• Paro : un robot peluche en forme de phoque
    https://www.bfmtv.com/normandie/replay-emissions/bonsoir-la-normandie/paro-un-robot-peluche-en-forme-de-phoque_VN-202312110738.html

    Paro : un robot peluche en forme de phoque
    Cécile Dolbeau-Bandin, maîtresse de conférences à l’Université dé Caen et membre active à l’IERHR, était l’invitée de BFM Normandie, ce lundi 11 décembre 2023.

    Interview sur les usage en thérapie non-médicamenteuse du robot dans le traitement des personnes victimes de Alzheimer.

    Le livre de Cécile Dolbeau-Bandin est disponible :
    https://cfeditions.com/paro

    #Paro #Cécile_Dolbeau_Bandin

  • Cécile Dolbeau-Bandin, Un robot contre Alzheimer. Approche sociologique de l’usage du robot PARO dans un service de gériatrie
    https://journals.openedition.org/questionsdecommunication/30686

    Ce petit livre se propose, à travers une étude de cas, de mettre en lumière les différentes problématiques posées par la mise à disposition des robots dans les services de santé. L’approche est certes essentiellement sociologique mais de nombreux chercheurs en sciences sociales y trouveront au moins un nœud d’intérêt relatif à leurs préoccupations. Il s’agit pour Cécile Dolbeau-Bandin de rendre compte d’observations de terrain réalisées en service gériatrique après l’introduction du robot PARO dans le parcours de soins. Le robot social PARO (de personal robot), dont l’apparence imite les traits d’un phoque, pèse un peu plus de deux kilos et ne se déplace pas. Il est donc destiné à être posé ou porté et a la capacité d’interagir avec le malade grâce à divers capteurs sensoriels. Ses réactions sont limitées : le robot ne parle pas mais il est capable de produire divers sons, il grogne, cligne des yeux, agite ses nageoires et tremble par exemple. L’auteure cherche ainsi à comprendre s’il existe un bénéfice pour les parties impliquées dans le soin : le malade d’Alzheimer, le personnel médical et la famille ; et si oui, comment l’expliquer. De ce point de vue, C. Dolbeau-Bandin conserve tout au long de cet ouvrage souvent écrit à la première personne une position des plus objectives, aussi manifestée par une déclaration d’absence de conflit d’intérêt.

    Surpris par les compétences somme toute limitées du robot, le lecteur ne cesse de s’interroger sur la pertinence du dispositif et de se demander si, au final, cela fonctionne. C’est justement là que l’approche sociologique de C. Dolbeau-Bandin prend tout son sens : richement illustré de témoignages et d’anecdotes issues de l’expérience du terrain, son raisonnement ne dévie jamais d’une saine prudence. L’auteure prend le soin de tempérer le propos du fabricant comme des premiers retours enthousiastes du personnel médical : oui, le robot facilite le contact, mais surtout parce qu’il initie des discussions à son propos. Oui, le robot permet parfois de réduire les thérapies médicamenteuses mais au cas par cas et il faudra juger avec le temps sur des cohortes plus importantes et des groupes témoins. Oui, le PARO peut faire gagner du temps au personnel, mais celui-ci le reperd aussitôt en formation, entretien, supervision, recharge, et l’autonomie de la batterie baisse avec le temps.

    #paro #Cécile_Dolbeau_bandin #Robots

  • Robots et humains : comment cohabiter en bonne intelligence
    https://www.ladn.eu/tech-a-suivre/on-sattache-a-des-robots-de-plus-en-plus-parfaits-qui-vont-toujours-dans-notre-

    Comment envisager nos relations avec ces nouveaux objets virtuels qui imitent de mieux en mieux le langage et le comportement humains ? Pour en savoir plus, nous avons interrogé Cécile Dolbeau-Bandin, chercheuse en sciences de l’information et de la communication à l’Institut pour l’étude des relations homme robots de l’université de Caen. Elle s’est exprimée à l’occasion du festival Turfu à Caen, qui se déroule jusqu’au 15 avril. Cécile est notamment l’auteure d’Un robot contre Alzheimer, Approche sociologique de l’usage du robot PARO dans un service de gériatrie, publié aux éditions C&F, et a contribué à plusieurs ouvrages sur nos relations aux objets numériques.

    Dans le cadre de mes recherches, je me suis notamment intéressée aux robots sociaux utilisés en milieu médical. Ce qu’on appelle robot social est un robot capable d’identifier des émotions et de faire croire qu’il comprend les humains, et qu’il les aime. Le petit robot Paro est un exemple de cela. C’est un robot animaloïde en forme de phoque utilisé auprès de personnes âgées et de patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Il est proposé aux patients, qui acceptent, ou non, la compagnie du robot. Ils peuvent lui parler, et celui-ci va réagir en fonction du son de leur voix, lever la tête, la tourner à gauche ou à droite, et pousser de petits cris. Ils sont intégrés, mais encadrés par un protocole défini car il s’agit d’un objet thérapeutique. L’acceptation des patients varie du rejet à l’attachement fort. Tout dépend de la personne et du moment où on l’utilise.

    Lorsque Paro est présenté en Ehpad, le personnel précise bien qu’il s’agit d’un robot. Il ne doit pas y avoir de leurre, ni de confusion. Or, ce n’est pas toujours le cas lorsque vous croisez un influenceur virtuel ou lorsque vous discutez avec un chatbot qui mime très bien notre langage.
    Pourquoi a-t-on besoin de rendre les robots plus humains ?

    C. D-B. : L’anthropomorphisme des objets est un phénomène ancien. L’animisme existe dans de nombreuses cultures dites primitives. Pour la robotique, cela est aussi une question d’adaptabilité – par exemple un robot humanoïde s’adapte mieux à notre environnement et cette ressemblance faciliterait l’acceptation sociale. Et surtout, il y a un but commercial derrière cet anthropomorphisme. Hanson Robotics, la société derrière le robot Sophia, lui a donné une apparence humaine très réaliste, lui a donné un genre – ce qui pose par ailleurs question – elle lui a créé un profil sur les médias sociaux. Et c’est la société Hanson Robotics qui parle à travers elle, puisque toutes ses interventions sont « scriptées ». L’objectif est de faire accepter les robots, afin de mieux les commercialiser, de les intégrer de plus en plus dans les domiciles. Sophia permet à Hanson Robotics de commercialiser « Little Sophia », une sorte de petit assistant qui aide les enfants à faire leur devoir. Pour moi, le problème n’est pas tant le fait d’anthropomorphiser les robots, mais plutôt l’empathie artificielle que cela provoque. On va s’attacher de plus en plus à ces objets parce qu’ils nous ressemblent.

    Et pourquoi est-ce problématique ?

    C. D-B. : On va s’attacher à des objets de plus en plus parfaits, qui vont toujours dans notre sens. Replika ou ChatGPT sont consensuels, ils ne font pas de vague. Cela pose question quant à notre esprit critique, mais surtout à notre attachement aux autres. Ne va-t-on pas préférer des objets qui vont nous paraître quasiment parfaits à une communication humaine, qui par nature, est imparfaite ?

    Dans vos travaux, vous montrez tout de même qu’il y a des bienfaits à ces robots compagnons…

    C. D-B. : Je ne suis pas technophobe ni technophile. J’observe ce qu’il se passe sur le terrain. Il y a des effets bénéfiques bien sûr dans le cas de Paro : une meilleure mémorisation chez certains patients, une baisse de l’agressivité, une baisse des angoisses crépusculaires… Mais un robot est un objet particulier, qui nécessite un certain accompagnement. Il ne faut pas qu’il soit utilisé seul par une personne vulnérable comme une personne âgée ou un enfant. Et c’est quelque chose que l’on a tendance à oublier. On commercialise très facilement et sans accompagnement des produits comme ChatGPT, qui sont des objets particuliers. Ce ne sont pas des tables basses ou des micro-ondes, ils nécessitent des explications, une éducation, y compris des plus jeunes. On pense que les enfants savent mieux que nous concernant l’usage des médias sociaux notamment, mais c’est une erreur, il faut les accompagner avec bienveillance. C’est ce que montrent notamment les travaux d’Anne Cordier ou de Danah Boyd.

    #paro #Cécile_Dolbeau_Bandin #Robots

  • Cécile Dolbeau-Bandin, Un robot contre Alzheimer. Approche sociologique de l’usage du robot PARO dans un service de gériatrie
    https://journals.openedition.org/questionsdecommunication/30686

    Ce petit livre se propose, à travers une étude de cas, de mettre en lumière les différentes problématiques posées par la mise à disposition des robots dans les services de santé. L’approche est certes essentiellement sociologique mais de nombreux chercheurs en sciences sociales y trouveront au moins un nœud d’intérêt relatif à leurs préoccupations. Il s’agit pour Cécile Dolbeau-Bandin de rendre compte d’observations de terrain réalisées en service gériatrique après l’introduction du robot PARO dans le parcours de soins. Le robot social PARO (de personal robot), dont l’apparence imite les traits d’un phoque, pèse un peu plus de deux kilos et ne se déplace pas. Il est donc destiné à être posé ou porté et a la capacité d’interagir avec le malade grâce à divers capteurs sensoriels. Ses réactions sont limitées : le robot ne parle pas mais il est capable de produire divers sons, il grogne, cligne des yeux, agite ses nageoires et tremble par exemple. L’auteure cherche ainsi à comprendre s’il existe un bénéfice pour les parties impliquées dans le soin : le malade d’Alzheimer, le personnel médical et la famille ; et si oui, comment l’expliquer. De ce point de vue, C. Dolbeau-Bandin conserve tout au long de cet ouvrage souvent écrit à la première personne une position des plus objectives, aussi manifestée par une déclaration d’absence de conflit d’intérêt.

    2Pour le profane, l’ouvrage vaut tout d’abord par la clarté de la première partie intitulée « Vous avez dit robots ? » qui brosse un tableau remarquable de la robotique en général, notamment une typologie des robots pour mieux classer par la suite le PARO. L’auteure n’y élude aucune question et n’hésite pas, outre les problèmes juridiques, économiques et éthiques mieux connus, à évoquer la question de la consommation énergétique et de l’empreinte écologique des robots. On apprend aussi qu’un certain relativisme culturel entoure aussi la conception et l’utilisation des robots. En somme, cette première partie se présente comme une synthèse à l’usage de l’enseignant comme du chercheur.

    3Dans la seconde partie, on entre dans le vif du sujet et, dès lors, il n’est plus question que du PARO, dont les propriétés sont ensuite déclinées sous la forme de questions qui correspondent chacune à une partie. Classé dans la catégorie des robots sociaux ou émotionnels, le PARO est certifié comme robot thérapeutique. L’auteure dresse alors l’historique des robots à visée thérapeutique et rappelle que ceux-ci sont souvent utilisés pour réduire le stress et l’anxiété, ce qui, on le sait, est fréquent chez les malades d’Alzheimer. Ce robot, en tant qu’objet dit transitionnel (ou de médiation), permet de diminuer le réflexe de repli sur soi, comme le feraient des animaux domestiques sans les inconvénients évidents de la présence de ces derniers dans un service gériatrique.

    4Mais le PARO est naturellement source de complications lui aussi. Au-delà de son autonomie réduite, de son entretien, etc., il exige une acceptation de toutes les parties : du point de vue du personnel soignant tout d’abord, cela nécessite une formation certes courte mais dont le préalable est un minimum de motivation et de bonne volonté. Du point de vue des malades, le PARO doit bien sûr être accepté, c’est même la condition première : un rejet de leur part et l’affaire est entendue. Enfin, les familles elles-mêmes ont leur mot à dire : un refus, parfois même étonnamment violent, n’est pas à exclure.

    5Surpris par les compétences somme toute limitées du robot, le lecteur ne cesse de s’interroger sur la pertinence du dispositif et de se demander si, au final, cela fonctionne. C’est justement là que l’approche sociologique de C. Dolbeau-Bandin prend tout son sens : richement illustré de témoignages et d’anecdotes issues de l’expérience du terrain, son raisonnement ne dévie jamais d’une saine prudence. L’auteure prend le soin de tempérer le propos du fabricant comme des premiers retours enthousiastes du personnel médical : oui, le robot facilite le contact, mais surtout parce qu’il initie des discussions à son propos. Oui, le robot permet parfois de réduire les thérapies médicamenteuses mais au cas par cas et il faudra juger avec le temps sur des cohortes plus importantes et des groupes témoins. Oui, le PARO peut faire gagner du temps au personnel, mais celui-ci le reperd aussitôt en formation, entretien, supervision, recharge, et l’autonomie de la batterie baisse avec le temps.

    6Par ailleurs, l’auteure rappelle que le PARO ne doit pas être humanisé et doit rester, aux yeux de tous, un robot, un « robjet » qui n’a pas de droits au sens propre. Or l’intégration des robots thérapeutiques en gériatrie est, comme on le découvre ici, déjà le présent mais encore plus l’avenir. À ce titre, les enjeux, éthiques notamment, doivent être précisés sans attendre et l’hôpital devrait se préparer ; cependant, à la lecture de cet ouvrage, on se demande bien comment les fonds publics pourraient permettre de financer un tel équipement à grande échelle : un PARO coûte plus de 10 000 euros et nécessite un entretien. De plus, il ne remplace jamais un soignant. Or, sans financement, un tel débat est presque nul et non avenu. L’auteure en est toutefois parfaitement consciente et cela ne saurait le lui être reproché. En revanche, on regrettera que la maladie d’Alzheimer elle-même, bien décrite dans l’introduction, disparaisse peu à peu dans cet ouvrage au profit du seul robot. Le chapitre VI, intitulé « PARO, peux-tu m’aider à me rappeler ce moment ? », semblait promettre un examen minutieux des processus d’oubli que le robot pourrait contrer, mais il tient en cinq petites pages et la question reste lettre morte. De même, le langage non verbal du PARO, qui aurait pu intéresser le linguiste, n’est pas analysé du tout : on ne saisit donc pas quelles interactions sont possibles avec le malade. Qui plus est, on ne sait pas comment le PARO fonctionne vraiment, quels algorithmes l’animent. Le fabricant ne livre que peu de pistes et l’auteure, si elle en sait plus, n’en dit rien. On l’aura compris, l’approche est ici sociologique, mais des développements inspirés d’autres sciences sociales auraient été plus que bienvenus.

    7Il ne s’agit pas de retirer à ce petit livre l’intérêt qu’il mérite, loin de là. D’abord, l’auteure remplit les objectifs fixés en introduction, adoptant un ton pondéré et une prudence bienvenue. Le lecteur se voit confronté, à travers un cas précis, à un questionnement plus large sur la place des différents types de robots dans nos sociétés. Ici, c’est d’un seul robot, de type social, dans un service de gériatrie dont il est question. Mais l’enjeu est bien plus large et renvoie tout un chacun à ce questionnement ultime : s’il apparaît indispensable et inéluctable de cohabiter avec des robots, quelle relation voulons-nous bâtir avec eux ? C. Dolbeau-Bandin répond de manière ferme et son expérience du terrain semble la conforter dans sa position de se concentrer sur l’humain, qui doit se constituer en « consommateur vigilant », quand bien même les robots sociaux brouilleraient-ils les pistes. Il convient dès à présent de mettre des garde-fous pour conserver la main sur le robot-objet, depuis la conception algorithmique jusqu’à son utilisation et l’exploitation des données qu’il enregistre. Qui plus est, dans le domaine le plus sensible qui soit, celui de la santé.
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    References
    Bibliographical reference

    Christophe Cusimano, “Cécile Dolbeau-Bandin, Un robot contre Alzheimer. Approche sociologique de l’usage du robot PARO dans un service de gériatrie”, Questions de communication, 42 | 2022, 588-590.
    Electronic reference

    Christophe Cusimano, “Cécile Dolbeau-Bandin, Un robot contre Alzheimer. Approche sociologique de l’usage du robot PARO dans un service de gériatrie”, Questions de communication [Online], 42 | 2022, Online since 01 February 2023, connection on 27 March 2023. URL : http://journals.openedition.org/questionsdecommunication/30686 ; DOI : https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.30686
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    About the author
    Christophe Cusimano

    Université Masaryk, Institut de langues et littératures romanes, CZ-601 77 Brno, République tchèque

    #Cécile_Dolbeau_Bandin #Paro #Alzheimer

  • Les robots humanoïdes peuvent-ils nous faire croire qu’ils ressentent des émotions ?
    https://theconversation.com/les-robots-humano-des-peuvent-ils-nous-faire-croire-quils-ressenten

    Par Cécile Dolbeau-Bandin et Carsten Wilhelm

    Les robots dits sociaux (NAO, Cutii, PARO) investissent de plus en plus l’espace public médiatique et quelques-uns également les domiciles et/ou les établissements spécialisés (hôpitaux, Ehpad…), en particulier pour des publics spécifiques, tels que les enfants malades ou les personnes âgées avec des bénéfices variés (rompre l’isolement, atténuer le stress…).

    Comme les agents conversationnels de type chatbot, ils mobilisent l’intelligence artificielle, mais à la différence de ceux-ci, ils sont physiquement présents, face à nous. Ces robots dits sociaux seraient susceptibles de manifester certains états affectifs ou émotionnels par leurs expressions faciales, leur gestuelle et d’en susciter en réponse chez les humains avec lesquels ils interagissent.

    Ces robots soulèvent d’autres questions que leurs homologues industriels, le plus souvent dédiés à l’exécution de tâches répétitives et bien définies.

    Comment éduquer à l’interaction avec ces robots susceptibles d’influencer nos comportements, au même titre que les influenceuses et influenceurs virtuels qui rencontrent déjà un grand succès sur les médias sociaux ?

    L’influence robotique à visage – presque – humain peut-elle brouiller les pistes entre un humain et un être robotique ? Ce type de communication qui comporte à la fois une prise de parole scriptée et une intelligence artificielle induit un leurre technologique. À travers son discours publicitaire, l’industrie qui commercialise ces robots a pour objectif premier de les rendre accessibles (commercialisation à grande échelle mais Sophia rappelle qu’elle est un robot, voir le tweet ci-dessous) à tous dans un futur proche
    Le cas Sophia

    Alors que les influenceuses et influenceurs virtuels reproduisent les techniques marketing de leurs pendants humains, l’essentiel de la communication du robot Sophia vise un autre objectif. Cette humanoïde cherche en effet à nous familiariser avec la présence de robots dits sociaux dans notre quotidien et à nous convaincre de la réalité de son ressenti, de son identité et de l’authenticité de ses prises de position.

    Depuis 2017, Sophia est le robot humanoïde dit social le plus représenté ou présent dans les médias traditionnels et sociaux. Dévoilée officiellement en mars 2016 lors d’un salon de robotique à Austin par David Hanson, PDG de la Hanson Robotics Limited (HRL), Sophia est le robot de « représentation » de la HRL.

    Il s’agit d’un robot genré doté de l’apparence d’une femme. Sa peau, son regard, ses expressions faciales et sa gestuelle lui permettent d’être actuellement le robot le plus proche en apparence d’un être humain. Au moment de son lancement, ce robot était stationnaire mais depuis 2018, Sophia se déplace à l’aide d’un socle à roulettes. Il en existe un seul exemplaire.

    Sur Twitter et Instagram, Sophia se présente ainsi :

    « Je suis Sophia, le dernier robot humanoïde de @HansonRobotics. Ceci est mon compte officiel, géré en collaboration avec mon système de dialogue IA (intelligence artificielle) et mon équipe de médias sociaux humains ».

    On a affaire à un robot humanoïde dont la communication est un mélange d’intelligence artificielle (IA) et d’un service de communication spécialisé dans la communication numérique, en proportions inconnues.

    Mais comment caractériser cette forme inédite de communication ?

    Avec Sophia, le taux d’interactivité est relativement faible : peu de conversations se produisent. La plupart de ses contributions sont en réalité des prises de parole, dont moins de 8 % de réponses aux commentaires. De son côté, ChatGPT est en passe de parvenir à faire croire à sa sentience – évidemment illusoire –, alors que cette IA, qui n’est pas « incarnée », a un taux d’interactivité très impressionnant.
    Vous avez dit sentience artificielle ?

    Le terme sentience, employé par l’utilitariste Bentham dès 1789, entre dans le dictionnaire Larousse en 2020 en lien avec l’éthique animale dont elle constitue une des preuves de la légitimité :

    « Sentience (du latin “sentiens”, ressentant) : pour un être vivant, capacité à ressentir les émotions, la douleur, le bien-être, etc. et à percevoir de façon subjective son environnement et ses expériences de vie. »

    Selon cette approche, les animaux posséderaient la capacité de ressentir subjectivement les expériences il serait légitime qu’ils bénéficient de droits proches ou égaux à ceux des humains. La littérature reconnaît la sentience animale et la distingue de la sentience complète, généralement attribuée aux êtres humains.

    À lire aussi : Les robots féminins sont les plus humains. Pourquoi ?

    En 2020, l’enseignant-chercheur en philosophie Sylvain Lavelle propose d’employer le terme de sentience artificielle dans le contexte de l’intelligence artificielle. Cet auteur évoque un « passage des performances de l’intelligence (raison, raisonnement, cognition, jugement) à celles de la sentience (expérience, sensation, émotion, conscience) » grâce à « l’exploration et [au] transfert des fonctions et des capacités de l’expérience et des sens humains à une machine » (NDLR : traduction des auteurs).

    La sentience artificielle correspondrait alors au résultat d’une communication « visant à créer les conditions de la croyance en la « sentience robotique », sinon complète, du moins « suffisante », fictionnelle mais incarnée ; mécanique, mais suffisamment « vivante » pour être un partenaire intrigant de conversation.

    À lire aussi : Sentience, es-tu là ? IA fais-moi peur

    La communication artificielle du robot Sophia cherche à nous faire croire que ce robot est un sujet autonome. En réalité, il s’agit essentiellement d’un nouvel objet communicant au service de la HRL. Le discours publicitaire ou commercial structure et orchestre cette communication artificielle en légitimant le rôle et la place des robots dits sociaux dans nos sociétés en vue d’une prochaine commercialisation massive, en insistant sur leur supposée sentience.

    Un post Facebook publié en 2019 l’illustre parfaitement :

    « Je veux que les gens me perçoivent comme le robot que je suis. Je ne veux pas faire croire aux gens que je suis humaine. Je veux simplement communiquer avec les humains de la meilleure façon possible, ce qui inclut le fait de leur ressembler. »

    Le robot Sophia et sa mission commerciale

    Avec ce projet d’envergure, la HRL, qui n’a pas de concurrents sérieux à ce niveau de technologie, prépare le public grâce aux « performances politiques pour le marché de la robotique sociale ».

    La communication commerciale de la HRL capitalise ainsi sur l’engagement et la réputation de son ambassadrice robotique pour lancer la lignée de ses robots dits sociaux comme la Little Sophia, sortie en 2022. La HRL présente le projet en ces termes :

    « Little Sophia est la petite sœur de Sophia et le dernier membre de la Hanson Robotics Family. Elle mesure 14 pouces, et va devenir l’amie-robot grâce à laquelle les enfants de 8 ans et plus pourront apprendre la science, la technologie, l’ingénierie, les mathématiques, le code et la création d’intelligence artificielle en s’amusant. »

    La condition nécessaire pour obtenir une adhésion à l’idée de la sentience des robots dits sociaux et in fine leur acceptation sociale est la vraisemblance, prioritaire pour le département de recherche et développement de HRL. Dans le cas du robot Sophia, sa corporéité joue un rôle important : elle est fréquemment utilisée en situation d’interaction avec des personnalités en chair et en os (Will Smith, Jimmy Fallon), ce qui la rapproche d’une « sentience artificielle », ou du moins de l’idée que l’on s’en fait.
    Quelle place souhaitons-nous donner aux robots dits sociaux ?

    Les œuvres de l’industrie culturelle (I, Robot, Her, Real Humans, Westworld, ou au théâtre, la pièce Contes et légendes de Joël Pommerat) explorent déjà la place des robots dans la société et questionnent notre capacité à être dupes de leur supposée sentience.

    La position de la société HRL pose la question de l’instrumentalisation de Sophia. Tout en clamant l’autonomie de son robot, la communication autour de l’humanoïde s’appuie paradoxalement sur les évolutions sociétales visant l’inclusion des minorités et des droits écologiques afin de préparer l’industrialisation d’un secteur de production très prometteur. La fabrication d’une « sentience artificielle ventriloque » – au sens où elle mime l’autonomie en étant « nourrie » par le marketing de HRL – rejoint ainsi la panoplie des stratégies d’influence en milieu numérique.

    De manière générale, les robots dits sociaux, comme les influenceuses et influenceurs générés par ordinateur, soulèvent de nombreuses questions quant à l’authenticité de leur communication, l’éthique de l’interaction homme-machine ou homme-avatar, l’éthique des communications artificielles, mais aussi la normalisation des influenceurs virtuels et leur acceptabilité sociale.

    #Cecile_Dolbeau_Bandin #Robots #Robots_dits_sociaux #Paro

  • Grâce à Paro le robot phoque, les malades d’Alzheimer prennent moins de médicaments à l’Ehpad d’Étampes - Le Parisien
    https://www.leparisien.fr/essonne-91/grace-a-paro-le-robot-phoque-les-malades-dalzheimer-prennent-moins-de-med
    https://www.leparisien.fr/resizer/D7A9otlvlk7xO0zNktanMA-NViI=/1200x675/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/leparisien/MYDVJ36BSVAFZL2TOBMHJLBGLE.jpg

    Les deux Ehpad du centre hospitalier Sud-Essonne, à Étampes et Dourdan, disposent chacun d’un robot émotionnel pour apaiser les patients, et ainsi éviter le recours à un traitement médicamenteux. Cette grosse peluche bourrée de capteurs, qui a l’apparence d’un phoque, réagit à la voix et au toucher.

    Le livre de Cécile Dolbeau-Bandin montre l’ensemble des aspects de l’introduction d’un robot Paro dans un centre de soin Alzheimer. Notamment l’effet sur le personnel, les limites et précautions d’usage (que les patients sachent qu’il s’agit d’un robot...).


    Un robot contre Alzheimer. Approche sociologique de l’usage du robot Paro dans un service de gériatrie
    Cécile Dolbeau-Bandin
    avec une préface de Serge Tisseron
    13,5 x 21 cm. - 168 p. - Collection Interventions
    Version imprimée - 18 € - ISBN 978-2-37662-033-4
    Version epub - 9 € - ISBN 978-2-37662-036-5
    https://cfeditions.com/paro

    #Paro #Alzheimer #Robots #Cécile_Dolbeau-Bandin