu l’être la convention citoyenne pour le climat, si elle avait été suivie d’effets.

      Sur les retraites, dégager un consensus

      Consolider l’avenir des retraites – même si, selon le diagnostic du Conseil d’orientation des retraites, il n’y a pas péril imminent – exige de mettre les propositions des uns et des autres sur la table et de dégager un consensus, sans verrouiller le débat d’emblée par une proposition non discutable sur l’âge de départ.

      Même chose pour la question de l’insertion : on ne peut faire porter la responsabilité de l’insertion sur les seuls allocataires du RSA [revenu de solidarité active, croit devoir expliquer Le Monde]. Enfin, sur le chantier écologique et de lutte contre le réchauffement, les propositions de la convention citoyenne sur le climat, en 2020, sont la bonne référence, actualisée en fonction de la nécessité de se passer en Europe de l’apport du gaz et du pétrole russes.
      Rajoutons que la fin de toute subordination du parquet à l’exécutif et une gestion enfin apaisée de l’ordre public sont signes indispensables ; tout comme une France ouverte et apaisée, inclusive avec nos concitoyens musulmans, et ouverte à l’accueil des réfugiés, d’où qu’ils viennent.

      Ce ne sont là que quelques pistes : dans une telle situation, la consultation démocratique n’est pas une option mais la condition même de la réussite de réformes qui ne soient pas des armes de guerre des uns contre les autres. Au contraire, s’en passer serait confondre la nécessité de l’action avec une précipitation mal venue, et croire que la constance est identique à l’obstination.

      Pour faire barrage à Marine Le Pen, Emmanuel Macron doit faire le nécessaire afin de donner ­envie de voter et faire baisser l’abstention.

      Signataires : Olivier Abel, philosophe ; Anne-Lorraine Bujon, directrice de la revue Esprit ; Françoise Diehlmann, germaniste ; Jacques Donzelot, sociologue ; Bernard Manin, politologue, Philippe Marlière, politologue ; Jean-Pierre Mignard, avocat ; Hélène Milet, sociologue, Olivier Mongin, ancien directeur de la revue Esprit, Yann Moulier-Boutang, économiste, Joël Roman, philosophe ; Jean-Louis Schlegel, éditeur ; Lucile Schmid, politologue ; Benjamin Stora, historien ; Georges Vigarello, historien.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/14/il-incombe-a-emmanuel-macron-de-faire-refluer-l-abstention-qui-menace-de-fai

      #intellectuels #présidentielle #abstention

  • Quand Eric Zemmour tentait de manipuler l’auteur de la loi de 1972 sur le racisme
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/03/21/quand-eric-zemmour-tentait-de-manipuler-l-auteur-de-la-loi-de-1972-sur-le-ra

    « Il n’est pas de bonne foi »
    Le jeune homme rédige ainsi une proposition de loi, adoptée à l’unanimité, promulguée le 1er juillet 1972, qui devint curieusement « la loi Pleven », du nom du garde des sceaux – qui n’y était pas du tout favorable : « il n’est pas utile de susciter l’adoption de nouveaux textes en matière de #discriminations_raciales », déclarait encore René Pleven six mois plus tôt, pour qui le racisme restait « exceptionnel » en France. « Moi, j’ai toujours dit qu’il fallait l’appeler loi de 1972, comme on appelle la loi de 1901, la loi de 1905, c’est une meilleure référence », dit #Alain_Terrenoire.

    Il discute à bâtons rompus avec Eric Zemmour. « Je lui manifestais clairement mon désaccord, notamment sur les juifs et Pétain, se souvient Alain Terrenoire. Quand il disait qu’à Londres, les premiers à être venus rejoindre la France libre, c’était les copains de Maurras. J’ai essayé de lui faire comprendre que d’abord, Maurras, c’est un personnage exécrable. Si mon père a été torturé et déporté à Dachau, c’est parce que Mauras l’avait dénoncé. » Le journaliste n’entend pas. « Quand on croit que quelqu’un est de bonne foi, on essaie de lui expliquer. En réalité, il n’est pas de bonne foi. »

    Puis Eric #Zemmour, candidat à la présidentielle, est invité le 16 décembre 2021 sur France Inter. « La #loi_Pleven, je l’abolirai, déclare le #polémiste. Elle a été dévoyée par les juges, j’ai parlé avec le véritable auteur de cette loi, M. Terrenoire, qui m’a expliqué que ce n’était pas du tout l’objet que de faire une loi liberticide comme elle a été utilisée par les juges de gauche. » Le vieux monsieur, stupéfait, écrit à la radio, que « cette loi a été reconnue comme un progrès significatif et indispensable dans notre société démocratique, vigilante sur le respect des droits de l’homme (…) Bien évidemment, je ne peux que vouloir, avec la plus grande fermeté, qu’elle reste en vigueur et qu’elle soit appliquée. »

    « #Usage_politique » de la #loi
    Eric Zemmour persiste dans l’émission « C à vous » sur France 5, le 16 février. Patrick Cohen lui met la lettre sous le nez, mais le candidat ne se démonte pas. « Je connais bien M. Terrenoire. Je l’ai vu à de nombreuses reprises, et je sais ce qu’il m’a dit en privé, répond l’ancien journaliste. Et je sais qu’il m’a dit que sa loi a été dévoyée. Je vais vous raconter ce qu’il m’a dit, et il ne pourra pas démentir. Il m’a dit que sa loi n’avait été absolument pas utilisée jusqu’en 1981. Et à partir de la victoire de la gauche, il a eu la surprise de voir que des juges, utilisaient de plus en plus sa loi. En vérité qu’est-ce qui s’est passé ? Il y a une instrumentalisation de cette loi par des juges et par des associations, qui l’utilisent pour abattre des adversaires et leur coller l’étiquette infamante de raciste. »

    Voir le comparateur : Comparez les programmes des principaux candidats
    Eric Zemmour n’a entendu que ce qu’il voulait entendre. « Oui, je lui ai dit que la loi avait été beaucoup plus appliquée à partir de 1981, admet l’ancien député, tout simplement parce qu’il y a eu une évolution sociale, sociologique de la magistrature. Parce qu’aussi, les associations ont eu le droit d’ester en justice. Dans cette loi, l’élément majeur, c’est celui-là. Il fallait que le système se mette en place, que la magistrature y soit suffisamment sensibilisée. Ça a effectivement pris du temps. »

    Le polémiste en donne une version toute personnelle dans son dernier livre, La France n’a pas dit son dernier mot (Rubempré, 2021). Alain Terrenoire lui aurait dit : « Je n’ai jamais voulu ça ! Ma loi n’est pas une loi contre la liberté d’expression ! C’est intolérable. Je le dirai. Je viendrai témoigner au tribunal en votre faveur à la première occasion. » Puis, « pendant des années, ma loi ne fut pas utilisée. Les juges s’en moquaient. J’étais presque vexé. Et puis, est arrivé 1981. Les juges de gauche ont compris l’usage politique qu’ils pouvaient en faire. Mais ils ont dénaturé l’esprit de ma loi en faisant un texte liberticide. C’est honteux. Honteux. Je le dirai. Je témoignerai en votre faveur. » Eric Zemmour indique qu’à chaque nouveau procès, il a demandé à Alain Terrenoire de venir témoigner. « A chaque fois, il y aura un propos “intolérable” de ma part qui l’en empêchera. »

    Le vieux monsieur a un geste de lassitude. « Zemmour m’a utilisé dans cette controverse. Rien que l’amalgame qu’il fait entre islam et islamisme pourrait, de mon point de vue, concerner l’application de la loi. Il a accumulé depuis des choses insupportables, qui me paraissent marquées par un #extrémisme_de_droite, même s’ils se réfèrent à de Gaulle et au RPR. C’est ce qui me donne le plus de boutons. »

  • Rapport du Sénat sur les cabinets de conseil : l’opposition dénonce un « scandale d’Etat et fiscal »

    Dans un rapport rendu jeudi, la commission d’enquête du Sénat sur le recours par l’Etat aux cabinets de conseil a notamment dénoncé le « phénomène tentaculaire » de leur présence dans la sphère publique.

    Gestion de la crise sanitaire, réformes des aides personnalisées au logement (APL), de la formation professionnelle, organisation de colloques : la commission d’enquête du Sénat sur le recours par l’Etat aux cabinets de conseil a dénoncé dans son rapport publié jeudi 17 mars le « phénomène tentaculaire » de leur présence dans la sphère publique.

    Le rapport sénatorial se risque pour la première fois à livrer un chiffre, bien qu’imparfait : les sénateurs ont dénombré 945 missions de conseil. Le Monde, qui a enquêté parallèlement, en a recensé des centaines d’autres, arrivant à un total de près de 1 600 contrats depuis 2015, pour un montant estimé à près de 2 milliards d’euros – des chiffres probablement inférieurs à la réalité.

    Le rapport sénatorial dévoile également que le cabinet de conseil américain #McKinsey & Company n’a payé aucun impôt sur les sociétés en France depuis dix ans.

    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/03/18/rapport-du-senat-sur-les-cabinets-de-conseil-l-opposition-denonce-un-scandal

    Explorez les 1 600 missions des cabinets de conseil pour l’Etat recensées par « Le Monde »
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/03/17/explorez-les-1-600-missions-des-cabinets-de-conseil-pour-l-etat-recensees-pa

    #cabinets_de_conseil #conseil #gouvernement #restructurations #fiscalité #fraude_fiscale

  • Emmanuel Macron et « la campagne du secret »
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/03/12/presidentielle-2022-emmanuel-macron-et-la-campagne-du-secret_6117231_6059010

    Adepte d’une communication ultra-maîtrisée, le chef de l’Etat, candidat à sa réélection, veut contrôler sa campagne en s’appuyant sur un cercle très restreint de fidèles et en tenant éloignés les journalistes.

    La scène a longtemps suscité l’hilarité parmi les proches d’Emmanuel Macron. Un jour de 2019, une journaliste de télévision appelle au standard de l’Elysée pour demander à discuter avec un conseiller politique du chef de l’Etat. Le coup de fil passe par la secrétaire de l’intéressé. « J’ai une journaliste pour vous au téléphone, prévient-elle, combiné en main. Mais je vous rappelle que vous n’avez pas le droit de leur parler ! » Ainsi vont les règles de la maison. Pas question de risquer une sortie en dehors des clous de la communication officielle.

    Emmanuel Macron a retenu la leçon de ses années passées auprès de François Hollande, jugé trop prolixe dans le commentaire de son action. L’image et le son doivent être maîtrisés au détail près ; sinon, c’est la chienlit, moteur de la faiblesse dont a tant souffert son prédécesseur. Un souci du contrôle qui nécessite une organisation de commando, où règne le culte du secret. La campagne présidentielle dans laquelle vient de s’engager le locataire de l’Elysée ne déroge pas à cette règle en vigueur depuis cinq ans.

    Depuis sa déclaration de candidature, le 4 mars, Emmanuel Macron égrène quelques-unes de ses propositions. Relèvement de l’âge de départ à la retraite à 65 ans, suppression de la redevance audiovisuelle… A chaque fois, elles surprennent, y compris dans ses propres rangs, où certains parlementaires se lamentent de découvrir ces mesures « en regardant la télé », comme tout le monde. « C’est la campagne du secret. On en sait autant que vous ! », se lamente un historique de la Macronie auprès des journalistes. L’information ne circule pas au-delà du cercle de ceux qui ont « besoin d’en connaître », selon la formule d’usage dans les services de renseignements.

    Même les plus proches interlocuteurs du président de la République n’ont pas pu consulter le programme dans son ensemble, qui sera révélé autour du 20 mars. Une petite dizaine de privilégiés sont tenus dans la confidence, parmi lesquels le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, le conseiller spécial, Clément Léonarduzzi, la « plume », Jonathan Guémas, ou des ténors, comme le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, et celui du MoDem, François Bayrou. La peur de la fuite confine parfois à la paranoïa, le voisin de bureau étant suspecté de se montrer trop bavard avec les journalistes. Les chapeaux à plume de la majorité n’ont ainsi été mis au courant du lancement du site de campagne, Avecvous.fr, que quelques heures avant la presse, le 27 janvier.

  • La Primaire Pop, la Gôche et le Monde

    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/01/29/presidentielle-2022-la-gauche-suspendue-au-resultat-de-la-primaire-populaire

    En fonction du résultat, il y a, grosso modo, deux cas de figure envisagés. Christiane Taubira n’est pas désignée par la Primaire populaire : sa précampagne effectuée « à fond », selon Guillaume Lacroix, président du Parti radical de gauche et principal soutien de l’ancienne garde des sceaux, s’arrête brutalement dimanche. La gauche perd une de ses candidatures et la Primaire populaire, dont l’objectif initial était de réduire le nombre de prétendants, aura réussi, petitement, à faire œuvre de clarification. Deuxième option, Christiane Taubira remporte la primaire : le statu quo sera décrété, personne ne se rangera derrière elle, l’unité étant devenue une vue de l’esprit.

    Le vaudeville de la gauche pourra jouer les prolongations avec cinq acteurs principaux qui continueront à faire semblant de s’ignorer, avec un ex-président de la République, François Hollande, caché dans le placard, qui souffle que, « pour l’instant, il n’est pas candidat », en attendant que tout ce petit monde s’épuise pour pouvoir en sortir.

    « Ridicule de la situation »

    Depuis un mois, on s’y perd tout en ne voyant pas bien ce que la gauche pourrait y gagner. Comme le résume Sandrine Rousseau, finaliste d’une autre primaire en septembre 2020, celle des écologistes : « Tous les jours ou presque, une nouvelle variable surgit qui vient encore complexifier l’équation à gauche. L’irruption de Christiane Taubira, François Hollande qui installe une ambiguïté… Il y a quelque chose qui nous renvoie collectivement au ridicule de la situation. »

    Il vous reste 71.87% de cet article à lire cachés derrière le #paywall de Le Monde ; et probablement, on s’en fout.

    #primaire_populaire
    #gauche (ou pas)

    • pendant ce temps, sur Mediapart :

      Zizanie ou « réenchantement », l’aventure de la Primaire populaire s’achève

      Par Mathilde Goanec

      Le résultat du scrutin, qui réunit 467 000 citoyens, sera dévoilé dimanche 30 janvier en soirée. Si l’union promise par la dynamique citoyenne n’a pas eu lieu, l’initiative, hors norme, a contribué à rebattre une partie des cartes à gauche.

    • et sur l’internaute live :

      20:29 - Comment s’organisera l’union à l’issue de la Primaire populaire ?

      Après l’annonce des résultats, le candidat désigné vainqueur pourra se rendre au QG parisien de la Primaire populaire à partir de 21h et jusqu’au lendemain pour être officiellement investi par le vote de l’initiative citoyenne. Cette investiture ne pourra être validée que si le candidat signe « le contrat de rassemblement » qui oblige le candidat à mener l’union de la gauche dans les conditions prévues par les organisateurs de la Primaire populaire. Si le candidat victorieux accepte de représenter l’union de la gauche et le socle commun, des discussions pourraient être entamées pour affiner les conditions de l’union.

    • et commentaire de la Mathilde porte-parole de la primaire pop, sur la télé utube dimanche soir :

      Mediapart titre « l’aventure s’achève » ; c’est tout le contraire : ça continue, et y’a beaucoup de travail pour les mois à venir

  • Marion Maréchal dit « pencher » pour Eric Zemmour, au grand dam de Marine Le Pen

    La candidate du Rassemblement national à l’élection présidentielle a connu, la semaine dernière, trois défections au profit de son rival à l’extrême droite.

    « Si je soutiens Eric, ce n’est pas juste pour passer une tête et dire coucou », avait-elle déjà déclaré la veille au Parisien, jugeant que le candidat de Reconquête avait fait « beaucoup de progrès dans la posture, le ton, la gravité » depuis son entrée en campagne, le 30 novembre 2021. « Je ne sais pas qui est le mieux placé. La campagne est encore longue. Eric Zemmour a une marge de progression plus grande chez les classes populaires et les abstentionnistes que Marine Le Pen auprès des classes supérieures », analysait-elle.

    [tout ça tout ça] quelques jours à peine après les ralliements de Gilbert Collard, de Jérôme Rivière et de Damien Rieu, venus du RN.
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/01/28/presidentielle-2022-marine-le-pen-deplore-que-marion-marechal-dise-reflechir

    faut bien qu’elle ait lieu quelque part l’alliance Le P**, Z******, ce dernier ne piquera pas assez d’électeurs à lui seul

    et, partout, des éléments qui peuvent faire casserole (même sans les diamants de Bokasssa)

    La « GUD connexion » toujours présente dans les coulisses de la campagne de Marine Le Pen

    Ils sont les fantômes d’un passé que Marine Le Pen voudrait faire oublier, les symboles d’une radicalité idéologique et d’un affairisme qui cadrent mal avec sa « dédiabolisation ». Frédéric Chatillon, Axel Loustau et Nicolas Crochet : l’imprimeur, le grand argentier et le comptable. Trois vieux amis de « la présidente », au cœur des scandales politico-financiers qui ont valu au Rassemblement national (#RN) quatre enquêtes judiciaires, dont la première a abouti à une condamnation en 2019. Tenus à l’écart des projecteurs, ces trois hommes jouent toujours un rôle dans les coulisses du RN, y compris pour l’actuelle campagne présidentielle de Marine Le Pen.
    https://justpaste.it/8zoj5

    #extrême_droite

  • Ehpad : le manque de contrôle en question
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/01/27/ehpad-le-manque-de-controle-en-question_6111262_3224.html


    ça à l’air beau et clean, j’achète !

    L’établissement Les Bords de Seine, mis en cause dans « Les Fossoyeurs », le livre de Victor Castanet https://seenthis.net/messages/945646, avait été visité en 2018 par les inspecteurs de l’ARS Ile-de-France, en vain.

    Pour éviter que l’embrasement médiatique ne tourne à la déflagration politique, le gouvernement n’a pas tardé à circonscrire l’incendie. Mardi 25 janvier, le ministre de la santé, Olivier Véran, a posé le premier pare-feu. La veille de la sortie du livre de Victor Castanet, Les Fossoyeurs (Fayard, 400 pages, 22,90 euros), qui contient une mine de révélations explosives sur les « dysfonctionnements » dans certains établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) du groupe privé Orpea, leader mondial de la prise en charge de la dépendance, le ministre de la santé a indiqué qu’il envisageait de lancer une enquête de l’inspection générale des affaires sociales sur l’entreprise, dont le siège est à Puteaux (Hauts-de-Seine).

    Dans la foulée, la ministre déléguée chargée de l’autonomie, Brigitte Bourguignon, a écrit, jeudi, au directeur général du groupe, Yves Le Masne, pour le convoquer à un entretien, le 1er février, en lui exposant sept points sur lesquels elle attend des « explications ». La ministre aura en main les résultats d’une « enquête flash » qu’elle vient de demander à l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France sur l’Ehpad Les Bords de Seine à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), établissement au cœur de l’enquête menée par l’auteur. « Si ces faits sont avérés, a déclaré, mercredi, Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement, ils devront être sanctionnés avec la plus grande sévérité. »

    De son côté, le groupe Orpea a annoncé, mercredi, qu’il mandatait deux cabinets d’audit pour « une mission indépendante d’évaluation sur l’ensemble des allégations rapportées dans ce livre (…). Nous continuons à affirmer qu’à aucun moment la direction du groupe n’a mis en place un système quelconque pour orchestrer les pratiques qui lui sont reprochées _ », indique l’entreprise dans un communiqué.

    « Optimisation de la masse salariale »

    Dans son livre, Victor Castanet part donc de l’Ehpad Les Bords de Seine, établissement le plus luxueux du groupe, où il a pu recueillir la parole de familles de résidents qui lui racontent les « manquements » et « mauvais traitements » infligés à leurs parents ou grands-parents pensionnaires. Puis, à partir de témoignages d’anciens directeurs de cet établissement mais aussi d’autres Ehpad du groupe et d’anciens dirigeants, il reconstitue le puzzle de ce qu’il appelle « le système Orpea ». Une mécanique qui transforme, selon lui, chaque équipe de direction d’établissement en « cost killer » avec promesse de percevoir des primes indexées sur les résultats.

    Au fil des pages, le lecteur découvre comment les directeurs sont incités par la direction du groupe à ne pas consommer la totalité des enveloppes attribuées par l’agence régionale de santé et par le conseil départemental, les deux financeurs publics de chaque Ehpad en France. L’objectif consiste à obtenir le « taux d’occupation » des lits le plus élevé et les dépenses de personnels les moins onéreuses possibles. « Chez Orpea, ce n’est pas le besoin qui détermine fondamentalement la décision. C’est une équation budgétaire », cingle Victor Castanet. L’« optimisation de la masse salariale » suppose de recourir à des vacataires plutôt qu’à des CDI. Il s’agit pour cela d’invoquer « un accroissement temporaire d’activité », la nécessité de « remplacer des salariés absents », quitte à recourir à de « faux CDD de remplacement ». Aux Bords de Seine, écrit l’auteur, « on avait trouvé la parade, semble-t-il. Rédiger des CDD de remplacement en inventant des personnes à remplacer. »

    Dans cet Ehpad mais aussi dans d’autres établissements du groupe, le directeur établit des fiches portant des noms de salariés censés être embauchés en CDI afin de pouvoir justifier le recours à un emploi temporaire qui pallierait leur absence. « M. Adani [nom modifié d’un ancien directeur] me raconte qu’il est contraint d’user de cette technique. Mais lui ne s’embête même pas à chercher des noms d’aides-soignantes extérieures au groupe. Il met souvent le nom de sa nièce sur le poste, comme personne à remplacer. Et tout le monde n’y aurait vu que du feu. » Une ancienne membre du service RH du groupe confie à l’auteur que tout est prévu pour que la responsabilité de pareilles « fraudes » au droit du travail ne puisse pas être imputée à la direction générale.

    « Impuissance » des autorités de tutelle

    S’agissant de l’achat de produits d’hygiène et de santé, Victor Castanet explique qu’Orpea paie les factures aux fournisseurs d’un montant équivalent aux crédits versés par l’ARS et le département. En retour, le siège de l’entreprise négocie une « rétrocession » financière à certains de ces prestataires. Ces « ristournes » d’argent public versées à Orpea permettent de réduire les dépenses. A cela s’ajoutent des règles d’économie très strictes. A l’Ehpad Les Bords de Seine, consigne était donnée de ne pas dépasser l’utilisation de trois couches par jour et par résident…

    L’auteur dépeint une entreprise dont les dirigeants se sentent « intouchables » et met en cause « l’impuissance » des autorités de tutelle face à ces « dysfonctionnements ». Une critique que le gouvernement veut à tout prix contrer en multipliant soudainement les contrôles. [le parquet ne s’est pas saisi de l’affaire ! ndc]

    L’établissement a pourtant déjà fait l’objet d’un contrôle, en juillet 2018, qui a donné lieu à un rapport en 2019. L’inspection s’est faite de manière inopinée à la suite d’un signalement d’une famille de résident. Mediapart, dans un article en janvier 2018, avait révélé que l’ARS avait été destinataire de « réclamations » de famille en 2016. Selon le cabinet de Mme Bourguignon, un nouveau « signalement concernant une résidente sur des suspicions d’actes de maltraitance de défaut de soins » est remonté à l’ARS en 2017. Raison qui a motivé l’inspection inopinée de l’établissement en juillet 2018. En décembre 2019, une nouvelle plainte de résidents atterrit sur le bureau de l’ARS envoyée pat le Défenseur des droits. En mars 2020, l’ARS répond à ce dernier qu’elle mènera un nouveau contrôle mais la crise sanitaire entraîne son report sine die.

    Dans l’unique rapport remis en 2019 sur cet Ehpad, l’ARS recommande « une augmentation immédiate des temps de médecin coordonnateur, de nouveaux protocoles d’intervention des auxiliaires de vie et une meilleure prise en compte des signalements ». Mais elle ne soupçonne pas alors le système d’optimisation des coûts révélée par l’enquête de Victor Castanet, encore moins les rétrocommissions. Du reste, ni l’inspection du travail, ni les corps d’inspection rattachés à Bercy n’ont jamais mis à jour de tels stratagèmes.

    Les contrôles des #ARS « ont de sérieuses limites, reconnaît un haut fonctionnaire, expert du sujet. Il faut que vous sachiez que les ARS n’accèdent pas à la totalité des comptes des Ehpad lucratifs car ce sont des sociétés commerciales régies par le code du commerce, qui édicte des règles de confidentialité ». Enfin, si un établissement, quel que soit son statut, ne consomme pas la totalité des dotations qui lui sont versées, il n’est pas tenu de les restituer. Les Ehpad peuvent ainsi se constituer une trésorerie à condition de savoir bien négocier une enveloppe prévisionnelle suffisamment grande chaque année avec l’ARS et le département.

    Dérives hors du privé

    Si le livre de Victor Castanet décrit la manière dont Orpea joue avec les règles du jeu fixées par la puissance publique, l’entreprise n’est pas la seule face aux critiques. En octobre 2016, l’ARS d’Ile-de-France a rendu un rapport d’inspection sévère, auquel Le Monde a eu accès, sur un Ehpad de quelque 500 lits à Paris, dans le 12e arrondissement. L’ARS constate un recours très important aux CDD, à des intérimaires, une instabilité importante du personnel médical, qui ont « une incidence négative sur la prise en charge des résidents ». Dans cet établissement privé non lucratif, le « nombre de changes est limité à deux par jour », un rationnement pire qu’à l’Ehpad Orpea des Bords de Seine.

    Dans un rapport de mars 2021, la chambre régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes épingle l’#Ehpad de Saint-Chamond (Loire) pour son « turnover de salariés », son « taux de CDD très élevé ». Or, l’établissement a un statut associatif. Preuve que les dérives décrites ne sont pas l’apanage des groupes privés… A cela près que leur prix à la journée, élevé, et la manne publique qu’ils reçoivent devraient leur permettre de garantir les meilleurs soins à leurs pensionnaires. Or, les seuls à ne pas se plaindre, semble-t-il, sont leurs actionnaires.

    La dépendance liée au grand âge est un choix de société
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/27/la-dependance-liee-au-grand-age-un-choix-de-societe_6111208_3232.html

    Editorial du « Monde ». Alors que la révélation sur la gestion des Ehpad du groupe Orpea est devenue une affaire politique, il n’est pas trop tard pour que le grand âge devienne un thème de la campagne présidentielle.

    Création d’emplois, allocations, soins… Les candidats à la présidentielle rivalisent de généreuses propositions pour les Ehpad
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/01/27/creation-d-emplois-allocations-soins-pour-les-ehpad-les-candidats-rivalisent

    Tous suggèrent de renforcer le contrôle sur les maisons de retraite médicalisées et d’accroître les dépenses en faveur du grand âge. Mais aucun n’évoque le financement de long terme de la dépendance.

    « Bouleversant » pour Valérie Pécresse, « ignoble » pour Marine Le Pen, « grave » pour Fabien Roussel… C’est par l’émotion que s’est imposée la question des Ehpad dans la campagne présidentielle. Les révélations du livre-enquête Les Fossoyeurs (Fayard, 388 pages, 22,90 euros), du journaliste Victor Castanet, qui documente les dérives dans certains établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) privés, a incité, depuis lundi 24 janvier, les principaux candidats à se positionner. Alors que plus de 600 000 personnes vivent aujourd’hui en Ehpad, l’enjeu du grand âge ne cessera de s’accroître – d’ici à 2030, la France comptera 21 millions de seniors d’au moins 60 ans, dont 3 millions en perte d’autonomie, selon les projections de la Drees et de l’Insee.

    Les candidats au scrutin d’avril se satisfont donc de voir à l’ordre du jour un thème qui leur permet d’avancer leurs idées, tout en plaçant l’exécutif sur la défensive. A gauche, deux types de mesures reviennent : augmentation des effectifs et réduction de la place des Ehpad privés. La députée Caroline Fiat (La France insoumise), ancienne aide-soignante de nuit dans un Ehpad du groupe Korian, a contribué sur ce point au programme de Jean-Luc Mélenchon. Elle soutient l’interdiction pure et simple des Ehpad privés lucratifs, le recrutement de 210 000 personnes et un ratio d’encadrement minimal de 0,6 (ce qui correspond à 60 soignants pour 100 résidents). Un coût qu’elle estime à 8 milliards d’euros, soit « deux ISF ».

    Même son de cloche chez le candidat communiste Fabien Roussel. « Le problème, c’est qu’on a laissé au marché le soin de s’occuper du grand âge », a tranché le député du Nord sur Franceinfo. Favorable à « un grand service public du grand âge », il propose d’exclure toute gestion à but lucratif, avec expropriation et placement des établissements sous tutelle en cas de « maltraitances avérées ». Et souhaite créer, en seulement trois ans, 300 000 emplois en Ehpad et 100 000 aides à domicile, avec un ratio d’un soignant par résident.

    « Priorité absolue »

    Yannick Jadot aborde, par l’intermédiaire de sa porte-parole, Delphine Batho, l’enjeu de l’attractivité des métiers dans ces établissements. « Vous n’arriverez pas à remplir les postes s’il n’y a pas de meilleures conditions de travail et une meilleure reconnaissance de la société », insiste la députée des Deux-Sèvres, qui dit avoir reçu des alertes sur Orpéa dans sa circonscription. « Le bien-être et le soin à nos anciens sont une priorité absolue, poursuit-elle, et font partie des choses que les leçons de la pandémie devaient mettre à l’ordre du jour. Or, le gouvernement actuel n’a cessé de remettre à plus tard les questions de financement sur le grand âge. » Le candidat écologiste proposera un ratio de 0,8 équivalent temps plein par résident (mais incluant les personnels administratifs), l’arrêt de toute création de places en Ehpad privés, le contrôle renforcé de ces établissements et, enfin, la revalorisation des carrières et métiers.

    Anne Hidalgo, dans son programme, avance des propositions du même ordre, quoique plus floues et sans objectifs chiffrés : un « service public d’accompagnement de la perte d’autonomie pour orienter et conseiller les familles », une revalorisation de l’allocation personnalisée d’autonomie, destinée aux personnes âgée, et « une présence humaine plus importante dans les Ehpad ». Les députés socialistes ont, de leur côté, demandé à obtenir le droit de visiter inopinément les Ehpad, comme pour les lieux de privation de liberté.

    « Une fois n’est pas coutume, je suis d’accord », a signalé Marine Le Pen, familière des « visites surprises » dans les prisons et les centres de rétention administrative. Mardi, la candidate du Rassemblement national avait réclamé la création d’une commission d’enquête parlementaire sur la gestion des Ehpad par les groupes privés. Sans parler de ratio, elle propose « un minimum » d’un médecin coordonnateur et d’une infirmière « vingt-quatre heures sur vingt-quatre » dans chaque Ehpad. Elle souhaite enfin porter la durée du congé des proches aidants à douze mois sur une carrière, avec indemnisation indexée sur le revenu, jusqu’à 100 % au niveau du smic.

    « Maintien à domicile »

    Valérie Pécresse indique au Monde qu’elle souhaite « radicalement changer le modèle des Ehpad ». « Une civilisation se juge à la place et au respect qu’elle accorde à ses anciens, y compris quand ceux-ci deviennent vulnérables, développe la candidate Les Républicains. Je veux tirer les leçons de ce naufrage. » Elle promet de renforcer la transparence sur la qualité des Ehpad, publics ou privés, à l’aide d’un « référentiel obligatoire » publié, détaillant les conditions de vie (qualité des repas, taille des chambres, activités de vie sociale, temps consacré à chaque résident…) et la qualité des soins. Les Ehpad qui « ne respecteront pas ces indicateurs seront fermés », prévient-elle, et les exploitants qui portent « atteinte à la dignité humaine » de leurs résidents au nom du « profit » seront « poursuivis ».

    Mais la candidate LR veut surtout encourager le virage domiciliaire de la politique du grand âge, qu’elle décrit comme une « révolution ». « Je donnerai la priorité au maintien à domicile », promet-elle, par le doublement des crédits d’impôt pour les services à la personne et l’aménagement de logements adaptés en centre-ville.
    Interrogé mercredi sur Public Sénat, Eric Zemmour, embarrassé, a proposé de supprimer les agences régionales de santé et d’instaurer « un vrai contrôle de l’Etat sérieux » par le préfet. Le candidat d’extrême droite a ensuite rectifié en proposant d’« améliorer le contrôle en amont », lors de la délivrance des agréments, sans autre proposition. Il a souligné qu’il n’avait pas attendu la sortie d’un livre pour en parler dans « Face à l’info », sur CNews. Mais, en juillet 2021, dans son émission consacrée au « péril vieux des baby-boomeurs », Zemmour fustigeait plutôt les « caprices » d’une génération : « Quand ils étaient jeunes, il fallait que les jeunes soient sur le pavois, maintenant qu’ils sont vieux, il faut que toute la société soit organisée autour d’eux. (…) Ils veulent – comme ils sont les plus nombreux et les plus puissants, puisqu’ils votent – que l’Etat mette beaucoup d’argent dans leurs Ehpad. »

    En parallèle des promesses de revalorisation, de recrutements ou de crédits d’impôt, aucun des candidats n’a développé ses vues sur le financement à long terme de la dépendance – qui impliquerait de toucher aux cotisations, au reste à charge ou encore à la CSG des retraités. Des mesures sans doute trop impopulaires à moins de trois mois du scrutin présidentiel.

    • Investir dans des chambres d’Ehpad, un placement discutable
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/01/27/investir-dans-des-chambres-d-ehpad-un-placement-discutable_6111219_3234.html

      Ces produits d’investissement locatif affichent des rendements élevés, autour de 5 %. Ils participent à la pression financière qui pèse sur les résidents et sur le personnel des maisons de retraite.

      Investir dans la vieillesse en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) est devenu un marché florissant et lucratif. Sur Internet, d’innombrables publicités promettent aux épargnants des rendements élevés (de 4 % à 6 %) pour l’achat d’une chambre en maison de retraite médicalisée privée, dont ils percevront des loyers. Les investisseurs peuvent aussi acquérir des parts de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ayant en portefeuille un parc de maisons de retraite.

      « Ça marche très fort, nous avons collecté 780 millions d’euros en 2021, contre 500 millions d’euros un an plus tôt. Le Covid a encore renforcé ce marché », dit Thierry Scheur chez Euryale, qui gère une de ces SCPI, Pierval Santé, à la tête, notamment, dequatre-vingt-sept Ehpad. « Je reprends la propriété des murs, et les exploitants des établissements médicalisés me versent un loyer », explique M. Scheur. En achetant des parts, les investisseurs ont obtenu, en 2021, un rendement de 4,8 %. Même constat du côté de Sacha Rubinski, président de Blue Bear Capital, qui vend lui aussi les murs des Ehpad à de gros investisseurs : « C’est un secteur très attractif : le taux d’occupation des Ehpad approche les 100 %, car l’offre est calée sur la demande par les pouvoirs publics en fonction de la pyramide des âges, c’est une sécurité très forte. »

      Pour les conseillers financiers, l’investissement locatif en chambres d’Ehpad est en outre un marché d’avenir. Selon les dernières projections de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, 108 000 seniors de plus seraient attendus en Ehpad d’ici à 2030, ce qui supposerait de doubler dans la durée le rythme d’ouverture de places observé depuis 2012. « Ces placements permettent de financer les maisons de retraite privées et sont assortis d’avantages fiscaux pour inciter les particuliers à investir. C’est une façon de faire rentrer de l’argent privé pour des biens que l’Etat ne parvient pas à financer », avance Cyrille Chartier-Kastler, fondateur de Facts & Figures, un cabinet de conseil en stratégie spécialisé dans la protection sociale.

      « Pression sur la gestion »

      Ce modèle d’affaires soulève toutefois quelques questions. « Le rendement servi aux investisseurs pour ces investissements locatifs a un lien avec les tarifs que paient les résidents pour leur hébergement en Ehpad, souligne l’associé d’un cabinet de conseil accompagnant les Ehpad dans leur pilotage financier, soucieux de conserver l’anonymat. Attendre une rémunération de 6 % pour un service public de l’autonomie, c’est un peu dérangeant. » Selon des chiffres publiés en 2019 par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, le coût médian d’une place en Ehpad atteignait 1 884 euros par mois dans le secteur public, contre 2 657 d’euros dans le privé commercial. Or, la pension moyenne nette des retraités en France avoisinait, en 2019, les 1 400 euros.

      Pour Annie de Vivie, fondatrice d’Agevillage.com, à destination des personnes âgées et des aidants, « ces gros rendements promis aux épargnants contribuent à la pression sur la gestion des Ehpad et rejaillissent soit sur le personnel, soit sur le niveau de prestation fourni aux résidents ».

      Conseiller en gestion de patrimoine, Gérard Maurin a fait le choix de ne pas proposer ce type de produit à ses clients, parce qu’il juge au contraire le rendement insuffisant au regard du risque pris par l’investisseur. « Si l’exploitant de l’Ehpad fait faillite, ou s’il résilie le bail, vous vous retrouvez coincé, dit-il. Votre épargne ne vous rapporte plus rien, et vous ne pouvez rien y faire. » « Il faut avoir en tête les rénovations régulières de la résidence, les parties communes s’abîment très vite, ajoute M. Chartier-Kastler. Le système, dans sa globalité, me gêne : le conseiller financier perçoit une commission importante sur la vente d’une chambre en Ehpad, entre 8 % et 10 %, mais tout n’est pas toujours dit clairement à l’investisseur. »

      #or_gris

    • Scandale dans les Ehpad : Orpea sous la menace d’une action de groupe
      https://www.leparisien.fr/societe/scandale-dans-les-ehpad-orpea-sous-la-menace-dune-action-de-groupe-30-01-

      il me semble que la procédure est nouvelle, ne me souviens pas de résultats significatifs, mais avec des famille qui ont put payer des milliers d’euros par mois pour le séjour de vieux en butte à des sévices, et des avocats en recherche de belles affaires, le groupe pourrait se trouver face à une meute de pitts bull quérulents à durée indéterminée.
      si les 15 millions promis à Victor Castanet pour qu’il cesse son enquête n’étaient pas une chausse trappe pour le compromettre mais une offre réelle, Orpéa aura à allonger davantage pour obtenir des accords en échange d’abandon de procédure.

      le parquet ne s’est toujours pas saisi.
      #paywall

    • toujours pas de saisine du parquet sur Orpéa (abus de biens sociaux, maltraitance, fausses factures. c’est de bonne guerre, le faire ce serait risquer d’avoir à faire de même dans tout le secteur.

      Le gouvernement va lancer une enquête administrative et une enquête financière, a, par ailleurs, annoncé la ministre, mardi sur France Inter. « C’est tout le groupe que nous allons interroger. Et nous lançons une enquête IGAS [Inspection générale des affaires sociales] et une enquête financière, de l’IGF [Inspection générale des finances]. Et toutes les ARS [agences régionales de santé] iront voir tous les établissements de ce groupe. » (...)

      La ministre a aussi affirmé que le référentiel de qualité des Ehpad – le classement des meilleurs établissements, au même titre que les hôpitaux –, annoncé depuis plusieurs années, « va être publié dans trois semaines ».

      Sur le plan judiciaire, Orpea est, par ailleurs, sous la menace d’une « action collective conjointe » lancée par les familles de résidents en colère. En portant plainte simultanément, elles « entendent faire nombre, avoir du poids face à un géant », a expliqué, lundi, leur avocate, Me Sarah Saldmann, qui veut lancer cette procédure d’ici à quelques semaines pour, selon les dossiers, « homicide involontaire, mise en danger délibérée de la vie d’autrui, violence par négligence » ou « non-assistance à personne en danger ».

      https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/02/01/orpea-le-nouveau-pdg-convoque-mardi-par-le-gouvernement_6111793_3224.html

    • Le DG d’#Orpea limogé dimanche, Yves Le Masne, a vendu des milliers d’actions 3 semaines après avoir été informé de la future parution du livre choc Les Fossoyeurs mettant en cause les pratiques du groupe. Une opération qui lui a rapporté près de 590.000€.

      L’ex-DG a mis en vente 5.456 titres #Orpea au prix de 107€ chacun. Depuis les révélations, l’action Orpea a dévissé à la Bourse de Paris. Elle vaut ce 1er février au soir 40€. Près de 30% de moins qu’il y a 5 jours, date de sortie des Fossoyeurs, précise Challenges...
      (Canard)

      #délit_d'initié

    • Business model . Jean-Claude Marian, fondateur d’Orpea, le business de l’âge jusqu’au milliard

      Neuropsychiatre de formation, n’ayant jamais exercé, l’octogénaire avait parmi les premiers reniflé le filon : la financiarisation du secteur des maisons de retraite permettrait d’en tirer de juteux dividendes. « Tout ce qui touchait à la santé de près ou de loin s’envolait, se souvient un ami de Marian. Les investisseurs se sont rués sur l’or gris. » En 1989, il ouvre son premier établissement, crée Orpea et bâtit un leader mondial, introduit en Bourse en 2002. Jusqu’à la parution du livre, ce sont les mots « business model », « retour sur investissements » ou « profitabilité » qui caractérisaient le groupe dans les articles qui lui étaient consacrés.

      Les lits des personnes âgées ont permis à Jean-Claude Marian d’engranger des sommes colossales. Fin 2012, il détient 20,16% du capital du groupe (23,09% avec les autres membres de sa famille), des parts qui lui rapportent quelque 7 millions d’euros de dividendes annuels. Un premier tournant se produit en 2013 : en novembre, révèle le livre les Fossoyeurs, la police, qui enquête sur une affaire d’#évasion_fiscale impliquant un cadre d’Orpea, perquisitionne chez un proche de Marian, dont le boulot discret consiste alors à faire le lien entre le groupe et les élus, afin d’obtenir des autorisations d’ouverture d’établissements.

      Marian a-t-il craint que la révélation de l’affaire fasse chuter le cours de Bourse, lui occasionnant de sérieuses pertes ? Quelques semaines plus tard, il vend 15,9% de ses parts à un fonds de pension canadien. L’action est à 40,34 euros. Le patron encaisse 321 millions d’euros, sans que l’affaire judiciaire soit révélée – elle le sera dans le livre paru la semaine dernière. Lui qui avait intégré dès 2001 le classement Challenges des fortunes professionnelles, fait en tout cas une entrée fracassante dans la catégorie des super-riches. Bingo : résident belge depuis 2006, il ne paie aucun impôt sur la vente de ses actions, comme le permet ce paradis des rentiers. Accessoirement il n’est plus assujetti à l’ISI (ex-ISF) français depuis son installation sur place.

      https://justpaste.it/50opj

      encore un beau résultat favorisé par l’apologie de l’entreprise et de sa liberté anonnée par le PS des années 80

      #santé #privatisation

    • Orpéa devrait changer de nom (à la radio)

      edit

      « Rien n’échappe à la marchandisation, pas même les plus fragiles, qu’ils soient âgés ou non », Anne Salmon
      https://seenthis.net/messages/948335

      Clinea, l’autre « cash machine » du groupe Orpea
      https://seenthis.net/messages/948334

      Après Orpea, le groupe Korian visé par des dizaines de signalements pour maltraitance dans ses Ehpad
      https://seenthis.net/messages/948043

      Maltraitance dans les Ehpad : « J’ai reçu des dizaines de témoignages », déclare l’avocate Sarah Saldmann qui va lancer une action collective en avril contre le groupe Korian
      https://seenthis.net/messages/948012

      « Fossoyeurs », une enquête sur le business du grand âge, "bonnes feuilles"
      https://seenthis.net/messages/945646

  • [Macron] représente une sorte de condensé de la circulation et du traitement des idées dans une classe politicienne où la distance entre droite et extrême droite s’amenuise à la même vitesse que celle entre la gauche et la droite.

    Jacques Rancière
    https://seenthis.net/messages/944724

    Marine Le Pen lisse son discours sur l’identité pour amadouer la « gauche républicaine »
    https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/01/19/presidentielle-2022-marine-le-pen-lisse-son-discours-sur-l-identite-pour-ama

    A l’approche de sa troisième élection présidentielle, la candidate du Rassemblement national s’est peu à peu approprié la critique « anti-woke » présente dans une partie de la gauche.

    Printemps 2021. Un parfum de légumes mijotés flotte dans sa cuisine. Ce dimanche d’avril, à La Celle-Saint-Cloud (Yvelines), Marine Le Pen prépare un couscous-merguez. Son invitée arrive. Voix douce, ligne athlétique et coupe afro, Rachel Khan a publié l’essai Racée (L’Observatoire, 2021), qui étrille ce qu’elle nomme la « pensée victimaire » des nouveaux antiracistes. Née à Tours d’un père gambien musulman et d’une mère juive d’origine polonaise, elle croise le fer contre l’assignation identitaire avec un mordant qui séduit jusqu’à la droite conservatrice… et a tapé dans l’œil de la présidente du Rassemblement national (RN).

    Rachel Khan, aujourd’hui, coordonne un groupe de travail de La République en marche sur l’immigration, l’intégration et la laïcité, pour la future campagne d’Emmanuel Macron. La ministre chargée de la citoyenneté, Marlène Schiappa, l’a faite marraine du Prix de la laïcité ; le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, lui a remis le Prix littéraire des droits de l’homme. En juillet, elle avait vu son essai couronné du Prix du livre politique à l’Assemblée nationale, où elle avait fustigé « une colonisation woke et racialiste », qu’elle assimile au racisme, et prôné « une identité infinie en relation avec l’autre ».

    Mais à l’heure où son livre paraît, en mars 2021, le ciel est orageux pour l’ancienne conseillère de Jean-Paul Huchon à la région Ile-de-France. Une avalanche d’attaques s’abat au sein d’une gauche déchirée sur l’identité, l’égalité et la laïcité. Le 16 mars, Rachel Khan reçoit un SMS. Son expéditeur lui confie son « sempiternel sentiment d’injustice qui [l]’étreint devant tant de méchanceté et de sectarisme ». « Je volerais bien à ton secours, mais pas sûr que ça n’aggrave pas la situation. Nous t’assurons de notre soutien, même discrètement. » Signé : « Marine Le Pen ».

    Un profond désaccord

    La patronne du RN sait le nom Le Pen radioactif. Discrètement, un rendez-vous est organisé par l’entremise d’un ami, Verlaine Djeni, ancien militant Les Républicains actif sur le site d’extrême droite Boulevard Voltaire contre le mouvement Black Lives Matter, né en soutien des Afro-Américains victimes de violences policières. A table, Rachel Khan découvre en Marine Le Pen une femme attachante et fragile… comme torturée par des démons traînés dans l’héritage de Jean-Marie Le Pen. « Ta campagne, c’est comme un championnat, lui souffle l’ancienne sportive de haut niveau. Tu dois gagner sur toi-même. » Et enterrer les marqueurs du Front national.

    Un profond désaccord sépare toutefois les deux femmes. Très opposée à la binationalité, Marine Le Pen veut imposer aux Français possédant un passeport extra-européen de choisir. En 2017, déjà, elle avait hérissé les communautés franco-libanaise et franco-israélienne, puis rétropédalé en imaginant des exceptions pour quelques pays… Quitte à traiter les Français à la carte, selon leurs origines. Rachel Khan, française et gambienne, plaide pour la culture et l’éducation ; son hôtesse n’envisage qu’interdit et sanction. Un malaise persiste que ne parvient pas à dissiper la photo souvenir prise avec la chef de file populiste, vite effacée.

    Cette rencontre n’était-elle qu’un malentendu ? A moins que, dans le secret gardé par Marine Le Pen, d’improbables chemins de convergence se soient esquissés ? L’idée que la patronne historique de l’extrême droite puisse gagner l’Elysée inquiète moins Rachel Khan que l’activisme des « indigénistes ». Ce sont eux, se désespère l’écrivaine en privé, qui attisent les blessures identitaires au point d’être « responsables de la mort de Samuel Paty », l’enseignant décapité par un terroriste islamiste.

    Une partie de la gauche dénonce avec force une « tenaille identitaire » entre l’extrême droite et les mouvements dits « woke », accusés de diviser la société. Son chef de file, Manuel Valls, qui vient de publier Zemmour, l’antirépublicain (L’Observatoire, 140 pages, 12 euros), voit dans les yeux doux de Marine Le Pen une manœuvre tactique limitée, mais non dénuée d’effets. « A force d’abandonner la nation, la laïcité, de céder à l’islam politique, un pan de la gauche s’est affaissé, déplore l’ancien premier ministre. Ça libère des énergies, ça ouvre des espaces. Une partie de l’électorat de gauche est déjà passée au lepénisme il y a trente ans. Aujourd’hui, la peur de l’islam s’additionne à l’effondrement ouvrier. Est-ce que cette peur peut dominer ? Il ne faut pas l’exclure. »

    « Il y a une convergence »

    Au RN, on a flairé cet air du temps, dans la logique du tournant laïciste que Marine Le Pen a opéré en purgeant son courant catholique traditionaliste. Son conseiller spécial, Philippe Olivier, confiait lorgner « la gauche républicaine et laïque » qui s’élève contre un islam conservateur. Bruno Gollnisch, ancien numéro deux du Front national, s’esclaffait devant sa télé : « Nos constats sont partagés par [l’ex-député socialiste et cofondateur de SOS-Racisme] Julien Dray, c’est extravagant ! Il est devenu plein de bon sens, il parle comme Le Pen. »

    En écho, le président du RN, Jordan Bardella, se félicite après une interview où il a qualifié le rappeur Youssoupha de « racaille » : « Le Printemps républicain tient un discours similaire au nôtre. J’écoute [le président du mouvement] Amine El Khatmi sur CNews et je pourrais dire la même chose. Il y a une convergence entre deux milieux infranchissables. » Un piège facile, tendu à une gauche éparpillée, laquelle perçoit un peu moins Marine Le Pen comme la figure d’une extrême droite nationaliste et xénophobe, selon le dernier baromètre Kantar Public pour Le Monde.

    La députée du Pas-de-Calais a donc affûté sa critique des militants antiracistes. « Ce sont eux, les vrais séparatistes », assène-t-elle lors du débat à l’Assemblée sur le projet de loi « séparatisme » au printemps 2021. « Ces théories sont anticonstitutionnelles et comparables au Ku Klux Klan », dit-elle au Monde début janvier, le jour où la Sorbonne accueille un colloque controversé « anti-wokisme ». Ce concept fourre-tout, peu connu des Français, l’est moins encore des seuls électeurs du RN, selon un sondage de l’IFOP de février 2021.

    Au congrès du parti à Perpignan, le porte-parole du RN Sébastien Chenu avait longuement discouru contre la « culture woke », décriant le fait qu’« il y a une égalité raciale à imposer » et « d’éternelles victimes »… La salle avait applaudi mollement. Qu’importe, Marine Le Pen renouvelle son discours identitaire au nom de la République et de « l’unité nationale », dans l’objectif, le moment venu, de dissuader une partie des électeurs de gauche de se mobiliser contre elle.

    Sa vision n’a pourtant guère évolué. Chantre d’une « société unifiante », elle combat les politiques de lutte contre les discriminations qu’elle juge déviantes. Une réflexion à l’Opéra de Paris pour mieux représenter la diversité dans les ballets ? Elle s’alarme que des œuvres de Rudolf Noureev disparaissent du répertoire « au nom d’un antiracisme devenu fou ». Mieux refléter la population française à la télévision ? Elle accuse le CSA de publier « une sinistre comptabilité ethnique ». Quand le chef de l’Etat confie à des historiens le soin d’exhumer des héros français nés de l’immigration, de Marc Chagall à Paulette Nardal, elle le qualifie de « grand séparatiste » et fustige « un concours pour trouver 300 noms d’Arabes et de Noirs ». « Il n’y a pas de héros arabes pour les Arabes, noirs pour les Noirs… », poursuit-elle, omettant que ces noms enrichissent le corpus de tous les Français.

    Se montrer humaine

    Si le RN accuse les activistes de la gauche intersectionnelle de « détester ce pays », il fait planer ce soupçon sur les Français d’origine étrangère. Karim Benzema aussitôt réintégré dans l’équipe de France, les cadres de Marine Le Pen relaient une « fake news » circulant dans les milieux d’extrême droite selon laquelle le footballeur se sentirait plus algérien que français. Une défiance liée à un projet de discrimination assumée des étrangers, porté par une vision nativiste, selon laquelle plus l’on est perçu comme étant présent de longue date dans le pays, plus l’on y est légitime.

    Mais, à l’inverse de son père, Marine Le Pen se garde de citer la théorie raciste du « grand remplacement ». C’est en plus habile politique qu’elle surfe sur les peurs culturelles et identitaires. Elle affirme que l’islam est compatible avec la République, point de bascule qui la distingue d’Eric Zemmour. Tout faux pas, sait-elle, lui revient en boomerang. En mars 2021, elle répond aux accusations de xénophobie et de racisme sur BFM-TV : « Moi je n’ai pas de sentiments négatifs à l’égard des étrangers, j’ai aucune haine, aucune peur. » Mais pour l’illustrer, elle évoque… l’outre-mer. Les soutiens d’Emmanuel Macron s’empressent de souligner ce raccourci qui assimile étrangers et Français ultramarins par la couleur de peau.
    Jouer l’unité pour pénétrer des « milieux infranchissables », mais aussi se montrer humaine, libérée des « forces internes » du lepénisme. Ostracisée à l’école, boudée par la clientèle lorsqu’elle se rêvait avocate, Marine Le Pen dit avoir souffert de l’exclusion. « Je sais ce que c’est d’être discriminée, s’épanche-t-elle auprès du Monde. Dans les élites, je suis la seule à l’avoir été vraiment. C’est pour ça que je suis aussi dure, que je veux séparer le bon grain de l’ivraie. » « Marine n’a jamais été le diable. Il y a de petits diables mais elle essaie de les écarter, la défend Wallerand de Saint-Just, rare historique gravitant encore dans sa garde rapprochée. Notre slogan, c’est “Les Français d’abord” ; ça veut dire qu’il peut y avoir les autres ensuite. »
    Quelques mois après son couscous dominical, Marine Le Pen a abandonné sa chasse à la binationalité. Elle veut toujours soumettre les binationaux à la déchéance de nationalité en cas de crimes graves, et traquer les « complices » de « l’idéologie islamiste ». Mais l’interdiction d’appartenir à deux pays disparaît de son projet sur l’identité et l’immigration, puis de son programme pour 2022. « Cela inquiète inutilement les Français d’origine étrangère », glissait la candidate cet automne, persuadée que « la France a changé »… et décidée, surtout, à montrer qu’elle n’est plus tout à fait la même.

    #gauche_républicaine #PS #PCF #Printemps_républicain #LREM #RN

    • Et ça risque bien de fonctionner !

      Présidentielle : Marine Le Pen vue comme « un danger pour la démocratie » par seulement 50 % des Français.
      Zemmour aura vraiment été l’idiot utile de la dédiabolisation définitive du RN !

      C’est pourquoi le seul choix possible malgré l’excellente tribune de Jacques Rancière, c’est le vote de rupture pour un meilleur Avenir en commun.
      Même les troskistes de la 4ème Internationale (pour avoir assister à l’une de leur réunion dans mon département) préconisent d’utiliser ce vote pour rompre avec le système.

      Ensuite il sera toujours temps de s’organiser pour la mise en place de mouvements autonomes type notre Dame des Landes ou de se réapproprier les moyens de production ou de reconstruire des structures, des lieux de délibération ...

      Sinon seule une catastrophe écologique, ou une révolte de masse et grêve générale qui à elles deux ne sont pas prêtes de se produire, nous permettra de retrouver cette époque où existait une organisation solidaire de la vie et des formes de solidarité sociale.

      Amen ! :)))

    • mais moi aussi j’avais [edit j’aurais !] pu l’utiliser ce vote ! mais avec la manière d’essayer de concrétiser la promesse de vaincre qu’ils se ont faite (dénégation galavanisatrice ? sans doute, mais ça rend bête) la LFI en fait beaucoup pour l’interdire.

      la seule chance de pouvoir en faire usage, pour ce qui me concerne, c’est une occasion surgie du réel les contraignent au vrai. ça a pas été le cas de la pandémie. je suis pas sûr que vienne un grève importante ou une mobilisation lycéenne qui serait en mesure de les faire obéir, en plus de prétendre diriger (vers tant d’ornières, voire le précipice, cf. la porosité avec des thèses et postures fascisantes sur fond de virilisme et de « pensée » en majesté...).

  • Roussel manifestant avec la police, c’était le Printemps républicain. Hier soir, le PCF organisait un hommage à Charlie. Parmi les invités à la tribune, place du Colonel Fabien : Fourest, Gorce et Aram.
    Source, Elsa Faucillon, Députée des Hauts-de-Seine (Gennevilliers, Colombes, Villeneuve), PCF
    .https://twitter.com/ElsaFaucillon/status/1479160731350319108

    Le Colonel Fabien était un résistant de la première heure, dès 1939, peu après la signature du pacte germano soviétique.

    #PCF #Printemps_républicain #honte