Mort d’une Nigériane dans les Alpes : la justice refuse de rouvrir l’enquête

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  • Affaire Blessing : le Procureur Général confirme le déni de vérité et de justice

    Communiqué de presse de Tous Migrants et Border Forensics du 30 juin 2022

    Le 27 mai 2022, l’association TOUS MIGRANTS et la sœur de Blessing MATTHEW ont introduit une demande de réouverture de l’information judiciaire sur charges nouvelles auprès du Procureur de la République.

    Il sera en effet rappelé qu’un non-lieu avait été prononcé le 18 juin 2020 en dépit des circonstances tout à fait troubles du décès de Blessing MATTHEW. Ce non-lieu est intervenu ab initio, soit sans investigations complémentaires et donc de manière tout à fait singulière.

    Ce non-lieu a été confirmé le 9 février 2021 par la chambre de l’instruction de la cour d’appel, en dépit des nombreuses contradictions mises en avant par les parties civiles qui ont également contesté l’impartialité de la procédure.

    Or, postérieurement à cette décision, un certain nombre d’éléments nouveaux et déterminants sont apparus.

    D’une part, à la lumière du travail technique considérable réalisé par BORDER FORENSICS, des incohérences inédites dans les déclarations des gendarmes ont été mises en exergue.

    D’autre part, l’association TOUS MIGRANTS est parvenue à recueillir la parole d’un témoin direct des faits, dont la situation n’avait pas permis d’être entendu physiquement par les enquêteurs de façon sereine.

    Contre toute attente, le 23 juin 2022, les Conseils des parties civiles ont été rendus destinataires d’un courrier du Procureur Général indiquant qu’il n’envisageait pas de saisir la chambre de l’instruction. ,

    Ce refus, particulièrement succinct, se fonde sur deux arguments :

    - « Les contradictions évoquées dans le mémoire entre les différentes déclarations des gendarmes quant au déroulement de la recherche dans le village de La Vachette des trois personnes en fuite n’apparaissent pas pertinentes, dès lors que chaque gendarme décrit son intervention et son positionnement ».

    - « L’existence du témoin prénommé Hervé était connue… et les enquêteurs avaient eu deux contacts téléphoniques avec lui les 14 et 15 mai 2018 et il n’avait pas évoqué de guet-apens. La chambre d’instruction avait expressément indiqué que son audition n’était pas utile à la manifestation de la vérité. »

    Cette décision du Procureur Général, qui tient en quelques lignes et qui a été prise en très peu de temps, balaye tous les éléments nouveaux apportés par notre enquête.

    Pas plus que les décisions précédentes, celle-ci n’apporte aucun élément concret permettant de lever les contradictions, incohérences et zones d’ombre que nous avons mises en évidence. Qui plus est, le Procureur refuse d’entendre le principal témoin qui, pour la première fois, révélait l’existence d’un véritable guet-apens.

    Cette décision prive les parties civiles d’obtenir toute la vérité sur les circonstances de la mort de Blessing MATTHEW. La justice n’a pas eu le courage suffisant pour accepter la remise en cause de l’enquête qui avait été réalisée par le Procureur, soit en l’absence d’un magistrat indépendant.

    Cette décision est d’autant plus inconcevable que les obligations de la France en matière d’enquête sont censées être renforcées en cas de décès. L’association TOUS MIGRANTS voit dans cette décision un refus de faire la lumière sur une affaire mettant en cause les forces de l’ordre avec la circonstance que la victime est une exilée.

    En réaction aux circonstances de la mort de sa sœur, Happy MATTHEW nous a dit : “Ils ont juste laissé une personne mourir parce qu’elle n’est pas blanche comme eux, elle n’est pas Française comme eux.” Le déni de vérité et de justice que confirme le Procureur perpétue le traitement discriminatoire et inhumain de Blessing MATTHEW après sa mort.

    De manière plus générale, cette décision est symptomatique d’une absence de véritable contrôle de la Justice face aux très graves violations des droits de l’Homme subies par les personnes exilées.

    Dans un contexte de militarisation croissante de la frontière depuis 2015, et dans un climat politique délétère, où les personnes exilées et les humanitaires qui les accompagnent se voient dénier l’accès aux droits fondamentaux et sont traités comme des citoyens de seconde zone, cette décision doit servir de sursaut.

    Rien n’arrêtera notre demande de « vérité et justice pour Blessing ».

    reçu via la mailing-list Migreurop, le 30.06.2022

    #Blessing_Matthew #justice (well...)

    voir aussi ce fil de discussion :
    https://seenthis.net/messages/962473

    • Mort d’une Nigériane dans les Alpes : la justice refuse de rouvrir l’enquête

      La justice n’envisage pas de rouvrir l’enquête sur la mort d’une Nigériane en 2018 dans les Hautes-Alpes, a déploré jeudi 30 juin l’association de défense des migrants qui en avait fait la demande avec la sœur de la victime.

      Blessing Matthew, 21 ans au moment des faits, avait été retrouvée noyée le 9 mai 2018 dans la Durance, après avoir franchi la frontière en provenance d’Italie. L’enquête sur les circonstances du décès, portant notamment sur un contrôle de gendarmerie survenu deux jours plus tôt à la frontière, avait d’abord été classée sans suite par le parquet de Gap. La sœur de la victime, Christiana Obie Darko, avait déposé plainte avec constitution de partie civile et une information judiciaire avait été ouverte. Elle a conclu à un non-lieu prononcé le 18 juin 2020 et confirmé, le 9 février 2021, par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Grenoble.

      Le 13 juin dernier, l’association Tous Migrants et la sœur de l’exilée ont déposé une demande de réouverture d’information judiciaire à la lumière d’un nouveau témoignage de nature, selon elles, « à rebattre totalement les cartes ». Mais dix jours plus tard, le procureur général de Grenoble leur a fait savoir, dans un courrier dont l’AFP a pris connaissance, qu’il n’envisageait pas de saisir la chambre de l’instruction à cette fin. Les requérants ont condamné, dans un communiqué de presse diffusé jeudi, « cette décision qui tient en quelques lignes et qui a été prise en très peu de temps ». « Elle est parfaitement inconcevable au vu du caractère déterminant du témoignage recueilli. Elle participe à accroître un sentiment de défiance envers la justice lorsque toutes les conditions de l’indépendance ne sont pas remplies et que des forces de l’ordre sont mises en cause », a ajouté leur avocat, Me Vincent Brengarth.

      Selon la sœur de la victime et le collectif de soutien aux migrants, le témoignage, fourni par un membre du « groupe d’exilés pourchassés par les gendarmes », révélait pour la première fois « l’existence d’un véritable guet-apens ». Pour le procureur général, « l’existence du témoin était connue » : « les enquêteurs avaient eu deux contacts téléphoniques avec lui, les 14 et 15 mai 2018, et il n’avait pas évoqué de guet-apens », écrit le magistrat dans sa réponse. « La chambre de l’instruction avait expressément indiqué que son audition n’était pas utile à la manifestation de la vérité », ajoute-t-il. L’association Tous Migrants estime que la situation personnelle de ce témoin direct des faits, à l’époque, ne lui avait pas permis « d’être entendu physiquement par les enquêteurs de façon sereine ».

      https://www.lefigaro.fr/flash-actu/mort-d-une-nigeriane-dans-les-alpes-la-justice-refuse-de-rouvrir-l-enquete-

    • Mort d’une Nigériane dans les Alpes : la justice refuse de rouvrir l’enquête

      Malgré la demande de l’association Tous migrants et de la sœur de la victime, le procureur général de Grenoble a indiqué dans un courrier qu’il n’envisageait pas de saisir la chambre de l’instruction pour rouvrir l’enquête sur la mort Blessing Matthew, une jeune Nigériane décédée en 2018 dans les Alpes.

      Près d’un mois après la demande de réouverture de l’enquête sur la mort de Blessing Matthew par sa sœur Christiana Obie Darko et l’association Tous migrants, la justice a décliné cette requête. Tous migrants a déploré, jeudi 30 juin, dans un communiqué, la décision du procureur général de Grenoble de ne pas saisir la chambre de l’instruction dans le but de relancer les investigations sur la mort de la jeune femme.

      Blessing Matthew, 21 ans au moment des faits, avait été retrouvée noyée le 9 mai 2018 dans la Durance, après avoir franchi la frontière en provenance d’Italie. L’enquête sur les circonstances du décès, portant notamment sur un contrôle de gendarmerie survenu deux jours plus tôt à la frontière, avait d’abord été classée sans suite par le parquet de Gap.

      La sœur de la victime, Christiana Obie Darko, avait déposé plainte avec constitution de partie civile et une information judiciaire avait été ouverte. Elle a conclu à un non-lieu prononcé le 18 juin 2020 et confirmé, le 9 février 2021, par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Grenoble.

      Mais, fin mai, Tous migrants et Christiana Obie Darko ont annoncé avoir demandé la réouverture de l’enquête après avoir pu mettre en lumière des incohérences dans les témoignages des gendarmes impliqués dans le drame. Ils souhaitaient également faire valoir les éléments apportés par un nouveau témoin. Ce dernier, Hervé S., a affirmé avoir assisté à la poursuite de Blessing Matthew par un gendarme, l’avoir entendue tomber à l’eau et avoir vu le gendarme ne pas lui porter secours.

      « Je l’ai entendue crier : ’Help me, help me !’ [’Aidez-moi, aidez-moi !’] Au fur et à mesure qu’elle criait, sa voix s’éloignait… Ensuite, le gendarme est allé dire à ses collègues qu’elle était tombée dans la rivière mais qu’elle avait peut-être traversé. Ils n’ont pas appelé les secours. Des gendarmes sont allés [essayer de] chercher Blessing de l’autre côté », avait confié Hervé S. à Médiapart qui l’avait rencontré et interrogé en avril dernier.

      Selon la sœur de la victime et le collectif de soutien aux migrants, le témoignage d’Hervé S. révélait pour la première fois « l’existence d’un véritable guet-apens ».
      « L’existence du témoin était connue »

      Le procureur général de Grenoble a fait savoir aux requérants, dans un courrier dont l’AFP a pris connaissance, qu’il n’envisageait pas de saisir la chambre de l’instruction dans le but de rouvrir l’enquête.

      Tous migrants cite dans son communiqué les deux motifs invoqués par le procureur pour motiver son refus. Le magistrat ne juge pas « pertinentes » "les contradictions évoquées dans le mémoire entre les différentes déclarations des gendarmes quant au déroulement de la recherche dans le village de La Vachette des trois personnes en fuite [...] dès lors que chaque gendarme décrit son intervention et son positionnement".

      Par ailleurs, le procureur assure que « l’existence du témoin prénommé Hervé était connue » et que « les enquêteurs avaient eu deux contacts téléphoniques avec lui les 14 et 15 mai 2018 » lors desquels « il n’avait pas évoqué de guet-apens ».

      « Cette décision du Procureur Général, qui tient en quelques lignes et qui a été prise en très peu de temps, balaye tous les éléments nouveaux apportés par notre enquête », déplore Tous migrants qui entend poursuivre les démarches dans cette affaire.

      https://www.infomigrants.net/fr/post/41611/mort-dune-nigeriane-dans-les-alpes--la-justice-refuse-de-rouvrir-lenqu