• A l’aube de l’été, la grande désertion des saisonniers du tourisme en Europe
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/06/09/a-l-aube-de-l-ete-la-grande-desertion-des-saisonniers-du-tourisme-en-europe_

    A l’aube de l’été, la grande désertion des saisonniers du tourisme en Europe
    Italie, Grèce, France, Espagne : toutes les destinations touristiques sont confrontées à la même disparition des serveurs, cuisiniers ou employés de ménage, rebutés par les bas salaires et un mode de vie déséquilibré. Les employeurs cherchent la parade.Cet été, vous allez attendre. Attendre votre crêpe. Attendre à l’aéroport. Attendre à l’hôtel. Car les bras ne seront pas assez nombreux pour vous servir, peu importe l’endroit où vous comptez partir : de Colmar à Héraklion, des Pouilles à Perros-Guirec, de Saint-Tropez à Séville et jusqu’en Amérique du Nord, le monde touristique occidental est concerné par la pénurie d’employés du tourisme, en particulier pour les contrats précaires de saisonniers et leurs tâches éreintantes. Ce qui fut absorbable lors des deux derniers étés, en raison de la baisse du nombre de touristes étrangers, devrait l’être plus difficilement cette année : tout indique que les Européens du Nord vont reprendre leur grande migration vers le soleil.Que trouveront-ils sur les plages du bord de l’Adriatique, où, en Emilie-Romagne, 83 % des professionnels ne trouvent pas de personnel ? Et sur les côtes espagnoles, où manquent 50 000 employés saisonniers ? Aux mêmes causes – connues de longue date –, les mêmes effets, quels que soient l’état du marché du travail ou son mode de régulation : les professionnels de l’hôtellerie-restauration font le constat du déficit d’attractivité de leur secteur, du manque de personnel qualifié et de la difficulté à les loger.Les trous dans les plannings se traduiront par des fermetures ponctuelles, une demande de polyvalence accrue pour les salariés ou une désorganisation pouvant nuire à la qualité de service, comme c’est déjà le cas dans les aéroports de Paris, de Londres ou d’Amsterdam. Ce dernier cas est symptomatique d’un secteur qui a préféré se séparer d’une partie de sa main-d’œuvre durant la pandémie de Covid-19, malgré les aides mises en place par les gouvernements. Peu d’employeurs s’attendaient à un rebond aussi rapide de l’activité et certains ont, faute de visibilité, préféré faire avec les moyens du bord à l’été 2020, sans réembaucher leurs saisonniers habituels. Le secteur des loisirs a été le dernier à recruter après la crise, dans un contexte général de manque de main-d’œuvre.

    #Covid-19#migrant#migration#sante#economie#tourisme#maindoeuvre#saisonnier

  • A l’aube de l’été, la grande désertion des saisonniers du tourisme en Europe
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    A l’aube de l’été, la grande désertion des saisonniers du tourisme en Europe
    Italie, Grèce, France, Espagne : toutes les destinations touristiques sont confrontées à la même disparition des serveurs, cuisiniers ou employés de ménage, rebutés par les bas salaires et un mode de vie déséquilibré. Les employeurs cherchent la parade.Cet été, vous allez attendre. Attendre votre crêpe. Attendre à l’aéroport. Attendre à l’hôtel. Car les bras ne seront pas assez nombreux pour vous servir, peu importe l’endroit où vous comptez partir : de Colmar à Héraklion, des Pouilles à Perros-Guirec, de Saint-Tropez à Séville et jusqu’en Amérique du Nord, le monde touristique occidental est concerné par la pénurie d’employés du tourisme, en particulier pour les contrats précaires de saisonniers et leurs tâches éreintantes. Ce qui fut absorbable lors des deux derniers étés, en raison de la baisse du nombre de touristes étrangers, devrait l’être plus difficilement cette année : tout indique que les Européens du Nord vont reprendre leur grande migration vers le soleil.Que trouveront-ils sur les plages du bord de l’Adriatique, où, en Emilie-Romagne, 83 % des professionnels ne trouvent pas de personnel ? Et sur les côtes espagnoles, où manquent 50 000 employés saisonniers ? Aux mêmes causes – connues de longue date –, les mêmes effets, quels que soient l’état du marché du travail ou son mode de régulation : les professionnels de l’hôtellerie-restauration font le constat du déficit d’attractivité de leur secteur, du manque de personnel qualifié et de la difficulté à les loger.Les trous dans les plannings se traduiront par des fermetures ponctuelles, une demande de polyvalence accrue pour les salariés ou une désorganisation pouvant nuire à la qualité de service, comme c’est déjà le cas dans les aéroports de Paris, de Londres ou d’Amsterdam. Ce dernier cas est symptomatique d’un secteur qui a préféré se séparer d’une partie de sa main-d’œuvre durant la pandémie de Covid-19, malgré les aides mises en place par les gouvernements. Peu d’employeurs s’attendaient à un rebond aussi rapide de l’activité et certains ont, faute de visibilité, préféré faire avec les moyens du bord à l’été 2020, sans réembaucher leurs saisonniers habituels. Le secteur des loisirs a été le dernier à recruter après la crise, dans un contexte général de manque de main-d’œuvre.

    #Covid-19#migrant#migration#sante#economie#tourisme#maindoeuvre#saisonnier

  • Le Québec met les enfants au travail pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre
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    Alors qu’il n’existe pas d’âge minimum requis, dans la province canadienne, pour commencer à travailler, le taux d’emploi des mineurs y dépasse les 50 %. Beaucoup d’adolescents occupent des petits boulots dans les services que les employeurs peinent à pourvoir.

    Moi qui pensais que les robots allaient tous nous remplacer...

    • A l’âge où certains jouent encore aux Lego, Adrien empile consciencieusement les boîtes de conserve au bout de son rayon. Tous les soirs, le jeune garçon sort de l’école en courant pour venir travailler dans cette grande surface du nord de l’île de Montréal. Deux heures de travail quotidien après la classe : un emploi du temps chargé pour ce garçonnet de 12 ans. Aux caisses de ce même supermarché, de très jeunes adolescents, comme lui, aident les clients à remplir leurs sacs. Combien d’heures par semaine pour chacun, pour quel salaire ? Le gérant refuse de répondre.

      Ces mineurs sont pourtant employés, a priori, en toute légalité. Au Québec, il n’y a pas d’âge minimum requis pour commencer à travailler. La loi sur les normes du travail se contente d’énumérer quelques restrictions : l’employeur doit s’assurer d’ obtenir l’autorisation écrite des parents pour les mineurs de moins de 14 ans. Jusqu’à16 ans, il est interdit de les faire travailler pendant les heures de classe, et les horaires de nuit sont proscrits.

      En 2016 , une enquête menée par l’Institut de la statistique du Québec soulignait qu’ un écolier sur trois avait un emploi rémunéré pendant l’année scolaire. Une situation déjà particulière, qui faisait du Québec, et plus généralement du Canada, des figures d’exception au sein des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques en matière de travail des enfants.

      « Autonomisation des enfants »

      « Dès la fin des années 1990, la déréglementation des horaires d’ouverture des commerces de détail en soirée et le week-end a fait exploser les besoins en main-d’œuvre à temps partiel, explique Elise Ledoux, professeure en ergonomie, spécialiste des questions du travail à l’université du Québec à Montréal. Les écoliers, libérés de leurs cours dès le début de l’après-midi en vertu de l’aménagement du temps scolaire au Québec, étaient une main-d’œuvre idéale pour quelques heures par jour. »

      Aujourd’hui, le phénomène atteint une ampleur inégalée. D’après une étude de Statistique Canada, le taux d’emploi des mineurs au Québec dépasse les 51 %. La situation économique actuelle de la province – un taux de chômage de seulement 3,9 % et une pénurie de travailleurs aggravée par la pandémie de Covid-19, avec quelque 240 000 postes à pouvoir – accroît la pression sur les employeurs. Corollaire : la main-d’œuvre immigrée et les mineurs sont particulièrement courtisés. Sur les autoroutes du pays, les géants de la restauration rapide comme Tim Hortons ou McDonald’s déploient une communication offensive grâce à d’immenses panneaux publicitaires promettant aux parents qu’un emploi chez eux « favorisera la carrière de [leur] enfant ».

      « Dans notre culture très nord-américaine, l’autonomisation des enfants par le biais du travail a toujours été encouragée par les parents, quel que soit d’ailleurs leur niveau de revenus. Parallèlement, leur progéniture était ravie de s’insérer ainsi dans la société de consommation », observe Charles Fleury, sociologue à l’université Laval à Québec.

      Longtemps les petits Québécois se sont contentés de se faire un peu d’argent de poche en distribuant le journal, en faisant du baby-sitting ou en donnant un coup de main pour ramasser les fruits dans l’exploitation agricole familiale. « Mais ce qui change radicalement la donne, poursuit le sociologue, c’est que ces jeunes, par ailleurs de plus en plus jeunes, sont aujourd’hui dans le circuit officiel du marché du travail, en occupant de vrais jobs de travailleurs à temps partiel. »
      Des emplois qui ne sont parfois pas sans risque. Responsables de la cuisson du pain dans une boulangerie, manutentionnaires dans les magasins ou serveurs en salle, les enfants sont, comme leurs aînés, à la merci de brûlures, de chutes ou de blessures. Une enquête du journal numérique québécois La Presse a révélé, fin avril, que 149 enfants de moins de 16 ans avaient été victimes d’un accident du travail en 2020. Les plus jeunes n’avaient pas 13 ans.

      Dilemme

      « Quand j’ai appris ces chiffres, j’étais sous le choc », confie Suzanne Arpin, vice-présidente de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec. « J’ai des petits-fils de cet âge-là, et je ne les imagine absolument pas déplacer des charges lourdes ou s’approcher de fours à haute température ! », poursuit-elle, outrée. Elle rappelle que cela fait plus de vingt ans que la commission alerte les pouvoirs publics afin d’exiger l’instauration d’un âge minimum légal pour être autorisé à travailler. Le but est de se mettre en conformité avec la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies, dont le Canada est signataire. Il s’agit aussi de ne pas voir la jeunesse québécoise sacrifiée sur l’autel des besoins économiques. « Car là où l’on veut vraiment voir nos enfants, c’est à l’école », cingle-t-elle.

      Employé douze heures par semaine dans une épicerie spécialisée du quartier de la Petite Italie, à Montréal, Antony le reconnaît volontiers : il n’est pas un « as » en cours. Alors, à 15 ans, à un an de la fin de la scolarité obligatoire, il réfléchit à son avenir. « J’ai commencé à travailler pour me payer les petits extras que mes parents ne voulaient pas m’offrir, comme les consoles de jeux vidéo. Mais à 20 dollars [environ 15 euros] de l’heure [le salaire minimum horaire est de 13,50 dollars au Québec], je me demande si j’ai intérêt à poursuivre mes études », s’interroge-t-il.

      Le Québec fait face à un dilemme : pour satisfaire ses besoins immédiats en main-d’œuvre, la province prend le risque de voir toute une génération se mettre en situation de décrochage, voire de renoncement scolaire. Mardi 31 mai, le ministre québécois du travail et de l’emploi, Jean Boulet, a reconnu « qu’il n’était pas normal que des enfants de 11 ans travaillent ». Il n’a pas exclu que le gouvernement légifère, sur le modèle de la Colombie-Britannique qui, en octobre 2021, a fait passer l’âge minimum pour travailler de 12 à 16 ans.

      #travail #emploi #travail_des_enfants #accident_du_travail