• « Au mieux le choix du slogan de Yannick Jadot est maladroit, au pire il s’inscrit dans la droite ligne d’une gauche réformatrice et néo-libérale à l’œuvre depuis le fameux tournant de la rigueur en 1983. »
    http://www.regards.fr/actu/article/jadot-2022-tout-changer-pour-que-rien-ne-change

    Chapitre après chapitre, le programme écologiste propose d’agir enfin pour le climat, de « faire société » ou d’apaiser le monde par la « diplomatie climatique ». Point révélateur pour situer un programme politique, les propositions destinées aux entreprises ont de quoi rendre sceptique : pas un mot quant aux actionnaires et aux dividendes. Chez #EELV, on préfère toujours privilégier le conditionnement des aides publiques aux engagements sus-cités ou l’instauration d’un bonus-malus en fonction de la nature des activités. Cela s’inscrit dans la continuité du principe pollueur-payeur prôné par l’Union européenne – politique décriée par la Cour des comptes européenne. Selon un de ses derniers rapports, le coût pour la société demeure élevé. La pollution atmosphérique résiduelle (après l’application du principe) causée par 14.000 grandes installations industrielles au cours de la période 2008-2012 se situait entre 329 milliards et 1053 milliards d’euros.

    Tout compte fait, le candidat écolo semble ne pas avoir non plus tiré les leçons du mouvement des gilets jaunes. Pour associer les territoires, il propose de créer une Cour d’équité territoriale chargée de la juste allocation des ressources. Les solutions proposées restent trop superficielles pour faire de la transition écologique une question d’équité. Déclencheur de la crise de 2018, l’équation sociale, spatiale et temporelle quant à l’utilisation de l’automobile ne trouve pas de résolution. L’augmentation du Smic à 1500 euros ne saurait combler le coût que représente la sortie des voitures polluantes pour les classes populaires.

    La tambouille, la tambouille !

    Si dans le texte, les références à la gauche se font rares, les manœuvres politiques à l’œuvre entre Christiane Taubira et Yannick Jadot renvoient aux vieilles méthodes. Les proches des deux candidats se sont rencontrés pour discuter d’une potentielle union, derrière les écologistes. Ils auraient même proposé à Christiane Taubira de prendre la tête d’une assemblée constituante si Yannick Jadot était élu président de la République. Pas vraiment sûr qu’ils aient compris le sens de ce qu’étaient une assemblée constituante qui prévoit que l’ensemble des décisions – du contenu au contenant – soient prises par les citoyens. Et non pas imposées par le haut.

    Ce qui s’apparente à une tambouille politique agace jusque dans les rangs du parti écologiste. En témoigne la réaction à chaud de Sandrine Rousseau sur BFMTV le 8 février dernier : « C’est de la politique à l’ancienne, que c’est exactement ce qu’il faut faire pour dégoûter les gens, c’est à dire des réunions d’alcôves dans des caves entre hommes ».

    Alors « Changeons ! », oui. Toute la gauche est d’accord. C’est le principe même de l’action publique et d’une campagne électorale : proposer une ligne politique, un changement, une alternance. Seulement, un véritable changement ne se décrète pas, il se prépare. Ce doit être au vu de l’urgence climatique, un processus de création collective. La question tangible est alors de se demander par quelles méthodes, outils et alliances le changement peut et doit se faire. Et surtout sur quelles luttes sociales s’appuyer pour le mener politiquement.

    En cela, au mieux le choix du slogan de Yannick Jadot est maladroit, au pire il s’inscrit dans la droite ligne d’une gauche réformatrice et néo-libérale à l’œuvre depuis le fameux tournant de la rigueur en 1983 – et il faut bien dire que l’époque à gauche ne nous habitue pas au mieux.