Comment les mouvements sociaux changent les choses

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    Regrouper 3,5 % d’une population lors d’une mobilisation n’est toutefois pas garant de victoire. Une théorie du changement exclusivement axée sur l’atteinte de cette proportion serait malavisée. La règle a été critiquée et depuis nuancée par Erica Chenoweth elle-même, qui rappelle l’importance d’autres facteurs (la conjoncture favorable, l’organisation, le leadership stratégique et la durabilité) dans le succès ou l’échec d’un mouvement et recommande de ne pas utiliser la règle de manière prescriptive.

    Il faut aussi prendre en compte que les mouvements n’ont pas tous les mêmes objectifs. Dans son livre Twitter et les gaz lacrymogènes : Forces et fragilités de la contestation connectée (C&F éditions, 2019), Zeynep Tufekci, professeure associée de sociologie à l’Université de la Caroline du Nord et chroniqueuse au New York Times, émet l’hypothèse que les mouvements possèdent trois types de capacités : celles d’influer sur le narratif social, de perturber l’ordre établi et d’influencer les élus et les institutions. Par exemple, le mouvement Occupons Wall Street a réussi à imposer l’idée que les intérêts des plus riches qui forment 1 % de la population nuisaient aux 99 % restants, une illustration de sa puissante capacité narrative, avec un discours sur les inégalités économiques qui continue de percoler, plus de 10 ans plus tard. Une des demandes clés d’Occupons Wall Street, l’annulation des dettes étudiantes, vient même d’être partiellement adoptée aux États-Unis par l’administration Biden, qui a offert un allègement ciblé aux familles à faible et à moyen revenu, preuve de la capacité de ce mouvement à influencer les institutions.

    Dans le cas de la mobilisation monstre du 27 septembre 2019, il serait juste de dire qu’elle a permis de maintenir le discours du mouvement climatique ; que sa capacité à influencer les élus se traduit par des chantiers en cours, malgré plusieurs victoires institutionnelles (telles que les projets de loi adoptés) ; et que sa capacité à perturber l’ordre établi a été mise à mal par la COVID-19. Il est donc simpliste de parler d’échec ou de réussite d’un mouvement — surtout pour un enjeu aussi complexe que la crise climatique. La bataille sera de très longue haleine et même une victoire aura plusieurs nuances de gris. Sans compter qu’une part colossale de l’énergie des militants sert à lutter contre des reculs…

    #Mouvements_sociaux #Zeynep_Tufekci