« Le manque de précipitations n’est pas en cause dans la fonte des glaciers pyrénéens, détaille Pierre René, car le stock de neige qui tombe est à peu près constant. Les températures sont les véritables responsables. » Le glaciologue sort des graphiques. La courbe de la fonte pourrait se calquer sur celle de la hausse du thermomètre planétaire. « L’intégralité du réchauffement est liée à l’activité humaine » et aux émissions de gaz à effet de serre qu’elle génère, rappelle Christophe Cassou, bonnet bleu et barbe de trois jours. Selon l’Observatoire pyrénéen du changement climatique (OPCC), les températures ont augmenté de 1,6°C en moyenne dans les Pyrénées en l’espace de soixante ans, une hausse plus rapide que la moyenne planétaire. (...)
Ses congénères pyrénéens devraient suivre le même chemin. Pierre René estime qu’ils n’en ont plus que pour vingt à trente ans. « On est en passe d’assister à leur disparition complète, alors qu’ils étaient là depuis des millénaires. Ça fait quelque chose, surtout quand on sait que les activités humaines en sont responsables », regrette le scientifique.
La fonte menace-t-elle l’accès à l’eau pour les vallées ? « Les glaciers ne représentent pas grand-chose dans les Pyrénées. L’eau des vallées provient plutôt du manteau neigeux, or la neige arrive désormais plus tard et finit plus tôt. S’il y a des pics de fonte précoces, cela réduit le soutien de débit des rivières au printemps », précise l’hydroclimatologue Florence Habets, directrice de recherche au CNRS et professeure principale du groupe d’étudiants de l’ENS. Pierre René complète : « La conséquence la plus importante est la perte de biodiversité dans cet espace de vie glacière, il y a du vivant sur et en périphérie du glacier, comme les algues et les puces des glaciers. »
Sans oublier une « perte esthétique et irréversible des paysages. Un glacier habille les cimes et donne naissance à des cours d’eau, là ça va devenir plus minéral ». Plus tard, la verdure regagnera le terrain libéré, et formera un jour une forêt. La fréquentation de la montagne deviendra aussi plus dangereuse : « Dans les zones rocheuses, il y aura plus de chutes de pierres, certains itinéraires deviennent même impraticables », avertit le glaciologue.