Godard et la mort de l’auteur

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  • Godard et la mort de l’auteur
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    « Un auteur n’a pas de droits, il n’a que des devoirs ». Après avoir participé à la « Politique des auteurs », Godard fut à partir de 68 un #critique virulent de la propriété des films, ce qu’il mit en pratique dans son travail de cinéaste et de médiateur entre les #Arts et la politique.

    #cinéma #droit #maoïsme #propriété_intellectuelle
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    • Après que nombre d’entre eux participèrent aux États généraux, les réalisateurs s’en désolidarisèrent en créant la Société des réalisateurs de films (SRF). Sa revendication fondatrice était la défense du statut d’auteur et de propriétaire reconnu aux réalisateurs par la loi du 11 mars 1957, auquel l’organisation reprochait toutefois de ne pas reconnaître la primauté du réalisateur sur ses coauteurs (les scénaristes, les compositeurs et les auteurs des œuvres adaptées). Les fondateurs de la SRF allaient même jusqu’à placer « avant toute autre chose, avant toute autre discussion, avant toute autre réflexion, l’affirmation de leur totale propriété artistique sur leur œuvre ». Ce droit de propriété, la SRF le fondait sur la « responsabilité du réalisateur » qui devait « comporter obligatoirement le contrôle de la fabrication de l’œuvre à tous les stades, et particulièrement, le contrôle du montage et de la finition ». Parmi ces défenseurs de la propriété du réalisateur en 1968, on trouvait nombre de collaborateurs des Cahiers du cinéma et cinéastes de la Nouvelle Vague (Jacques Doniol-Valcroze, Rozier, Rohmer, Resnais, etc.), mais aussi de grands noms de générations précédentes (Robert Bresson), d’anciens dirigeants de syndicats professionnels (Jean-Paul Le Chanois) et des réalisateurs « grand public » comme Henri Verneuil (dont La Vache et le prisonnier avait attiré en 1959 vingt fois plus de spectateurs que Les 400 coups).

      À ces fondateurs de la SRF, Godard reprocha de « faire leur révolution bourgeoise » avec deux cents ans de retard sur les événements. Tandis que les premiers fondaient le droit de propriété du réalisateur sur son autorité et son ascendant sur les autres professions, il dénonçait le statut d’auteur en tant que position « patronale », en appelant au renversement des rapports de pouvoir entre le réalisateur et ses collaborateurs (que ces derniers soient devant ou derrière la caméra). Pareil dépassement du statut d’auteur, Godard en faisait une condition d’un cinéma au service des luttes politiques des opprimés :

      « Pour filmer d’une manière politiquement juste, il faut se lier aux gens dont on pense qu’ils sont politiquement justes. C’est-à-dire ceux qui sont opprimés, qui subissent la répression et qui combattent cette répression. Et se mettre à leur service. Apprendre en même temps que leur apprendre. Abandonner l’idée de faire des films. Abandonner la notion d’auteur, telle qu’elle était. C’est là qu’on voit la trahison, le révisionnisme intégral. La notion d’auteur est une notion complètement réactionnaire. Elle ne l’était peut-être pas à des moments où il y avait un certain progressisme des auteurs par rapport à des patrons féodaux. Mais à partir du moment où l’écrivain ou le cinéaste dit : moi je veux être le patron parce que je suis le poète et que je sais, alors là c’est complètement réactionnaire. Dans le Paradis socialiste, celui qui voudra être cinéaste ne le sera pas forcément. Il le sera si c’est bon pour tous. Moi, ça ne me fait rien. »

      (...) Avant même que paraisse en 1967 le fameux article de Barthes sur « La mort de l’auteur », la propriété artistique et la notion d’artiste étaient en effet attaquées par des plasticiens comme Duchamp, Elaine Sturtevant et Andy Warhol, des collectifs d’artistes comme Fluxus ou USCO, des musiciens comme John Cage et la troupe du Living Theatre.

      #corporatismes #artistes #auteur #cinéma_d'auteur