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  • Les médias sous la domination de Google et Facebook (Mediapart, 5 janvier 2022) https://www.mediapart.fr/journal/economie/050122/les-medias-sous-la-domination-de-google-et-facebook

    L’exemple le plus révélateur est celui du Monde, qui est le premier quotidien, avec La Voix du Nord, à intégrer sur son site lemonde.fr cette nouvelle fonctionnalité baptisée « Suscribe with Google » (SWG). Décryptage du Journal du Net dans un article consacré « au pacte faustien » conclu entre la plateforme et le quotidien : « L’outil permet à un utilisateur qui dispose d’un compte Google de s’abonner au média partenaire par ce biais. C’est-à-dire sans friction car SWG renseigne automatiquement ses informations de connexion, qu’il s’agisse de ses nom et prénom ou de ses coordonnées bancaires, si celles-ci sont déjà associées à son compte Google. Des informations qu’il transmet ensuite au média partenaire. »

    https://www.journaldunet.com/media/publishers/1499021-suscribe-with-google-le-nouveau-pacte-faustien-des-medias

    Ce système SWG n’est pas une véritable nouveauté. Il s’apparente aux modalités de paiement conçues pour ceux qui disposent d’un compte Paypal ou qui s’abonnent au travers d’un compte Apple. Mais, dans le cas du Monde, ce système SWG est quelques mois après son lancement amendé. Google décide de faire un geste complémentaire, en prenant à sa charge 50 % du prix des abonnements pendant un an au Monde - et pas à la plupart des autres journaux disposant du même système. La plateforme américaine, dont l’immense fortune est fonction de sa position dominante sur le marché publicitaire, met la main dans tous les cas de figure sur des données hautement précieuses : une partie de la base abonnés du Monde. Les nouveaux abonnés au journal ne le savent donc pas forcément, mais s’ils ont profité d’une souscription à prix réduit, c’est au terme d’un vieux et pernicieux précepte : si c’est gratuit, c’est que c’est vous la marchandise !

    De l’intérêt grandissant de se démarquer de ces stratégies de captation. Difficile de lutter contre le sentiment que la partie est déjà perdue. cc @booz

    • Presse : une mission de l’Assemblée exige la transparence des accords avec Google et Facebook https://www.mediapart.fr/journal/economie/120122/presse-une-mission-de-l-assemblee-exige-la-transparence-des-accords-avec-g

      « Le fait le plus marquant du travail qui a été conduit est le manque de transparence des acteurs du numérique vis-à-vis de ceux dont ils exploitent les contenus à leur propre intérêt. En proposant aux plateformes numériques d’être auditionnées à huis clos, la représentation nationale aurait souhaité accéder à des informations lui permettant de comprendre les modes de calcul de la rémunération proposée. Le rapporteur et moi-même partageons une même déception sur le contenu de ces auditions. Évaluer la justesse de la rémunération proposée implique de lever l’opacité du fonctionnement des plateformes et des revenus qu’elles tirent de l’exploitation des données des tiers, y compris de leurs utilisateurs. »

      À lire ces lignes extraites de l’avant-propos du rapport que la députée (LR) Virginie Duby-Muller, présidente de la mission d’information « sur l’application du droit voisin », a dévoilé mercredi 12 janvier, on pourrait être enclin à penser que les travaux parlementaires sur cette question ont échoué ; et que le rapport, n’apportant aucune révélation précise sur les accords secrets entre Google, Facebook et les principaux médias, en porte la trace. https://s3.documentcloud.org/documents/21179890/le-rapport-de-lassemblee-nationale-sur-les-droits-voisins.pdf

      (…)

      Et plus loin, le rapporteur insiste : « Les auditions menées à huis clos par la mission n’ont pas permis d’obtenir le détail des accords de rémunération conclus au titre du droit voisin, ni même leur montant. Certains de ces accords ont même fait l’objet de clauses de confidentialité entre les contractants. Votre rapporteur respecte ces clauses de confidentialité et la mission a d’ailleurs organisé plusieurs auditions à huis clos. Pour autant, il considère que l’enjeu en termes de pluralisme de la presse est important et les accords pourraient avoir des répercussions, à terme, sur l’ampleur du soutien public à la presse et sur la redistribution de ces revenus aux journalistes. Pour cette raison, votre rapporteur recommande que l’intégralité du contenu des accords soit rendue publique. »

      L’interpellation est donc très forte, et risque de placer dans l’embarras nombre de journaux membres de l’APIG, qui dans de fréquents éditoriaux vantent la transparence sur les questions d’intérêt public – or c’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui. Comme le rapporteur regrette même que « le secret des affaires lui soit opposé », l’interpellation risque d’embarrasser tout particulièrement Le Monde et Libération, dont les directions ont signé les accords avec Google les plus contestables, dans le dos de leurs propres confrères de l’APIG. Car dans les deux cas, les rédactions concernées se sont engagées fortement au plan éditorial contre le secret des affaires.

      (…)

      La mission d’information a d’ailleurs pu elle-même le vérifier en procédant, le 23 septembre 2021, à l’audition de Louis Dreyfus, président du directoire du groupe Le Monde. Avec beaucoup de morgue, le patron du Monde a fait comprendre à ses interlocuteurs qu’il se refuserait à toute démarche solidaire et collective avec le reste de la presse et qu’il continuerait de soutirer le maximum d’argent possible à Google, quitte à ce que les autres journaux n’aient que des miettes. Évoquant l’accord conclu par les journaux IPG, il a ainsi ces mots : « Il ne faut pas s’écarter de ce critère, au risque que le bénéfice soit dilué par le nombre de bénéficiaires. Ma recommandation est que l’IPG reste le critère d’attribution. » https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/comptes-rendus/dv/l15dv2021009_compte-rendu

      (…)

      Jean-Marie Cavada, qui a, lui aussi, été entendu par la mission le 16 septembre 2021, lors d’un échange en visio (à écouter à partir de la 31e minute), a ainsi donné une évaluation de la prédation opérée en France sur la presse par les grandes plateformes et les « crawlers », c’est-à-dire les différents algorithmes d’indexation : « Si l’on regarde l’étendue des prédations, c’est probablement entre 800 millions et un milliard d’euros [par an] qui échappent à l’économie de la démocratie à travers la presse », a-t-il estimé.