• Ce que fait l’animal à la ville - AOC media
    https://aoc.media/opinion/2023/12/28/ce-que-fait-lanimal-a-la-ville-2

    En 1923, Le Corbusier écrit dans Vers une architecture[1] une phrase qui incarnera, pour plusieurs générations d’architectes, l’idéologie d’un certain mouvement moderne et une définition à la fois épaisse et sensible de la discipline architecturale : « L’architecture est le jeu savant, correcte et magnifique des volumes assemblés sous la lumière ».
    Aujourd’hui, que nous racontent les volumes assemblés sous la lumière des changements climatiques à l’œuvre et de l’effondrement du vivant ? Au service de quoi, ce jeu savant, correct et magnifique doit-il être mis pour faire face aux enjeux contemporains ? Et eux, ces vivants qui s’effondrent, des papillons aux moineaux en passant par les libellules, qu’attendent-ils de l’architecture et de la ville d’aujourd’hui ?

    https://justpaste.it/2hf45

    #urbanisme #écologie (vision anthropo-centrée de l’) #nos_ennemies_les_bêtes

  • Accoucher à Gaza - AOC media
    Par Noémie Merleau-Ponty – Anthropologue
    https://aoc.media/opinion/2023/12/20/accoucher-a-gaza

    Dans la guerre entre Israël et le Hamas, la reproduction est un enjeu central. Du prélèvement du sperme des soldats israéliens tués au combat aux conditions effroyables des maternités gazaouies, les politiques de vie et de mort apparaissent aujourd’hui sous une forme particulièrement aiguë.

    50 000 personnes sont actuellement enceintes à Gaza, et 180 accouchent quotidiennement. Les moins malchanceuses se voient uniquement privées d’antidouleurs. Des césariennes sont réalisées sans anesthésie et sans eau potable.

    Des ablations d’utérus sont parfois nécessaires pour limiter la perte de sang, car les transfusions ne sont plus possibles. Les couveuses des prématurés n’ont plus d’électricité. Les fausse-couches et les mort-nés augmentent chaque jour. Des nouveau-nés meurent dans les bras de leur mère, des nouveau-nés poussent leurs premiers cris dans les bras d’une morte.

    Quand le nourrisson et l’accouchée survivent, elles sont immédiatement invitées à quitter l’hôpital, peut-être sans savoir où aller, sans nourriture, sans ressource pour accompagner les saignements qui suivent la délivrance, sans la certitude qu’une montée de lait permettra de nourrir l’enfant. Les anémies sont légion. Voici quelques-unes des conséquences du bombardement incessant qui détruit sans relâche les moyens de subsistance à Gaza.

    J’ai peur en écrivant ces mots. Un climat de censure s’abat sur le monde académique. Mises en garde, invectives, diffamations, dénonciations, menaces de mesure disciplinaire, nombre de mes collègues spécialistes du Moyen-Orient sont invités à se taire. Nombre de mes collègues s’auto-censurent. Une pensée binaire frappe. Si l’on ose évoquer le massacre des Palestiniens, on légitime les assassinats impardonnables du 7 octobre, on est antisémite, peut-être même négationniste. Des jugements à l’emporte-pièce font vibrer certaines et certains. Derrière l’autorité prodiguée par le statut académique, c’est le sophisme qui toque à la porte.

    Force est cependant de constater que le Fonds des Nations unies pour l’enfance, le fonds des Nations unies pour la population, l’Organisation mondiale de la santé sonnent l’alarme. Le tribut payé par les populations civiles dans la bande de Gaza, suite aux exactions du Hamas le 7 octobre, sont très préoccupantes. Le mot est faible. Dès le 16 novembre, le Haut-commissariat pour les droits de l’homme des Nations Unis « lance un appel à la communauté internationale pour prévenir un génocide à l’encontre du peuple Palestinien. »

    Force est également de constater que certaines voix juives font savoir leur opinion avec une vive clarté. « Le droit d’Israël à se défendre ne saurait être celui de massacrer indistinctement des populations civiles entières, d’ajouter le terrorisme d’État au terrorisme du Hamas, le piétinement de toute référence à l’humanité la plus élémentaire. » Le 8 novembre 2023, « Une autre voix juive » publie un texte intitulé Cessez le feu. Reconnaître l’Etat de Palestine, et dont cet extrait est tiré.

    « Une autre voix juive » prend pour origine l’indignation d’une partie de la communauté juive progressiste française pour la politique coloniale de l’Etat d’Israël. Il y a tout juste vingt ans cette voix se fait entendre autour de la signature d’un manifeste dont Olivier Gebuhrer et Pascal Lederer, deux physiciens, sont les instigateurs. A l’époque, Stéphane Hessel, Raymond Aubrac ou encore Pierre Vidal-Naquet le signent.

    Raconter brièvement l’enfer tragique et sanguinolent qui fait le lit des maternités gazaouies ou convoquer la figure du nouveau-né n’est pas une tentative pour minimiser le 7 octobre.

    « Cessez le feu », c’est aussi l’appel du projet Safe Birth in Palestine, qui a essayé de créer un hôpital à la frontière égyptienne, sans succès, pour des raisons politiques. L’Etat d’Israël n’est pas favorable à l’initiative. La population de Gaza ne souhaite pas nécessairement quitter sa terre. Des kits d’accouchement ont alors été envoyés auprès des associations humanitaires. Très peu passent la frontière, car la priorité est donnée à l’essence et l’eau potable. Des vidéos postées en ligne sont réalisées pour informer sur les gestes à pratiquer lors d’accouchements en contexte de guerre.

    Entre les coupures de courant et l’accès de plus en plus difficile à internet de l’autre côté de Rafah, un maigre espoir porte ces quelques informations digitales. De la Turquie au Canada, à la Grande-Bretagne en passant par la France, des associations et des civils ont répondu à l’appel international de cette organisation, qui n’est pas religieuse, précise Ferhan Guloglu. Cette doctorante à l’université de Georges Washington est une des figures académiques propalestinienne qui soutient l’initiative. Elle aussi est consciente du poids des mots, des malentendus qui pourraient être exploités à la moindre virgule mal placée. Elle insiste et ajoute.

    Essayer de venir en aide aux parturientes ne signifie pas oublier les grossesses non désirées, celles qui résultent d’un viol, ni glorifier la figure maternelle. Ce n’est pas non plus oublier les autres victimes des crimes de guerre israéliens. Raconter brièvement l’enfer tragique et sanguinolent qui fait le lit des maternités gazaouies ou convoquer la figure du nouveau-né n’est pas une tentative pour minimiser le 7 octobre. Le bon sens n’est plus suffisant, il faut l’écrire noir sur blanc. Les précautions oratoires sont nécessaires, car chaque faille narrative risque de laisser place à une critique incendiaire.

    Début novembre, Ferhan Guloglu a lancé un appel à la communauté internationale des anthropologues de la reproduction, afin de réfléchir collectivement aux moyens de se mobiliser. Avec stupeur, j’apprends la nouvelle : si peu de mes collègues ont répondu. Une doctorante s’expose, et les statutaires se taisent. Ce silence assourdissant est consternant.

    La reproduction est au centre de la guerre entre Israël et le Hamas. La mise à mort est une arme pour empêcher l’ennemi de se reproduire, et pour donner vie à son camp. Une autre figure de la mort est au cœur de la politique reproductive qui se joue dans cette partie du Moyen-Orient. Le journal Haaretz publie le 9 novembre un article qui relate l’extraction de sperme sur des soldats israéliens tombés au combat, afin de conserver et inséminer des femmes porteuses volontaires. Il ne s’agit pas d’un épiphénomène scabreux à la marge des opérations militaires en cours. Cette opération demande une organisation logistique précise, car les spermatozoïdes ne peuvent pas survivre plus de 24 heures en dehors d’un corps vivant.

    Par ailleurs, la reproduction dite « posthume » ne date pas de ce conflit. La technique de cryoconservation des gamètes humains est un outil de la politique pro-nataliste de l’Etat d’Israël. Ce mode de procréation est promu sur le site du ministère de la Santé israélien, où toutes les informations requises pour permettre une vie après la mort d’un époux ou d’un fils sont mises à disposition. Pour reprendre les mots de Sigrid Vertommen, chercheuse en économie politique à l’université de Gand et d’Amsterdam, et que je traduis : « L’ambition centrale du sionisme pour créer et consolider une patrie juive en Israël/Palestine n’a pas uniquement coproduit une logique démographique pronataliste, mais également – en continuité – une croyance et une confiance considérables dans le pouvoir diagnostique et thérapeutique de la science et de la technologie médicales ». Comment, dans ce cadre, interpréter la destruction de la moitié des hôpitaux de la bande de Gaza ?

    Il est difficile de ne pas penser à la notion de « nécropolitique », que l’historien et politiste Achille Mbembe créa pour évoquer la manière dont la souveraineté coloniale se donne la vie en semant la mort. Cette politique apparaît dans une forme particulièrement aiguë aujourd’hui. L’obstétricienne Debbie Harrington, qui officie à Oxford, relate sur le compte Instagram de Safe birth in Palestine un épisode exemplaire rapporté par une infirmière gazaouie. Un membre de sa famille donna la vie après le bombardement du domicile familial, durant lequel de nombreuses personnes moururent ou furent sévèrement brûlées. Le bébé ne survit pas. Sa naissance n’avait pas été établie qu’il fallut enregistrer son décès.

    La polarisation de la politique reproductive israélienne est aussi mortifère que morbide. D’un côté la parturiente palestinienne à l’utérus prélevé dans une douleur difficilement imaginable, de l’autre le soldat israélien aux testicules ponctionnés après qu’il a rendu son dernier souffle dans la violence. Cet instantané profondément perturbant marque l’esprit. Celles et ceux qui survivent aujourd’hui sont marqués au fer rouge d’un traumatisme qu’il ne faut pas laisser indicible.

    La reproduction ne commence ni ne s’arrête à la gestation et à la naissance. Les événements qui les accompagnent sont inscrits dans la chair des individus et de leurs gamètes, donc dans les générations passées et à venir. Ce sont les leçons actuelles des sciences sociales et de la biologie du développement. L’épigénétique, cette branche de la biologie qui s’intéresse à la manière dont les gènes s’expriment selon l’environnement moléculaire dans lesquels ils baignent, indique que des traumatismes biographiques ont des effets sur l’expression génétique. L’environnement moléculaire est tributaire de l’environnement personnel, social, culturel, des individus qui entrent en lien pour procréer. Ainsi, les traumatismes ne sont pas seulement des blessures psychiques et narratives, mais aussi des sillons tracés dans le cœur des cellules. La politique reproductive d’aujourd’hui fait déjà histoire pour la psychosomatique des générations de demain.

    Selon un rapport du 9 décembre produit par le Bureau des Nations Unis pour la coordination des événements humanitaires, près de 8000 enfants ont été tués à Gaza, 1500 ont disparu sous les décombres, 18 000 souffrent de blessures, 25 000 ont perdu leurs parents ces deux derniers mois. Combien errent, sous le feu des soldats ?

    J’ai peur, car l’on m’accusera peut-être d’une métaphore filée scandaleuse. La fournaise a durablement marqué celles et ceux qui ont survécu à la Shoah. C’est indéniable. C’est peut-être précisément pour cela qu’avoir traversé une des plus sombres heures de l’histoire européenne sans y laisser toute sa vie rend particulièrement sensible à la tuerie qui frappe Gaza.

    Le Dr Gabor Maté, médecin spécialiste du traumatisme, survivant de l’holocauste, se mobilise en ligne pour dénoncer les conséquences profondes de la guerre actuelle. Il écrit sur son site : « Et que devons-nous faire, nous, les gens ordinaires ? Je prie pour que nous puissions écouter nos cœurs. Mon cœur me dit que “plus jamais” n’est pas un slogan tribal, que le meurtre de mes grands-parents à Auschwitz ne justifie pas la dépossession continue des Palestiniens, que la justice, la vérité, la paix ne sont pas des prérogatives tribales. Que “le droit d’Israël à se défendre”, incontestable par principe, ne valide pas le meurtre de masse »

    Cessez le feu ! 50 000 personnes sont enceintes à Gaza, et 180 accouchent par jour.

    Cessez le feu. Cet appel urgent venu de tous bords cherche à extraire la mort de la reproduction, celle d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Les tisons ardents ont la vie dure.

    Noémie Merleau-Ponty
    Anthropologue, chargée de recherche au CNRS

    • Aparté transgressive
      Le texte original est en français, le mot femme n’y est utilisé qu’une seule fois pour parler de « femmes porteuses volontaires ». Je ne connais pas la raison de ce choix lexical.

  • Israël, année zéro - AOC media par Elad Lapidot
    https://aoc.media/opinion/2023/11/26/israel-annee-zero

    L’objectif de Buber fut de mettre fin à la violence et aux meurtres. Il considérait les Arabes comme un « toi » et non comme un « cela », et il pensait que le mouvement national palestinien devait être reconnu. Sion ne pouvait être que juste, ne pouvait que créer la paix, c’est-à-dire qu’elle ne pouvait exister d’après Buber que comme coopération judéo-arabe, comme alliance de paix. Il imaginait une relation positive avec les Arabes dans de différents domaines, plaidait pour une solidarité économique au lieu de la politique dominante du « travail hébreu » et pour le devoir d’apprendre la culture et la langue des Arabes et leur Islam, contrairement aux sentiments anti-arabes omniprésents, souvent racistes, chez les colons juifs. Au lieu d’un État juif, Buber prônait l’idée d’un État binational qui œuvrerait au bénéfice de l’ensemble de la population du pays et qui s’intégrerait dans une fédération régionale d’États du Proche-Orient.

    Cette vision semble aujourd’hui illusoire. La violence terrible des massacres perpétrés le 7 octobre par le Hamas nous a profondément choqués, nous les Juifs israéliens. Notre choc ne nous a pas empêchés de faire des comparaisons. Au contraire, la prise de conscience que nos enfants sont la cible d’une telle haine a réactivé notre traumatisme collectif le plus profond. Beaucoup donnent un sens à ces atrocités en les comparant aux meurtres de masse des Juifs pendant la Shoah et dans les pogroms. Ils contextualisent la haine palestinienne comme une nouvelle éruption d’antisémitisme – pas seulement barbare, mais le mal pur.

    Cette vision dicte la réponse militaire d’Israël. La violence extrême et indiscriminée des attaques israéliennes sur la bande de Gaza depuis le 7 octobre vise à éradiquer le mal, à sauver les Juifs d’Auschwitz. Le Premier ministre Netanyahou a déclaré à ses soldats : « C’est une guerre des fils de la lumière contre les fils des ténèbres. »

    Dans cette atmosphère, quiconque propose une contextualisation alternative des massacres, une contextualisation qui met l’accent sur le conflit israélo-palestinien et non pas sur l’éternelle haine des Juifs, quiconque suggère que les actions d’Israël à Gaza ne sont peut-être pas la solution mais font partie du problème, est souvent taxé de justifier le mal. Ceux qui pensent différemment sont traités comme des traîtres.

    Pensons à Buber. Sa vision semble aujourd’hui illusoire, comme elle l’était pour la plupart des sionistes à l’heure zéro du conflit et tout au long de son histoire. Même Brit Shalom n’a été que de courte durée. Mais Buber est resté ferme. Avec quelques-uns, un trop petit nombre, il a continué à défendre l’impératif de la coopération contre la stratégie de domination qui a déterminé la politique juive en Palestine et, plus tard, dans l’État d’Israël. La violence actuelle, persistante et excessive, jette une ombre sur les perspectives d’un avenir binational. Cependant, si nous voulons éviter un génocide ou un suicide, une variante de la vision de Brit Shalom est le seul avenir possible. Pour une grande partie, cela dépend de notre capacité de trouver aujourd’hui la force de déclarer, en tant que Juifs, en tant qu’Israéliens : « C’est notre volonté que les condamnations à mort prononcées à cause de nous, à cause des méfaits commis à notre encontre, ne soient pas exécutées. »

  • Ne pas renoncer à penser – réponse de Didier Fassin à Bruno Karsenti et al.
    Posted on novembre 19, 2023 | Didier Fassin | AOC – Aurdip
    https://aurdip.org/ne-pas-renoncer-a-penser-reponse-a-bruno-karsenti-et-al

    Mis en cause dans l’édition du 13 novembre de AOC par Bruno Karsenti, Jacques Ehrenfreund, Julia Christ, Jean-Philippe Heurtin, Luc Boltanski et Danny Trom pour son Opinion « Le spectre d’un génocide » publiée dans AOC le 1er novembre, Didier Fassin leur répond. (...)

  • Fanon en Palestine - AOC media
    https://aoc.media/opinion/2023/10/25/fanon-en-palestine

    Ce champ d’étude s’est plus généralement élargi à d’autres pays d’immigration nés par le colonialisme tels que les États-Unis, le Canada, la Nouvelle-Zélande, par le passé la France avec l’Algérie, ou encore l’Australie dont la finalité du référendum constitutionnel récent visant à créer un organe consultatif représentant les aborigènes d’Australie auprès des organes législatifs et exécutifs a été marquée par un refus majeur (60%), symbolisant la marginalisation des populations autochtones dans les processus décisionnels, et encore plus les peurs d’hétérogénéités et de diversités des États-Nations modernes.

    Adam Dahl s’intéresse à la formation de cette pensée moderne qui s’est établie sur le nettoyage ethnique des autochtones américains permettant l’établissement d’une continuité territoriale permettant de mettre en scène les concepts clés de la pensée démocratique moderne. Ainsi les États-Unis ont ouvert la marche de la Révolution bourgeoise avec le mythe de l’individualité et de la propriété privée[1], qui trouve son exécution dans la négation des aspects culturels (race, ethnicité et sexe) et des aspects matériels (classe, ressources, capital, privilèges) dans la répartition du pouvoir.

    Par conséquent parler de « colonisé » pour évoquer la situation palestinienne n’est pas une réduction ou une victimation, mais le constat d’une hiérarchie imposée par une puissance occupante, définissant une réalité d’expérience régie par des distributions de pouvoir inégalitaires et illégitimes. Le nationalisme israélien a donc tracé une ligne nette entre Juifs et non-Juifs dans l’inclusion à la gouvernance, mais aussi dans la présence physique même sur la Terre[2].

    https://justpaste.it/32a5v

  • #Judith_Butler : Condamner la #violence

    « Je condamne les violences commises par le #Hamas, je les condamne sans la moindre réserve. Le Hamas a commis un #massacre terrifiant et révoltant », écrit Judith Butler avant d’ajouter qu’« il serait étrange de s’opposer à quelque chose sans comprendre de quoi il s’agit, ou sans la décrire de façon précise. Il serait plus étrange encore de croire que toute #condamnation nécessite un refus de comprendre, de #peur que cette #compréhension ne serve qu’à relativiser les choses et diminuer notre #capacité_de_jugement ».

    Les questions qui ont le plus besoin d’un #débat_public, celles qui doivent être discutées dans la plus grande urgence, sont des questions qui sont difficiles à aborder dans les cadres existants. Et même si l’on souhaite aller directement au cœur du sujet, on se heurte à un cadre qui fait qu’il est presque impossible de dire ce que l’on a à dire. Je veux parler ici de la violence, de la violence présente, et de l’histoire de la violence, sous toutes ses formes. Mais si l’on veut documenter la violence, ce qui veut dire comprendre les #tueries et les #bombardements massifs commis par le Hamas en Israël, et qui s’inscrivent dans cette histoire, alors on est accusé de « #relativisme » ou de « #contextualisation ». On nous demande de condamner ou d’approuver, et cela se comprend, mais est-ce bien là tout ce qui, éthiquement, est exigé de nous ? Je condamne les violences commises par le Hamas, je les condamne sans la moindre réserve. Le Hamas a commis un massacre terrifiant et révoltant. Telle a été et est encore ma réaction première. Mais elle n’a pas été la seule.

    Dans l’immédiateté de l’événement, on veut savoir de quel « côté » sont les gens, et clairement, la seule réaction possible à de pareilles tueries est une condamnation sans équivoque. Mais pourquoi se fait-il que nous ayons parfois le sentiment que se demander si nous utilisons les bons mots ou comprenons bien la situation historique fait nécessairement obstacle à une #condamnation_morale absolue ? Est-ce vraiment relativiser que se demander ce que nous condamnons précisément, quelle portée cette condamnation doit avoir, et comment décrire au mieux la ou les formations politiques auxquelles nous nous opposons ?

    Il serait étrange de s’opposer à quelque chose sans comprendre de quoi il s’agit, ou sans la décrire de façon précise. Il serait plus étrange encore de croire que toute condamnation nécessite un refus de comprendre, de peur que cette compréhension ne serve qu’à relativiser les choses et diminuer notre capacité de jugement. Mais que faire s’il est moralement impératif d’étendre notre condamnation à des #crimes tout aussi atroces, qui ne se limitent pas à ceux mis en avant et répétés par les médias ? Quand et où doit commencer et s’arrêter notre acte de condamnation ? N’avons-nous pas besoin d’une évaluation critique et informée de la situation pour accompagner notre condamnation politique et morale, sans avoir à craindre que s’informer et comprendre nous transforme, aux yeux des autres, en complices immoraux de crimes atroces ?

    Certains groupes se servent de l’histoire de la violence israélienne dans la région pour disculper le Hamas, mais ils utilisent une forme corrompue de raisonnement moral pour y parvenir. Soyons clairs. Les violences commises par #Israël contre les Palestiniens sont massives : bombardements incessants, assassinats de personnes de tous âges chez eux et dans les rues, torture dans les prisons israéliennes, techniques d’affamement à #Gaza, expropriation radicale et continue des terres et des logements. Et ces violences, sous toutes leurs formes, sont commises sur un peuple qui est soumis à un #régime_colonial et à l’#apartheid, et qui, privé d’État, est apatride.

    Mais quand les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard (Harvard Palestine Solidarity Groups) publient une déclaration disant que « le régime d’apartheid est le seul responsable » des attaques mortelles du Hamas contre des cibles israéliennes, ils font une erreur et sont dans l’erreur. Ils ont tort d’attribuer de cette façon la #responsabilité, et rien ne saurait disculper le Hamas des tueries atroces qu’ils ont perpétrées. En revanche, ils ont certainement raison de rappeler l’histoire des violences : « de la #dépossession systématique des terres aux frappes aériennes de routine, des #détentions_arbitraires aux #checkpoints militaires, des séparations familiales forcées aux #assassinats ciblés, les Palestiniens sont forcés de vivre dans un #état_de_mort, à la fois lente et subite. » Tout cela est exact et doit être dit, mais cela ne signifie pas que les violences du Hamas ne soient que l’autre nom des violences d’Israël.

    Il est vrai que nous devons nous efforcer de comprendre les raisons de la formation de groupes comme le Hamas, à la lumière des promesses rompues d’Oslo et de cet « état de mort, à la fois lente et subite » qui décrit bien l’existence des millions de Palestiniens vivant sous #occupation, et qui se caractérise par une #surveillance constante, la #menace d’une détention sans procès, ou une intensification du #siège de #Gaza pour priver ses habitants d’#eau, de #nourriture et de #médicaments. Mais ces références à l’#histoire des Palestiniens ne sauraient justifier moralement ou politiquement leurs actes. Si l’on nous demandait de comprendre la violence palestinienne comme une continuation de la violence israélienne, ainsi que le demandent les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard, alors il n’y aurait qu’une seule source de #culpabilité_morale, et même les actes de violence commis par les Palestiniens ne seraient pas vraiment les leurs. Ce n’est pas rendre compte de l’autonomie d’action des Palestiniens.

    La nécessité de séparer la compréhension de la violence omniprésente et permanente de l’État israélien de toute justification de la violence est absolument cruciale si nous voulons comprendre quels peuvent être les autres moyens de renverser le #système_colonial, mettre fin aux #arrestations_arbitraires et à la #torture dans les prisons israéliennes, et arrêter le siège de Gaza, où l’eau et la nourriture sont rationnés par l’État-nation qui contrôle ses frontières. Autrement dit, la question de savoir quel monde est encore possible pour tous les habitants de la région dépend des moyens dont il sera mis fin au système colonial et au pouvoir des colons. Hamas a répondu de façon atroce et terrifiante à cette question, mais il y a bien d’autres façons d’y répondre.

    Si, en revanche, il nous est interdit de parler de « l’#occupation », comme dans une sorte de Denkverbot allemand, si nous ne pouvons pas même poser le débat sur la question de savoir si le joug militaire israélien sur la région relève du #colonialisme ou de l’#apartheid_racial, alors nous ne pouvons espérer comprendre ni le passé, ni le présent, ni l’avenir. Et beaucoup de gens qui regardent le carnage dans les médias sont totalement désespérés. Or une des raisons de ce #désespoir est précisément qu’ils regardent les #médias, et vivent dans le monde sensationnel et immédiat de l’#indignation_morale absolue. Il faut du temps pour une autre #morale_politique, il faut de la patience et du courage pour apprendre et nommer les choses, et nous avons besoin de tout cela pour que notre condamnation puisse être accompagnée d’une vision proprement morale.

    Je m’oppose aux violences que le Hamas a commises, et ne leur trouve aucune excuse. Quand je dis cela, je prends une position morale et politique claire. Je n’équivoque pas lorsque je réfléchis sur ce que cette condamnation implique et présuppose. Quiconque me rejoint dans cette position se demande peut-être si la condamnation morale doit reposer sur une compréhension de ce qui est condamné. On pourrait répondre que non, que je n’ai rien besoin de connaître du Hamas ou de la Palestine pour savoir que ce qu’ils ont fait est mal et pour le condamner. Et si l’on s’arrête là, si l’on se contente des représentations fournies par les médias, sans jamais se demander si elles sont réellement utiles et exactes, et si le cadre utilisé permet à toutes les histoires d’être racontées, alors on se résout à une certaine ignorance et l’on fait confiance aux cadres existants. Après tout, nous sommes tous très occupés, et nous n’avons pas tous le temps d’être des historiens ou des sociologues. C’est une manière possible de vivre et de penser, et beaucoup de gens bien-intentionnés vivent effectivement ainsi, mais à quel prix ?

    Que nous faudrait-il dire et faire, en revanche, si notre morale et notre politique ne s’arrêtaient pas à l’acte de condamnation ? Si nous continuions, malgré tout, de nous intéresser à la question de savoir quelles sont les formes de vie qui pourraient libérer la région de violences comme celles-ci ? Et si, en plus de condamner les crimes gratuits, nous voulions créer un futur dans lequel ce genre de violences n’aurait plus cours ? C’est une aspiration normative qui va bien au-delà de la condamnation momentanée. Pour y parvenir, il nous faut absolument connaître l’histoire de la situation : l’histoire de la formation du Hamas comme groupe militant, dans l’abattement total, après Oslo, pour tous les habitants de Gaza à qui les promesses de gouvernement autonome n’ont jamais été honorées ; l’histoire de la formation des autres groupes palestiniens, de leurs tactiques et de leurs objectifs ; l’histoire enfin du peuple palestinien lui-même, de ses aspirations à la liberté et au #droit_à_l’autodétermination, de son désir de se libérer du régime colonial et de la violence militaire et carcérale permanente. Alors, si le Hamas était dissous ou s’il était remplacé par des groupes non-violents aspirant à la #cohabitation, nous pourrions prendre part à la lutte pour une Palestine libre.

    Quant à ceux dont les préoccupations morales se limitent à la seule condamnation, comprendre la situation n’est pas un objectif. Leur indignation morale est à la fois présentiste et anti-intellectuelle. Et pourtant, l’indignation peut aussi amener quelqu’un à ouvrir des livres d’histoire pour essayer de comprendre comment un événement comme celui-ci a pu arriver, et si les conditions pourraient changer de telle sorte qu’un avenir de violence ne soit pas le seul avenir possible. Jamais la « contextualisation » ne devrait être considérée comme une activité moralement problématique, même s’il y a des formes de contextualisation qui sont utilisées pour excuser ou disculper. Est-il possible de distinguer ces deux formes de contextualisation ? Ce n’est pas parce que certains pensent que contextualiser des violences atroces ne sert qu’à occulter la violence ou, pire encore, à la rationaliser que nous devrions nous soumettre à l’idée que toute forme de contextualisation est toujours une forme de #relativisme_moral.

    Quand les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard disent que « le régime d’apartheid est le seul responsable » des attaques du Hamas, ils souscrivent à une conception inacceptable de la responsabilité morale. Il semble que pour comprendre comment s’est produit un événement, et ce qu’il signifie, il nous faille apprendre l’histoire. Cela veut dire qu’il nous incombe tout à la fois d’élargir la perspective au-delà de la terrible fascination du moment et, sans jamais nier l’horreur, de ne pas laisser l’#horreur présente représenter toute l’horreur qu’il y a à représenter, et nous efforcer de savoir, de comprendre et de nous opposer.

    Or les médias d’aujourd’hui, pour la plupart d’entre eux, ne racontent pas les horreurs que vivent les Palestiniens depuis des décennies, les bombardements, les tueries, les attaques et les arrestations arbitraires. Et si les horreurs des derniers jours ont pour les médias une importance morale plus grande que les horreurs des soixante-dix dernières années, alors la réaction morale du moment menace d’empêcher et d’occulter toute compréhension des #injustices_radicales endurées depuis si longtemps par la Palestine occupée et déplacée de force.

    Certains craignent, à juste titre, que toute contextualisation des actes violents commis par le Hamas soit utilisée pour disculper le Hamas, ou que la contextualisation détourne l’attention des horreurs perpétrées. Mais si c’est l’horreur elle-même qui nous amenait à contextualiser ? Où commence cette horreur et où finit-elle ? Si les médias parlent aujourd’hui de « guerre » entre le Hamas et Israël, c’est donc qu’ils proposent un cadre pour comprendre la situation. Ils ont, ainsi, compris la situation à l’avance. Si Gaza est comprise comme étant sous occupation, ou si l’on parle à son sujet de « prison à ciel ouvert », alors c’est une autre interprétation qui est proposée. Cela ressemble à une description, mais le langage contraint ou facilite ce que nous pouvons dire, comment nous pouvons décrire, et ce qui peut être connu.

    Oui, la langue peut décrire, mais elle n’acquiert le pouvoir de le faire que si elle se conforme aux limites qui sont imposées à ce qui est dicible. S’il est décidé que nous n’avons pas besoin de savoir combien d’enfants et d’adolescents palestiniens ont été tués en Cisjordanie et à Gaza cette année ou pendant toutes les années de l’occupation, que ces informations ne sont pas importantes pour comprendre ou qualifier les attaques contre Israël, et les assassinats d’Israéliens, alors il est décidé que nous ne voulons pas connaître l’histoire des violences, du #deuil et de l’indignation telle qu’est vécue par les Palestiniens.

    Une amie israélienne, qui se qualifie elle-même d’« antisioniste », écrit en ligne qu’elle est terrifiée pour sa famille et pour ses amis, et qu’elle a perdu des proches. Et nous devrions tous être de tout cœur avec elle, comme je le suis bien évidemment. Cela est terrible. Sans équivoque. Et pourtant, il n’est pas un moment où sa propre expérience de l’horreur et de la perte de proches ou d’amis est imaginé comme pouvant être ce qu’une Palestinienne éprouve ou a éprouvé de son côté après des années de bombardement, d’incarcération et de violence militaire. Je suis moi aussi une Juive, qui vit avec un #traumatisme_transgénérationnel à la suite des atrocités commises contre des personnes comme moi. Mais ces atrocités ont aussi été commises contre des personnes qui ne sont pas comme moi. Je n’ai pas besoin de m’identifier à tel visage ou à tel nom pour nommer les atrocités que je vois. Ou du moins je m’efforce de ne pas le faire.

    Mais le problème, au bout du compte, n’est pas seulement une absence d’#empathie. Car l’empathie prend généralement forme dans un cadre qui permette qu’une identification se fasse, ou une traduction entre l’expérience d’autrui et ma propre expérience. Et si le cadre dominant considère que certaines vies sont plus dignes d’être pleurées que d’autres, alors il s’ensuit que certaines pertes seront plus terribles que d’autres. La question de savoir quelles vies méritent d’être pleurées fait partie intégrante de la question de savoir quelles sont les vies qui sont dignes d’avoir une valeur. Et c’est ici que le #racisme entre en jeu de façon décisive. Car si les Palestiniens sont des « #animaux », comme le répète Netanyahu, et si les Israéliens représentent désormais « le peuple juif », comme le répète Biden (englobant la diaspora juive dans Israël, comme le réclament les réactionnaires), alors les seules personnes dignes d’être pleurées, les seules qui sont éligibles au deuil, sont les Israéliens, car la scène de « guerre » est désormais une scène qui oppose les Juifs aux animaux qui veulent les tuer.

    Ce n’est certainement pas la première fois qu’un groupe de personnes qui veulent se libérer du joug de la #colonisation sont représentées comme des animaux par le colonisateur. Les Israéliens sont-ils des « animaux » quand ils tuent ? Ce cadre raciste de la violence contemporaine rappelle l’opposition coloniale entre les « civilisés » et les « animaux », qui doivent être écrasés ou détruits pour sauvegarder la « civilisation ». Et lorsque nous rappelons l’existence de ce cadre au moment d’affirmer notre condamnation morale, nous nous trouvons impliqué dans la dénonciation d’une forme de racisme qui va bien au-delà de l’énonciation de la structure de la vie quotidienne en Palestine. Et pour cela, une #réparation_radicale est certainement plus que nécessaire.

    Si nous pensons qu’une condamnation morale doive être un acte clair et ponctuel, sans référence à aucun contexte ni aucun savoir, alors nous acceptons inévitablement les termes dans lesquels se fait cette condamnation, la scène sur laquelle les alternatives sont orchestrées. Et dans ce contexte récent qui nous intéresse, accepter ce cadre, c’est reprendre les formes de #racisme_colonial qui font précisément partie du problème structurel à résoudre, de l’#injustice intolérable à surmonter. Nous ne pouvons donc pas refuser l’histoire de l’injustice au nom d’une certitude morale, car nous risquerions alors de commettre d’autres injustices encore, et notre certitude finirait par s’affaisser sur un fondement de moins en moins solide. Pourquoi ne pouvons-nous pas condamner des actes moralement haïssables sans perdre notre capacité de penser, de connaître et de juger ? Nous pouvons certainement faire tout cela, et nous le devons.

    Les actes de violence auxquels nous assistons via les médias sont horribles. Et dans ce moment où toute notre attention est accaparée par ces médias, les violences que nous voyons sont les seules que nous connaissions. Je le répète : nous avons le droit de déplorer ces violences et d’exprimer notre horreur. Cela fait des jours que j’ai mal au ventre à essayer d’écrire sans trouver le sommeil, et tous les gens que je connais vivent dans la peur de ce que va faire demain la machine militaire israélienne, si le #discours_génocidaire de #Netanyahu va se matérialiser par une option nucléaire ou par d’autres tueries de masse de Palestiniens. Je me demande moi-même si nous pouvons pleurer, sans réserve aucune, pour les vies perdues à Tel-Aviv comme pour les vies perdues à Gaza, sans se laisser entraîner dans des débats sur le relativisme et sur les #fausses_équivalences. Peut-être les limites élargies du deuil peuvent-elles contribuer à un idéal d’#égalité substantiel, qui reconnaisse l’égale pleurabilité de toutes les vies, et qui nous porte à protester que ces vies n’auraient pas dû être perdues, qui méritaient de vivre encore et d’être reconnues, à part égale, comme vies.

    Comment pouvons-nous même imaginer la forme future de l’égalité des vivants sans savoir, comme l’a documenté le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies, que les militaires et les colons israéliens ont tué au minimum 3 752 civils palestiniens depuis 2008 à Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est. Où et quand le monde a-t-il pleuré ces morts ? Et dans les seuls bombardements et attaques d’octobre, 140 enfants palestiniens ont déjà été tués. Beaucoup d’autres trouveront la mort au cours des actions militaires de « #représailles » contre le Hamas dans les jours et les semaines qui viennent.

    Ce n’est pas remettre en cause nos positions morales que de prendre le temps d’apprendre l’histoire de la #violence_coloniale et d’examiner le langage, les récits et les cadres qui servent aujourd’hui à rapporter et expliquer – et interpréter a priori – ce qui se passe dans cette région. Il s’agit là d’un #savoir_critique, mais qui n’a absolument pas pour but de rationaliser les violences existences ou d’en autoriser d’autres. Son but est d’apporter une compréhension plus exacte de la situation que celle proposée par le cadre incontesté du seul moment présent. Peut-être d’autres positions d’#opposition_morale viendront-elles s’ajouter à celles que nous avons déjà acceptées, y compris l’opposition à la violence militaire et policière qui imprègne et sature la vie des Palestiniens dans la région, leur droit à faire le deuil, à connaître et exprimer leur indignation et leur solidarité, à trouver leur propre chemin vers un avenir de liberté ?

    Personnellement, je défends une politique de #non-violence, sachant qu’elle ne peut constituer un principe absolu, qui trouve à s’appliquer en toutes circonstances. Je soutiens que les #luttes_de_libération qui pratiquent la non-violence contribuent à créer le monde non-violent dans lequel nous désirons tous vivre. Je déplore sans équivoque la violence, et en même temps, comme tant d’autres personnes littéralement stupéfiées devant leur télévision, je veux contribuer à imaginer et à lutter pour la justice et pour l’égalité dans la région, une justice et une égalité qui entraîneraient la fin de l’occupation israélienne et la disparition de groupes comme le Hamas, et qui permettrait l’épanouissement de nouvelles formes de justice et de #liberté_politique.

    Sans justice et sans égalité, sans la fin des violences perpétrées par un État, Israël, qui est fondé sur la violence, aucun futur ne peut être imaginé, aucun avenir de #paix_véritable – et je parle ici de paix véritable, pas de la « #paix » qui n’est qu’un euphémisme pour la #normalisation, laquelle signifie maintenir en place les structures de l’injustice, de l’inégalité et du racisme. Un pareil futur ne pourra cependant pas advenir si nous ne sommes pas libres de nommer, de décrire et de nous opposer à toutes les violences, y compris celles de l’État israélien, sous toutes ses formes, et de le faire sans avoir à craindre la censure, la criminalisation ou l’accusation fallacieuse d’antisémitisme.

    Le monde que je désire est un monde qui s’oppose à la normalisation du régime colonial israélien et qui soutient la liberté et l’autodétermination des Palestiniens, un monde qui réaliserait le désir profond de tous les habitants de ces terres de vivre ensemble dans la liberté, la non-violence, la justice et l’égalité. Cet #espoir semble certainement, pour beaucoup, impossible ou naïf. Et pourtant, il faut que certains d’entre nous s’accrochent farouchement à cet espoir, et refusent de croire que les structures qui existent aujourd’hui existeront toujours. Et pour cela, nous avons besoin de nos poètes, de nos rêveurs, de nos fous indomptés, de tous ceux qui savent comment se mobiliser.

    https://aoc.media/opinion/2023/10/12/condamner-la-violence

    ici aussi : https://seenthis.net/messages/1021216

    #à_lire #7_octobre_2023 #génocide

    • Palestinian Lives Matter Too: Jewish Scholar Judith Butler Condemns Israel’s “Genocide” in Gaza

      We speak with philosopher Judith Butler, one of dozens of Jewish American writers and artists who signed an open letter to President Biden calling for an immediate ceasefire in Gaza. “We should all be standing up and objecting and calling for an end to genocide,” says Butler of the Israeli assault. “Until Palestine is free … we will continue to see violence. We will continue to see this structural violence producing this kind of resistance.” Butler is the author of numerous books, including The Force of Nonviolence: An Ethico-Political Bind and Parting Ways: Jewishness and the Critique of Zionism. They are on the advisory board of Jewish Voice for Peace.

      https://www.youtube.com/watch?v=CAbzV40T6yk

  • L’anthropologue #Didier_Fassin sur #Gaza : « La non-reconnaissance de la qualité d’êtres humains à ceux qu’on veut éliminer est le prélude aux pires violences »

    Le sociologue s’alarme, dans une tribune au « Monde », que l’Union européenne n’invoque pas, dans le cadre du conflit israélo-palestinien, la « responsabilité de protéger » votée par l’Assemblée des Nations unies, et qu’elle pratique le deux poids deux mesures dans ses relations internationales.

    L’incursion sanglante du #Hamas en #Israël a produit dans le pays un #choc sans précédent et a suscité des réactions d’horreur dans les sociétés occidentales. Les #représailles en cours à Gaza, d’autant plus violentes que le gouvernement israélien est tenu responsable par la population pour avoir favorisé l’essor du Hamas afin d’affaiblir le #Fatah [le parti politique du président palestinien, Mahmoud Abbas] et pour avoir négligé les enjeux de sécurité au profit d’une impopulaire réforme visant à faire reculer la démocratie, ne génèrent pas de semblables sentiments de la part des chancelleries occidentales, comme si le droit de se défendre impliquait un droit illimité à se venger. Certaines #victimes méritent-elles plus que d’autres la #compassion ? Faut-il considérer comme une nouvelle norme le ratio des tués côté palestinien et côté israélien de la guerre de 2014 à Gaza : 32 fois plus de morts, 228 fois plus parmi les civils et 548 fois plus parmi les enfants ?

    Lorsque le président français, #Emmanuel_Macron, a prononcé son allocution télévisée, le 12 octobre, on comptait 1 400 victimes parmi les Gazaouis, dont 447 enfants. Il a justement déploré la mort « de nourrissons, d’enfants, de femmes, d’hommes » israéliens, et dit « partager le chagrin d’Israël », mais n’a pas eu un mot pour les nourrissons, les enfants, les femmes et les hommes palestiniens tués et pour le deuil de leurs proches. Il a déclaré apporter son « soutien à la réponse légitime » d’Israël, tout en ajoutant que ce devait être en « préservant les populations civiles », formule purement rhétorique alors que #Tsahal avait déversé en six jours 6 000 bombes, presque autant que ne l’avaient fait les Etats-Unis en une année au plus fort de l’intervention en Afghanistan.

    La directrice exécutive de Jewish Voice for Peace a lancé un vibrant « #plaidoyer_juif », appelant à « se dresser contre l’acte de #génocide d’Israël ». Couper l’#eau, l’#électricité et le #gaz, interrompre l’approvisionnement en #nourriture et envoyer des missiles sur les marchés où les habitants tentent de se ravitailler, bombarder des ambulances et des hôpitaux déjà privés de tout ce qui leur permet de fonctionner, tuer des médecins et leur famille : la conjonction du siège total, des frappes aériennes et bientôt des troupes au sol condamne à mort un très grand nombre de #civils – par les #armes, la #faim et la #soif, le défaut de #soins aux malades et aux blessés.

    Des #crimes commis, on ne saura rien

    L’ordre donné au million d’habitants de la ville de Gaza de partir vers le sud va, selon le porte-parole des Nations unies, « provoquer des conséquences humanitaires dévastatrices ». Ailleurs dans le monde, lorsque éclatent des conflits meurtriers, les populations menacées fuient vers un pays voisin. Pour les Gazaouis, il n’y a pas d’issue, et l’armée israélienne bombarde les écoles des Nations unies où certains trouvent refuge. Ailleurs dans le monde, dans de telles situations, les organisations non gouvernementales apportent une assistance aux victimes. A Gaza, elles ne le peuvent plus. Mais des crimes commis, on ne saura rien. En coupant Internet, Israël prévient la diffusion d’images et de témoignages.

    Le ministre israélien de la défense, #Yoav_Gallant, a déclaré, le 9 octobre, que son pays combattait « des #animaux_humains » et qu’il « allait tout éliminer à Gaza ». En mars, son collègue des finances a, lui, affirmé qu’« il n’y a pas de Palestiniens, car il n’y a pas de peuple palestinien ».
    Du premier génocide du XXe siècle, celui des Herero, en 1904, mené par l’armée allemande en Afrique australe, qui, selon les estimations, a provoqué 100 000 morts de déshydratation et de dénutrition, au génocide des juifs d’Europe et à celui des Tutsi, la non-reconnaissance de la qualité d’êtres humains à ceux qu’on veut éliminer et leur assimilation à des #animaux a été le prélude aux pires #violences.

    Rhétorique guerrière

    Comme le dit en Israël la présidente de l’organisation de défense des droits de l’homme, B’Tselem, « Gaza risque d’être rayée de la carte, si la communauté internationale, en particulier les Etats-Unis et l’Europe, ne fait pas stopper – au lieu de laisser faire, voire d’encourager – les crimes de guerre qu’induit l’intensité de la riposte israélienne ». Ce n’est pas la première fois qu’Israël mène une #guerre à Gaza, mais c’est la première fois qu’il le fait avec un gouvernement aussi fortement orienté à l’#extrême-droite qui nie aux Palestiniens leur humanité et leur existence.
    Il existe une « responsabilité de protéger », votée en 2005 par l’Assemblée des Nations unies, obligeant les Etats à agir pour protéger une population « contre les génocides, les crimes de guerre, les nettoyages ethniques et les crimes contre l’humanité ». Cet engagement a été utilisé dans une dizaine de situations, presque toujours en Afrique. Que l’Union européenne ne l’invoque pas aujourd’hui, mais qu’au contraire la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, se rende, sans mandat, en Israël, pour y reprendre la #rhétorique_guerrière du gouvernement, montre combien le deux poids deux mesures régit les relations internationales.
    Quant à la #France, alors que se fait pressante l’urgence à agir, non seulement le gouvernement apporte son appui sans failles à l’#opération_punitive en cours, mais il interdit les #manifestations en faveur du peuple palestinien et pour une #paix juste et durable en Palestine. « Rien ne peut justifier le #terrorisme », affirmait avec raison le chef de l’Etat. Mais faut-il justifier les crimes de guerre et les #massacres_de_masse commis en #rétorsion contre les populations civiles ? S’agit-il une fois de plus de rappeler au monde que toutes les vies n’ont pas la même valeur et que certaines peuvent être éliminées sans conséquence ?

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/10/18/l-anthropologue-didier-fassin-sur-gaza-la-non-reconnaissance-de-la-qualite-d

    #à_lire #7_octobre_2023

    • Le spectre d’un génocide à Gaza

      L’annihilation du Hamas, que la plupart des experts jugent irréaliste, se traduit de fait par un massacre des civils gazaouis, ce que la Première ministre française appelle une « catastrophe humanitaire », mais dans lequel un nombre croissant d’organisations et d’analystes voient le spectre d’un génocide.

      Au début de l’année 1904, dans ce qui était alors le protectorat allemand du Sud-Ouest africain, les Hereros se rebellent contre les colons, tuant plus d’une centaine d’entre eux dans une attaque surprise.

      Au cours des deux décennies précédentes, ce peuple d’éleveurs a vu son territoire se réduire à mesure que de nouvelles colonies s’installent, s’emparant des meilleures terres et entravant la transhumance des troupeaux. Les colons traitent les Hereros comme des animaux, les réduisent à une forme d’esclavage et se saisissent de leurs biens. Le projet des autorités est de créer dans ce qui est aujourd’hui la Namibie une « Allemagne africaine » où les peuples autochtones seraient parqués dans des réserves.

      La révolte des Hereros est vécue comme un déshonneur à Berlin et l’empereur envoie un corps expéditionnaire avec pour objectif de les éradiquer. Son commandant annonce en effet qu’il va « annihiler » la nation herero, récompensant la capture des « chefs », mais n’épargnant « ni les femmes ni les enfants ». Si l’extermination n’est techniquement pas possible, ajoute-t-il, il faudra forcer les Hereros à quitter le pays, et « ce n’est qu’une fois ce nettoyage accompli que quelque chose de nouveau pourra émerger ».

      Dans les mois qui suivent, nombre de Hereros sans armes sont capturés et exécutés par les militaires, mais la plupart sont repoussés dans le désert où ils meurent de déshydratation et d’inanition, les puits ayant été empoisonnés. Selon l’état-major militaire, « le blocus impitoyable des zones désertiques paracheva l’œuvre d’élimination ». On estime que seuls 15 000 des 80 000 Hereros ont survécu. Ils sont mis au travail forcé dans des « camps de concentration » où beaucoup perdent la vie.

      Le massacre des Hereros, qualifié par les Allemands de « guerre raciale » est le premier génocide du XXe siècle, considéré par certains historiens comme la matrice de la Shoah quatre décennies plus tard. Dans Les Origines du totalitarisme, la philosophe Hannah Arendt elle-même a établi un lien entre l’entreprise coloniale et les pratiques génocidaires.

      Comparaison n’est pas raison, mais il y a de préoccupantes similitudes entre ce qui s’est joué dans le Sud-Ouest africain et ce qui se joue aujourd’hui à Gaza. Des décennies d’une colonisation qui réduit les territoires palestiniens à une multiplicité d’enclaves toujours plus petites où les habitants sont agressés, les champs d’olivier détruits, les déplacements restreints, les humiliations quotidiennes.

      Une déshumanisation qui conduisait il y a dix ans le futur ministre adjoint à la Défense à dire que les Palestiniens sont « comme des animaux ». Une négation de leur existence même par le ministre des Finances pour qui « il n’y a pas de Palestiniens car il n’y a pas de peuple palestinien », comme il l’affirmait au début de l’année. Un droit de tuer les Palestiniens qui, pour l’actuel ministre de la Sécurité nationale, fait du colon qui a assassiné vingt-neuf d’entre eux priant au tombeau des Patriarches à Hébron un héros. Le projet, pour certains, d’un « grand Israël », dont l’ancien président est lui-même partisan.

      Pendant les six premiers jours de l’intervention israélienne, 6 000 bombes ont été lâchées sur Gaza, presque autant que les États-Unis et ses alliés en ont utilisé en Afghanistan en une année entière

      Dans ce contexte, les attaques palestiniennes contre des Israéliens se sont produites au fil des ans, culminant dans l’incursion meurtrière du Hamas en territoire israélien le 7 octobre faisant 1 400 victimes civiles et militaires et aboutissant à la capture de plus de 200 otages, ce que le représentant permanent d’Israël aux Nations unies a qualifié de « crime de guerre ». La réponse du gouvernement, accusé de n’avoir pas su prévenir l’agression, s’est voulue à la mesure du traumatisme provoqué dans le pays. L’objectif est « l’annihilation du Hamas ».

      Pendant les trois premières semaines de la guerre à Gaza, les représailles ont pris deux formes. D’une part, infrastructures civiles et populations civiles ont fait l’objet d’un bombardement massif, causant 7 703 morts, dont 3 595 enfants, 1 863 femmes et 397 personnes âgées, et endommageant 183 000 unités résidentielles et 221 écoles, à la date du 28 octobre. Pendant les six premiers jours de l’intervention israélienne, 6 000 bombes ont été lâchées sur Gaza, presque autant que les États-Unis et ses alliés en ont utilisé en Afghanistan en une année entière, au plus fort de l’invasion du pays.

      Pour les plus de 20 000 blessés, dont un tiers d’enfants, ce sont des mutilations, des brûlures, des handicaps avec lesquels il leur faudra vivre. Et pour tous les survivants, ce sont les traumatismes d’avoir vécu sous les bombes, assisté aux destructions des maisons, vu des corps déchiquetés, perdu des proches, une étude britannique montrant que plus de la moitié des adolescents souffrent de stress post-traumatique.

      D’autre part, un siège total a été imposé, avec blocus de l’électricité, du carburant, de la nourriture et des médicaments, tandis que la plupart des stations de pompage ne fonctionnent plus, ne permettant plus l’accès à l’eau potable, politique que le ministre de la Défense justifie en déclarant : « Nous combattons des animaux et nous agissons comme tel ». Dans ces conditions, le tiers des hôpitaux ont dû interrompre leur activité, les chirurgiens opèrent parfois sans anesthésie, les habitants boivent une eau saumâtre, les pénuries alimentaires se font sentir, avec un risque important de décès des personnes les plus vulnérables, à commencer par les enfants.

      Dans le même temps, en Cisjordanie, plus d’une centaine de Palestiniens ont été tués par des colons et des militaires, tandis que plus de 500 éleveurs bédouins ont été chassés de leurs terres et de leur maison, « nettoyage ethnique » que dénoncent des associations de droits humains israéliennes. Croire que cette répression féroce permettra de garantir la sécurité à laquelle les Israéliens ont droit est une illusion dont les 75 dernières années ont fait la preuve.

      L’annihilation du Hamas, que la plupart des experts jugent irréaliste, se traduit de fait par un massacre des civils gazaouis, ce que la Première ministre française appelle une « catastrophe humanitaire », mais dans lequel un nombre croissant d’organisations et d’analystes voient le spectre d’un génocide.

      L’organisation états-unienne Jewish Voice for Peace implore « toutes les personnes de conscience d’arrêter le génocide imminent des Palestiniens ». Une déclaration signée par 880 universitaires du monde entier « alerte sur un potentiel génocide à Gaza ». Neuf Rapporteurs spéciaux des Nations unies en charge des droits humains, des personnes déplacées, de la lutte contre le racisme et les discriminations, l’accès à l’eau et à la nourriture parlent d’un « risque de génocide du peuple palestinien ». Pour la Directrice régionale de l’Unicef pour le Moyen Orient et l’Afrique du nord, « la situation dans la bande de Gaza entache de plus en plus notre conscience collective ». Quant au Secrétaire général des Nations unies, il affirme : « Nous sommes à un moment de vérité. L’histoire nous jugera ».

      Alors que la plupart des gouvernements occidentaux continuent de dire « le droit d’Israël à se défendre » sans y mettre de réserves autres que rhétoriques et sans même imaginer un droit semblable pour les Palestiniens, il y a en effet une responsabilité historique à prévenir ce qui pourrait devenir le premier génocide du XXIe siècle. Si celui des Hereros s’était produit dans le silence du désert du Kalahari, la tragédie de Gaza se déroule sous les yeux du monde entier.

      https://aoc.media/opinion/2023/10/31/le-spectre-dun-genocide-a-gaza

    • Cette réponse sur AOC est d’une mauvaise foi affligeante. Ils se piquent de faire du droit international, et ne se rendent pas compte que leurs conclusions vont à l’encontre de ce qui est déclamé par les instances multilatérales internationales depuis des dizaines d’années.

      Personnellement, les fachos qui s’ignorent et qui prennent leur plume pour te faire comprendre que tu n’es pas assez adulte pour comprendre la complexité du monde, ils commencent à me chauffer les oreilles. La tolérance c’est bien, mais le déni c’est pire. Et là, cette forme de déni, elle est factuelle. Elle n’est pas capillotractée comme lorsqu’on étudie les différentes formes d’un mot pour en déduire un supposé racisme pervers et masqué.

    • La réponse dans AOC mais fait vraiment penser à la sailli de Macron sur les violences policières : « dans un État de droit il est inadmissible de parler de violences policières » : autrement dit ce ne sont pas les violences elles-mêmes, concrète, prouvées, qui sont à condamner, mais c’est le fait d’en parler, de mettre des mots pour les décrire.

      Là c’est pareil, l’État israélien fait littéralement ces actions là : tuerie de masse par bombes sur civils, destruction des moyens de subsistance en brulant les champs (d’oliviers et autres), et en coupant tout accès à l’eau (base de la vie quand on est pas mort sous les bombes) ; ce qui correspond bien factuellement au même genre de stratégie militaire d’annihilation des Héréros par les allemands. Mais ce qui est à condamner c’est le fait de le décrire parce que ça serait antisémite, et non pas les actions elles-mêmes.

      Parce que l’accusation d’empoisonnement est un classique de l’antisémitisme depuis le moyen âge, alors si concrètement une armée et des colons de culture juive bloquent l’accès à la subsistance terre et eau, ça n’existe pas et il ne faut pas en parler.

      (Et c’est le même principe que de s’interdire de dire que le Hamas est un mouvement d’extrême droite, avec une politique autoritaire et ultra réactionnaire, et qu’ils promeuvent des crimes de guerre, parce qu’ils se battent contre l’État qui les colonise. Il fut un temps où beaucoup de mouvements de libération, de lutte contre le colonialisme et ou les impérialismes, faisaient attention aux vies civiles, comme le rappelait Joseph Andras il me semble.)

      #campisme clairement ("mon camp", « notre camp », ne peut pas faire ça, puisque c’est les méchants qui nous accusaient faussement de faire ça…)

  • Condamner la violence, Judith Butler

    Il serait étrange de s’opposer à quelque chose sans comprendre de quoi il s’agit, ou sans la décrire de façon précise. Il serait plus étrange encore de croire que toute condamnation nécessite un refus de comprendre, de peur que cette compréhension ne serve qu’à relativiser les choses et diminuer notre capacité de jugement. Mais que faire s’il est moralement impératif d’étendre notre condamnation à des crimes tout aussi atroces, qui ne se limitent pas à ceux mis en avant et répétés par les médias ? Quand et où doit commencer et s’arrêter notre acte de condamnation ? N’avons-nous pas besoin d’une évaluation critique et informée de la situation pour accompagner notre condamnation politique et morale, sans avoir à craindre que s’informer et comprendre nous transforme, aux yeux des autres, en complices immoraux de crimes atroces ?

    Certains groupes se servent de l’histoire de la violence israélienne dans la région pour disculper le Hamas, mais ils utilisent une forme corrompue de raisonnement moral pour y parvenir. Soyons clairs. Les violences commises par Israël contre les Palestiniens sont massives : bombardements incessants, assassinats de personnes de tous âges chez eux et dans les rues, torture dans les prisons israéliennes, techniques d’affamement à Gaza, expropriation radicale et continue des terres et des logements. Et ces violences, sous toutes leurs formes, sont commises sur un peuple qui est soumis à un régime colonial et à l’apartheid, et qui, privé d’État, est apatride.

    Mais quand les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard (Harvard Palestine Solidarity Groups) publient une déclaration disant que « le régime d’apartheid est le seul responsable » des attaques mortelles du Hamas contre des cibles israéliennes, ils font une erreur et sont dans l’erreur. Ils ont tort d’attribuer de cette façon la responsabilité, et rien ne saurait disculper le Hamas des tueries atroces qu’ils ont perpétrées. En revanche, ils ont certainement raison de rappeler l’histoire des violences : « de la dépossession systématique des terres aux frappes aériennes de routine, des détentions arbitraires aux checkpoints militaires, des séparations familiales forcées aux assassinats ciblés, les Palestiniens sont forcés de vivre dans un état de mort, à la fois lente et subite. » Tout cela est exact et doit être dit, mais cela ne signifie pas que les violences du Hamas ne soient que l’autre nom des violences d’Israël.

    (...) Si l’on nous demandait de comprendre la violence palestinienne comme une continuation de la violence israélienne, ainsi que le demandent les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard, alors il n’y aurait qu’une seule source de culpabilité morale, et même les actes de violence commis par les Palestiniens ne seraient pas vraiment les leurs. Ce n’est pas rendre compte de l’#autonomie d’action des Palestiniens.

    (...) La question de savoir quelles vies méritent d’être pleurées fait partie intégrante de la question de savoir quelles sont les vies qui sont dignes d’avoir une valeur. Et c’est ici que le racisme entre en jeu de façon décisive.

    (...) tous les gens que je connais vivent dans la peur de ce que va faire demain la machine militaire israélienne, si le discours génocidaire de Netanyahu va se matérialiser par une option nucléaire ou par d’autres tueries de masse de Palestiniens.

    https://aoc.media/opinion/2023/10/12/condamner-la-violence

    https://justpaste.it/9zy1v

    #Judith_Butler #violence #pleurer #Palestine #Hamas #Israël #discours_génocidaire

    • où l’on voit une intello BDS qui plane au point de penser que le Hamas se crée après les accords d’Oslo, sans voir que c’est bien avant 1987 qu’Israël à produit les conditions d’émergence d’une telle organisation. donc outre le fait de signaler ce « discours génocidaire » qui gouverne Israël, pas mal de bêtises de quelqu’un qui s’est débattu pour arriver à écrire dans l’après 7 octobre 2023, après l’attaque du Hamas.
      le point qui m’intéresse c’est celui qu’elle évoque trop rapidement : l’autonomie politique, celle des palestiniens en l’occurence, et ce depuis un aspect décisif qu’elle fait mine de résoudre par une « non-violence » ici encore absurde.

      on arrive bien à essentialiser « la violence » lorsque l’on est pas confronté en première personne à la question de son usage, de sa nécessité (ou que cet usage vous est garanti par la la force et la loi). ça nous donne des indignations qui loupent totalement le coeur du problème qu’exemplifie cette attaque du Hamas : de quelle type de violence use-t-on ? quelles limites est on a même de lui donner ? de quoi parle-t-on au juste, concrètement ?

      c’est sur ce point à mon sens que pour le Hamas la comparaison avec Daesh vaut quelque chose. un proto-État à moins encore de limites que bien des États (Hiroshima, Sétif, etc.) et se situe exactement dans le même registre : s’autoriser le massacre de civils.

      c’est la visée politique qui donne sa forme à la violence employée. le contenu vient avec : attentats massacre (extrême droite), pogroms (dont le Hamas vient de fournir un exemple qui surpasse spectaculairement, bravo ! ce que les meurtres quotidiens de palestiniens dans les territoires occupés donnent à voir).

      l’autonomie, se donner une, des lois, ce n’est pas l’État, cela a souvent voulu dire s’empêcher, autant que faire se peut, prendre des précautions (souvent coûteuses) et avant tout s’interdire le massacre sans distinction d’aucune sorte. c’est à ce titre que les organisations combattantistes des années 70 étaient critiqués non pas depuis des positions extérieures mais depuis d’autres usages de la violence révolutionnaire.

  • La recherche « deepLisée » ou pourquoi il faut se méfier de la traduction automatique - AOC media
    https://aoc.media/opinion/2023/09/03/la-recherche-deeplisee-ou-pourquoi-il-faut-se-mefier-de-la-traduction-automat

    La recherche « deepLisée » ou pourquoi il faut se méfier de la traduction automatique
    Par Katharine Throssell

    POLITISTE, TRADUCTRICE
    Dans un contexte touché de plein fouet par les innovations apportées par l’IA, un nombre croissant de chercheurs, par manque de temps ou par contrainte budgétaire, ont recours à des outils de traduction automatique, avec des résultats dont ils ne semblent pas toujours se méfier. À tort.

    La critique est argumentée par de nombreux exemples qui font sens (ou plutôt qui illustre les contresens potentiels que peut générer l’usage d’un tel outil). Elle a aussi raison de souligner la nécessité de s’acculturer, et pas seulement de traduire : écrire en anglais, c’est discuter selon les canons du champ les pensées dominantes du champ... Pour autant, pour des chercheurs qui savent assez l’anglais pour repérer ces errements, quel gain de temps... et d’argent...
    #IA

  • De la toxicité du Pass Culture pour les bibliothèques et la lecture publique - AOC media
    https://aoc.media/opinion/2023/06/26/de-la-toxicite-du-pass-culture-pour-les-bibliotheques-et-la-lecture-publique

    Si la véritable justification politique de cette machine était la lecture de livres par les jeunes, l’État se devait de confier la plus grande partie des 75 millions d’euros à des initiatives publiques : au moins, chaque livre aurait été lu plusieurs fois et, en plus, en relation avec d’autres ! Les responsables du Pass Culture se félicitent d’avoir fait acheter 7,5 millions de livres mais ils oublient trop vite que le nombre de prêts de livres dans les bibliothèques s’élève à 213 millions (en 2018) et que les projets de « lire ensemble » sont légion bien que trop souvent pauvres dans leurs moyens.

  • Se réapproprier la production de connaissance
    https://aoc.media/opinion/2023/05/17/se-reapproprier-la-production-de-connaissance

    Se réapproprier la production de connaissance
    Par Alexandre Monnin, Éric Tannier et Maël Thomas

    PHILOSOPHE , BIOLOGISTE ET INFORMATICIEN, PHILOSOPHE

    Face à la marchandisation de la recherche scientifique et sa possible mobilisation à des fins destructrices, la science ouverte, aveugle aux conditions d’utilisation des travaux de recherche, est au mieux impuissante, au pire contre-productive. Nous proposons au contraire la définition de communautés se réappropriant les enjeux de la propriété intellectuelle au service de la redirection écologique. Cette construction n’est pas un vœu pieux : elle existe déjà, en tant qu’outil juridique disponible pour tous.tes.

    Le physicien et membre éminent du parti communiste français Frédéric Joliot-Curie proposait en décembre 1945 que les scientifiques se missent en grève si leurs résultats étaient utilisés pour produire des applications qu’ils réprouvaient[1]. Non seulement il ressentait, comme beaucoup de ses pairs à l’époque, une responsabilité eu égard aux conséquences de la mise au point de l’arme atomique, mais il imaginait ainsi un moyen d’action pour exercer cette responsabilité. S’il pouvait s’enorgueillir de conséquences de ses travaux de recherche quand il les trouvait bénéfiques, preuve qu’après leur diffusion ils lui appartenaient encore un peu, il ne pouvait par conséquent se dédouaner des conséquences qu’il jugeait à l’inverse désastreuses.

    Le principe de la grève, destinée à empêcher certains usages de leurs résultats, n’a pas essaimé parmi les scientifiques[2]. Cependant, cette idée soulève aujourd’hui la question de l’exercice de la responsabilité des chercheurs et chercheuses face à la mobilisation à marche forcée de la production scientifique à des fins de croissance économique, au détriment de la production d’un savoir partagé et de l’écologie[1]. Sans exclure la grève, nous proposons d’employer un moyen d’action alternatif, autant symbolique que juridique, basé sur une réappropriation des enjeux de la propriété intellectuelle et des communs afin de définir à qui et à quoi chercheuses et chercheurs entendent destiner leurs productions.

    À qui appartiennent les résultats de la recherche scientifique ? Tout résultat « matérialisable » est protégé par le droit de la propriété intellectuelle, qui en attribue une part aux auteurs et une part à leurs employeurs. Une partie est soumise au secret des entreprises ou des États, quand les résultats touchent à des enjeux stratégiques pour la défense ou la compétitivité par exemple. En dehors de ces règles, l’habitude de la communauté scientifique est de reconnaître la maternité ou la paternité d’un résultat, mais pas sa propriété : les idées sont publiées puis libres de circuler et d’être reprises, modifiées ou utilisées par toutes et tous. Il s’agit autrement dit de ce qui passe pour un « commun », et le mouvement de la « science ouverte » accentue le détachement de fait entre les auteurs et leur œuvre – les travailleurs et leur production.

    Cependant, envisager la production de résultats scientifiques sous l’angle d’un commun nécessite de préciser les contours de la communauté d’utilisateurs et utilisatrices de ces résultats. En effet, la définition d’une communauté ou d’un collectif est à la base de la prise en charge des communs, popularisées par la politiste américaine Elinor Ostrom. Si à l’origine le commun est défini comme une ressource limitée nécessitant une politique de gestion pour la préserver, il a été étendu à toute ressource dont l’utilisation nécessite de s’accorder sur des principes politiques pour en réguler la gestion et la circulation, et en particulier la connaissance[4].

    La communauté avec laquelle construire une politique autour d’un commun scientifique varie en fonction des résultats produits, des endroits où ils le sont et de l’esprit qui préside à cette production. Il existe toutefois des tendances, que reflètent les modèles macro-économiques dont s’inspirent les politiques publiques : ces modèles pointent l’innovation technologique comme principal ressort de la croissance du PIB, et la recherche et développement (R&D) comme le moteur de cette innovation[5]. Ces modèles décrivent et contribuent à organiser un partage de la connaissance produite dans les laboratoires moins avec l’humanité toute entière qu’avec des acteurs politiques ou économiques intéressés par (ou intéressés à) la maximisation de la croissance. La forte corrélation entre la richesse et l’empreinte environnementale[6] remet en question cette alliance.

    Un exemple nous en est donné dans l’actualité technologique : un agent conversationnel comme ChatGPT utilise largement le corpus de publications mis à disposition par le mouvement de la science ouverte. Il est possible que les modèles de langage reposant sur l’apprentissage en deviennent un débouché important, sans que nous en maîtrisions les applications et les conséquences : uberisation croissantes des activités humaines (y compris l’activité scientifique ?), élimination des garde-fous concernant la vérification des résultats, promotion d’un type unique de pensée, déplacement de la production, et donc de l’autorité et du pouvoir, vers les pays et les entreprises productrices de ces modèles. Cet usage de la mise à disposition de nos résultats interroge notre rapport aux instruments de travail et la nécessité pour les chercheuses et chercheurs de s’en ressaisir.

    Nous proposons à la communauté scientifique de bâtir et d’employer un instrument juridique lui permettant de redéfinir et de se réapproprier les finalités de son travail. Il est issu de la propriété littéraire et artistique, sous le régime de laquelle sont produits les résultats scientifiques (documents, données, logiciels) depuis le XIXe siècle[7]. Les droits d’auteur limitent les droits à « exploiter » une œuvre de l’esprit afin d’assurer une rémunération aux autrices et aux auteurs. Si l’exploitation, en matière d’œuvres d’art, consiste principalement à les copier ou à les représenter (d’où le copyright anglo-saxon), l’exploitation d’une œuvre scientifique se caractérise avant tout par son utilisation. L’enjeu est donc de construire un droit d’usage (UsageRight). Non pas, en l’occurrence, pour se ménager la possibilité d’une rémunération mais pour empêcher les usages que l’on réprouve (le droit moral des œuvres d’art explore d’ailleurs en partie cette possibilité).

    Le droit d’usage est inspiré des licences éthiques, inventées par la programmeuse de logiciels et activiste américaine Coraline Ada Ehmke. Elles proposent de définir de potentielles communautés utilisatrices des logiciels, soit par exclusion (certains usages sont interdits et certaines institutions exclues), soit par inclusion (l’usage est réservé à une communauté définie).

    Nous proposons de restreindre l’usage de nos productions (qui sont déclinées en documents, données et logiciels) à une communauté constituée de membres (individus ou collectivités) qui auraient publié leurs engagements en faveur de la redirection écologique[8]. Nous entendons ainsi interdire l’usage de nos productions à des fins destructrices.

    Notre proposition est aussi une manière de redéfinir avec quels partenaires nous voulons faire de la science et selon quelles modalités

    Comme Joliot-Curie en son temps, (et en accord avec la constitution française, précisant dans sa charte de l’environnement, Article 1 : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » et Article 9 : « La recherche et l’innovation doivent apporter leur concours à la préservation et à la mise en valeur de l’environnement ») nous ne sommes pas d’accord avec l’utilisation inconsidérée des résultats de la recherche. Demander cet engagement, c’est définir une communauté non pas selon des valeurs morales construites à l’avance, ni des frontières tracées par les concepteurs, mais selon une volonté de construire collectivement une trajectoire vers un mode de production et un mode de vie soutenable, en respectant les spécificités de chaque membre de ce collectif.

    L’instrument proposé est une licence comportant trois volets, chacun adapté à un type de production. Les brevets en sont exclus car ils sont d’ores et déjà susceptibles d’être utilisés dans le même but[9], et la licence sert précisément à protéger les résultats non brevetés. La licence propose de tracer des frontières perméables autour d’une communauté qui se définit elle-même par l’exclusion des pratiques destructrices. Elle donne le droit d’usage de la production à cette communauté et le prohibe au-delà.

    En choisissant une licence, nous entendons donner prise à l’un des fondements des communs qui supposent la mise en place de procédures de punition en cas de non-respect des obligations auxquelles les membres du collectif souscrivent. La jurisprudence ne reconnaît pas encore d’interdiction d’usage pour des raisons éthiques mais les textes de loi le permettent (davantage en raison d’un vide juridique que d’une disposition explicite à ce stade)[10].

    Par cette définition principalement exclusive d’une communauté utilisatrice, notre proposition est aussi une manière de redéfinir avec quels partenaires nous voulons faire de la science et selon quelles modalités : pas seulement entre nous, scientifiques, ou avec les industriels ou les politiques, mais avec les collectivités, associations, citoyen.nes, paysan.nes, consommateur.rice.s, amateur.rice.s de science, toutes et tous « parties prenantes » et partenaires de l’activité de recherche.

    Cette proposition n’est pas exclusive d’une réflexion plus large sur la réappropriation des moyens de production de la recherche ; au contraire, elle peut et doit la précéder en contribuant à poser l’enjeu à nouveaux frais. En effet, une licence juridique peut être le support de revendications politiques, auprès des tutelles, souvent exprimées dans le monde de la recherche au bénéfice d’une science tout à la fois plus autonome (au sens propre du terme) mais aussi – et sans contradiction – plus impliquée socialement car moins soumise à des agendas qui ne devraient pas être les siens.

    Les licences restrictives contrarient le mouvement de la science ouverte, populaire chez les scientifiques, qui aiment partager leurs résultats, et les institutions, qui entendent en faciliter la circulation et l’utilisation. Elles établissent des barrières, ou plutôt une « membrane semi-perméable[11] », autour de nos recherches. Car l’ouverture n’est pas en soi un concept désirable si l’on n’a pas à l’avance défini à qui et pour quoi nous voulons ouvrir la science. Le partage bien compris nécessite que soient définies ses conditions.

    Cette réappropriation des conditions du partage constitue à son tour une étape sur le chemin de l’autonomie et de la réappropriation des conditions de production de la recherche. Nous comprenons l’efficacité de la science ouverte du point de vue de la diffusion ainsi que l’agrément de l’absence de barrière pour l’accès aux ressources mais nous entrevoyons aussi le danger d’une prolétarisation de la production scientifique, le danger que nos créations nous échappent et que nous en soyons réduits, comme plusieurs physiciens en 1945, à regretter d’avoir contribué à construire une bombe.

    Cette initiative constitue donc une main tendue aux partisan·es de la science ouverte, en leur soumettant un cadre propre à maintenir l’idée généreuse d’ouverture tout en la dissociant des forces économiques dans lesquelles elle a été jusqu’ici encastrée. Aujourd’hui la communauté scientifique documente elle-même le potentiel destructeur de l’utilisation de sa production à des fins de croissance[12]. Cessons de l’alimenter.

    En pratique, comment faire : Pour être membre utilisateur de la communauté, publiez une description de votre position ou de vos engagements en tant que scientifiques dans la redirection écologique. Plusieurs exemples figurent sur le site compagnon. 2/ Pour être membre producteur de la communauté, apposez sur vos publications, rapports, présentations, logiciels, bases de données, une mention ou le logo UsageRight, à la manière dont Camille Noûs est mentionnée dans la liste des auteurs et autrices de certains articles afin de souligner le caractère collectif de l’entreprise scientifique.

    Nous voulons ici mettre en avant le fait que la recherche s’intéresse aussi aux destinées du monde. Cette mention aura une valeur symbolique et juridique : il sera possible de dénoncer et d’attaquer en justice les usages avérés contraires au contrat établi. L’utilisation d’une licence sur les logiciels est soumise à l’approbation de l’institution employeuse car celle-ci partage les droits d’auteur avec la productrice ou le producteur du logiciel. L’État cherche également à réguler les usages de licences. La nécessité d’initier des négociations collectives avec les institutions à la fois au sujet de la protection des résultats de la recherche et de leur engagement en matière de redirection, constituera, nous en formulons le vœu, un bénéfice supplémentaire de cette démarche.

    Un ensemble de développements sur le sujet de cet article, avec le texte des licences, est disponible ici.
    https://pbil.univ-lyon1.fr/members/tannier/usageright/accueil_fr.html
    Des cas d’utilisation fictifs sont imaginés ici https://pbil.univ-lyon1.fr/members/tannier/usageright/Usages_fr.html.

    #science_ouverte #commun #droit_d_usage

  • Le macronisme, la loi et le quotidien - AOC media
    https://aoc.media/opinion/2023/05/09/le-macronisme-la-loi-et-le-quotidien

    Le macronisme, la loi et le quotidien

    Par Jérôme Lèbre
    Philosophe

    Le macronisme repose sur une loi supérieure à toutes les règles de droit, avec laquelle on ne peut absolument pas transiger : la nécessité elle-même. C’est ainsi que le sage Macron et sa réforme nécessaire se détachent de la foule des insensés, centrés sur leur plaisir et aveugles aux lois de ce monde. Et au moment où le macronisme entend tourner la page de la réforme des retraites en se reportant sur notre « quotidien » qu’il entend améliorer, nous avons encore plus de souci à nous faire.

    https://justpaste.it/cmn3z

  • L’ordre républicain d’Emmanuel Macron - Jacques Rancière - AOC - 20/04/2023
    https://justpaste.it/8f2dj
    https://aoc.media/opinion/2023/04/20/lordre-republicain-demmanuel-macron

    C’est le moment de se le rappeler : il n’y a pas en France une mais deux traditions républicaines. En 1848 déjà, il y avait la république tout court, celle des royalistes, et la république démocratique et sociale, écrasée par la première sur les barricades de juin 1848, exclue du vote par la loi électorale de 1850 puis à nouveau écrasée par la force en décembre 1851. En 1871, c’est la République des Versaillais qui noyait à son tour dans le sang la république ouvrière de la Commune. Macron, ses ministres et ses idéologues n’ont sans doute aucune intention meurtrière. Mais ils ont clairement choisi leur république.

    #Macron #Ordre_policier

    • Marx disait, avec quelque exagération à l’époque, que les États et leurs chefs n’étaient que les agents d’affaires du capitalisme international. Emmanuel Macron est peut-être le premier chef d’État chez nous à vérifier exactement ce diagnostic. Il est décidé à appliquer jusqu’au bout le programme dont il est chargé : celui de la contre-révolution néo-conservatrice qui, depuis Margaret Thatcher, vise à détruire tous les vestiges de ce qu’on appelait l’État social mais aussi toutes les formes de contre-pouvoir issues du monde du travail pour assurer le triomphe d’un capitalisme absolutisé soumettant toutes les formes de vie sociale à la seule loi du marché.

      [...]
      Certains pensaient que les rigueurs de la discipline « républicaine » étaient réservées aux populations musulmanes issues de l’immigration. Il apparaît aujourd’hui qu’elles visent bien plus largement tous ceux et toutes celles qui s’opposent à l’ordre républicain tel que le conçoivent nos dirigeants. L’idéologie « républicaine » que certain(e)s essaient encore par des jongleries diverses d’associer à des valeurs universalistes, égalitaires et féministes n’est que l’idéologie officielle de l’ordre policier destiné à assurer le triomphe du capitalisme absolutisé.

      #économie #Jacques_Rancière #État_policier

    • Le républicanisme dans sa version illibérale est une « haine de la démocratie ». Ainsi l’avait pressenti Jacques Rancière dans son ouvrage éponyme :

      La Haine de la démocratie apporte une réflexion sur la résurgence du discours antidémocratique en France. L’auteur cherche à comprendre pour quelles raisons une élite intellectuelle, relativement privilégiée au sein d’États dits « démocratiques », en est arrivée à un tel mépris et une telle haine pour le principe de démocratie. Sa thèse principale est qu’il existe une confusion sur le terme de démocratie. Le livre est divisé en quatre parties :

      De la démocratie victorieuse à la démocratie criminelle

      Durant la Guerre froide, la démocratie est conçue par opposition au régime totalitaire soviétique. Une fois cet antagonisme disparu, le concept consensuel devient sujet à des réflexions plus critiques. Un tournant idéologique concernant la démocratie s’effectue ainsi après l’effondrement de l’empire soviétique, au début des années 1990. Deux grandes critiques s’élèvent : une plutôt issue des hautes sphères intellectuelles et étatiques et une venue des penseurs marxistes.

      Les premiers expliquent que parce que la démocratie enlève toute limite au peuple, le bien commun en est menacé : c’est la montée de l’individualisme anarchique et des revendications excessives. Ils effectuent une distinction entre ceux qui ont le pouvoir de prendre les bonnes décisions, qui ont le savoir, et le reste. Les seconds dénoncent la société démocratique comme étant celle qui promeut les droits des individus égoïstes de la société bourgeoise et détruit les valeurs collectives. L’individu démocratique est un consommateur soucieux de son seul confort.

      La politique ou le pasteur perdu

      Les individus « démocratiques » ont perdu l’orientation que leur apportait Dieu, ou toute autorité suprême, qui faisait d’eux un tout, un peuple avec une volonté commune. Le crime démocratique est un crime politique, le fait que toutes les voix peuvent se confronter de manières égales. Ces nouvelles pensées critiques trouvent écho dans les raisonnements du philosophe grec Platon, premier grand détracteur de la démocratie, qui lui aussi dénonce l’individualisation des mœurs qu’apporte la démocratie. Selon eux, quand l’égalité est l’unique principe qui dirige les peuples et qui légitime la prise de pouvoir, la société est chaotique. La démocratie renverse toutes les relations de pouvoir naturelles entre les individus.

      Démocratie, république, représentation

      Démocratie et système électoral représentatif, suffrage universel ne vont pas ensemble de soi. Ce suffrage a une nature double : d’un côté, il donne la possibilité d’élire n’importe qui, et en cela stimule raisonnablement les tendances démocratiques de la population ; mais d’un autre côté, il assure surtout la reproduction d’oligarchies dominantes. Ces oligarchies au pouvoir tentent de dépolitiser la sphère publique, de la privatiser. Le fait de remettre en cause cette démarcation est une manifestation de vie politique et démocratique. De même, il ne faut pas faire d’amalgame entre démocratie et république, car la république signifie le règne de la loi égale pour tous, ce principe étatique tend à homogénéiser la population et donc à contrer l’individualisme démocratique.

      La Raison d’une haine

      Chaque gouvernement est nécessairement oligarchique, une minorité dirige la majorité. La démocratie n’est pas une forme d’État ou de gouvernement. Elle est en réalité un principe au-dessus et des pratiques en dessous de l’État : c’est-à-dire à la fois le principe d’égalité nécessaire entre les humains et à la fois la pratique qui consiste à remettre en cause le statu quo imposé par les élites gouvernantes. La haine de la démocratie résulte d’une mauvaise compréhension de ce concept, et les maux de civilisation (atomisation de la société, montée de l’individualisme, populisme, etc.) qu’on lui attribue sont en fait la preuve de sa vitalité.

      https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Haine_de_la_d%C3%A9mocratie

      On peut aussi réécouter des extraits d’une conférence donnée en août 2006 dans le cloître de l’école des Beaux-Arts de Rennes, à l’initiative de la librairie Planète Io à l’occasion de la parution de son livre .

      http://www.radio-univers.com/la-haine-de-la-democratie

    • Il est excellent, argumenté, Sylvain Bourmeau. Il faut écouter cette démonstration jusqu’au bout. J’entends ceux qui lèvent les yeux au ciel en disant “Faut pas exagérer”… Et pourtant ...

      https://video.twimg.com/amplify_video/1649117416650047489/vid/1920x1080/WiAhH688lv83I9fy.mp4?tag=16

      #Macron #Ganges #casserolades
      https://twitter.com/francoisedegois/status/1649191247796420614?cxt=HHwWjIC2ufesjeMtAAAA

      Sylvain Bourmeau : journaliste, directeur du quotidien AOC media, producteur de La Suite dans les Idées sur France culture et professeur associé à Sorbonne Paris1

  • [On arrête et on se casse] Le large spectre des grèves et des #retraites - Yves Citton
    https://aoc.media/opinion/2023/03/01/le-large-spectre-des-greves-et-des-retraites

    Prendre sa retraite de la folie compétitive exacerbée par le capitalisme néolibéral, c’est bien. Faire la grève pour interrompre la folie productiviste de l’extractivisme écocidaire, c’est bien aussi. Mais #déserter les boulots qui ne contribuent à gonfler la croissance du PIB qu’en désertifiant nos milieux de vie, c’est encore mieux.

    Un spectre hante l’Europe : en Angleterre, en Allemagne, en France, des #grèves paralysent tour à tour tel ou tel secteur de l’économie nationale, avec quelques avant-goûts épisodiques de grève générale. Ce spectre n’est certes pas nouveau même si une certaine démobilisation des forces traditionnelles de revendication semble avoir caractérisé les décennies passées en Europe de l’Ouest. Davantage que le spectre-fantôme, c’est toutefois la largeur du spectre des revendications (explicites ou latentes) qui mérite de nous intéresser.

    C’est aujourd’hui un lieu commun de relever qu’il y va de bien autre chose que du seul âge légal de la retraite dans les mouvements sociaux actuellement en cours en royaume de Macronie. On l’avait déjà souligné pour les Gilets Jaunes, dont les occupations de ronds-points excédaient largement la question de la taxe carbone, pour remettre en cause l’ensemble d’un « système » à la fois politique, économique, financier, urbanistique, médiatique et épistémique. Derrière les questions relatives à la retraite, c’est l’ensemble du « rapport au #travail » qui est en train de subir une mutation de grande ampleur, nous dit-on (avec raison). Essayons de préciser sommairement cinq échelles (temporelles, sociales, idéologiques, macroéconomiques, écologiques) sur lesquelles mérite de se décliner cet élargissement nécessaire du compas avec lequel mesurer le spectre de ce qui se joue en ce début 2023.

    La forêt de l’injustice sociale

    Au cours des dernières semaines, on n’a pas assez souligné le parallélisme profond entre le moment existentiel de la retraite et le geste de la grève : dans les deux cas, on sort d’une routine scandée par la contrainte salariale qui structure le capitalisme (tu bosses ou tu crèves). Dans les deux cas, on arrête. Et suivant la façon dont on arrête, quelque chose s’interrompt. Le capitalisme écocidaire, survitaminé à la spéculation financière, s’enorgueillit de sa capacité de disruption (qui constitue l’envers de la sacro-sainte innovation). À la suite des anarchistes du XIXe siècle, nos amis de Tarnac et de Lundi matin soulignent depuis des années la radicalité politique du geste d’interruption des flux de cette...

    #paywall

    • Dans l’analyse qu’en propose Yann Moulier Boutang, https://seenthis.net/messages/993740 cette perte de sens des emplois salariés résulte d’au moins cinq facteurs de causalité : 1° la taylorisation des activités tertiaires ; 2° une numérisation qui intensifie encore ce contrôle tayloriste ; 3° l’injonction contradictoire d’être à la fois soumis à la discipline tayloriste et perpétuellement inventif, « créatif », émancipé de la boîte à pensées préformatées ; 4° la conscience de plus en plus vive d’un insoutenable décalage entre les injonctions de l’économie (le boulot) et les évidences de l’#écologie (la planète) ; 5° une « mutation du #capitalisme où l’activité de pollinisation cognitive devient beaucoup plus productive (comprenons qu’elle produit bien plus de sur-valeur) que la prestation individualisée du travail salarié[5] ».
      Sous le quintuple effet de ces facteurs de désaffection et de détachement face à nos emplois salariés, la retraite et la grève n’apparaissent plus seulement comme un « repos bien mérité » pour la première, et comme un « levier pour l’amélioration des droits sociaux » pour la seconde. Elles sont plutôt à interpréter comme des gestes de fuite et de rejet face à un système productif dont la logique d’ensemble est devenue proprement insupportable : les manifestant·es réuni·es dans les rues en quantités inédites signalent (encore calmement) qu’ielles ne peuvent ni continuer à endurer ce qui leur est imposé, ni continuer à cautionner la pseudo-rationalité économique au nom de laquelle de nouveaux « sacrifices » leur sont imposés avec le report de l’âge légal de la retraite. C’est bien plutôt la logique d’ensemble de ce système insoutenable qu’ils demandent (calmement, raisonnablement) de sacrifier.

      #grève #travail #emploi #retraites

  • https://aoc.media/opinion/2023/02/15/hors-sujet-theorie-de-ma-situation-climatique

    Chaque individu contribue, en dépit de ses efforts éventuels, à la dégradation de la planète. Pourtant la référence à une crise écologique ne suffit jamais à provoquer dans la vie individuelle une réponse cohérente et appropriée. Pour le dire autrement : ce qui se passe éventuellement du point de vue du sujet, dans les termes de la conscience, de la volonté, de la raison, de l’engagement, est hors sujet par rapport aux processus de dégradation environnementale.

    Dans la première conférence de son livre Face à Gaïa, le très regretté Bruno Latour passe en revue une série de « rapports » des sujets aux mutations écologiques du monde, dont le changement climatique est le paradigme. Il est intéressant de revenir à ses réflexions à l’heure où des militants écologistes prônent un mode d’action radicale, que l’ADEME publie son 23e rapport sur les représentations sociales du changement climatique, et que la COP 27 a suscité les commentaires de défiance bien connus.

    Les climato-sceptiques n’ont pas complètement disparu : ils entretiennent encore l’idée que les chiffres du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ne sont pas fiables. Un autre rapport à la crise écologique, beaucoup plus répandu, prend la forme du quiétisme. On ne se précipite pas dans le catastrophisme, on n’enquiquine pas les autres avec toutes les urgences auxquelles ils devraient réagir. Et puis il y a ceux qui ont été sensibles aux alertes et qui prétendent sortir des problèmes par un surcroît d’ubris technologique, géo-ingénierie et autres moyens de contrôler l’écosystème terrestre dans sa totalité. La conscience de la crise écologique en déprime d’autres, qui savent ce qui se passe mais savent aussi à quel point ils sont démunis. Les militants ou les porteurs de bonne parole institutionnelle continuent à y croire. Ils font la promotion de la panoplie des solutions. Quelques-uns, plus rares, se sont retirés dans l’isolement de leur activité et, sans prétendre résoudre la crise écologique, surmontent les angoisses qu’elle suscite en eux. Aujourd’hui surgissent les radicaux lanceurs d’alertes, qui espèrent faire bouger les foules et surtout les médias en lançant de la sauce tomate sur des œuvres d’art.

    Cette liste de postures pourrait fonctionner comme une injonction adressée au lecteur. Vous, oui, vous, où vous situez-vous ? Dans quel rapport concret, pratique, intellectuel, moral êtes-vous avec le monde que des mutations écologiques sont en train de bouleverser ? En acceptant une telle question, on valide les différences qui existent entre les postures mentionnées, entre les choix qu’elles expriment et entre les conséquences qu’elles induisent. De ce point de vue, cela fait bien une différence d’être climato-sceptique, militant environnementaliste, quiétiste anti-catastrophisme ou encore grand sage de la cause éco-systémique. L’intention de Latour n’est pourtant pas de provoquer son lecteur par ce genre d’interpellation. Bizarrement, par l’énumération de ces différentes postures, il souhaite montrer en réalité qu’elles sont équivalentes relativement à ce qu’il nous faut comprendre de Gaïa et de l’ère géologique (anthropocène) dans laquelle nous sommes désormais entrés. Doute, cynisme, espoir militant, engagement désespéré, quiétisme as usual, sagesse « bio » ou écologique, tout n’est que folie. Voilà le point de départ qui permet « d’aller au fond de la situation de déréliction dans laquelle nous nous trouvons ».

    Pourquoi ce jugement sur la folie des hommes et sur la déréliction à laquelle nous sommes condamnés ? Cette rhétorique quasi prophétique dit en fait que le sujet humain est HS (hors-sujet).

    #écologie #activisme #quiétisme #capitalocène #crises_systémiques #effondrements

    https://justpaste.it/b3f1n

  • https://aoc.media/opinion/2023/02/01/et-surtout-une-bonne-sante

    Trois ans après le Covid-19, le Roi est nu. Dans ses vœux aux professionnels de santé, le président Macron a annoncé une énième réforme de santé, censée être « disruptive ». On peine à y croire. Pourtant des solutions existent, parmi lesquelles de faire du service territorial de santé, un commun.

    [...]

    Oui, le soin c’est l’école de la modestie, tout médecin ou infirmière vous le dira. La T2A envisageait l’hôpital comme une industrie automobile qui produit une gamme de séjour. Sauf qu’entre soigner, surtout des maladies chroniques, et produire une voiture, il y a une petite différence : le soin est une coproduction : la réussite d’une relation thérapeutique dépend autant de la qualité du médecin que de la singularité, de l’idiosyncrasie et des aléas du patient. On aurait presque honte à rappeler une telle évidence. Mais il est certain que chez McKinsey, ce type de subtilité ne passe pas la rampe du Powerpoint.

    Finalement, l’effondrement de notre hôpital est le symptôme de l’inanité de la « pensée » McKinsey. Piloter l’offre de soins avec des recettes tout terrain, des power-points, des consultants avec des chaussures à bout pointu, ça ne fonctionne pas. La santé n’est pas et ne sera jamais une industrie. Certes, on peut rationaliser jusqu’à un certain point la « production de soins », mais l’exercice trouve vite ses limites. L’humain est source d’incertitudes, d’aléas, de complexité. Le grand sociologue Anselm Strauss et son équipe avait démontré cela dès les années 1950, dans un livre fameux La trame de la négociation. Tout est négocié dans le système de santé : entre le patient et son médecin, entre le médecin et son équipe, entre le patient et sa famille, entre l’équipe et la direction, etc. Vous pouvez rationaliser, au sens industriel, des bouts de trajectoire, mais la rationalisation complète de cette dernière est une chimère d’ingénieur.

    https://justpaste.it/2r16l

  • Emmanuel Macron rhabillé pour l’hiver ... Il a quand même de la chance, ce con : les températures de ces dernières semaines flirtent avec un écart de +7°C à +10°C par rapport aux moyennes climatiques.

    Quand Macron joue avec la planète Terre - AOC media
    https://aoc.media/opinion/2023/01/05/quand-macron-joue-avec-la-planete-terre

    « Qui aurait pu prédire la crise climatique ? », s’est demandé le Président de la République lors de ses vœux pour 2023. La petite phrase, une de plus, a fait bondir. Il y a de quoi. Elle révèle l’inconséquence d’un chef de l’État qui privilégie les petits jeux de la « com’ » à la résolution d’une rupture sans précédent pour nos sociétés. Emmanuel Macron « fait mumuse » ; il a pourtant les moyens de laisser, de son passage sur Terre, une trace digne de mémoire.

    https://justpaste.it/bzbrf