L’idéologie atlantiste est une idéologie interventionniste. Elle l’est en Europe, elle l’est dans le monde. Une fois le Rubicon franchi, il n’y a pas de retour en arrière et les principales victimes, dans toutes les guerres, ce sont les peuples. Cette stratégie de la tension est d’autant plus dangereuse que l’état-major de l’Otan est actuellement sous le commandement d’un faucon parmi les faucons, le général d’armée aérienne Philip M. Breedlove qui, dans la tradition bushienne d’intoxication des opinions, a multiplié les déclarations sur « l’invasion russe de l’Ukraine et de l’Europe orientale », déclarations que même ses alliés ont considérées comme outrancières. Cela lui a valu un rappel à plus de mesure et, lors des conférences de presse, d’être placé sous le contrôle du secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, atlantiste confirmé, mais plus expérimenté en diplomatie et communication.
L’intérêt des peuples européens est-il de chercher une solution diplomatique à la crise ukrainienne ou de recourir à la menace des armes ? (nous sommes en 2015) Qui peut croire les dirigeants russes prêts à mener une guerre suicidaire pour leur pays et leur peuple ? (et 7 ans plus tard, il a dû se passer des choses pour qu’on en arrive là, mais pour l’instant, on a du mal à y voir clair ou nos "stratèges" ne veulent toujours pas avouer qu’ils ont merdé quelque part)
Un principe de négociation consiste à entendre l’autre partie. Dans le cas de la Russie, au cœur du conflit ukrainien, comme cela était dans le conflit géorgien, se pose, comme pour toute grande puissance, la question de « l’espace vital ». Il y a une volonté politique et idéologique de ne pas comprendre que tout élargissement de l’Otan à ses frontières est jugé inacceptable par la Russie, que cela est considéré comme une ligne rouge stratégique, au même titre que les États-Unis, en application de la doctrine Monroe, ont durant deux siècles défendu leur pré carré et porté la guerre, multiplié les coups d’État, soutenu des dictatures, commandité des assassinats en Amérique centrale et du Sud.
Connaître les options stratégiques de l’Otan et les choix politiques des dirigeants atlantistes qui nous gouvernent ne signifie nullement ignorer que dans tout conflit deux parties (au moins) sont en présence et s’affrontent, et qu’il convient de connaître les objectifs de chacune des parties, en l’occurrence ceux de Moscou comme de Washington, Berlin, Paris, Varsovie ou Kiev. Cela précisé, il nous revient, comme citoyens, de tirer les leçons et dénoncer les politiques suivies depuis vingt-cinq ans par nos gouvernements, de reconnaître les responsabilités qui découlent de ces politiques dans la situation de conflits que l’Europe et le monde connaissent, c’est là un préalable nécessaire, indispensable, à une autre politique.
À quoi sert l’Otan aujourd’hui (en 2015) ? La finalité de toute structure est de se perpétuer, c’est donc par la guerre (froide ou chaude) qu’elle peut légitimer son existence et son rôle. Il en a été ainsi après l’implosion de l’Union soviétique, l’Otan a pu alors assurer son maintien par l’existence d’un foyer de guerre dans les Balkans, d’où le risque qu’aujourd’hui, l’Ukraine ou un autre conflit soient sa justification.
Le bilan de vingt-cinq ans de « guerres justes » dont l’Otan a été un instrument essentiel condamne celle-ci. Si l’idéologie atlantiste responsable de ces politiques interventionnistes n’est plus porteuse d’un projet hégémonique, cela n’en change ni la nature ni la logique de puissance et de domination. C’est pourquoi il faut rompre avec les concepts atlantistes s’appuyant sur la force des armes et les interventions militaires de l’Otan pour maintenir la domination des puissances occidentales et imposer au monde l’économie de marché. Il faut se libérer de l’allégeance à l’Otan, proclamée dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale adopté 2013 sous la présidence de François Hollande, dans lequel il est affirmé que « l’Alliance est un pilier de la politique de défense française ». Il faut encore et toujours en demander la dissolution. (sauf que dans le cas présent, ce n’est plus à l’ordre du jour)
Après, chaque nation souveraine dispose de son droit pour adhérer ou non à une alliance militaire mais encore faudrait-il que les dirigeants de ces nations aient toujours à l’esprit que la diplomatie et la négociation passe avant le déclenchement d’un conflit armé, surtout si la prise de décision est conditionnée par une certaine forme de panique.