• Les morts de Waterloo ont-ils été transformés en fertilisant agricole au 19e siècle ?
    https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/archeologie/les-morts-de-waterloo-ont-ils-ete-transformes-en-fertilisant-agrico


    Au dix neuvième siècle les capitalistes britanniques exploitaient sans scrupules les soldats encore àprès leur mort. Depuis la première guerre mondiale les hécatombes atteignent des dimensions qui poussent les états à tenter l’apaisement des survivants en fournissant des sépultures individuelles à un maximum de tombés. Les progrès dans la fabrication d’engrais chimiques leur facilitent la tâche.

    21.6.2022 par Bernadette Arnaud - Des fouilles archéologiques menées depuis 2015 sur le site de la bataille de Waterloo (1815) n’ont livré que de très rares restes humains... Or ces modestes découvertes soulèvent une question majeure : où sont passés les corps des dizaines de milliers d’hommes et de chevaux de cette bataille napoléonienne ? Une explication, -peu relayée tant elle est macabre-, voudrait qu’ils aient pu être transformés en engrais à usage agricole… Un mystère qui devrait être prochainement réexaminé par de nouvelles fouilles archéologiques menées sur le célèbre site.

    Comme chaque année depuis 2015, -hors la période de pandémie de Covid-19-, l’organisation britannique « Waterloo Uncovered », un organisme qui travaille en coopération avec des militaires blessés ou atteint du syndrome de stress post-traumatique (SSPT), participe à des recherches archéologiques dans la plaine de Waterloo (Belgique), lieu de la grande bataille napoléonienne de 1815. Sous la houlette de l’archéologue Tony Pollard, directeur du Centre d’Archéologie des Champs de batailles de l’Université de Glasgow (Ecosse), une soixantaine de participants ont déjà exploré de nombreux secteurs du champ de bataille. En 2019, passant particulièrement au crible les alentours de la ferme de Mont-Saint-Jean, l’un des épicentres des combats, ils avaient ainsi été mis au jour des munitions et surtout trois os provenant de membres inférieurs - probablement issus d’amputation - dégagés à proximité du bâtiment ayant servi d’hôpital de campagne. L’un des os dégagés portait encore des marques de scie... « Cette découverte poignante a immédiatement transformé l’atmosphère de la fouille, tissant un lien direct entre les personnes qui avaient souffert ici en 1815 et les soldats vétérans présents », avait alors déclaré Tony Pollard dans une interview au Guardian.


    Un des rares ossements humains mis au jour dans la plaine de Waterloo, lors de fouilles archéologiques. Crédits : Waterloo Uncovered

    Une pénurie de restes humains qui interroge

    L’exhumation de ces restes humains constituait surtout une première pour l’archéologue écossais qui étudie la plaine de la bataille de Waterloo, « le plus affreux carnage que j’ai jamais vu », selon le maréchal Ney (1769-1815). La pénurie d’ossements exhumés intrigue en effet depuis longtemps le spécialiste : à ce jour, sur ce site où se sont affrontés près de 269.000 hommes et où 47.000 d’entre eux environ ont perdu la vie ou ont été blessés, un seul squelette complet a été récupéré ! En 2012, lors du creusement d’un parking, la dépouille d’un soldat a en effet été recueillie. Il appartenait à la King’s German Legion (KGL) du roi Georges III, des unités militaires hanovriennes formées en Grande-Bretagne et Irlande entre 1803 et 1816. La balle de mousquet ayant entrainé sa mort a même été retrouvée au milieu de ses côtes, l’ensemble étant désormais exposé dans le musée du site.


    "La Bataille de Waterloo, le 18 juin 1815", par Clément Auguste Andrieux (1829-1880). Crédits : AFP

    A la recherche des fosses communes

    Que sont donc devenues les dépouilles des soldats de Waterloo ? Interrogation à laquelle Tony Pollard vient de consacrer un article dans le Journal of Conflict Archaeology paru ce 18 juin 2022. L’archéologue écossais y développe en effet une hypothèse : « S’il est extrêmement rare de trouver des restes humains sur ce champ de bataille, c’est que de nombreuses fosses communes ont été pillées et les os broyés pour être utilisés comme engrais dans les années qui ont suivi la bataille de 1815 ». Des propos qu’il avait déjà tenu dans un article du Telegraph le 17 juillet 2019 relayé par le très sérieux Smithsonian Institute du 18 juillet 2019 qui évoquait de son côté « les fabricants d’engrais anglais qui récupéraient ces os »… ! Diantre ! Dans la presse anglo-saxonne, les choses semblaient établies ! Mais de ce côté-ci de la Manche ? Sommes-nous face à une rumeur, un élément de folklore à classer dans la longue liste des légendes urbaines ? Ou bien s’agit-il de faits historiques avérés ? A bien lire ce qui a été écrit autour des affrontements homériques que furent les batailles napoléoniennes, il demeure difficile aujourd’hui encore de se faire une idée de la réalité de ces comportements profanatoires, alors que les cimetières de la Première (1914-1918) et Seconde guerres mondiales (1939-1945) sont l’objet de tous les soins et commémorations. Rappelons que la considération attribuée à l’individualisation des corps des soldats morts au combat n’est seulement advenue qu’avec la Première guerre mondiale.


    Emplacements indicatifs de possibles lieux de sépultures, de concentrations de fosses, ou de bûchers, après de récentes analyses de sources. Crédits : Waterloo Uncovered

    Toujours est-il que pour tenter de cartographier l’emplacement des fosses et lieux de sépultures non repérés à ce jour, l’archéologue écossais raconte avoir réuni tous les témoignages d’archives et informations existants émanant de témoins oculaires présents au lendemain de la bataille de 1815. Des croquis, des peintures, des récits, signalant des lieux où avaient été creusées des fosses, grandes ou petites (cf. carte). En particulier des dessins récemment découverts, et des lettres et documents personnels inédits d’un certain James Ker, un marchand écossais vivant à Bruxelles au moment de l’affrontement, dont les informations recueillies à Waterloo dès le 19 juin 1815 n’avaient jamais été publiées. « Il serait vraiment intéressant de retrouver l’emplacement des fosses desquelles des os ont été extraits, car toute perturbation produit des anomalies géophysiques dans les sols », explique ainsi Tony Pollard. Pour tenter de les localiser, des relevés du champ de bataille utilisant des méthodes électromagnétiques devraient démarrer au cours des prochaines fouilles archéologiques. Interrogé, le Dr. Kevin Linch, expert en guerres napoléoniennes à l’Université de Leeds (qui ne participe pas à ces recherches), a déclaré de son côté, « qu’il y avait de bonnes raisons de penser que les os des morts avaient été prélevés pour être utilisés comme engrais ». Des travaux prochains qu’approuvent la Napoleonic & Revolutionnary War Graves Charity, pour lequel il serait important de retrouver et connaitre ce qui est véritablement advenu des dépouilles.


    "Enterrer les morts au Château d’Hougoumont après la bataille de Waterloo (1815)". Aquarelle de James Rouse, de 1817. Crédits : Journal of Conflict Archaeology

    Ce que l’histoire nous dit, c’est qu’à Waterloo, les morts auraient été inhumés ou incinérés. Les descriptions des carnets du Capitaine Coignet (1799-1815), l’un des célèbres soldats de la Garde Impériale, n’en font pas mystère puisqu’elles indiquent que « pendant huit jours des buchers brulèrent nuit et jour » ; ou que « les dépouilles des soldats morts étaient entassés dans des fosses ». Ce qu’ont confirmé quelques autres découvertes de fosses napoléoniennes effectuées au 21e siècle, à l’instar des 3.000 squelettes exhumés à Vilnius (Lituanie) en 2001 (lire Sciences et Avenir n° 663). D’autre part, des documents rapportent que dès la fin des combats, nombreux étaient ceux qui se rendaient sur les champs de bataille pour « dépouiller » les morts, prélever les vêtements des soldats, leurs chaussures, leurs armes, -parfois jusqu’à leurs dents pour en faire des prothèses ! Une collecte d’artefacts revendus en « souvenirs » connue des historiens.


    Dépouillés de leurs vêtements, de leurs biens, de leurs armes et tout ce qui pouvait avoir la moindre valeur, les morts de Waterloo ont été placés dans plusieurs fosses communes... Crédits : Journal of Conflict Archaeology

    Contactés, des spécialistes de l’étude des traitements funéraires des champs de batailles ont rappelé que pour ces périodes napoléoniennes « les sites étaient complètement nettoyés après les batailles, et qu’une quinzaine de charniers sont documentés à travers l’Europe, ce qui ne correspond donc pas une absence totale de corps ». Néanmoins, la question que pose l’archéologue Tony Pollard n’est pas anodine : des milliers d’hommes -et des dizaines de milliers de chevaux- tués sur les champs de bataille des guerres napoléoniennes ont-ils connu, -ou non-, ce destin, que d’avoir au 19e siècle, été transformés en fertilisant agricole ?

    Ce thème peu évoqué semble en fait lié au développement agricole de l’époque. Un sujet sur lequel travaille l’archéologue Ecossais qui a confié à Sciences et Avenir être actuellement en train d’écrire un livre sur le sujet.

    Des sociétés d’engrais ont-elles fait irruption dans les sépultures des guerres napoléoniennes ?

    Pour comprendre, revenons au contexte de l’époque. Au 19e siècle, l’agrochimiste allemand Justus von Liebig (1803-1873) met en lumière le principe de fertilisation. Pour croître dans de bonnes conditions, les plantes doivent pousser dans un sol riche en azote, en potassium et phosphore. L’idée majeure étant qu’une fois les récoltes effectuées, il fallait rendre à la terre les nutriments prélevés sous peine de voir les sols s’appauvrir. Mais où trouver les précieux minéraux en quantité ? Le fumier procuré par les animaux des fermes jusque-là ne suffisait plus en ces aubes de révolution industrielle et de croissance des populations à nourrir. Pour produire plus, les cultures nécessitaient l’apport de quantités massives de fertilisants.

    Dans les années 1830-1840, les os, très riches en phosphate de calcium, auraient alors été considérés comme d’excellents engrais… Brûlés ou broyés ils étaient répandus dans les champs pour augmenter les rendements. Ainsi bien des fossiles paléontologiques ont-ils fini pulvérisés. Mais ils ne sont pas les seuls, semble-t-il ! Des entreprises anglaises auraient alors pensé au trésor qui se trouvait enfouis sous les champs de bataille... Elles se seraient rendues sur les sites des guerres napoléoniennes pour récupérer les ossements des soldats et chevaux tombés, ensuite broyés et vendus aux agriculteurs britanniques.

    « Des fosses communes ont été vidées par des entrepreneurs à la recherche d’os utilisés comme engrais pour faire de la farine d’os dans la première moitié du 19e siècle. Il existe de nombreux journaux faisant références à cette pratique à l’époque - avec les principaux champs de bataille européens dans lesquels étaient recherchés des tombes contenant de grandes quantités d’os. Leipzig est un autre champ de bataille mentionnés dans ce contexte. Les os ont été expédiés vers des ports tels que celui de Hull en Angleterre, mais également vers l’Écosse, où ils étaient broyés pour être utilisés comme engrais afin de favoriser la croissance des cultures. Seuls les charniers valaient la peine [des fosses contenant des corps en quantité, ndlr] et des contacts locaux ont probablement dû être payés pour identifier l’emplacement de ces sépultures. Ce qui ne veut pas dire que chaque charnier a été traité de cette manière, mais beaucoup semblent l’avoir été », a expliqué à Sciences et Avenir, l’archéologue Tony Pollard, lors d’un précédent échange.

    Auraient ainsi été visités les champs de bataille d’Austerlitz, Waterloo et quelques autres. En 1822, un journal britannique rapportait d’ailleurs : « On estime que plus d’un million de boisseaux d’os humains et inhumains [chevaux, ndlr] ont été importés du continent européen l’année dernière dans le port de Hull. Les quartiers de Leipzig, Austerlitz, Waterloo et de tous les lieux où se sont déroulés les principaux combats de la dernière guerre sanglante ont été balayés de la même façon par les os du héros et du cheval qu’il a montés. Ainsi rassemblés chaque trimestre, ils ont été expédiés au port de Hull, puis acheminés aux broyeurs d’os du Yorkshire, qui ont installé des moteurs à vapeur et des machines puissantes dans le but de les réduire à l’état de granulaire. [..Ils ont été envoyés principalement à Doncaster, l’un des plus grands marchés agricoles de cette partie du pays, et son vendus aux agriculteurs pour qu’ils fassent purifier leurs terres…] »

    Une campagne géophysique « ambitieuse »

    Dans le Journal de la société statistique de Paris, et sa séance du 4 mars 1863, on pouvait lire : « La culture anglaise est tellement pénétrée de l’importance du rôle du phosphate de chaux comme engrais, que des spéculateurs ont fouillé pour elle, tous les champs de bataille de l’Europe, et que récemment encore, des navires apportaient, dans les ports anglais, où elle se vendaient à gros bénéfice, des cargaisons d’ossements humains recueillis en Crimée ».

    Toutes ces matières finirent toutefois par s’épuiser. Ces pratiques auraient cessé dans les années 1860, après une campagne de rumeurs contre les agriculteurs, soulignant qu’ils jetaient les corps de leurs propres enfants dans les champs. Il est à noter que ces mêmes usages, la transformation en engrais, concernèrent les momies égyptiennes rapportées par cargaisons entières -un fait largement confirmé par des documents historiques. A partir de 1841, remplaçant les ossements, ces engrais aurait été recherché dans les îles à guano -des montagnes de déjections d’oiseaux marins- acheminées en Grande-Bretagne et dans l’ensemble de l’Europe depuis les îles Chincha, au large des côtes du Pérou.

    Pour déterminer une fois pour toute si les restes des morts de Waterloo ont fini broyés en « farine d’os », Tony Pollard et ses équipes du « Waterloo Uncovered » souhaitent pouvoir mener dans les années qui viennent, une campagne géophysique « ambitieuse » pour tenter d’identifier les zones où le sol a été perturbé et où aurait pu se trouver l’emplacement d’anciennes fosses… vidangées.

    Le 18 juin 1815, se sont opposés dans la plaine de Waterloo, à 18km au sud de Bruxelles, les forces françaises constituées de 74.000 hommes et 266 canons, aux Forces alliées (195 000 hommes), composées des armées anglo-hollando-Belges : 68.000 hommes, et prussiennes : 127.000 hommes. Débutée à 11h35, la bataille s’est achevée autour de 21h par la défaite des troupes napoléoniennes. Les pertes françaises (tués et blessés) se sont élevées aux alentours de 20.000 hommes, de même que les pertes alliées, 20.000 hommes tués et blessés dont 7.000 prussiens).
    Dictionnaire des batailles de Napoléon, d’Alain Pigeard, editions Taillandier.


    Forces en présence dans la plaine de Waterloo, le 18 juin 1815 (en bleu, les armées napoléoniennes). Crédits : Journal of Conflict Archaeology

    Histoire de plantes : l’engrais des champs de bataille
    Par Marc Mennessier Publié le 30/03/2018
    https://www.lefigaro.fr/jardin/2018/03/30/30008-20180330ARTFIG00257-histoire-de-plantes-l-engrais-des-champs-de-batai

    Le mystère de la disparition des corps des soldats à la bataille de Waterloo enfin résolu ?
    https://www.ouest-france.fr/leditiondusoir/2022-06-22/le-mystere-de-la-disparition-des-corps-des-soldats-a-la-bataille-de-wat

    #capitalisme #agriculture #engrais #chimie #phosphates #guerre #histoire #Belgique #Waterloo #bataille

  • Covid-19 en Afrique : jusqu’à 90% des morts contaminés dans une morgue - Sciences et Avenir
    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/covid-19-en-afrique-jusqu-a-90-des-morts-contamines-dans-une-morgue


    #covid

    Les résultats montrent que la majorité des #décès ont eu lieu en dehors des structures de santé, dans des communautés très appauvries. En moyenne, 32% des personnes décédées ont été testées positives au Covid-19. Un chiffre qui est monté jusqu’à 89,3% lors de la deuxième phase de janvier à juin 2021. A ce moment-là, 4 personnes sur 5 mouraient dans les villages.

    Analyse avec Antoine Flahault, professeur de santé publique à l’Université de Genève et directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de cette même université.

    Sciences et Avenir : On apprend dans cette étude que les contaminations au Covid-19 ont atteint environ 90% des morts d’une morgue de Lusaka. Que penser de ce chiffre très élevé ? Est-il représentatif de la situation en #Afrique dans sa globalité ?

    Antoine Flahault : Ces résultats sont très importants parce que l’on a eu trop rapidement la #paresse intellectuelle de trouver de rapides explications à l’apparent faible nombre de cas et de décès dus au Covid rapportés en Afrique subsaharienne. On a invoqué notamment la démographie jeune de la population, l’immunité croisée avec d’autres infections préalables, ou encore le recours fréquent à la chloroquine... alors que cette recherche montre qu’il faut d’abord se poser la question de la sous-estimation massive du problème dans les pays à bas niveau de #revenus. Malheureusement, je crains que l’on puisse tout à fait transposer les résultats de cette recherche conduite en Zambie au reste de l’Afrique subsaharienne.

  • La #catastrophe #écologique couvait déjà il y a 50 ans

    https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/la-catastrophe-ecologique-couvait-deja-il-y-a-50-ans_168334

    En 2022, deux limites planétaires ont été dépassées. Au total, six de ces seuils fatidiques qui déterminent l’habitabilité de la Terre sont désormais dans le rouge. Une surprise ? Pas vraiment. Car il y a cinquante ans, un rapport scientifique démontrait déjà que poursuivre une croissance illimitée dans un monde aux ressources finies provoquerait une déstabilisation des équilibres planétaires, faisant courir de graves risques à l’humanité.

    Publié en 1972, traduit en 36 langues et vendu à plus de dix millions d’exemplaires, l’ouvrage intitulé « Les Limites à la #croissance » provoqua une onde de choc au sein de la communauté internationale. Il fut rédigé par quatre chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT, États-Unis) - Dennis et Donella Meadows, Jorgen Randers et William Behrens - spécialistes de la dynamique des systèmes, une technique de modélisation mathématique qui permet d’analyser des problèmes complexes.

    Le rapport présente les travaux de recherche réalisés sous la direction de Dennis #Meadows par 17 scientifiques de six pays (États-Unis, Norvège, Allemagne, Inde, Iran et Turquie). Il fut commandé par le Club de Rome, un groupe de réflexion rassemblant des hommes d’affaires, des scientifiques et des économistes, dans un contexte où naissent les premières ONG environnementales comme Greenpeace et le WWF, et où l’opinion publique s’inquiète des dégradations écologiques en cours.
    Une conclusion sans appel

    Pendant deux ans, l’équipe Meadows met au point un modèle mathématique permettant de prévoir l’évolution de plusieurs grandes variables : la démographie, l’activité industrielle, la production agricole, la pollution, les ressources naturelles… La conclusion est sans appel : même en misant sur des progrès technologiques ambitieux, la poursuite de la croissance aboutit inévitablement à un #effondrement du système d’ici à la fin du siècle. Autrement dit, une diminution brutale des ressources disponibles, s’accompagnant d’une dégradation des conditions de vie et d’une chute de la population mondiale.

    Selon les scénarios, cet effondrement est causé soit par une #pénurie de #ressources non #renouvelables comme le pétrole, dont le coût d’extraction devient trop important ; soit par l’érosion des terres agricoles et un niveau de #pollution si élevé qu’il affecte gravement la production alimentaire. Parmi la dizaine de scénarios étudiés, un seul permettait d’éviter le crash : celui d’une stabilisation de la démographie et d’un arrêt de la croissance économique.

    « La plupart des économistes ont jeté ce rapport à la poubelle, raconte l’économiste Gaël Giraud. En effet, l’écrasante majorité d’entre eux ne prend pas en compte, ou très peu, la question des ressources naturelles. Or, le rapport Meadows nous rappelle que le monde réel existe et que si nous ne nous en occupons pas, le retour de bâton sera sévère. » Après de nouvelles éditions publiées en 1992 et en 2004, des études ont confirmé que jusqu’ici, les prévisions du rapport se sont révélées justes (lire l’encadré ci-dessous). « Il est compliqué d’imaginer qu’on puisse pérenniser la croissance économique pendant des décennies et résoudre en même temps les problèmes environnementaux. Car 2 % de croissance par an pendant un siècle revient par exemple à multiplier par six ou sept notre production et notre consommation », explique Aurélien Boutaud, chercheur CNRS associé au laboratoire Environnement, ville, société, à Lyon, et coauteur du livre « Les Limites planétaires » (éd. La Découverte).

    Un scénario d’effondrement qui se confirme.

    Jusqu’ici, les prévisions du rapport Meadows se sont révélées justes. Elles ont été confirmées par plusieurs chercheurs, dont l’Australien Graham Turner en 2012 (tendance observée ci-dessous). L’évolution des différentes variables (nourriture, pollution, production industrielle…) correspond au scénario menant à un effondrement du système.

    À la suite des travaux de l’équipe Meadows, les scientifiques ont tenté de mieux évaluer l’impact de l’humanité sur la planète. Élaborée dans les années 1990, l’empreinte écologique mesure la quantité de surface terrestre nécessaire pour produire les biens et services que nous consommons et absorber les déchets que nous produisons. Elle permet de calculer le jour du dépassement, à partir duquel nous avons pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres, cultivé plus de terre que ce que la nature peut nous procurer en une année - et émis plus de gaz à effet de serre que nos océans et nos forêts ne peuvent en absorber.

    En 2022, le jour du dépassement a eu lieu le 28 juillet. « Nous sommes face à un fort déficit écologique qui ne peut pas durer », s’alarme Aurélien Boutaud. Pour compléter le tableau, une équipe de recherche du Stockholm Resilience Centre, en Suède, a défini neuf limites planétaires. Parmi elles, le changement climatique, l’érosion de la biodiversité, mais aussi d’autres moins connues comme les cycles de l’azote et du phosphore, ou l’acidification des océans (lire l’encadré ci-dessous).

    Six limites planétaires dans le rouge

    Les scientifiques ont identifié neuf limites planétaires qui correspondent aux processus naturels conditionnant la vie sur Terre. Pour chacune d’entre elles, est déterminé un seuil au-delà duquel existe un risque de modification et d’emballement. Deux de ces seuils biophysiques ont été dépassés en 2022 : le cycle de l’eau douce, avec un déficit de l’eau verte contenue dans les sols et la biosphère, principalement dû au changement climatique et à la déforestation ; et l’introduction d’entités nouvelles (pollution chimique) qui reflète en particulier une surabondance des déchets plastiques dans l’ensemble des milieux terrestres. La prochaine sur la liste pourrait être l’acidification des océans, une modification chimique due au surplus de CO2 dans l’air qui affecte notamment le plancton, base de toute la chaîne alimentaire marine.

    Empreinte écologique et limites planétaires offrent une vision globale de notre impact sur la planète. Une nécessité lorsqu’on sait que les différents paramètres sont étroitement liés. Si bien qu’une solution ne prenant pas en compte l’ensemble de ces facteurs pourrait, au contraire, aggraver la situation.

    L’utilisation massive d’agrocarburants pour réduire les émissions de CO2 de nos voitures et de nos avions aurait par exemple un impact majeur sur la déforestation. « Il ne s’agit pas d’avoir sans arrêt recours à des solutions de substitution. Il faut juste consommer moins d’emballages, d’énergie, de produits alimentaires transformés, etc. », explique Sandra Lavorel, écologue, membre de l’Académie des sciences, et coauteure du rapport de l’IPBES (plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques).
    Énergies fossiles et agriculture intensive pointées du doigt

    Le pas à franchir est considérable : diviser par deux notre empreinte écologique au niveau mondial, et par trois en France. « Dire qu’on arrivera à résoudre le problème par des réponses purement technologiques paraît problématique », explique Aurélien Boutaud. Le chercheur souligne l’importance de l’effet rebond : lorsqu’une nouvelle technologie permet de réduire notre impact, cette réduction est compensée par l’augmentation de la consommation. « Il faut avant tout convoquer la sobriété. La meilleure énergie, c’est celle qu’on n’utilise pas, la meilleure ressource est celle qu’on n’a pas eu besoin d’extraire », confirme Philippe Bihouix, ingénieur et auteur de « L’Âge des low tech » (éd. du Seuil).

    Deux secteurs en particulier pèsent très lourd dans notre empreinte écologique : les énergies fossiles, fortement émettrices de CO2, mais aussi l’agriculture. « Notre agriculture intensive produit beaucoup, mais détruit aussi beaucoup », souligne l’agronome Marc Dufumier, évoquant le labour qui dégrade l’humus des sols, l’impact des pesticides et des engrais sur la biodiversité et la pollution des eaux. Sans compter qu’à eux seuls, l’agriculture et l’élevage pèsent 30 % des émissions de gaz à effet de serre.

    Selon une étude de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), réduire notre consommation de viande et passer à l’agroécologie permettrait de diminuer fortement notre empreinte écologique tout en nourrissant 10 milliards de personnes en 2050. "Vous pouvez réduire de moitié votre impact individuel, mais le reste ne peut être baissé que de manière collective ", insiste Aurélien Boutaud. Un changement des modes de consommation est donc nécessaire, mais pas suffisant.

    « Nous n’avons aucune chance de résoudre le problème en gardant le modèle économique et sociétal actuel, confirme Sandra Lavorel. La question n’est pas de savoir s’il faut changer de modèle, mais de déterminer ensemble comment y parvenir. Plus nous attendons, plus les changements seront difficiles. »

  • #Covid-19 : l’#aération mécanique dans les écoles serait efficace

    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/covid-19-l-aeration-mecanique-dans-les-ecoles-diviserait-par-trois-

    Le taux de #ventilation de ces purificateurs d’air (la quantité d’air expulsé par seconde) pouvait aller de 1,4 litre par seconde par étudiant à 14 litres par seconde par étudiant, contre moins de 0,5 litre par seconde par étudiant pour l’aération naturelle (qui consiste à ouvrir les fenêtres et la porte de temps en temps).

    Les chercheurs ont ensuite refait leur analyse en séparant les classes ventilées en fonction de ce taux. Ainsi, ils ont mis en évidence que les classes avec un taux élevé (plus de 10 litres par seconde par étudiant) avaient un risque d’infection encore plus bas : 5 fois moins que l’aération naturelle, contre 3 fois moins pour les classes ventilées à un taux plus faible.

    [...]

    “À notre connaissance, celle-ci est la première et donc la plus large étude rétrospective dans des écoles pour déterminer l’impact de l’aération mécanique sur le risque d’infection par le Covid-19”, affirment les auteurs. “Les résultats démontrent l’efficacité de l’aération mécanique et la possibilité de l’utiliser dans tout autre environnement clos”, poursuivent-ils. En conjonction avec les gestes barrières, le masque et les vaccins, ces appareils pourraient donc aider à sécuriser les lieux clos et ainsi bloquer l’avancée de cette nouvelle vague épidémique.

  • « Les personnes qui ont eu le #Covid plus d’une fois ont davantage de risques d’avoir une série de problèmes de santé graves que celles qui ne l’ont eu qu’une seule fois selon une nouvelle etude

    Les problèmes cardiaques et pulmonaires étaient par exemple plus de trois fois plus fréquents chez les personnes qui avaient été réinfectées.

    La réinfection a également favorisé les affections cérébrales, maladies rénales et le diabète, selon l’étude. »

    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/covid-les-infections-repetees-multiplient-le-risque-de-problemes-de

  • Comment en finir avec la pandémie de Covid-19 ? - Sciences et Avenir

    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/comment-en-finir-avec-la-pandemie-de-covid-19_167445

    Top 10 des mesures pour en finir avec la pandémie de Covid-19

    1 Systèmes de santé

    La planification de la préparation et de l’intervention en cas de pandémie doit adopter une approche globale de la société qui inclut plusieurs disciplines, secteurs et acteurs (par exemple, les entreprises, la société civile, l’ingénierie, les communautés religieuses, la modélisation mathématique, l’armée, les médias et la psychologie).

    2 Communication

    Les responsables communautaires, les experts scientifiques et les autorités de santé publique doivent collaborer pour élaborer des messages de santé publique qui instaurent et renforcent la confiance des individus et des communautés et utilisent les moyens d’accès et de communication préférés des différentes populations.

    3 Prévention

    Tous les pays doivent adopter une approche « vaccins plus » qui combine la vaccination contre le Covid-19, des mesures de prévention, des traitements et des incitations financières.

    4 Inégalités face à la pandémie

    La préparation et la réponse à une pandémie doivent tenir compte des inégalités sociales et sanitaires préexistantes.

    5 Communication

    Les autorités de santé publique doivent s’associer à des personnes et à des organisations qui jouissent de la confiance de leur communauté pour fournir des informations précises et accessibles sur la pandémie et favoriser les changements de comportement.

    6 Vaccination

    Les financements publics, philanthropiques et industriels doivent mettre l’accent sur la mise au point de vaccins offrant une protection durable contre plusieurs variantes du SARS-CoV-2.

    7 Communication

    Les professionnels et les autorités de la santé publique doivent combattre les fausses informations de manière proactive en s’appuyant sur des messages clairs, directs, adaptés à la culture et exempts de jargon scientifique inutile.

    8 Systèmes de santé

    Les stratégies de préparation et d’intervention doivent adopter des approches pangouvernementales (par exemple, une coordination multiministérielle) pour identifier, examiner et traiter la résilience des systèmes de santé.

    9 Inégalités face à la pandémie

    Les organisations mondiales du commerce et de la santé devraient se coordonner avec les pays pour négocier le transfert de technologies permettant aux fabricants des pays à revenu faible ou intermédiaire de mettre au point des vaccins, des tests et des traitements abordables et de qualité garantie.

    10 Traitement et soins

    Promouvoir la collaboration multisectorielle afin d’accélérer le développement de nouvelles thérapies pour tous les stades du Covid-19 (par exemple, la consultation externe, l’hospitalisation et le Covid long).
    Le défi du Covid long

    Le Covid long fait partie des défis d’ampleur auxquels la société devra faire face au niveau international, ajoutent les experts. « Une personne sur six souffrira de Covid long au moins un mois, voire une année », pointe Jeffrey Lazarus. Pour en diminuer l’impact, un des plus gros enjeux sera de pouvoir les repérer et les suivre, ajoute l’expert. « Ensuite, il faudra trouver des traitements efficaces et abordables. »

    Pour le Dr Ayman El-Mohandes, qui a également co-signé ce consensus international, il faut pouvoir rendre les tests disponibles avec un usage simplifié. « Il faudra accompagner ces tests de recommandations pratiques et claires sur quand mettre un masque, quand aller ou ne pas aller au travail ou à l’école, qui ne varient pas ni se contredisent au fil du temps », ajoute-t-il.

    « Ces recommandations arrivent à un moment clé de la pandémie, où les gens commencent à se gratter la tête en se demandant comment aller plus loin », lance Ayman El-Mohandes. « Je vois ces recommandations comme un appel à l’action. »

    #CestPasGagne

  • Une étude sur des primates infectés avec le #coronavirus a permis de voir en détail quelles zones du #cerveau sont les plus touchées et l’ampleur de ces dégâts.

    Les dégâts cérébraux observés chez les primates étaient causés par l’infection au coronavirus, mais pas directement, car le #virus n’était pas trouvé en grandes quantités dans le cerveau, à l’exception des vaisseaux sanguins. C’est dans les cellules endothéliales qui tapissent les vaisseaux sanguins que le virus se concentrait. Mais l’infection de ces cellules pourrait entrainer les problèmes vasculaires observés, générant les micro-hémorragies et l’ischémie qui ensuite vont causer l’inflammation et la mort cellulaire des #neurones. Effet aggravé par la baisse d’oxygénation du sang causée par le #Covid et l’hypoxie qui s’ensuit. Cependant, le bulbe olfactif n’a pas été analysé dans cette étude, donc il est possible que le virus puisse entrer dans le système nerveux central par cette voie. Il reste à savoir maintenant comment ces dommages cérébraux entraînent les problèmes neurologiques observés dans le Covid et le Covid long.

    https://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/covid-19-voici-comment-le-coronavirus-affecte-le-cerveau_162914

  • Los Angeles attaque Monsanto en justice - Sciences et Avenir
    https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/pollution/los-angeles-attaque-monsanto-en-justice-pour-des-decennies-de-pollu

    La plainte cite trois sociétés issues d’une division de Monsanto dans les années 1990 : Monsanto Company, qui appartient à Bayer désormais ; Solutia, propriété d’Eastman Chemical Company, et Pharmacia, rachetée par Pfizer. Aucune des trois entreprises n’avait réagi lundi après-midi.

    Bayer est miné depuis le rachat de Monsanto par une salve de procédures, collectives et individuelles, qui ont été lancées concernant le pesticide Round’Up et sa substance active, le glyphosate. Le groupe allemand conteste cette caractérisation mais la substance est classée « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Bayer fait en outre face à une plainte d’actionnaires en Allemagne, qui lui réclament pas moins de 2,2 milliards d’euros de dommages et intérêts, lui reprochant de ne pas les avoir suffisamment informés sur les risques financiers causés par ces procédures judiciaires.

    #eau