• Aide aux migrants aux portes de l’Europe : de plus en plus systématiquement, « citoyens et exilés sont condamnés »

    Les eurodéputés verts ont dévoilé à Riace, en Italie, un rapport pointant les maltraitances des Etats européens, et notamment de la Grèce, vis-à-vis des exilés et de ceux qui les aident, pour décourager les candidats à l’exil. Ils dénoncent une entorse aux valeurs de l’Europe.

    « Il est important pour moi d’être aux côtés de Mimmo alors que son procès en appel vient de s’ouvrir. » Le député européen EE-LV Damien Carême prend la parole devant quelques dizaines de personnes rassemblées vendredi à Riace, petite commune du sud de l’Italie. Lui et d’autres parlementaires européens, dont l’Allemande Cornelia Ernst (Die Linke, gauche) ou l’Italienne Rosa D’Amato (les Verts), sont venus soutenir Domenico Lucano, surnommé Mimmo. Maire de Riace de 2004 à 2018, il avait été condamné à plus de 13 ans de prison ferme en septembre 2021, accusé d’ « association de malfaiteurs visant à aider et encourager l’immigration clandestine, d’escroquerie, de détournement de fonds et d’abus de fonction ». Mimmo avait en fait fait renaître son petit village de Calabre en y accueillant des dizaines de migrants. Le verdict avait ravi l’extrême droite italienne et provoqué la consternation et l’indignation de toutes les personnes concernées par la question migratoire.
    « Riace, capitale de l’hospitalité »

    « En réalité, pendant ses mandats, Mimmo a fait de ce village un territoire accueillant. Il a refusé l’inaction de l’Etat, pallié les défaillances des politiques européennes et surtout prouvé qu’un autre modèle est possible », reprend Damien Carême. Sa collègue Cornelia Ernst rebondit : « Riace est devenu un lieu d’espoir, une petite ville devenue la capitale de l’hospitalité. » Les députés européens ont aussi profité de ce déplacement pour présenter un rapport sur la criminalisation de la solidarité à travers l’Europe.

    « Le choix de Riace et le moment pour y venir sont évidemment symboliques », explique Damien Carême lors d’un entretien avec Libération. Alors qu’il n’y avait pas eu d’enrichissement personnel de la part de Domenico Lucano, mais d’éventuels manquements au droit administratif, comme le fait de ne pas avoir réalisé d’appel d’offres public pour la gestion des déchets de la commune, il avait écopé de cette lourde peine, tandis que l’extrême-droite, avec Matteo Salvini, dirigeait la région. Si le cas du maire est emblématique, « de nombreux autres élus, citoyens, et exilés sont condamnés au sein de l’UE aujourd’hui », enchaîne Damien Carême, pour qui « nous assistons actuellement à une hausse de la criminalisation des migrations et des solidaires dans l’UE ».
    « Décourager toute solidarité envers les exilés »

    L’étude de 57 pages, réalisée par deux chercheuses, Marta Gionco et Jyothi Kanics, avait été commandée par les eurodéputés verts pour appuyer leurs travaux en commission sur les migrations. Les conclusions du rapport documentent les outils mis en place dans les Etats de l’UE pour criminaliser de plus en plus systématiquement les exilés et les actions de solidarité. « Les actions des bénévoles consistent essentiellement à donner à manger aux exilés, à leur apporter une aide sanitaire ou encore à les accompagner dans leurs démarches pour obtenir des papiers. Mais ils sont victimes de maltraitances des Etats, où ils subissent des procès en réalité pour l’aide qu’ils ont apportée », souligne le député européen, qui fut également maire de Grande-Synthe, commune du Nord où des exilés étaient hébergés dans un camp avant de tenter de gagner l’Angleterre.

    Pour lui, « ces procès politiques doivent être dénoncés et cesser. Ils visent à décourager toute forme de solidarité envers les exilés et nous ne pouvons tolérer ces dérives qui piétinent les valeurs de l’UE et les droits fondamentaux », reprend l’eurodéputé. Dans le fond, « les solidaires sont accusés d’être des passeurs. Ce qui n’est pas le cas. Ce sont des gens qui sauvent des vies humaines en mer, dans les montagnes… Ils ne s’enrichissent pas ! Le rapport recommande donc de mettre en place des corridors humanitaires. »

    En mars 2021, la Cour de cassation avait confirmé la relaxe de Cédric Herrou, devenu une figure de l’aide aux migrants en France, après une longue procédure jalonnée de trois procès et d’une saisine du Conseil constitutionnel. Il avait été initialement poursuivi pour avoir convoyé des migrants venus d’Italie et organisé un camp d’accueil en 2016 dans les Alpes-Maritimes.
    Acharnement judiciaire

    Pour Damien Carême, il existe une différence choquante dans le traitement des réfugiés en fonction de l’endroit d’où ils arrivent. Le député européen cite en exemple les initiatives européennes mises en place dès le début du conflit en Ukraine. « La directive de protection temporaire, qui date de 2001, a été activée. Mais pourquoi n’a-t-elle pas été mise en œuvre pour les réfugiés syriens ou afghans ? » interroge-t-il. « C’est révélateur de ce que l’Europe veut. Quand on est blanc et chrétien, on est bienvenu ; quand on est basané et musulman, non. C’est du racisme », estime-t-il. « Dans une Europe dont les valeurs sont la lutte contre les discriminations, la solidarité, la liberté, la démocratie, le respect de l’état de droit… les fondations sont secouées. »

    Selon le rapport, c’est un véritable système européen de rejet systématique des migrants qui est mis en place. L’idée est de décourager les candidats à l’exil en criminalisant et condamnant ceux qui les aident par solidarité et compassion. Cette stratégie est de plus en plus visible, notamment dans certains pays comme la Pologne, la Hongrie ou encore la Grèce, pointent les responsables d’ONG également présents à Riace. La journaliste néerlandaise Ingeborg Beugel le sait bien. Son procès en Grèce, qui devait s’ouvrir le 1er juin, a été finalement reporté, mais elle reste accusée d’avoir « facilité » le séjour illégal d’un Afghan de 23 ans qu’elle hébergeait sur l’île d’Hydra, où elle vit depuis 40 ans. Elle risque un an de prison et une amende de 5 000 euros. La journaliste se dit victime d’un acharnement judiciaire, car depuis des années, elle enquête en Grèce sur les sujets migratoires et dénonce les « pushback », ces refoulements illégaux des migrants en mer commis par les garde-côtes, ou encore les conditions déplorables d’accueil des migrants dans les camps. Ce harcèlement s’est accentué depuis qu’elle a osé poser directement au Premier ministre grec Mitsotakis une question sur ces refoulements lors d’une conférence de presse.
    Une peine de 187 ans de prison

    Les exilés comparaissent, eux aussi, régulièrement devant les tribunaux après leur arrivée sur les îles grecques. Une disposition de la loi grecque permet de qualifier de « passeur » toute personne reconnaissant avoir tenu la barre d’un rafiot de fortune entre la Turquie et la Grèce, point d’entrée dans l’UE, y compris pendant quelques instants. La plupart du temps, le vrai trafiquant et passeur, parfois armé, abandonne le bateau d’exilés pour sauter sur un jet-ski et rentrer à terre, en laissant les réfugiés tenter de se débrouiller pour piloter l’embarcation. Les peines de prison peuvent s’élever à plusieurs dizaines d’années.

    Le 5 mai dernier, trois demandeurs d’asile syriens ont ainsi été jugés après le naufrage d’un bateau près de l’île de Paros le 24 décembre 2021. Ils ont écopé de peines de prison pour « aide à l’entrée illégale » sur le territoire grec. L’un a été condamné à 187 ans de prison et les deux autres à 126 ans chacun. Environ 2 000 personnes seraient actuellement détenues dans les prisons grecques pour trafic illégal de migrants, ce qui représenterait la deuxième population de détenus la plus importante en Grèce.

    https://www.liberation.fr/international/europe/aide-aux-migrants-aux-portes-de-leurope-de-plus-en-plus-systematiquement-

    #procès #justice #Mimmo_Lucano #Riace #Domenico_Lucano #Italie #criminalisation_de_la_solidarité #acharnement_judiciaire #asile #migrations #réfugiés #villes-refuge #hospitalité #IoStoConMimmo

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    voir aussi ce fil de discussion :
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    • Mimmo Lucano, processo alla solidarietà: appunti sulla sentenza di Locri

      Un pomeriggio intensissimo di emozioni e di approfondimenti quello del 17 giugno appena trascorso al No Mafia Memorial di Palermo, così denso che non può ridursi a un resoconto: l’intento originario era valutare le motivazioni della sentenza (ne ha già scritto Fulvio Vassallo Paleologo, che ha svolto il ruolo di moderatore), ma a poco a poco ricordi, intenzioni, desideri e progetti hanno preso il sopravvento, specie nelle parole accorate dell’ex sindaco di Riace.

      “In tre sindacature, ho fatto dell’accoglienza non solo un’affermazione del rispetto dei diritti umani, ma anche un’occasione per lo sviluppo del territorio e per la lotta contro le mafie. Dal 2009 ero responsabile dell’Ufficio Amministrativo e, quando una famiglia sudanese di nove persone fu chiamata a pagare 5 euro e 50 centesimi a testa per ottenere le carte d’identità, decisi che da quel momento quei soldi li avrei versati di tasca mia. Poi, eletto sindaco, eliminai questi diritti di segreteria, forse troppo sbrigativamente, senza seguire la procedura ufficiale…”

      Quando a Locri non esisteva un albo ufficiale delle cooperative e i locali del Tribunale non avevano l’agibilità, Lucano estromise alcune cooperative in odor di mafia dal progetto di accoglienza; staccò l’acquedotto di Riace dalla rete regionale; pretese il controllo pubblico dello smaltimento dei rifiuti; perfino le imprese funebri locali contestarono la sepoltura dei migranti nel cimitero di Riace divenuto multietnico. Alcuni di questi soggetti giuridici hanno testimoniato poi per l’accusa durante il processo.

      Quando il modello Riace, ora imitato in tutto il mondo, fu avviato, nei primi anni Duemila, vigeva la legge Turco-Napolitano; venivano stabiliti flussi d’ingresso (sia pure solo sulla carta); “la Prefettura mi osannava perché le risolvevo il problema degli sbarchi”, confessa Lucano. Poi vennero i decreti Minniti e Salvini e quello che era meritorio si mutò in delittuoso. “Al tempo dello sbarco del 1998, tutto avvenne spontaneamente, con la collaborazione del vescovo, Mons. Bregantini, vicino alla teologia della liberazione e al Movimento dei Lavoratori per il Socialismo, mentre io ero di Democrazia proletaria” (vescovo, che poi deporrà al processo a favore dell’imputato e della sua <<visione profetica>>, citando l’Enciclica Fratelli tutti n.d.r.). Fu rimesso in uso il borgo, ricostruite case, nacquero la scuola, il doposcuola, la mensa sociale, il banco alimentare; riacesi e richiedenti asilo lavorarono affiancati con contratti regolari. Fu perfino creata una moneta, per gli scambi interni, con le effigi di Peppino Impastato, di Martin Luther King e Che Guevara.

      Lucano viene coinvolto all’inizio del 2020 nel processo Xenia, nell’aura di criminalizzazione generalizzata dei soccorsi in mari, dell’operato delle ONG, dell’accoglienza, e condannato a 13 anni e 2 mesi (quasi il doppio di quanto richiesto dall’accusa), per associazione a delinquere, frode, falso in atto pubblico, peculato, abuso d’ufficio e truffa. Curioso che il primo reato, favoreggiamento dell’immigrazione clandestina, per il quale era stato anche arrestato, sia stato archiviato! Curioso, ma non troppo se si pensa che avrebbe impedito l’accusa di associazione a delinquere, passibile di ben più aspra condanna (art. 416 dei codici Zanardelli e Rocco)! Curioso anche che gli sia stato contestato il falso in atto pubblico per aver concesso una carta d’identità a un bimbo di 4 mesi privo di permesso di soggiorno, affinché potesse essere curato, ma che lo stesso reato non gli sia stato ascritto per la carta d’identità data a Becky Moses, poi morta nell’incendio del 2017 della baraccopoli di San Ferdinando. Curioso, ma non troppo se si pensa che la responsabilità di quel campo era del prefetto Di Bari, la cui moglie oltre tutto era indagata dal 2016 per la gestione non troppo limpida di alcuni centri di accoglienza…

      La sociologa Giovanna Procacci, che ha seguito tutte le udienze, paragona il processo Lucano al processo contro Danilo Dolci per lo “sciopero alla rovescia” del 1956, in cui l’attivista triestino fu difeso da Piero Calamandrei, il quale in quell’occasione parlò di “rovesciamento di senso”: c’è nei processi politici un marcatore comune, non ci sono fatti ma idee, sparisce il contesto, l’identità dell’inquisito viene capovolta. In questo caso, l’accoglienza diventa sistema clientelare per l’accaparramento dei voti, il volontariato peculato, la trasparenza amministrativa corruzione.

      Il sociologo Santoro parla di questo processo come di una “cerimonia di degradazione”, che è resa possibile dal fatto che l’accusatore può presentarsi come incarnazione di un sentire comune e pubblico. Ciò spiega l’enormità della pena: si mira a distruggere un’identità politica fortissima. Se non che, come osserva Umberto Santino, questa volta la cerimonia di degradazione si è risolta in un effetto boomerang: la condanna ha suscitato indignazione e solidarietà dappertutto; “il villaggio globale” di Riace, come a Lucano piace chiamarlo, sta risorgendo. Ci sono nuove ospiti: dodici bambine afghane e diverse donne nigeriane; Lucano resta in contatto con il movimento di liberazione curdo, cui aveva aderito fin dall’inizio.

      L’appello inizierà il 6 luglio, ma nel frattempo la scelta dell’ex sindaco è quella della disobbedienza civile: non intende pagare la multa, poiché sarebbe un’ammissione di colpevolezza, “il riconoscimento di una forma di legalità squallida”. I soldi raccolti dall’associazione “A buon diritto”, di cui sono garanti Manconi e Colombo, desidera siano impegnati per accogliere più profughi a Riace. “Nell’appello non voglio l’attenuazione della pena, non accetto neanche un giorno in meno, voglio la riabilitazione del nostro lavoro, voglio la luce della verità”.

      Chiudiamo con le parole di Francesco Saccomanno, anch’egli presente ad ogni seduta del processo, amico e compagno sincero di Lucano senza incertezze.
      “Essendo un uomo di legge”.

      (da una frase del Colonnello Sportelli nel processo di Locri,

      mentre parla di migranti e chiede quasi di essere ringraziato).

      Parafrasando il Calamandrei della famosa epigrafe “Lo avrai camerata Kesserling”,

      noi gli rispondiamo.

      “Lo avrete,

      giudici ed inquisitori, il monumento che pretendete da noi compagni

      e da quanti vogliono Restare Umani.

      Ma con che pietra si costruirà

      a deciderlo tocca a noi.

      Non con le membra straziate

      delle migliaia di esseri inermi

      distrutti dalla disumanità di leggi ingiuste

      non con la terra dei cimiteri

      dove i nostri fratelli migranti

      riposano in serenità

      non con la neve insanguinata delle montagne

      che per tanti inverni li sfidarono

      non con la primavera di queste valli

      che li videro fuggire.

      Ma soltanto col silenzio dei torturati

      più duro d’ogni macigno

      soltanto con la roccia di questo patto

      giurato fra uomini liberi

      che, come Mimmo, volontari si adunarono

      per dignità e non per odio

      decisi a riscattare

      la vergogna e la disumanità del mondo.

      Su queste strade se vorrete tornare

      ai nostri posti ci ritroverete

      morti e vivi con lo stesso impegno

      popolo serrato intorno al monumento

      che si chiama

      ora e sempre

      RESISTENZA

      https://www.pressenza.com/it/2022/06/mimmo-lucano-processo-alla-solidarieta-appunti-sulla-sentenza-di-locri

    • Processo a Mimmo Lucano, la corte riapre l’istruttoria per un’intercettazione del 2017. «Ora voglio la verità»

      Locri, la mossa decisiva degli avvocati difensori. La registrazione chiave: «L’amministrazione dello Stato non vuole il racconto della realtà di Riace». A ottobre la sentenza di Appello. L’ex sindaco: "Non mi interessa una riduzione di pena, voglio l’assoluzione piena”. L’aiuto di Luigi Manconi

      (#paywall)
      https://www.repubblica.it/cronaca/2022/07/07/news/reggio_calabria_processo_mimmo_lucano_riaperta_istruttoria-356927399