Écologie : enquêtes, reportages, vidéos

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  • Inès Léraud : « J’ai voulu rendre justice à des paysans esquintés »
    21 novembre 2024 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/211124/ines-leraud-j-ai-voulu-rendre-justice-des-paysans-esquintes

    En librairie depuis mercredi 20 novembre, « Champs de bataille. L’histoire enfouie du remembrement » est la nouvelle BD d’Inès Léraud et du dessinateur Pierre Van Hove. Ils sont les invités d’« À l’air libre ».

    C’est une histoire méconnue, qui a brisé des vies dans les campagnes.

    Le remembrement, à partir des années 1940, a conduit à un vaste agrandissement des parcelles agricoles, à l’abattage d’innombrables haies, et à un exode massif de paysannes et de paysans. Cette politique, menée de façon autoritaire par les services de l’État, a été fondamentale dans l’industrialisation de l’agriculture. C’est le sujet du nouveau récit graphique d’Inès Léraud et de Pierre Van Hove, Champs de bataille. L’histoire enfouie du remembrement.

    L’agrandissement des parcelles n’a cessé de se poursuivre jusqu’à aujourd’hui. Il est pourtant possible d’arrêter cette fuite en avant délétère. De replanter des haies, de reconstituer des écosystèmes résilients face aux catastrophes écologiques. C’est ce que nous dit Inès Léraud, alors que le mouvement de colère agricole a repris depuis quelques jours, et que certains syndicats prônent le moins-disant environnemental.

    Une émission préparée et présentée par Amélie Poinssot.

    Avec :

    Inès Léraud, journaliste d’investigation et autrice de Champs de bataille. L’histoire enfouie du remembrement (Delcourt et La Revue Dessinée) ;
    Pierre Van Hove, dessinateur de Champs de bataille. L’histoire enfouie du remembrement.

  • Le gouvernement abandonne le Plan vélo : un projet à « 2 milliards d’euros » s’évapore
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/291024/le-gouvernement-abandonne-le-plan-velo-un-projet-2-milliards-d-euros-s-eva

    Le gouvernement met au rebut l’ambitieux Plan vélo 2023-2027. Les plus d’un milliard d’euros d’investissements prévus sur cinq ans ne sont plus qu’un lointain souvenir. Le nouveau ministre des transports préfère, quant à lui, miser sur les cars.

    En règle générale, un magicien n’aime pas qu’on révèle ses secrets. Mais les associations de cyclistes n’ont que faire de la réputation de prestidigitateur de l’État. Depuis quelques semaines, elles braquent leurs phares en direction d’une disparition hallucinante : des centaines de millions d’euros, promis aux collectivités dans le cadre du Plan vélo, qui se sont évanouis dans la nature.

  • Nucléaire : les EPR de Gravelines sous la menace de la montée des eaux | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/031024/nucleaire-les-epr-de-gravelines-sous-la-menace-de-la-montee-des-eaux

    Le site nucléaire d’EDF dans le Nord, où doivent être construits deux réacteurs EPR2, est trop vulnérable à la hausse du niveau de la mer dans le contexte du dérèglement climatique, selon une étude de Greenpeace. L’industriel assure s’appuyer sur les rapports du Giec.

  • La sûreté nucléaire fait encore moins de place à la société civile | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/120924/la-surete-nucleaire-fait-encore-moins-de-place-la-societe-civile

    Selon Yves Marignac, « parler de transparence est un choix sémantique ». Il cite un personnage créé par l’écrivain Daniel Pennac dans sa saga Malaussène : « La transparence est un concept d’escamoteur. » Pour cet expert, « la transparence, c’est un principe opposé à celui de l’accès à l’information du public ». Parler de transparence, « c’est une manière pour le détenteur d’informations de garder la main et de décider ce qu’il est pertinent de montrer au public ». Alors que « lorsque le droit du public à l’information est reconnu, c’est au détenteur de justifier qu’il ne la donne pas ».

    Sollicités par Mediapart, ni le ministère de l’écologie ni le ministère de l’énergie n’ont voulu répondre à nos questions.

    #nucléaire #irsn #asn #asnr

  • Guillaume Vama, un écologiste kanak dans les geôles coloniales
    Lucie Delaporte | 1 septembre 2024 à 11h48 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/010924/guillaume-vama-un-ecologiste-kanak-dans-les-geoles-coloniales

    Incarcéré à Bourges depuis deux mois, le militant accusé d’avoir participé aux révoltes de Nouvelle-Calédonie est connu pour avoir développé l’agroforesterie sur l’archipel. Une technique écologique permettant l’autosuffisance alimentaire, détruite par la colonisation.
    (...)



  • 🐋 Libérez Paul Watson - de Sea Shepherd 🐋

    Le dimanche 21 juillet, la police danoise 🇩🇰 a décidé d’arrêter le capitaine Paul Watson dans le port de Nuuk au Groenland. Il faisait route vers le pacifique nord pour barrer la route au plus grand baleinier jamais construit dans l’histoire de la chasse baleinière, le Kangei Maru. Ce navire japonais 🇯🇵 inauguré en mai 2024 est une machine de guerre conçue pour tuer des milliers de baleines jusque dans les coins reculés de la planète.

    Le Japon 🇯🇵 agit impunément en violation du moratoire international sur le commerce de viande de baleines entré en vigueur en 1986. Moratoire que le Danemark 🇩🇰 a ratifié. Il répand le sang des baleines à l’heure même où une mobilisation mondiale s’organise pour libérer leur plus grand défenseur.

    Âgé aujourd’hui de 73 ans, Paul Watson a dédié sa vie entière à la défense de l’océan et des baleines en particulier. S’il est extradé vers le Japon, il encourt une peine de 15 ans d’emprisonnement. Dans les faits, la perpétuité. Il n’en repartirait pas vivant.

    Nous demandons aux député-es 🇫🇷 de faire pression sur la ministre danoise 🇩🇰 pour empêcher l’extradition et obtenir la libération de Paul Watson.


    Publication : 08 / 08 / 2024
    Commission : Affaires étrangères
    Admissibilité : pas de seuil


    .

    https://politipet.fr/2373
    https://petitions.assemblee-nationale.fr/initiatives/i-2373

  • Lyon-Turin : le mégaprojet de tunnel impacte l’eau de la montagne | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/160724/lyon-turin-le-megaprojet-de-tunnel-impacte-l-eau-de-la-montagne


    Extrait du Power Point interne à EDF à propos des impacts du Lyon-Turin sur ses ouvrages. © Document Mediapart

    Cadre d’une entreprise spécialisée dans le creusement de tunnel, Jérôme* était présent sur le chantier du Lyon-Turin en avril 2019 : « On creusait une galerie pour le tube sud du tunnel à proximité du barrage et il y a eu une venue d’eau importante, d’environ 50 litres d’eau par seconde. Nous avons dû arrêter le chantier durant une journée. C’était un tronçon très compliqué à creuser, avec une géologie chahutée et pleine de failles, qui bouge beaucoup. »

    Des « venues d’eau exceptionnelles » dans cette galerie du tube sud Lyon-Turin, et avec le même débit de 50 litres par seconde, sont mentionnées dans le document d’EDF.
    « Il existe un réseau de piézomètres pour surveiller le niveau des eaux en montagne, spécifiquement réalisé dans le cadre du Lyon-Turin, témoigne pour sa part à Mediapart Nicolas*, un technicien qui a travaillé un temps sur l’ouvrage. On a vu une réponse assez rapide juste après le passage du tunnelier dans une galerie de reconnaissance. Le relevé d’un piézomètre a chuté de 150 mètres, c’est énorme, et très significatif comme chute de niveau. »

    Selon un hydrogéologue qui connaît bien cette montagne, mais demande à rester anonyme pour ne pas être étiqueté comme opposant au projet : « Le creusement de la galerie est en train de vider la montagne de son eau à cet endroit. Dans les Alpes, le milieu géologique est très fracturé. La roche est pleine d’eau. Si des failles dans cette roche viennent à communiquer avec la galerie percée, elles vont drainer l’eau depuis le massif vers le tunnel. »
    C’est d’autant plus préoccupant, selon ce spécialiste, que l’eau est descendue si bas qu’elle se retrouve sous le niveau de l’Arc, la rivière qui coule à côté. Elle ne peut donc plus s’y déverser. Et se répand à la place dans les galeries du tunnel situées au-dessous : « L’#eau est évacuée de la galerie par pompage plus loin dans la vallée et par conséquent cette eau est perdue pour toujours dans ce secteur… »

    #Tunnel_Lyon_Turin

  • PFAS : loi votée mais ambitions réduites | Libé | 30.05.24

    https://www.liberation.fr/environnement/pollution/pfas-apres-lassemblee-nationale-le-senat-adopte-linterdiction-des-polluan

    Nous voilà rassuré-es.

    Le texte examiné lors de la niche écologiste a été voté au Sénat, ce jeudi 30 mai, grâce au travail effectué en amont en commission. Mais l’ambition initiale de la loi est largement amoindrie.
    [...]
    L’article 1er du texte interdit à compter du 1er janvier 2026, la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché des cosmétiques, textiles, ou produits de fart (pour les skis) contenant des PFAS.

    La gauche a tenté, en vain, d’y ajouter les mousses à incendie et les ustensiles de cuisine, rappelant la très forte exposition des pompiers et du grand public à ces usages. Le rapporteur et le gouvernement, représenté cette fois-ci par le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, y étaient défavorables, sous prétexte que l’Union européenne devrait bientôt légiférer à ce sujet et les interdire en 2027.

    En revanche, la droite a réussi à exempter les « textiles techniques à usage industriel » du cadre de la loi, diminuant toujours plus les produits dont la présence des PFAS sera interdite.

    • chez Mediapart : https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/300524/polluants-eternels-le-senat-approuve-son-tour-leur-restriction

      « Il y a un an, quand je parlais de ce scandale des polluants éternels, on me disait que ça ne servirait à rien de tenter de faire voter un texte, parce que les lobbies sont trop forts et le sujet trop technique, se souvient Nicolas Thierry. Mais on a réussi à lancer un mouvement d’opinion avec des activistes. » Pour lui, cette nouvelle étape est la preuve que son camp a « gagné la bataille culturelle ». « Personne ne remet en cause l’enjeu des PFAS. »

      À lire aussi
      Polluants éternels : deux géants industriels devant la justice à Lyon
      29 mai 2024

      Et dans l’hémicycle, ni gouvernement ni la droite sénatoriale n’ont osé minorer la pollution ou l’enjeu sanitaire de cette famille de produits chimiques. Des communistes aux LR, on égraine les risques sanitaires, les chiffres sur la concentration de ces perfluorés dans l’environnement, et on dit vouloir « fermer le robinet ».

      Ce constat fait, Nicolas Thierry tient à prévenir tout le monde : « On est inarrêtables. Tout le monde a bien compris que la population est en demande d’une législation sur ces produits. » Mais il reste du chemin. Le texte n’ayant pas été voté dans les mêmes termes au Sénat qu’à l’Assemblée deux mois plus tôt, il devra y repasser. « J’espère pouvoir compter sur tout le monde, y compris la majorité présidentielle », avance Nicolas Thierry, plutôt optimiste sur l’issue du texte.

  • Giga-bassines : à nous, la Beauce ! | Mediapart | 12.05.24

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/120524/gigabassines-des-milliers-de-manifestants-dans-le-puy-de-dome-denoncent-un-entetement-du-gouvernement/commentaires#comment-12328032

    12/05/2024 20:36 PAR FRANCISCO DE LUCA

    Dans la lignée des solutions foireuses, que le système trouve par-ci par là, voici une solution :

    Faisons de la Beauce une immense plaine immergée pour créer la méga-hyper-bassine, mère de toutes les bassines.

    On pourrait créer ainsi une immense zone piscicole et de baignade publique.

    Je sais, j’aurais pu être ministre dans tous ces gouvernements d’improbables.

  • Écologie : comment sortir du blocage ? | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/090524/ecologie-comment-sortir-du-blocage

    Quand l’État recule et reporte les réformes structurantes nécessaires pour arrêter l’écocide, que faut-il faire ? Démanteler soi-même les infrastructures toxiques, planifier la transition écologique ou inventer de nouvelles formes de démocratie ? Discussion dans « À l’air libre ».

    Pour en parler :

    Benoît Feuillu et Léna Lazare : membres des Soulèvements de la terre ;
    Loïc Blondiaux, professeur de science politique à l’université Paris I-Panthéon-Sorbonne ;
    Claire Morgane Lejeune : doctorante à Sciences Po et coresponsable du département planification écologique de l’Institut La Boétie.

  • L’habitat léger, nouvelle cible des préfectures | Mediapart | 07.04.24

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/070424/la-cabanisation-du-territoire-nouvelle-cible-des-prefectures

    L’habitat léger est dans la ligne de mire des services de l’État, qui voient dans leur développement un menaçant chaos. Ses défenseurs rappellent son bénéfice écologique ainsi que son utilité sociale en pleine crise du logement.

    [...] ces constructions légères sont énergétiquement sobres et écologiquement vertueuses. Alors que des propriétaires de forêts denses n’arrivent pas à les entretenir, favoriser l’installation de ces habitants qui font un travail de débroussaillage peut s’avérer, par exemple, bien utile pour éviter les feux.

    Dans un contexte où les élus opposent souvent leurs besoins de nouveaux logements et la loi sur le zéro artificialisation nette (ZAN), l’habitat léger est un modèle précieux. « Face à la bétonnisation, la légalisation de l’habitat léger est une vraie solution », avance la sociologue Geneviève Pruvost, qui vient de publier une enquête très fouillée sur les habitants d’une yourte, La Subsistance au quotidien (Seuil, 2024). « On ne réussira pas non plus à faire des ceintures maraîchères autour des villes sans l’habitat léger », plaide-t-elle, en référence à l’objectif également affiché par les pouvoirs publics de relocaliser la production agricole.

    Pour elle, les blocages sont fortement culturels. « L’administration est peuplée de gens de la génération des Trente Glorieuses qui ont grandi avec l’idée que le désirable, c’est le pavillon en parpaing. Ils ont une conception complètement misérabiliste de ces habitats », regrette-t-elle.

    Au pays de Galles, lorsque les habitants de ce type de constructions éphémères font la preuve que leur installation produit une empreinte carbone réduite, ils sont régularisés.

  • La « cabanisation » du territoire, nouvelle cible des préfectures
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/070424/la-cabanisation-du-territoire-nouvelle-cible-des-prefectures

    L’habitat léger est dans la ligne de mire des services de l’État, qui voient dans leur développement un menaçant chaos. Ses défenseurs rappellent son bénéfice écologique ainsi que son utilité sociale en pleine crise du logement.

    C’est une lutte sourde mais déterminée qu’ont entamée un certain nombre de préfectures contre l’habitat léger, ou ce qu’elles appellent la « cabanisation » de leur territoire.

    En effet, qu’il soit motivé par des aspirations écologiques et/ou alimenté par la crise du logement, l’habitat léger – caravanes, mobiles homes, cabanes ou yourtes – n’a cessé de se développer ces dernières années.

    « Il y a de plus en plus de personnes en difficulté pour trouver un logement ou pour échapper à des formes indignes d’habitat qui trouvent refuge dans l’habitat léger, confirme Paul Lacoste, porte-parole de l’association Halem qui défend les habitants de logements éphémères ou mobiles. Le problème, c’est qu’elles subissent une répression continuelle. »

    Le statut juridique de ces formes d’habitat reste néanmoins extrêmement précaire. Si la loi Alur en 2014 a mis fin au vide juridique, en autorisant les maires à accorder des dérogations pour des habitats légers en résidence principale sur les terrains non constructibles, bien peu d’élus les intègrent dans leur plan local d’urbanisme (PLU).

    [...]

    La préfecture [de Corrèze] propose donc un guide pratique à destination des élus pour « sanctionner » et « obtenir la démolition » des habitats légers, semblant les mettre sur le même plan que n’importe quelle construction illégale.

    Avant elle, la préfecture de l’Hérault avait adopté une charte similaire en 2021, arguant que la cabanisation « n’a que trop gangrené notre beau territoire ». La préfecture de Haute-Garonne, engagée dans le même combat, s’est même adjoint les services du Centre national d’études spatiales (Cnes) de Toulouse pour détecter, via des satellites, les cabanes et autres yourtes. Les informations recueillies permettent une verbalisation immédiate.

    [...]

    Que les préfectures s’enquièrent des risques de feu ou de pollution, c’est bien leur rôle, mais il y a, pour lui, « beaucoup de mauvaise foi dans ces arguments. Derrière, il y a des pressions très fortes de la spéculation foncière, les lobbys de la construction ou du tourisme de plein air », précise le porte-parole d’Halem.

    Les associations en défense de ces habitants rappellent aussi que ces constructions légères sont énergétiquement sobres et écologiquement vertueuses.

    #habitat_léger #précarité #répression

  • https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/210324/scandale-du-chlordecone-le-conseil-de-l-europe-est-saisi

    Écosystèmes et pollution
    Scandale du chlordécone : le Conseil de l’Europe est saisi

    La Fédération internationale pour les droits humains a déposé jeudi une réclamation collective auprès du Comité européen des droits sociaux pour exiger de la France un accès urgent à l’eau potable en Guadeloupe et des réparations pour l’empoisonnement des Antilles à ce pesticide.

    Mickaël Correia, 21 mars 2024

    Dix-huit ans après le dépôt d’une première plainte qui a débouché en janvier 2023 sur un non-lieu, le combat pour réparer l’empoisonnement des Antilles françaises au chlordécone continue. Ce pesticide, abondamment utilisé dans les bananeraies de 1972 à 1993 en Guadeloupe et en Martinique, est au centre d’une nouvelle action en justice lancée jeudi 21 mars.

    La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), avec le concours de la Ligue des droits de l’homme et de Kimbé Rèd FWI, association antillaise de défense des droits humains, a déposé une réclamation collective auprès du Comité européen des droits sociaux à l’égard de la France. Cette requête, que Mediapart a pu consulter, dénonce la violation du droit à l’eau potable et à l’assainissement en Guadeloupe, ainsi que la pollution au chlordécone des Antillais et Antillaises, considérée par ces trois organisations comme une atteinte au droit à la santé.

    Cette action contre l’État français est fondée sur la Charte sociale européenne, un traité du Conseil de l’Europe qui garantit le respect des droits économiques et sociaux fondamentaux, tels que la santé et la non-discrimination. Le Comité européen des droits sociaux, à qui a été adressé la réclamation, est l’institution du Conseil de l’Europe chargée de la mise en œuvre de cette charte ratifiée par la France en 1973 puis en 1999, dans sa version révisée.

    Le dossier déposé dénonce dans un premier temps « la privation d’eau potable à plus de 380 000 personnes en Guadeloupe », qui résulte tant des coupures chroniques du réseau de distribution que de la pollution de l’eau, notamment au chlordécone.

    Dans l’objet de la réclamation, la FIDH souligne qu’en Guadeloupe, « jusqu’à 80 % de l’eau produite est perdue à cause de fuites dans les réseaux ». Pis, lorsque l’eau est disponible, elle n’est pas potable en raison de « la vétusté des canalisations », de la « défaillance de l’assainissement » et de la « pollution au chlordécone ».

    Concernant l’empoisonnement au chlordécone des Antilles françaises, le dossier pointe « le manque de mesures préventives et curatives effectives pour plus de 665 000 personnes dont la santé est exposée aux conséquences néfastes du chlordécone en Martinique et en Guadeloupe ». Selon Santé publique France, plus de 90 % de la population adulte y est contaminée par le chlordécone et, dans les deux îles, « les taux d’incidence du cancer de la prostate se situent parmi les plus élevés au monde ».

    Bien que l’Organisation mondiale de la santé eût averti dès 1979 de la dangerosité de ce produit, le chlordécone n’a été interdit en France qu’en 1990, puis a continué d’être utilisé aux Antilles françaises par dérogation ministérielle jusqu’en 1993. À la suite de ces pollutions délétères pour la santé, la requête collective précise que « la traçabilité du chlordécone à titre préventif et la détoxification de l’être humain à titre curatif ne sont pas garanties et [que], fin 2023, seules 45 personnes avaient été indemnisées pour le préjudice subi ».

    En ce sens, concernant l’accès à l’eau potable et l’empoisonnement au chlordécone, le refus de l’État français d’appliquer des mesures d’urgence relève pour la FIDH d’un traitement discriminatoire « qui serait inimaginable dans l’Hexagone » et qui contrevient à plusieurs droits fondamentaux des ultramarin·es, pourtant consacrés par la Charte sociale européenne.

    « La France ne peut pas continuer à ignorer les problèmes récurrents des Antilles. Ils n’ont que trop duré, prévient Elena Crespi, responsable du bureau Europe de l’Ouest à la FIDH. Elle doit enfin reconnaître que la Charte sociale européenne doit s’appliquer à l’ensemble de ses territoires. »

    Face à ces violations « graves et répétées » des droits des Antillais et des Antillaises, l’organisation demande au Comité européen des droits sociaux d’« accorder un traitement prioritaire à [leur] réclamation et […] une attention particulière à la demande de mesures immédiates dont elle est assortie ».

    Dans sa requête, la FIDH exhorte le Comité à demander que « l’État français adopte urgemment des mesures » pour pallier les coupures d’eau et des mesures de traçabilité systématique du chlordécone dans l’alimentation, ou encore mette en place « des mesures de détoxification systématique du corps humain pour les personnes dépistées, en fonction du taux de chlordécone mesuré dans leur sang ».

    Elena Crespi résume : « En donnant une suite favorable à la présente réclamation collective, le Comité européen des droits sociaux inviterait la France à prendre plus sérieusement en compte les inégalités historiques entre l’Hexagone et les territoires ultramarins. »

    Le 29 février dernier, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à reconnaître la responsabilité de l’État dans le scandale du chlordécone. Dans ce texte, la République française « s’est assigné pour objectif » l’indemnisation des victimes.

    Mickaël Correia

    #Antilles #pollution #empoisonnement #justice

  • Rénovation énergétique : les lobbys du BTP ont eu la peau de la réforme | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/180324/renovation-energetique-les-lobbys-du-btp-ont-eu-la-peau-de-la-reforme

    Le « choc de simplification » dans la politique de rénovation énergétique, pour lequel ont œuvré les acteurs du BTP, est en réalité un immense recul. Retour sur les derniers mois d’un lobbying qui a vidé de sa substance une réforme ambitieuse.

  • Climat : un #agriculteur #belge assigne #TotalEnergies en #justice | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/130324/climat-un-agriculteur-belge-assigne-totalenergies-en-justice

    C’estC’est une action inédite. Pour la première fois en Belgique, un #citoyen poursuit une #multinationale devant la justice pour un #contentieux_climatique.

    Mercredi 13 mars, Hugues Falys, éleveur en #agriculture_bio de #vaches allaitantes à Bois-de-Lessines, dans la province du #Hainaut, a assigné TotalEnergies devant le tribunal de l’entreprise de Tournai – l’équivalent du tribunal de commerce en France.

    L’agriculteur, qui est aussi administrateur et porte-parole de la Fédération unie de groupements d’éleveurs et d’agriculteurs (Fugea, syndicat wallon qui défend une agriculture paysanne et la transition agroécologique), estime que la multinationale, en tant qu’industriel parmi les plus émetteurs au monde, porte une responsabilité dans les événements climatiques extrêmes qu’il subit régulièrement sur sa ferme.

    Agrandir l’image : Illustration 1
    Hugues Falys. © Photo The Farmer Case / Adrien Medy
    « Je suis installé depuis 1993 et je consacre une grande partie de la surface de mon exploitation au pâturage et à la culture de fourrage pour le bétail, explique à Mediapart Hugues Falys. Mais j’ai été victime en 2016 d’un orage stationnaire avec de la grêle qui a entraîné des pertes de rendement. Puis, au cours des étés 2018, 2020 et 2022, ma ferme a essuyé des vagues de chaleur et des sécheresses. En conséquence, j’ai dû acheter du fourrage, puiser dans mes stocks prévus pour l’hiver et baisser d’un tiers mon cheptel. L’autonomie de ma ferme a été mise en péril. »

    La citation en justice, qu’a pu consulter Mediapart, demande au pétrolier français, « à titre de réparation des conséquences dommageables des fautes constatées », un euro provisionnel pour chacun des aléas subis par l’agriculteur et un euro provisionnel à titre de préjudice moral.

  • Sûreté nucléaire : l’Assemblée repousse une motion de rejet au projet controversé de fusion ASN-IRSN | Connaissances des énergies
    https://www.connaissancedesenergies.org/afp/surete-nucleaire-lassemblee-repousse-une-motion-de-rejet-au

    AFP parue le 11 mars 2024 - 20h14

    La réforme de la sûreté nucléaire fait l’objet de nouveaux débats lundi à l’Assemblée nationale , qui a repoussé une motion de rejet au projet controversé du gouvernement de fusion entre l’ASN, gendarme du nucléaire, et l’IRSN, expert technique .

    (...)

    Mais le camp présidentiel, qui a battu le rappel des troupes, a passé confortablement ce premier obstacle, la motion étant repoussée par 185 voix contre 83. Les députés de la majorité présidentielle ont voté contre, tout comme les groupes RN et LR. La gauche et le groupe Liot ont voté pour.

    (...)

    L’examen du projet de loi, et des plus de 350 amendements déposés, est inscrit jusqu’à mercredi à l’ordre du jour de l’Assemblée.

    (...)

  • La #rémunération hors norme d’#Arnaud_Rousseau, président de la #FNSEA, à la tête du groupe #Avril

    L’émission de France 2 « Complément d’enquête », consacrée jeudi soir à la FNSEA, révèle le montant de la rémunération d’Arnaud Rousseau par sa société Avril : 187 000 euros en 2022. Sans compter ses autres revenus liés à ses multiples casquettes.

    Le chiffre est dix fois supérieur au revenu moyen des agriculteurs et agricultrices du pays. Président du conseil d’administration du groupe Avril et président du syndicat de la FNSEA, Arnaud Rousseau a touché en 2022 une rémunération supérieure à 187 000 euros de la part de la société spécialisée dans le colza et le tournesol. C’est ce que révèle l’émission de France 2 « Complément d’enquête », dans un long format consacré à la FNSEA, diffusé jeudi 29 février à partir de 23 heures (https://www.france.tv/france-2/complement-d-enquete/5714862-agriculture-pour-qui-roule-la-fnsea.html).

    Rapportée à une moyenne mensuelle, cette rémunération, dans laquelle sont inclus des jetons de présence et des avantages en nature – voiture et logement de fonction –, est équivalente à plus de 15 500 euros par mois. L’information de l’équipe de « Complément d’enquête » a été confirmée par le directeur juridique du groupe Avril. Il a toutefois été précisé à France 2 que « ce que perçoit Arnaud Rousseau est confidentiel ».

    Ce montant ne fait pas le tour des rémunérations d’Arnaud Rousseau, dont l’ensemble des revenus est, à l’évidence, encore supérieur. L’homme est en effet président de la FNSEA – où il touche des indemnités d’élu –, exploitant agricole à la tête de plusieurs structures bénéficiaires des aides publiques de la PAC – dont Mediapart révélait les montants l’an dernier –, vice-président de la chambre d’agriculture de la région Île-de-France, vice-président de la FOP (Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux), et maire de sa commune.
    Des manœuvres pour empêcher la reconnaissance de maladies liées aux pesticides

    Dans son enquête, le magazine de France 2 révèle également comment la FNSEA a tenté de manœuvrer pour empêcher la reconnaissance de maladies liées aux pesticides. Au cours de réunions rassemblant expert·es et partenaires sociaux pour décider de la reconnaissance de maladies professionnelles agricoles, le syndicat majoritaire des exploitantes et exploitants agricoles s’est notamment opposé, en 2011, à la reconnaissance de la maladie de Parkinson et, en 2013, à la reconnaissance du lymphome non hodgkinien. L’une et l’autre seront tout de même reconnus respectivement en 2012 et en 2015.

    La reconnaissance de maladies liées aux pesticides permet aux victimes de toucher, via la MSA, la Mutuelle sociale agricole, des indemnités à vie. Plus il y a de maladies reconnues, plus les cotisations sociales des exploitantes et exploitants agricoles sont susceptibles d’augmenter. À ce jour, de nombreuses victimes sont obligées d’aller jusqu’en justice pour faire reconnaître leur maladie.

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/290224/la-remuneration-hors-norme-d-arnaud-rousseau-president-de-la-fnsea-la-tete
    #agriculture

    • Le groupe Avril, présidé par le patron de la FNSEA, carbure aux frais de l’État

      L’entreprise d’Arnaud Rousseau est devenue leader sur le marché des « #biocarburants ». Son or jaune, c’est le #colza. La société a prospéré grâce à une réglementation sur mesure et à un important #rabais_fiscal.

      Le 30 mars 2022, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, la #Fédération_nationale_des_syndicats_d’exploitants_agricoles (FNSEA) organise un « grand oral » des candidats à la fonction suprême à l’occasion de son congrès annuel qui se tient à Angers (Maine-et-Loire). Emmanuel Macron intervient, en vidéo, depuis son QG de campagne. Et il fait cette promesse : « Je voulais ici vous le dire très clairement. Le Crit’Air 1 sera attribué aux véhicules qui roulent en permanence au B100. C’était, je le sais, attendu. »

      Le #B100 ? C’est un #carburant fait d’#huile_de_colza. Les #poids_lourds roulant exclusivement avec ce produit vont donc obtenir la #vignette qui autorise à circuler dans les « #zones_à_faibles_émissions » (#ZFE) mises en place dans les grandes agglomérations pour limiter la pollution locale. Deux semaines plus tard, le 16 avril, l’arrêté paraît au Journal officiel. On est entre les deux tours de la présidentielle, il n’y a eu aucune consultation publique.

      La décision ne tombe pas du ciel. Elle est particulièrement favorable à une société étroitement liée à la FNSEA : Avril, quatrième groupe agroalimentaire français, qui a lancé trois ans et demi plus tôt l’Oleo100, un carburant B100. De la graine de colza qu’il achète auprès des coopératives de producteurs comme sur les marchés mondiaux, et qu’il fait passer dans ses usines de trituration, le groupe Avril tire à la fois un produit sec – ce qu’on appelle les tourteaux, destinés à l’alimentation animale – et une huile végétale. C’est cette huile qui fait tourner des moteurs Diesel.

      L’entreprise est présidée par Arnaud Rousseau, alors premier vice-président de la FNSEA et dans les starting-blocks pour succéder à sa présidente, Christiane Lambert – il prendra la tête du syndicat un an plus tard. L’attribution de la vignette vient compléter un arsenal règlementaire qui contribue directement aux bénéfices mirobolants du groupe : grâce à un important rabais fiscal et à la vente, en plus de son propre carburant, de « certificats » censés aider à la décarbonation des transports, le groupe Avril, via sa filiale Saipol, dégage des dizaines de millions d’euros de bénéfices sur un produit à la rentabilité hors normes. Loin, très loin, de ce que touchent réellement agricultrices et agriculteurs. Et sans que l’écologie y gagne.

      Le jour même de l’intervention d’Emmanuel Macron au congrès de la FNSEA, Arnaud Rousseau se réjouit de la nouvelle dans un communiqué de la FOP (Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux), qu’il préside également à ce moment-là : « L’ensemble des acteurs de la filière française des huiles et protéines végétales se félicite de l’obtention de la vignette Crit’Air 1 pour le B100, carburant 100 % végétal », écrit-il.

      La mesure était, de fait, attendue. Une présentation commerciale de l’Oleo100 auprès de potentiels clients évoquait déjà, début 2021, la future vignette en indiquant « actions en cours pour Crit’Air 1 et classification “véhicule propre” ».

      Elle ne fait certes pas grand bruit mais certains s’en émeuvent. Le sénateur (Europe Écologie-Les verts) Jacques Fernique s’est étonné de cette décision discrétionnaire, prise au profit d’un seul produit. « Cette évolution réglementaire soudaine interpelle […] au sortir d’un premier quinquennat marqué par la tenue de la convention citoyenne pour le climat et à l’orée d’un second, placé, selon le président de la République, sous le signe d’une “méthode nouvelle” associant l’ensemble des acteurs et dont l’écologie serait “la politique des politiques” », dit-il dans une question adressée au Sénat le 14 juillet 2022.

      Répondant à nos questions, le service communication d’Avril le reconnaît : « La demande de classification Crit’Air 1 a été portée par les différentes associations professionnelles représentatives des industriels producteurs de B100, des constructeurs et des transporteurs ». On peut d’ailleurs relever sur le site de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) que le groupe déclare avoir mené des actions de lobbying auprès de décideurs sur le sujet.

      Côté producteurs de B100, ces associations, précise-t-il, ce sont « Estérifrance, le syndicat français des producteurs de biocarburants de type Ester méthylique d’acide gras [type dont fait partie l’huile de colza – ndlr] », et « l’European Biodiesel Board, une association européenne visant à promouvoir l’utilisation des biocarburants dans l’UE ». La filiale Saipol d’Avril fait partie de l’une et de l’autre.
      Un « biocarburant » polluant

      L’an dernier, le député (MoDem) Mohamed Laqhila posait une question similaire à l’Assemblée nationale, s’interrogeant sur la différence de « traitement » entre le B100 et le HVO, alors même que ce dernier « est homologué dans de nombreux pays européens depuis plusieurs années ».

      Le HVO est un autre carburant alternatif qui peut être composé, celui-là, à partir d’huiles usagées, de graisses animales et de déchets. Autrement dit, sans recourir aux terres agricoles. Mais les véhicules roulant au HVO, eux, ne sont pas autorisés dans les centres-villes classés ZFE.

      Pourquoi une telle distinction ? Au regard de ce que dit la science, elle n’a pas lieu d’être. « Dans un moteur, la combustion du B100 se traduit par plus de NOx [oxydes d’azote – ndlr] qu’un carburant fossile, explique le chercheur Louis-Pierre Geffray, de l’institut Mobilités en transition. Ces NOx supplémentaires sont normalement traités par le système antipollution du véhicule, mais il n’y a aucune raison objective qui explique pourquoi, en usage réel, ce biocarburant est classé Crit’Air 1, à la différence du HVO et du diesel qui sont restés en Crit’Air 2. »

      AirParif, qui observe la qualité de l’air en Île-de-France, est arrivé aux mêmes conclusions en comparant les émissions du diesel et des carburants alternatifs.

      Interrogé sur le sujet, le ministère des finances – auquel est maintenant rattachée la Direction générale de l’énergie et du climat qui avait signé l’arrêté en question – indique que le B100 permet des réductions d’autres émissions. Et que si le HVO est exclu, c’est qu’il n’y a pas de moteur permettant de s’assurer qu’« il ne sera utilisé que du carburant HVO ».

      Ce traitement favorable au carburant issu de l’huile de colza n’est pas anecdotique. Il fait partie du « business model » d’Avril, mastodonte présent dans dix-neuf pays, au chiffre d’affaires, en 2022, de 9 milliards d’euros. Depuis longtemps, le groupe développe une stratégie d’influence auprès de la puissance publique comme auprès des gros acteurs du secteur, afin de s’assurer une position hégémonique sur le marché.

      Comme Mediapart l’avait écrit, une importante niche fiscale était déjà favorable, au cours des années 2000 et 2010, à un produit du groupe Avril – qui s’appelait alors Sofiprotéol –, le diester.
      De niche fiscale en niche fiscale

      Les bonnes affaires avec la bénédiction de l’État ne se sont pas arrêtées là. Dès son homologation par arrêté ministériel, en avril 2018, le B100 a bénéficié d’un énorme rabais fiscal. Cette année-là, Avril déclare à la HATVP l’action de lobbying suivante : « défendre les intérêts de la filière française lors des révisions du dispositif fiscal d’incitation à l’incorporation de biocarburants ».

      Sept mois après l’arrêté ministériel, Saipol annonçait le lancement de l’Oleo100. La société est la première sur le coup. Les concurrents n’arriveront que dans un second temps - un an plus tard pour la coopérative Centre ouest céréales, trois ans plus tard pour Bolloré. Eux et une poignée d’autres resteront minoritaires sur le marché.

      Cette ristourne fiscale donne un sacré avantage au B100 sur les autres carburants : il n’est taxé qu’à hauteur de 118,30 euros par mètre cube. Le produit alternatif HVO, commercialisé entre autres par TotalEnergies, Dyneff ou encore le néerlandais Neste, est imposé au même niveau que le diesel issu du pétrole, soit une taxe à hauteur de 607,5 euros par mètre cube.

      Pour l’État, la perte est substantielle. Elle pèse 489,20 euros par mètre cube de B100. Pour l’année 2023 où la filiale Saipol d’Avril, a vendu, selon ses propres chiffres, 185 000 mètres cubes d’Oleo100, ce manque à gagner dans les recettes publiques s’élève à 90,5 millions d’euros.

      Le ministère des finances dément avoir mis en place un traitement privilégié. « Aucune mesure favorisant un groupe n’a été prise. » Bercy explique la différence de taxation entre B100 et HVO par leurs caractéristiques chimiques. Le B100 est « un carburant qui ne peut être utilisé qu’avec des moteurs dédiés, et dans le cadre de flottes captives de camions spécifiquement conçus pour ce carburant. Son utilisation est donc particulièrement encadrée et restrictive ». À l’inverse, le HVO pouvant être utilisé dans différents types de moteur, le contrôle de sa bonne utilisation n’est pas possible.

      Au total, selon les chiffres d’Avril, la société présidée par Arnaud Rousseau a vendu environ 360 000 m³ d’Oleo100 depuis 2020. Ce sont plus de 176 millions d’euros qui ne sont pas allés dans les caisses de l’État. Et ce trou dans les recettes fiscales pourrait encore se creuser : selon nos informations, les projections du groupe continuent de suivre une courbe ascendante, avec l’estimation que le marché du B100 avoisinera les 600 000 m³ en 2025.

      Même si le B100 est moins émetteur de gaz à effet de serre que le gazole ordinaire, l’apport écologique de ce développement n’est pas avéré. « La fiscalité très avantageuse sur le B100 se traduit par un fort développement de ce carburant, au détriment de l’incorporation de renouvelables dans le diesel classique B7 vendu à la pompe aux particuliers, fait valoir le chercheur Louis-Pierre Geffray. Car, sur l’ensemble des carburants, l’incorporation d’énergies issues de productions agricoles en concurrence avec l’alimentation humaine est limitée par le cadre réglementaire européen à 7 %, et ce seuil a été atteint en France. » Au bénéfice du B100, donc, et au détriment des autres carburants. « Ce qui ne se justifie que partiellement en termes de vertu environnementale », souligne le chercheur.

      Dans une note publiée l’année dernière par l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddrri), ce chercheur et deux de ses collègues relèvent en outre que la culture de colza est très consommatrice de produits phytosanitaires. C’est « la deuxième culture française la plus traitée » aux pesticides, et elle absorbe en moyenne 170 kilos par hectare d’engrais azoté, estiment-ils, soulignant par ailleurs que la consommation française d’huile de colza est très dépendante des importations.

      Fin 2021, la fiscalité du B100 a d’ailleurs été étrillée par la Cour des comptes, qui avait mis en exergue, dans un rapport sur le développement des biocarburants, des taux d’imposition « sans aucune rationalité », conduisant à un système « qui n’est pas conforme à la réglementation européenne sur la taxation des produits énergétiques ». De fait, le niveau d’imposition du B100 est plus de deux fois inférieur au minimum fixé par la directive européenne sur la taxation de l’énergie pour les équivalents au gazole routier.

      La stratégie de maximisation du quatrième groupe agroalimentaire français ne s’est pas arrêtée là. Ces dernières années, il a étendu son emprise du côté des acheteurs de carburant. C’est ainsi qu’il a noué des partenariats avec des constructeurs automobiles – Renault Trucks, Volvo Trucks, Man, Scania –, comme l’écrivait Transport Infos l’an dernier, mais aussi signé des contrats avec des sociétés de la logistique et des transports. L’objectif ? garantir des débouchés pour son carburant, en concevant des modèles de véhicules qui ne peuvent rouler qu’au B100, et en incitant des transporteurs à se tourner vers ces nouveaux poids lourds.

      Depuis le projet de loi de finances (PLF) 2020, une nouvelle niche fiscale est apparue : l’achat de tels véhicules, pour les entreprises qui en font l’acquisition, entraîne, suivant le poids de l’engin, une déduction d’impôt de 5 à 15 %. C’est ce que le secteur appelle le « suramortissement ».
      Le bénéfice de Saipol, une info « confidentielle »

      Il est, enfin, encore une politique publique qui contribue directement aux juteuses affaires du groupe Avril sans pour autant contribuer efficacement à la décarbonation du secteur pour laquelle elle a été conçue. C’est celle des « certificats ». Ce système complexe, mis en place en 2019 – au départ pour pousser le secteur des carburants vers la décarbonation –, est un marché secondaire, où ne s’échangent plus des matières premières, mais des tickets permettant d’éviter des pénalités de l’État. Un mécanisme semblable aux droits à polluer pour le CO2.

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      Le marché des certificats

      Le marché des certificats permet à un fournisseur de gazole qui a dépassé le seuil obligatoire d’incorporation de 9 % d’énergie renouvelable dans son produit de vendre l’équivalent de son surplus sous forme de certificats. C’est le cas de la filiale Saipol d’Avril, dont le produit Oleo100 est constitué à 100 % de renouvelable, et qui peut donc vendre des certificats pour 91 % de ses volumes.

      À l’inverse, le fournisseur n’ayant pas atteint ce seuil des 9 % achète les certificats qui lui permettent de combler virtuellement l’écart. S’il ne le fait pas, des pénalités, plus douloureuses pour ses comptes, lui sont imposées par l’État. C’est la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans le transport (Tiruert).

      Le principe de ce mécanisme, non réglementé et opaque, est de donner aux fournisseurs abondants en renouvelables une assise financière confortable de façon à ce qu’ils poursuivent dans cette voie, afin d’obtenir, sur l’ensemble de la production française de carburant le mix attendu par les directives européennes. Cela génère donc pour eux deux sources de revenu : la vente du biocarburant en lui-même, et la vente des certificats.

      Le premier est indexé sur le prix du gazole, vendu quelques centimes au-dessous. Pour les seconds, les prix ne sont pas publics. Selon nos informations, ces certificats s’échangeaient l’année dernière autour de la coquette somme de 900 euros par mètre cube de carburant renouvelable – en ce début d’année, le prix était descendu à 700 euros.

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      La filiale d’Avril vend à la fois son produit Oleo100 et des certificats qui lui sont associés. C’est ainsi qu’elle dégage, sur son carburant, une marge incongrue. Celle-ci pèserait, pour la seule année 2023, entre 110 et 150 millions d’euros (voir en annexes notre calcul à partir du prix de vente du carburant, du coût de production et de la vente des certificats).

      Si l’on retient le bas de la fourchette, cela donnerait un taux de marge d’environ 29 %. Soit une rentabilité digne de l’industrie du luxe - en 2023, le taux de marge de LVMH, qui a publié ses chiffres en début d’année, était de 26,5 %...

      Comment justifier ce profit colossal que les contribuables financent pour partie ? Contacté, Arnaud Rousseau ne nous a pas répondu. Il n’est que le président « non exécutif » du groupe, nous précise le groupe Avril, lequel nous indique que le montant des bénéfices et du chiffre d’affaires de la filiale Saipol en 2023 est une information « confidentielle ».

      À l’évidence, l’activité biocarburants, avec ces dispositifs et traitements fiscaux particuliers, est la locomotive du groupe. En 2022, où le chiffre d’affaires d’Avril avait fait un bond à 9 milliards d’euros, la filiale Saipol dégageait, selon les derniers comptes disponibles, 135,5 millions d’euros de bénéfices. Ce qui représentait plus de 50 % du résultat net du groupe Avril.

      Depuis le début du mouvement de colère du monde agricole, l’un des principaux arguments d’Arnaud Rousseau pour maintenir la pression et obtenir la levée d’un maximum de contraintes pour le secteur est d’invoquer la fonction nourricière de l’agriculture et la nécessité de préserver la souveraineté alimentaire de la France.

      Il l’a répété sur France 2, sur RTL et sur France Inter ces dernières semaines : « Notre objectif, c’est de produire pour nourrir. » Devant les grilles du parc des expositions Paris Expo, Porte de Versailles à Paris, peu avant l’ouverture du Salon de l’agriculture samedi matin, où il réclamait « une vision » et « des réponses » du chef de l’État, le patron de la FNSEA le disait encore : « Produire pour nourrir, pour nous ça a du sens. La souveraineté alimentaire et faire en sorte que dans ce pays on continue à produire une des alimentations les plus sûres du monde, dont on est fiers […], tout cela, ça a du sens pour nous. »

      L’activité phare du mastodonte qu’il préside bénéficie pourtant déjà des attentions du gouvernement, et n’a rien à voir avec le fait de nourrir la population : elle fait tourner des bus et des camions, et elle rapporte énormément d’argent.

      https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/290224/le-groupe-avril-preside-par-le-patron-de-la-fnsea-carbure-aux-frais-de-l-e
      #fiscalité #fisc

  • Suspension du plan #Écophyto : « On ne s’attendait pas à un tel recul » | #Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/090224/suspension-du-plan-ecophyto-ne-s-attendait-pas-un-tel-recul?userid=ef6c592

    Le souci est-il généralisé ?

    On en vient à se demander s’il y a des endroits sur Terre qui ne sont pas contaminés. J’ai comparé des sols cultivés avec des sols de prairies. Ce sont des prairies qui le sont depuis toujours de mémoire d’agriculteur, donc sans beaucoup d’activité agricole, et dans lesquelles on retrouve tout de même des résidus de produits phytosanitaires.

    On entend beaucoup parler de l’impact des pesticides sur la santé humaine. Mais quel est-il sur la biodiversité ?

    On sait que ces produits sont toxiques quand on les applique sur des organismes ou qu’on donne à manger des produits contaminés à des organismes en laboratoire. Sur le terrain, c’est plus compliqué. Je n’ai jamais observé d’impact létal direct sur les espèces. Mais ce sont des impacts dits sublétaux, plus insidieux.

    Par exemple, dans un travail récent, j’ai étudié deux populations de vers de terre de la même espèce et de la même lignée génétique. En comparant une population qui a été dans des sols gérés en agriculture biologique et l’autre en conventionnel, durant plus de vingt ans.

    On se rend compte que l’expression de leur génome s’est différenciée. En imageant, on peut expliquer que le système métabolique des espèces exposées aux produits phytosanitaires est en surchauffe. Cela laisse entendre que le ver de terre dépense beaucoup d’énergie à faire face, à se décontaminer.

    Concernant les oiseaux dont le régime alimentaire est principalement composé de graines, il y a aussi un déclin, car ils mangent des graines de semences qui sont enrobées de néonicotinoïdes. On sait que cela agit. Mais ce qu’on ne peut pas déterminer, c’est quelle proportion exacte de la baisse du nombre d’oiseaux est directement liée aux produits, puisque d’autres causes entrent en jeu, comme la destruction d’habitats, le manque de haies.

    Mais on découvre encore énormément de conséquences de l’usage des #phytosanitaires

    On cumule quand même pas mal de données sur les concentrations qui existent dans le milieu naturel. Il y a beaucoup de réseaux d’analyses dédiés à l’eau par exemple. En revanche, pour ce qui est des sols, c’est un peu plus récent. Pour moi, cette étude des sols a été délaissée parce qu’on considérait peut-être comme normal de trouver des pesticides, parce que c’était le réceptacle normal des produits en question.

    Maintenant qu’on y prête attention, on a des surprises. Au niveau européen, il y a une étude très récente qui indique que trois quarts des sols sont pollués et contiennent des #pesticides. Et ce n’est pas pollué qu’avec une molécule, c’est un cocktail de #molécules

    Est-ce possible de prévenir les conséquences phytosanitaires sur la biodiversité autrement qu’en réduisant leur usage global ?

    Depuis des années, l’idée est de tendre vers des molécules moins toxiques. Mais cela rend le travail encore plus complexe. Avant, à la sortie de la guerre, les molécules étaient tellement toxiques qu’on voyait des organismes qui pouvaient mourir par intoxication directe. Maintenant, c’est une atteinte à bas bruit qui touche aussi la dynamique des populations. Chez le ver de terre, par exemple, un modèle que je connais bien, cela favorise un retard de croissance, qui implique un retard dans la maturité sexuelle. 

    Par extension, sur une vie de ver de terre, il va moins se reproduire qu’en temps normal. Il y a un déclin des populations parce qu’il y a des effets qui entravent la reproduction de l’espèce.

    On trouve des traces de contamination dans la terre, dans les plantes, dans l’eau, mais aussi dans l’air ?

    Quand l’agriculteur pulvérise son champ, on estime qu’il n’y a que 25 % du produit qui atteint directement la plante. Une partie pénètre dans le sol et atteint la biodiversité et l’eau, et puis le reste part avec le vent. Cette dispersion par le vent est d’ailleurs une des pistes qui expliquerait que l’on retrouve des traces de ces produits y compris dans des parcelles qui n’ont jamais été pulvérisées.

    Puisque beaucoup de travail reste à faire, quelles sont les questions encore en suspens dans l’analyse des produits phytosanitaires ?

    C’est vraiment d’évaluer la #toxicité réelle, en conditions réelles et sur le long terme. C’est le point critique, d’aller vers ce que l’on ne voit pas. On s’intéresse toujours à ce qu’on voit, mais ce qu’on ne voit pas, ce sont les effets sublétaux. Parce qu’en fait, on ne peut pas se contenter de tests. Tout est basé sur des tests qui n’ont aucune réalité et aucune pertinence écologique. 

    Le problème, c’est que maintenant, on veut tout, tout de suite, et on veut le résultat alors que l’expérimentation n’a pas commencé. On fait du court terme. Il nous faut davantage de données sur les conséquences à long terme des produits phytosanitaires sur la biodiversité. Par exemple sur les effets multigénérationnels de ces produits sur les organismes. On doit pouvoir étudier ces effets sur au moins trois générations pour être complets.

    #plan_ecophyto

    • Comme dit #linguisticae :

      Si on vient de baisser les normes phytosanitaires à celles de la Bulgarie. Qu’est ce qui nous empêche d’acheter bulgare ?

      Je trouve ca tellement juste.

      Leurs demandes portaient maladroitement (merci FNSEA) sur les salaires et sur les normes environnementales. Ils ont obtenu le point environnement. Mais ca les met d’autant plus en concurrence avec leurs concurrents, de ce fait. Tout perdu, meme pour eux.

  • Le gaz est aussi nocif pour le #climat que le charbon | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/030823/le-gaz-est-aussi-nocif-pour-le-climat-que-le-charbon

    Alors que l’Europe et les majors pétrolières se ruent vers le gaz, une nouvelle étude scientifique montre que ce combustible fossile est tout aussi néfaste que le charbon. Ces résultats ébranlent l’idée vantée par les industriels que le gaz serait une #énergie de transition vers un avenir vert. Telle est l’amère sensation qui ressort à la lecture d’une vaste étude scientifique, publiée le 17 juillet dans Environmental Research Letters. https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/ace3db

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