• Autonomie régionale : vers un grand soir breton ? - Réunification de la Bretagne - Le Télégramme
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    À l’origine du vœu voté en session, les élus autonomistes d’opposition du groupe Breizh à gleiz : Gaël Briand, Nil Caouissin, Aziliz Gouez, Valérie Tabart et Christian Guyonvarc’h.
    Philippe Créhange/Le Télégramme

    Le conseil régional de Bretagne a voté ce vendredi un vœu appelant à ouvrir des discussions avec l’État pour plus d’autonomie. Son objectif : obtenir une « part de pouvoir législatif et réglementaire ».

    Obtenir plus d’autonomie et de marges de manœuvre auprès d’un futur gouvernement pour mieux agir localement, mais jusqu’où aller ? Sans surprise, la question est au cœur de cette nouvelle journée de session au conseil régional de Bretagne, ce vendredi à Rennes, alors que le groupe d’opposition Breizh a gleiz a déposé comme prévu un vœu en ce sens, soutenu par les écologistes. Et pas la peine de patienter longtemps puisque, dès 8 h 30, l’élu autonomiste Gaël Briand profite des questions orales pour mettre le dossier sur la table. Objectif premier : demander à l’exécutif régional comment il compte s’y prendre pour ouvrir des discussions avec l’État afin d’acquérir de nouveaux droits. Une prise de parole qui permet aussi au Lorientais de développer la vision de son groupe.

    La Bretagne est prête, mature, pour s’engager sur ce chemin d’autonomie législative, réglementaire, fiscale

    « Nous entendons régulièrement que l’autonomie serait un délitement de la République. Mais c’est l’absence de reconnaissance, de respect, qui ne peut que créer un délitement. » Et pour Briand, « l’autonomie, c’est le partage du pouvoir législatif avec l’État. Le fédéralisme, c’est la construction d’un nouveau rapport entre la société et l’État. » Ce que sa collègue Aziliz Gouez ne manque pas de compléter, lors du dépôt à proprement parler du vœu en fin de matinée, en prenant modèle sur l’organisation fédérale de l’Espagne, l’Italie, la Belgique, l’Allemagne ou encore la Suisse.

    Alors bien sûr, l’élue nantaise ne cache pas que parler d’autonomie peut être un risque en France. « Nous sommes conscients du caractère sulfureux du terme », confie-t-elle. « Le fédéraliste, le girondin, est devenu l’ennemi de l’intérieur. Mais notre République française a besoin d’une évolution de son architecture institutionnelle. La Bretagne (dans l’esprit du groupe, Loire Atlantique comprise, NDLR) est prête, mature, pour s’engager sur ce chemin d’autonomie législative, réglementaire, fiscale. »

    La touche fédéraliste de trop
    Une vision quelque peu atténuée par l’exécutif puisque la notion de fédéralisme est au final gommé du texte initialement rédigé par Breizh a gleiz. « Le fédéralisme n’est pas un gros mot. Mais la notion nous gêne car dans la République qui est la nôtre, vouloir attendre qu’elle soit fédérale, c’est se condamner à ne pas la voir évoluer. Or on n’a pas le temps d’attendre », justifie le premier vice-président (PS) du conseil régional Michaël Quernez, interrogé par Le Télégramme. Et de préférer une « République des territoires » chère aux socialistes bretons. Sans pour autant vouloir réduire la portée d’un nouveau texte auquel la majorité de gauche adhère pleinement, votant pour le vœu de Breizh a gleiz.

    « Oui à la décentralisation, oui à la différenciation, oui à la déconcentration, oui à ce supplément d’âme qu’est l’autonomie », indiquait ainsi un peu plus tôt, et sans ambiguïté, le vice-président, sous les applaudissements de Breizh a gleiz. « Ce supplément d’âme est aujourd’hui vital pour que les collectivités, dont les régions, puissent agir avec efficacité. »

    La droite vote finalement pour
    Et sur les autres bancs ? Comme prévu, les centristes et macronistes de Nous la Bretagne abondent dans le sens du vœu, appelant à une « Assemblée de Bretagne ». A contrario, Gilles Pennelle, ne craignant pas de « passer pour le jacobin de service », engage son groupe (RN) dans un vote contre. « Le fédéralisme n’appartient pas à l’histoire française, à la culture politique française. Nous sommes attachés à l’égalité des droits sur le territoire national », explique-t-il.

    Fédéralisme, encore et toujours. C’est ce qui a d’ailleurs fait hésiter le groupe Droite, centre et régionalistes d’Isabelle Le Callennec. En début de semaine, la maire de Vitré indiquait ainsi au Télégramme qu’elle pourrait voter contre le vœu. Mais voilà, le mot fédéralisme ayant été gommé, il est désormais plus simple d’y adhérer. « Nous aurions pu introduire des nuances, des différences, ça n’aurait pas été déplacé. Mais il faut distinguer l’accessoire de l’essentiel. Et l’essentiel, c’est une Bretagne à cinq qui s’assume. N’ayons pas peur », souligne le costarmoricain Marc Le Fur, régionaliste convaincu.

    Si on n’a pas l’argent, on n’a pas le pouvoir
    Face à cette quasi-unanimité de l’hémicycle, le président PS de Région Loïg Chesnais-Girard ne cache pas sa satisfaction. « Ce texte donne de la force à cette Bretagne positive, sereine, consciente de sa capacité à agir. Il affirme notre volonté de pouvoir mieux répondre à nos concitoyens. »

    Reste que le patron de l’exécutif sait que le plus dur reste à faire. Convaincre un futur gouvernement - dont on ne connaît pas encore la couleur politique - d’ouvrir des discussions. Et, surtout, adosser des moyens. « Car si on n’a pas l’argent, on n’a pas le pouvoir. Sinon, ça s’appelle une chimère ou un fantasme », prévient l’élu breton.