• La guerre nucléaire qui vient - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/opinion/2022/02/27/la-guerre-nucleaire-qui-vient-2

    Lors de la conférence de presse qui a suivi sa rencontre avec Emmanuel Macron le 7 février à Moscou, Vladimir Poutine a fait allusion au risque d’escalade nucléaire, ce que la presse française n’a pas vraiment bien traduit, évoquant une menace plutôt qu’une mise en garde. Cela n’a pas échappé au philosophe Jean-Pierre Dupuy, dont nous avions publié, il y a tout juste trois ans, cet article important qu’il nous a semblé essentiel de reprendre aujourd’hui.

    Le (presque) non-dit de la crise actuelle est que nul ne peut écarter le risque d’escalade jusqu’à l’extrême, c’est-à-dire une guerre nucléaire. Poutine y a fait allusion pour la première fois lors de la conférence de presse qui a suivi sa rencontre à Moscou avec Macron. La presse française, négligence ou post-vérité, a très mal traduit ce qu’il a dit alors, qui ressemblait moins à une menace qu’à une mise en garde. En voici une traduction littérale : « Bien sûr, les potentiels de l’organisation conjointe de l’OTAN et de la Russie ne sont pas comparables. Nous le comprenons, mais nous rappelons également que la Russie est l’une des principales puissances nucléaires, et en termes de modernité de certains composants, elle est même en avance sur beaucoup d’autres. Il n’y aura pas de vainqueurs, et vous vous retrouverez entraînés dans ce conflit contre votre volonté. Vous n’aurez même pas le temps de cligner des yeux lorsque vous allez mettre en œuvre l’article cinq du traité de Rome. » [Avec une belle confusion, distraction ou voulue, entre le traité de Rome et celui de Washington qui régit l’OTAN.]

    Il y a exactement trois ans, le mardi 26 février 2019, AOC publiait mon premier article pour ses colonnes sous le titre « La guerre nucléaire qui vient ». J’y réagissais à un double événement très important pour la stabilité de l’Europe : la dénonciation par Trump le 1er février 2019, et le lendemain par Poutine, du traité dit INF (pour « Intermediate-Range Nuclear Forces », soit forces nucléaires de portée intermédiaire) datant de 1987, par lequel les États-Unis et l’Union soviétique s’engageaient à éliminer tous leurs missiles de croisière et balistiques lancés depuis le sol et ayant une portée se situant entre 500 et 5 500 km. Beaucoup d’experts considèrent que ce traité, signé par Gorbatchev et Reagan, a contribué à assurer la paix en Europe pendant toute cette période (donc, de 1987 à 2019).

    5 500 km : Poutine peut atteindre de Moscou le nord de l’Écosse et le Portugal. La dénonciation du traité INF n’a pas fait grand bruit il y a trois ans. Aujourd’hui, nous pressentons ce qu’il comporte de menaces terrifiantes.

    Jean-Pierre Dupuy, le 26 février 2022

    #Guerre #Nucléaire

  • Des gauches sans possibles ? Haud Guéguen et Laurent Jeanpierre
    https://aoc.media/opinion/2022/02/23/des-gauches-sans-possibles

    Si les gauches ne portent pas d’avenir lisible et désirable, comment pourraient-elles résister à la droite conservatrice ? Face à la désolation des partisans de l’émancipation, il nous faut déplacer le regard vers les potentialités et puissances de ceux qui contestent les pouvoirs en place. Dès lors, pensées critiques, projection utopique et partis de changements peuvent s’engager dans une voie de réconciliation, au bénéfice du plus grand nombre.

    La campagne pour l’élection présidentielle française illustre une fois de plus l’état de fragmentation et de décomposition des organisations politiques rattachées aux gauches. Elle témoigne aussi de la puissance inquiétante acquise par les thématiques portées par l’extrême-droite.

    Pour rendre compte de ce nouveau rapport de forces entre partis et entre cultures politiques, les facteurs matériels et organisationnels occupent une place prépondérante. La crise des organes d’expression des forces de gauche, l’éloignement social, politique et éthique de ses représentants vis-à-vis des groupes qu’ils représentaient, le financement et la démultiplication des titres de journaux, de revues et des chaînes promouvant les idées de droite et d’extrême droite, les transformations de l’actionnariat des médias, en sont, parmi d’autres, des causes essentielles.

    Crises de la critique

    Les facteurs intellectuels de cette transformation de l’échiquier politique dont nous sommes souvent les spectateurs atterrés ne sont pas pour autant négligeables. Parmi eux, il y a la distance voire la défiance, y compris à gauche, entre les professionnels de la politique et les idées des mouvements sociaux et intellectuels.

    De la contestation néo-conservatrice des savoirs critiques, en vogue actuellement en France, au mépris des universités au plus haut niveau de l’État, en passant par l’usage intermittent ou instrumental des sciences pendant la pandémie actuelle et pendant les campagnes électorales : plusieurs épisodes récents viennent rappeler la dévalorisation, dans le monde de la politique et parmi les formations d’extrême-droite, de droite mais aussi de gauche, des idées rigoureusement contrôlées ou discutées, de celles et ceux qui les font vivre. Peut-on prétendre améliorer ou réparer le monde si l’on n’est pas vraiment attentif aux idées nouvelles et à leurs conditions matérielles et socio-économiques d’élaboration ?

    Dans les universités et les laboratoires, c’est aussi la fragmentation qui domine, attisée sans doute par une tentation de repli face à l’hostilité croissante des pouvoirs, des médias et des politiciens. Du côté des sciences humaines et sociales, en particulier, les dernières décennies ont été marquées par une démultiplication des critiques de la réalité existante et des dénonciations des relations et des systèmes de pouvoir. Il y aurait lieu de s’en réjouir : l’état des choses est de plus en plus questionné et ausculté en vue de le rendre plus juste et plus vivable.

    Mais malgré la croissance continue des diplômés, et donc d’un public potentiel des discours universitaires, les effets politiquement bénéfiques de cette hypertrophie de la critique paraissent faibles. Les divisons partisanes ou programmatiques de la gauche reflètent aussi l’éclatement de la critique sociale. Plus grave : les condamnations de l’existant peuvent proliférer, elles restent trop souvent jugées hors sol et, en définitive, inoffensives. Rien ne semble enrayer le mouvement de déliaison entre pensées critiques et partis de changement en faveur du plus grand nombre. C’est même l’impression contraire qui domine : le hiatus entre champ politique et champ intellectuel est devenu tel que, plus les gauches se divisent et s’affaiblissent, plus les critiques de l’ordre social se spécifient et se complexifient à l’instar de ce que donne à voir la configuration nord-américaine.

    De cette situation vient sans doute le procès, devenu commun depuis quelques années, d’absence de véritable projet transformateur de la gauche. Certes, ce sentiment est d’abord la contrepartie directe de l’hégémonie des idées de droite extrême dans l’espace public. Car une diversité foisonnante de mesures, de réformes, d’alternatives concrètes et même – en période électorale – de programmes politiques coexistent en réalité dans le camp de l’autonomie, de l’égalité et de l’entraide. Mais derrière ce foisonnement de plus en plus large il manque tout de même un horizon clair, un dessein d’ensemble. Si les gauches ne portent pas d’avenir lisible et désirable, comment pourraient-elles résister aux droites conservatrice ou modernisatrice et à une extrême-droite n’ayant pour seule aspiration que de revenir à un passé fantasmé et défiguré ?

    La boussole des possibles

    Au cœur de cette dissociation entre critiques et politiques, entre programmes de mesures et tendances sociales de fond – véritable foyer de la crise des gauches depuis plusieurs décennies – il y a une ambivalence fondamentale sur ce qu’il faut tenir comme possible et sur la manière adéquate de s’y relier et d’en faire un principe d’action. Pour secondaire ou abstrait qu’il puisse paraître, ce problème est en réalité central d’un point de vue politique. Avant de le souligner, dissipons d’emblée un malentendu : évoquer les possibles, et leur meilleure appréciation, comme boussoles nécessaires pour transformer la réalité, ce n’est pas réduire le combat d’idées à une simple adaptation ou résignation à l’ordre existant.

    Pour beaucoup, le possible n’est d’ailleurs, au contraire, que le souhaitable, ce qui appelle à être réalisé, un idéal attendant sa propre mise en œuvre. Donnez-nous un « monde d’après », quelques fidèles plus ou moins nombreux pour y croire et s’en faire les prosélytes zélés, et vous obtiendrez, moyennant sans doute des oppositions farouches et des luttes féroces, un nouveau monde.

    Dit autrement : « Quand on veut, on peut » ; de la volonté suit la possibilité. Lorsqu’il n’est pas complice avec l’idéologie dominante du « tout est possible », ce volontarisme sans mode d’emploi, qui anime le désir de réforme plus ou moins radicale, est l’exact contraire de la stratégie. Voilà pourquoi, dans sa conception de la division du travail politique entre militants et intellectuels, le philosophe communiste italien Gramsci entendait corriger cet « optimisme de la volonté » partisane par le « pessimisme de l’intelligence » issu, selon lui, de la théorie marxiste. Ainsi concevait-il la rationalité pratique propre à son camp : comme une équation à la fois savante et intime entre la connaissance approfondie des contraintes de la réalité institutionnelle et sociale et les aspirations intraitables à modifier le monde capitaliste, entre une conscience des limites du possible dans une conjoncture donnée et un appel à leur franchissement indéfini.

    Près d’un demi-siècle après la mort du révolutionnaire italien, Raymond Williams, un autre marxiste, envisageait, quant à lui, un nouage différent du savoir et du vouloir pour les socialismes et les gauches. « Être vraiment radical, écrivait-il à l’adresse, d’abord, des intellectuels engagés, c’est rendre l’espoir possible plutôt que le désespoir convaincant ». Dans le champ de la critique et des sciences sociales, la formule – qui est loin d’avoir eu le même succès que celle de Gramsci – invite à de nouvelles expériences de pensée. Et d’abord celle-ci : plutôt que de partir des limites du possible, regardons les possibilités effectives ou latentes du présent.

    Après deux siècles d’enquêtes, les mécanismes de domination qui structurent l’ordre social sont en effet bien connus. Certes, leur inventaire ne peut jamais être achevé : il s’enrichit à chaque génération de nouveaux points de vue ; il demande à être actualisé à la lumière de l’histoire immédiate. Mais, pour les partisans de l’émancipation, les motifs de désespoir ne manquent pas. La défaite actuelle des gauches n’en est, au fond, qu’un composant supplémentaire. Face à cette impasse, une autre réflexion gagnerait à être renforcée : des raisons d’être des pouvoirs, déplaçons le regard vers les potentialités et puissances de ceux qui les contestent. De l’explication de l’existant, allons vers l’enquête sur les possibles.

    Aucun irénisme dans ce changement d’angle de vue : pas question de remplacer un verre d’eau à moitié vide par le même verre qu’on aura décrété à moitié plein. Pas question non plus de nourrir un nouveau catalogue sans fin de luttes « inspirantes » et de souhaits irréductibles – à quoi beaucoup de programmes politiques finissent par ressembler en période de compétition électorale. L’analyse des espérances d’une époque serait de peu de valeur théorique et pratique si elle n’allait de pair avec celle des obstacles qu’elles rencontrent.

    L’essentiel tient à ce qu’en imaginant l’avenir et en pensant l’action, le savant et le politique ne soient plus condamnés aux possibilités abstraites ni aux devenirs probables. Les utopies et les prévisions ont en effet été les techniques politiques privilégiées pour relier le présent à l’avenir et le savoir à l’agir. Les programmes (de cette élection comme des autres) en témoignent : vœux pieux et statistiques dialoguent et s’y succèdent toujours et encore.

    Or l’utopie tend à détacher l’avenir désirable du présent vécu ; et la prévision, à prolonger le passé pour prédire le futur. La première absolutise la distance du possible et du réel tandis que la seconde la dénie. Du jeu d’aller-retour et de miroir entre ces rapports à l’avenir dérive au passage le partage figé, et réducteur, entre révolutionnaires (« utopistes ») et réformateurs (« réalistes »). Entre ces deux manières usées de nouer la connaissance théorique et la politique transformatrice, il faudrait ménager une autre voie. Cette voie, c’est la recherche non pas de « possibles » préexistants en attente de leur réalisation mais de possibles à explorer et inventer, d’abord par une interprétation de ce que le présent rend ou non faisable : la recherche de possibilités réelles.

    Cartographie nouvelle

    Pour entamer cette quête, commençons par reconnaître que la définition du possible fait l’objet d’une lutte sans merci, que ce conflit est même l’un des ressorts fondamentaux de la politique moderne et des relations de pouvoir. La pandémie récente a livré de ce combat un concentré sans équivalent puisque nous y avons appris chaque jour à comparer et à opposer des prévisions épidémiologiques et économiques, à soupeser des anticipations du « monde d’après », à essayer de nous projeter souvent sans grands succès.

    Bourdieu l’avait bien vu dans ses Méditations pascaliennes, livre tardif dans son parcours, écrit pour cette raison en forme de bilan : au sein des « luttes à propos du sens du monde social », écrivait-il, celles qui portent sur « son orientation, […] son devenir, […] son avenir » représentent « l’un des enjeux majeurs […] : la croyance que tel ou tel avenir, désiré ou redouté, est possible, probable ou inévitable peut, dans certaines conjonctures, mobiliser autour d’elle tout un groupe et contribuer ainsi à favoriser ou à empêcher l’avènement de cet avenir ». C’est dans cette brèche que pourrait opérer un travail de cartographie de possibles « plus ou moins improbables », suggérait-il, apte à ouvrir l’avenir et à inciter à l’action.

    Apparaissaient aussi, en passant, les limites de la critique qu’il avait déployée jusqu’alors et du pari, qui avait été le sien, d’une politique de la prise de conscience des déterminations sociales et d’une mobilisation qui reposerait avant tout sur la diffusion d’une connaissance critique des dominations. La tâche inaugurale et irréductible d’un nouveau savoir ayant pour terrain le possible consiste alors à dessiner, avec le plus de précisions, le théâtre de la guerre symbolique pour la définition des possibles légitimes, tout l’arsenal des instruments de préemption et de canalisation des possibles – avec aujourd’hui, parmi eux, les algorithmes – opérées constamment par les puissances publiques et privées.

    L’enquête sur les possibles ne peut s’arrêter au dessin de ces lignes de front. Elle doit aussi s’attacher à reconstruire l’ensemble de forces immanentes représentées par les formes théoriques et pratiques de l’espérance. Les questions à traiter sont nombreuses. Qui espère et qui est résigné ? Autrement dit : sachant qu’il est établi que la « capacité à espérer » n’est jamais distribuée de manière égale dans la société et qu’elle tend à diminuer ou à osciller avec les ressources et les discriminations subies, à quelles conditions sociales peut-on accéder à un possible distinct du probable de la destinée comme de la rêverie sans lendemain ? Et l’enquête, de se poursuivre à partir de là.

    Quels sont dès lors les effets concrets et visibles des convictions utopiques ? Où sont les institutions et expérimentations alternatives et contre-hégémoniques et quels sont, dans la multitude des secteurs d’activité sociale (santé, écologie, culture, école, production, alimentation, énergie, etc.), leurs visées, leurs contenus, leurs manières de fonctionner et de dysfonctionner ? À quelles conditions peuvent-elles s’améliorer, survivre et se multiplier ? Comment la puissance publique pourrait-elle, pour peu qu’elle le souhaite, favoriser leur développement et leur viabilité ? Et comment l’hypothèse de la catastrophe écologique transforme-t-elle toutes les pratiques de projection et d’espérance ? Au fil d’une recherche qui serait guidée par ces interrogations, c’est toute une carte des possibles, avec les dynamiques qui les soutiennent et les divers obstacles qu’elles rencontrent, qui est susceptible d’apparaître.

    Arrimer l’imagination politique à une effectivité déjà existante : l’examen historique montre par ailleurs que ce projet intellectuel n’a rien d’extravagant ni d’abstrait. Il aura même traversé avec insistance les gauches historiques et la pensée socialiste, une certaine philosophie marxiste ou postmarxiste (qui irait de Ernst Bloch et les théoriciens de l’École de Francfort à Cornelius Castoriadis) et l’essor des sciences sociales (de Gabriel Tarde à Luc Boltanski, sans oublier Marx et Weber, à l’origine de ces questionnements). Pour aborder l’avenir, les socialistes du XIXe siècle n’avaient en effet pas séparé la science, l’utopie et l’émancipation.

    Le XXe siècle et, avec lui, une grande partie de la tradition communiste comme les nouvelles disciplines des sciences de l’homme et de la société ont au contraire dissocié ces pratiques au point même d’opposer sans nuances les faits et les conjectures, la science de l’histoire et la projection utopique, toujours au détriment du second terme. Voilà pourquoi le fantasme encore vif de l’ingénierie sociale a tant contribué aux atrocités inoubliables des cent dernières années. La cartographie des espoirs et des possibilités pratiques que nous voudrions développer ne saurait se confondre avec leur planification.

    En termes de savoir comme de politique, l’enjeu d’une science sociale du possible n’est pourtant pas spéculatif avant tout, mais bel et bien stratégique. Il s’agit de dépasser l’injonction écrasante à la Realpolitik sans sombrer dans l’idéalisme ou l’utopisme abstrait.

    Quelques mois d’une campagne électorale n’y suffiront assurément pas. Formuler et promouvoir une telle perspective de recherches peut même paraître à mille lieues des problèmes de l’élection présidentielle. L’adoption éventuelle d’un meilleur sens du possible n’en est pas moins d’autant plus urgente à un moment où la réalité de l’anthropocène modifie en profondeur les temporalités et les marges de l’agir politique.

    L’utopisme renouvelé et réflexif dont ont besoin les gauches, et que peuvent alimenter les théories et les sciences sociales, n’a pas vocation à se substituer à l’engagement et à la mobilisation. Mais sans son concours, toutes les bonnes volontés pourraient bien se heurter à la décomposition en cours, et les conceptions hors sol du possible nourrir à nouveau un sentiment amer d’impuissance puis de désolation.

     

    NDLR : Haud Guéguen et Laurent Jeanpierre viennent de publier aux Éditions La Découverte La perspective du possible. Comment penser ce qui nous arrive, et ce que nous pouvons faire.

    #gauche #gauches

  • Biens publics ou biens communs mondiaux ? - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/opinion/2022/02/08/biens-publics-ou-biens-communs-mondiaux

    La manière dont la pandémie de Covid-19 a jusqu’ici été gérée au niveau mondial témoigne plus que jamais de la grande tragi-comédie des biens publics mondiaux : proclamer haut et fort que tel ou tel bien est un bien public mondial consiste en réalité dans le respect du marché et dans ses interstices, à inclure autant qu’il est possible des dispositifs qui permettraient de pallier certaines de ses défaillances.

    En regard, la notion des biens communs mondiaux offre une voie nouvelle, encore en gestation, pour que s’organise de façon solidaire et équitable la lutte contre la pandémie en cours et celles à venir. Il ne s’agit plus de fabriquer des dispositifs permettant seulement de pallier certaines défaillances du marché, mais de créer les conditions de mise hors marché du bien.

    Ce texte a pour ambition de commencer à rendre explicite la différence profonde entre les notions de biens publics et de biens communs mondiaux et les enjeux qui s’y nouent. Si la première est une notion stabilisée qui trouve ses origines dans le courant de l’économie néoclassique essentialisant la nature des biens et postulant la suprématie des règles de marché, la notion de bien commun quant à elle, en cours d’élaboration, vise à renverser entièrement cette logique pour ouvrir sur une autre manière de penser et conduire la lutte contre les pandémies.

    #Communs

    • Biens publics ou biens communs mondiaux ?

      Par Benjamin Coriat, Fabienne Orsi, Jean-François Alesandrini, Pascale Boulet et Sauman Singh-Phulgenda
      Économiste , Économiste, Consultant, Juriste, Économiste

      Au moment où se multiplient les appels à ériger les vaccins, masques ou médicaments essentiels en biens publics ou biens communs mondiaux, il est urgent de mettre un terme à la confusion entre ces deux notions, qui empêche de saisir les enjeux politiques et intellectuels sous-jacents. La première s’inscrit dans la science économique mainstream et la seconde pense à l’inverse les conditions d’une mise hors marché et d’un autre mode de gouvernance.l

      Avec la pandémie de Covid-19, la notion de « biens publics mondiaux » a retrouvé de l’aura, celle-là même qui avait été propulsée sur le devant de la scène au moment d’une autre pandémie, celle du VIH/sida. À ses côtés cependant est apparue la notion de « biens communs mondiaux ».

      On ne compte plus les appels à constituer des biens publics mondiaux ou des biens communs mondiaux par des acteurs variés, aux horizons de pensée parfois diamétralement opposés : Président de la République française, femmes et hommes politiques de droite et de gauche, militant.e.s pour l’accès universel aux vaccins contre le Covid-19, organisations internationales, panels d’experts… Dans les discours ou dans les textes des uns et des autres ces notions apparaissent souvent comme synonymes, on les emploie l’une pour l’autre, on les amalgame. Tout se passe en réalité comme si ces notions étaient des mots, dont le sens exact importait peu, leur contenu tout autant. Leur signification, sans profondeur réelle, serait simplement là pour indiquer une direction dont on ne saisirait que très peu la finalité concrète.
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      Or pensons-nous, il est urgent de mettre un terme à cette confusion qui n’est pas seulement d’ordre sémantique. Elle empêche de saisir les enjeux conceptuels et politiques majeurs qui se jouent et avec eux la compréhension à la fois de l’impasse dans laquelle nous sommes arrivés.

      La manière dont la pandémie de Covid-19 a jusqu’ici été gérée au niveau mondial témoigne plus que jamais de la grande tragi-comédie des biens publics mondiaux : proclamer haut et fort que tel ou tel bien est un bien public mondial consiste en réalité dans le respect du marché et dans ses interstices, à inclure autant qu’il est possible des dispositifs qui permettraient de pallier certaines de ses défaillances.

      En regard, la notion des biens communs mondiaux offre une voie nouvelle, encore en gestation, pour que s’organise de façon solidaire et équitable la lutte contre la pandémie en cours et celles à venir. Il ne s’agit plus de fabriquer des dispositifs permettant seulement de pallier certaines défaillances du marché, mais de créer les conditions de mise hors marché du bien.

      Ce texte a pour ambition de commencer à rendre explicite la différence profonde entre les notions de biens publics et de biens communs mondiaux et les enjeux qui s’y nouent. Si la première est une notion stabilisée qui trouve ses origines dans le courant de l’économie néoclassique essentialisant la nature des biens et postulant la suprématie des règles de marché, la notion de bien commun quant à elle, en cours d’élaboration, vise à renverser entièrement cette logique pour ouvrir sur une autre manière de penser et conduire la lutte contre les pandémies.
      La lutte contre le Covid-19 ou le visage de Janus des biens publics mondiaux mise à nue

      La notion de bien public mondial a été forgée par extension de celle de « bien public » élaborée par la théorie économique néoclassique[1]. Selon cette théorie, les biens publics sont ceux qui combinent par nature la double propriété d’être « non-rivaux » et « non excluables ». On peut en donner pour illustrations emblématiques le phare installé à l’entrée d’un port et son signal ou la connaissance scientifique.

      Il s’agit alors de situations considérées comme exceptionnelles, caractérisées par des « échecs de marché » car l’incitation à produire ces biens de manière privative est nulle alors que leur utilité pour la société est certaine. En effet, dans ces situations (de non-rivalité et de non-excluabilité), chacun attendra que le voisin se « lance » dans la production du bien pour en bénéficier gratuitement. Le bien est sujet à des comportements opportunistes désignés comme des comportements dits de « cavalier libre » (free rider). Il en résulte que ce bien ne verra le jour que s’il est produit sur des fonds publics et une réglementation publique est au minimum requise et indispensable pour rendre possible la production et l’accès à ce type de bien.

      C’est à partir de ce concept, de facture entièrement « néoclassique », qu’a été élaborée et proposée la notion de bien public mondial (BPM). Elle partage en effet les mêmes fondements avec ceci en propre qu’elle a une dimension « globale » et « transgénérationnelle ». La notion de BPM apparaît au début des années 1980. Elle est alors liée à l’extension de la mondialisation à la montée d’enjeux transnationaux : biodiversité, santé, changement climatique nécessitant une coopération transnationale. Kindleberger en propose une première définition en les caractérisant comme : « l’ensemble des biens accessibles à tous les États qui n’ont pas forcément un intérêt individuel à les produire[2] ».

      Cette notion sera ensuite développée par Kaul, Grunberg et Stern qui vont lui donner son statut canonique[3]. L’ouvrage publié par ces auteurs va alors susciter un large débat tant sur le plan académique que dans les grandes instances internationales, débat qui va tourner autour de la question de savoir comment, à l’échelle globale, fabriquer des « biens publics », sachant que le marché est incapable de le faire et qu’il n’existe pas d’instance supranationale capable de le faire non plus.

      Pour autant, malgré la création de nouvelles formes d’organisations supranationales dans les années 2000 (par exemple dans le domaine de la santé le Fonds Mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme), les BPM n’ont jamais été autre chose que des « injonctions » ou des « proclamations » sans que celles-ci s’accompagnent de changements institutionnels dans les modes de production et d’administration dominants de ces biens.

      Les BPM ont surtout servi de socle à l’élaboration d’un nouveau « grand récit » en matière d’aide au développement, venant masquer l’allégeance aux règles de marché et à une gouvernance mondiale défaillante. On peut déclarer que la santé est un BPM tout en laissant le monde comme il est, c’est à dire ravagé par des maladies endémiques et les épidémies.

      Proclamer haut et fort que tel ou tel bien est un BPM consiste en réalité dans le respect du marché et dans ses interstices, à inclure autant qu’il est possible des dispositifs qui permettraient de pallier certaines de ses défaillances.

      La manière dont la pandémie de Covid-19 a jusqu’ici été gérée au niveau mondial témoigne plus que jamais de la grande tragi-comédie des BPM : les produits de santé indispensables à la lutte contre le virus partout dans le monde – masques, tests de dépistage, oxygène, médicaments essentiels et vaccins – ont été massivement soutenus par de l’argent public. Qu’il s’agisse de leur fabrication, de leur mise en marché accélérée, de leurs achats… Tout a été, la plupart du temps, garantis par des contrats publics.

      Dans nombre de cas, la responsabilité des risques sanitaires des produits de santé des firmes pharmaceutiques a même été transférée vers les États. Tout cela pour ensuite offrir ces biens à la toute-puissance du marché et au pouvoir de monopole des firmes. S’est ainsi créé un niveau de profits pour les compagnies pharmaceutiques qui bat des records historiques cependant que l’échelle des inégalités d’accès aux produits de santé entre les pays riches et les pays pauvres atteint des sommets.

      Le coup de projecteur éclaire en grand le visage de Janus des BPM : une logique éperdument marchande d’un côté, celle de la charité de l’autre. Engagés dans une course folle au nationalisme sanitaire, ignorant les appels répétés de l’OMS à la solidarité entre nations, les États les plus riches ont regardé de loin se fabriquer des mécanismes internationaux tels que le dispositif ACT-A (« dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre le Covid-19 ») et surtout la « facilité » d’accès aux vaccins COVAX souvent du fait d’organisations ou de fondations privées telles que la Gates ou le Wellcome Trust[4] avec, dans les faits, un pouvoir de contrôle très faible de l’OMS sur ces dispositifs.

      Ces mêmes États se glorifient chaque jour des donations de doses de vaccins aux pays les plus pauvres, sans qu’à aucun moment aucune règle ou accord ne vienne contraindre les logiques de marché. Les acteurs prépondérants en ces matières s’accommodant fort bien d’un modèle basé sur la charité qui ne vient en rien contrevenir à leurs très lucratives activités. Le refus des pays riches de soutenir la proposition de l’Inde et de l’Afrique du sud (dite du waiver) devant l’OMC de suspendre, le temps de la pandémie, les différents droits de propriété intellectuelle sur les produits de santé indispensables à la lutte contre le Covid-19 est sans nul doute la plus belle et la plus visible expression de la duplicité à laquelle conduit le discours sur les BPM.
      Les biens communs ou l’inversion radicale des fondements des biens publics mondiaux

      C’est à un renversement radical de logique et de démarche auquel nous invitons les lecteurs désireux de cheminer sur la voie des biens communs pour esquisser des pistes de réflexion pour gouverner véritablement contre les pandémies. Il s’agit de partir de la praxis, saisir des faits et des initiatives qui comportent en eux les germes d’un autre horizon et d’inscrire leur analyse dans un cadre conceptuel radicalement différent de celui des BMP.

      Ce n’est pas le lieu pour rendre compte de l’ensemble des différents concepts ainsi que l’histoire qui est au fondement de notre démarche et qui permettrait pourtant d’en mesurer pleinement le sens et les implications. Indiquons toutefois nos deux sources principales d’inspiration que sont les travaux de l’économiste et politiste Elinor Ostrom sur les Commons ainsi que ceux initiés en Italie par le juriste Stefano Rodotà à propos des Beni Comuni[5].

      Certes, aucun des deux auteurs n’a travaillé sur les pandémies. Néanmoins les éléments conceptuels qu’ils nous offrent ainsi que les pistes qu’ils ont ouvertes chacun de façon complémentaire sont une source d’inspiration féconde. Les réflexions conduites par ces auteurs permettent tout d’abord de rompre avec l’approche par les biens publics, en en renversant entièrement les fondements. Il ne s’agit plus de définir un bien à partir de sa nature intrinsèque mais par un processus instituant, c’est à dire par décisions et élaborations de règles partagées par la communauté concernant la production et l’usage d’une ressource donnée.

      Dit autrement, les biens communs ne deviennent et ne sont reconnus tels que si un régime de propriété et un ensemble de dispositions d’institutionnelles bâtis autour d’eux, permettent d’assurer à la fois leur production et leur accès au plus grand nombre. Dès lors un vaccin par exemple n’est par nature ni public, ni privé.

      En pratique cependant, les vaccins contre le Covid-19 sont actuellement des biens privés car propriété exclusive des détenteurs de droits de propriété intellectuelle et soumis aux règles du marché qui ont été construites, définies et donc instituées par la communauté internationale. Il en est ainsi des normes en matière de propriété intellectuelle qui se sont imposées à l’ensemble des membres de l’OMC lors de son institution en 1994.

      En conséquence, toujours pour prendre l’exemple du vaccin, il ne pourra devenir commun que lorsque qu’il sera institué comme tel sur la base de règles formulées par la communauté auquel il est destiné, c’est-à-dire qu’il sera soustrait au marché par décision politique, qu’il sera produit pour cela selon des modalités qui ne sont pas celles du marché capitalistique fondé sur la propriété privée exclusive et qu’il sera distribué selon un mode de gouvernance qui assurera son accès au plus grand nombre de façon égale.

      Il ne s’agit donc plus ici de fabriquer des dispositifs permettant seulement de pallier certaines défaillances du marché. Non, il s’agit de créer les conditions de mise hors marché du bien, cela à partir d’un ou de plusieurs processus instituant et ce à plusieurs niveaux qui vont de la fabrication du bien jusqu’au mode de gouvernance internationale permettant sa distribution. On comprend dans ces conditions comment peuvent se lire les débats et controverses suscités par la proposition de l’Inde et de l’Afrique du Sud de lever temporairement la propriété intellectuelle, soutenue désormais par plus de 100 États de pays à bas et moyens revenus. Si cette décision était prise, elle marquerait une rupture avec le modèle des BPM et ouvrirait une voie déterminante pour aller vers la fabrique de biens communs.

      Alors que l’OMC ne cesse de tergiverser, d’ores et déjà des initiatives pour lutter contre la pandémie se sont déployées, et n’ont jusque-là suscité que très peu d’attention de la communauté internationale. Elles partagent les mêmes objectifs de découvrir et produire autrement des traitements efficaces et de les rendre disponibles sans entraves au plus grand nombre.

      Sans pouvoir présenter de façon détaillée ces initiatives, citons le Consortium ANTICOV, une plateforme collaborative de recherche clinique promue par DNDi (Drugs for Neglected Diseases initiative) et ses alliés. Elle regroupe treize pays africains et un réseau international d’institutions de recherche associées dès avril 2020 pour lancer une étude clinique en Afrique pour des nouveaux traitements destinés à être proposés à des prix abordables pour les populations atteintes par des formes légères ou modérées de Covid.

      Dans le même esprit, a pris son essor le projet Covid Moonshot initié par un collectif de scientifiques né sur Twitter et travaillant en toute transparence pour lancer un essai préclinique en open source d’un traitement antiviral contre le Covid-19. Ces traitements qui seront libres de tout droit de propriété intellectuelle ou mis à disposition dans une démarche non exclusive selon les cas, sont conçus en priorité pour les patients du sud et devront obéir à des conditions de stockage et d’administration simplifiées.

      Plus récemment encore, le 28 décembre 2021, le Texas Children’s Hospital et le Baylor College of Medicine ont annoncé la mise au point d’un nouveau vaccin ainsi que l’obtention d’une autorisation d’utilisation d’urgence des autorités sanitaires indiennes afin que sa production puisse être engagée à grande échelle par des fabricants indiens, et par la suite en Indonésie, au Bangladesh et au Botswana. Le vaccin est libre de brevet, adapté aux contraintes logistiques des pays à bas et moyens revenus et l’accord prévoit une collaboration étroite avec un transfert de technologie et de savoir-faire.

      Enfin, concluons sur le modèle du vaccin Oxford/AstraZeneca proposé à prix dit « cost+ » (prix coutant + une faible marge de profit) et basé sur un réseau de licences d’exploitation conclues avec des producteurs installés sur tous les continents permettant tout à la fois d’assurer une diffusion internationale en vaccins produits localement à bas prix, et de préserver les droits du concepteur. Même si ce modèle présente certaines limites sur lesquelles nous ne pouvons revenir ici, il revêt une forme typique de « commun ».

      Certes ces initiatives sont encore émergentes, fragiles car évoluant dans un contexte qui privilégie les logiques de profits plutôt que la santé publique. Elles ont cependant l’immense mérite de montrer qu’une voie qui conduit à faire des produits de santé de véritables biens communs est ouverte.

      Il est plus que temps de sortir de la confusion dans laquelle les mots nous ont enfermés. Penser les biens communs : c’est penser les formes de leur institutionnalisation. La lutte contre la pandémie en fournit déjà et en fournira toujours plus fortement l’opportunité. Saisissons-là !

      NDLR : Cet article est le fruit d’une recherche en cours menée par les auteurs, coordonnée par Benjamin Coriat. Il fait écho par ailleurs à un épisode du podcast Public Pride, « Vaccin, bien public ou bien commun ? », dans lequel intervient Fabienne Orsi.

      Benjamin Coriat

      Économiste , Professeur émérite à l’Université Sorbonne Paris Nord

      Fabienne Orsi

      Économiste, Chercheuse à l’IRD et au LPED, Aix-Marseille Université

      Jean-François Alesandrini

      Consultant, Ex-directeur des affaires publiques de DNDi

      Pascale Boulet

      Juriste, Responsable de la propriété intellectuelle de DNDi

      Sauman Singh-Phulgenda

      Économiste, DNDi

      Notes :

      [1] Elle trouve son origine dans une « typologie des biens » qui a notamment été formulée par Paul A. Samuelson, « The pure theory of public expenditure », Review of Economics and Statistics, 1954, v. 36, p. 387-389.

      [2] Charles Kindleberger, « International public goods without international government », American Economic Review 1986, vol. 76 n°1, pp. 1-13

      [3] Inge Kaul, Isabelle Grunberg, Marc Stern, Les biens publics mondiaux et la cooperation internationale au XXIe siècle, Economica, 2002 (traduit de : Global Public goods : International Cooperation in the 21st century, New York : PNUD, Oxford University Press, 1999).

      [4] Dès le départ l’ambition et les objectifs d’ACT-A et de COVAX ont été fixés par un petit groupe d’organisations internationales et de fondations privées qui n’ont pas permis que soit mis en place un dialogue véritable entre les pays à bas et moyens revenus et les pays à haut revenu. La plupart des pays pauvres n’ont ainsi pas eu voix au chapitre pour déterminer qui produit quoi, où et selon quels tarifs et conditions d’accès. Ce processus de prise de décision « à huis clos » dans des cercles restreints est ainsi marqué par une absence de transparence pour nombre de pays à faible pouvoir de négociation ou d’influence. Notons également que ni la Chine ni la Russie n’ont été invités à la table.

      [5] Les références sont nombreuses, voici quelques repères : Elinor Ostrom, Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, De Boeck, 2010 (traduit de : Govering the commons, Cambridge University Press, 1999, par Lauren Baechler) ; Stefano Rodotà, « Souveraineté et propriété au XXIe siècle », Tracés, hors-série n°16, 2016, p. 211-232 ; Benjamin Coriat, La pandémie, l’Anthropocène et le Bien Commun, Les Liens qui Libèrent, 2020 ; Marie Cornu, Fabienne Orsi et Judith Rochfeld, Dictionnaire des biens communs, PUF, 2021 pour la deuxième édition.

  • Les primaires sont-elles compatibles avec la culture sociale et écologique ? - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/opinion/2022/02/01/les-primaires-sont-elles-compatibles-avec-la-culture-sociale-et-ecologique

    Tout ce texte est fort intéressant, et j’en partage une large partie. C’est en tout cas une voie intéressante pour repenser la relation mouvements/citoyens/partis et redonner aux partis un véritable rôle politique, mais aussi idéologique (culturel) et de sélection des porteurs de voix. Sans pour autant en faire l’alpha et l’oméga de la politique.
    J’apprécie aussi l’idée que le fonctionnement interne des groupes, associations, partis et alliances, le respect mutuel qui s’y exerce, sont en fait des préfigurations du monde que l’on souhaite, et ce faisant sont le seul moyen de re-investir les gens dans l’activité politique.

    Alors que la primaire populaire vient de se conclure par le choix d’une candidate de plus, il convient d’interroger la cohérence de cette démarche avec les valeurs sociales et écologiques, ouvertement plébiscitées par les porteurs de cette initiative. En continuant de se focaliser sur la sélection d’une personnalité et d’affaiblir in fine les partis, ce format apparaît comme une impasse. Pourquoi ne pas, plutôt, renouer avec la gauche plurielle en s’inspirant des shadow cabinets britanniques ?

    #Politique #Primaires #Refondation