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  • Afrique : « Il serait trop facile de ne voir que “la main de Moscou” dans ce spectaculaire congédiement de la France »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/02/04/afrique-il-serait-trop-facile-de-ne-voir-que-la-main-de-moscou-dans-ce-spect

    Afrique : « Il serait trop facile de ne voir que “la main de Moscou” dans ce spectaculaire congédiement de la France »

    Philippe Bernard, 4 février 2023

    En prétendant continuer d’exercer son influence en Afrique, la France s’est faite la complice des échecs des indépendances. Mais nous gagnerions sans doute à considérer les événements en cours comme une nouvelle phase de la décolonisation, analyse Philippe Bernard, éditorialiste au « Monde », dans sa chronique.

    Les présidents français ont longtemps aimé les vivats des Africains, les petits drapeaux français agités sur la route des aéroports, les bains de foule et le dépaysement bienvenu que procure la chaleur d’un accueil à la spontanéité très organisée, la célébration des « liens particuliers » qui unissent la France à de nombreux pays d’Afrique. A Bamako, en 2013, après le déclenchement de l’opération « Serval » destinée à bloquer la percée des djihadistes vers le sud, alors que des Maliens en liesse le remerciaient, François Hollande avait affirmé qu’il vivait « la journée la plus importante de [s]a vie politique ». Emmanuel Macron semblait aux anges, à Ouagadougou, à la fin 2017, face à un amphi d’étudiants applaudissant sa promesse de rompre avec une vision postcoloniale et de parler désormais d’égal à égal avec les Africains. « Il n’y a plus de politique africaine de la France ! », avait-il même proclamé.

    Il serait trop facile, alors que les soldats français sont expulsés du Mali et du Burkina Faso, que la France y est conspuée dans la rue, que, sur les tee-shirts, Vladimir Poutine a remplacé Emmanuel Macron, de ne voir que « la main de Moscou » dans ce spectaculaire congédiement de la France. Si les mercenaires du Groupe Wagner peuvent proposer leurs services – une assurance-vie pour les militaires putschistes au pouvoir –, si des Africains « marchent » dans la grossière propagande russe, c’est parce qu’ils voient Vladimir Poutine comme un homme ayant relevé son pays, ce que leurs dirigeants n’ont jamais su faire. C’est aussi qu’au Mali, les libertés fondamentales ont été supprimées et qu’un climat de peur s’est répandu. Mais, fondamentalement, nombre de Sahéliens tournent le dos à la France parce qu’ils lui reprochent son incapacité à rétablir la sécurité.

    Or, cette impuissance résulte essentiellement d’un défaut d’analyse : les agressions djihadistes, dont ont été victimes les pays du Sahel depuis que la chute du dictateur libyen Kadhafi en 2011 y a fait déferler armes et combattant, se sont transformées en conflits endogènes. Les combattants djihadistes, à l’origine des étrangers, se recrutent désormais parmi les communautés locales brimées, rançonnés ou abandonnées par le pouvoir central, ou en butte à des conflits intercommunautaires – souvent liés à l’utilisation des sols – jamais arbitrés. Au fil des ans, les groupes djihadistes « ont recruté sur place en proposant un mode de gouvernance alternatif. La France s’est alors retrouvée mêlée à une guerre qui ne visait plus des “groupes terroristes”, mais des insurrections locales, parfois microlocales. Dans le cas du Mali, on peut même parler de guerre civile », a expliqué au Monde le 6 janvier Rémi Carayol, journaliste spécialiste de l’Afrique, auteur du Mirage sahélien. La France en guerre en Afrique. Serval, Barkhane et après (La Découverte, 2023).
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Le Burkina Faso officialise sa demande de rupture de la présence militaire française dans le pays

    « Guerre civile », l’expression revient aussi dans l’analyse d’Olivier Vallée, économiste spécialiste de l’Afrique : « Il semble bien que pour faire la paix, il serait nécessaire d’accepter de considérer que se déroule, du Nigeria au Burkina, une guerre et de la qualifier. Ni locale ni globale, comme on a tenté de la présenter au nom du terrorisme, la guerre [en Afrique de l’Ouest] est une guerre civile. » De fait, au Mali comme au Burkina Faso, une large partie du pays échappe au contrôle des autorités et les massacres de populations civiles se multiplient. L’armée française, en privilégiant certaines communautés comme les Touareg en vertu de traditions coloniales, a alimenté les accusations d’ingérence.

    Résultat, la faillite des Etats, au mieux absents, au pire prédateurs, à assurer la sécurité, sans même parler de conditions de vie décentes, est désormais masquée par un nationalisme nourri de ressentiment antifrançais, arme décisive pour des putschistes en manque de légitimité. Aucun Malien, aucun Burkinabé, comme aucun des habitants de plusieurs autres pays africains francophones, n’ignore que ses dirigeants élus, responsables du total manque de perspectives de leur jeunesse, ont été appuyés par la France. En prétendant continuer d’exercer son influence, Paris s’est fait le complice des échecs des indépendances. Mais le sentiment – de plus en plus éloigné de la réalité – selon lequel Paris « fait la pluie et le beau temps » est devenu insupportable avec l’échec sécuritaire français.

    Le mot d’ordre de « souveraineté », largement brandi aujourd’hui, se nourrit aussi de l’incapacité française à se débarrasser des comportements condescendants. Devant les étudiants de Ouagadougou en 2017, Emmanuel Macron n’avait pas pu s’empêcher d’humilier par une pique le président élu, Roch Marc Christian Kaboré, alors même qu’il souhaitait faire passer son message de « nouveau partenariat décomplexé ». Aujourd’hui, comment le ministre des armées, Sébastien Lecornu, peut-il convaincre les Africains que la France entend parler d’égal à égal avec eux, lorsqu’il présente l’Afrique comme faisant « partie de notre profondeur stratégique » et justifie le maintien de bases militaires sur le continent par le souci de « protéger nos ressortissants » ?

    Nous gagnerions sans doute à considérer les événements en cours comme rien de moins qu’une nouvelle phase de la décolonisation. « Nous sommes tout simplement en train de changer d’époque, passant d’une Afrique dominée à une Afrique souveraine. Cela se déroule sous nos yeux, mais peu le comprennent », constate dans Le Monde (26 janvier) le général Bruno Clément-Bollée, ancien commandant des forces françaises en Côte d’Ivoire (où le ressentiment contre la France s’est manifesté dans les années 2000, en dehors de toute influence russe). Venant d’un général, l’avertissement vaut coup de semonce. L’Afrique n’a pas fini de réclamer sa souveraineté. Il ne s’agit pas de battre sa coulpe, mais de changer de logiciel.

    #France #Sahel #Françafrique #Mali #Centrafrique #Décolonisation #Serval #Barkhane

    • La lecture de la chronique de Philippe Bernard sera utilement complétée par celle d’un entretien avec Rémi Carayol, publié dans le Monde du 6 janvier 2023. Rémi Carayol journaliste spécialiste de l’Afrique est notamment l’auteur de F rance en guerre en Afrique. Serval, Barkhane et après ? (La Découverte, 2023).

      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/06/remi-carayol-chercheur-specialiste-de-l-afrique-au-sahel-les-officiers-franc

    • Présentation du livre de Rémi Carayol sur le site de son éditeur.

      Le mirage sahélien - Rémi Carayol - Éditions La Découverte
      https://www.editionsladecouverte.fr/le_mirage_sahelien-9782348075469

      L’intervention militaire engagée par la France au Sahel tourne au fiasco. Lancée en janvier 2013, l’opération Serval ressemblait au départ à une success story. Les quelques centaines de djihadistes qui avaient pris le contrôle des principales villes du Nord-Mali furent mis en déroute. Des foules en liesse, brandissant ensemble les drapeaux français et malien, firent un triomphe à François Hollande lorsqu’il se rendit à Bamako.
      Tout cela n’était pourtant qu’un mirage. En quelques mois, l’opération Barkhane, qui prend le relais de Serval en juillet 2014, s’enlise. Les djihadistes regagnent du terrain au Mali et essaiment dans tout le Sahel : des groupes locaux, liés à Al-Qaïda ou à l’État islamique, se constituent et recrutent largement, profitant des injustices et de la misère pour se poser comme une alternative aux États déliquescents. Au fil des ans, la région s’enfonce dans un chaos sécuritaire et politique : les civils meurent par milliers et les coups d’État militaires se multiplient. Impuissante, la France est de plus en plus critiquée dans son « pré carré ».
      L’armée française, imprégnée d’idéologie coloniale et engluée dans les schémas obsolètes de la « guerre contre le terrorisme », se montre incapable d’analyser correctement la situation. Prise en étau entre des décideurs français qui ne veulent pas perdre la face et des dirigeants africains qui fuient leurs responsabilités, elle multiplie les erreurs et les exactions. Des civils sont tués. Des informateurs sont abandonnés à la vengeance des djihadistes. Des manifestations « antifrançaises » sont violemment réprimées.
      Sous couvert de la lutte contre la « barbarie », la France a renié les principes qu’elle prétend défendre sur la scène internationale. Le redéploiement du dispositif militaire français au Sahel, annoncé par Emmanuel Macron, n’y change rien : la France poursuit en Afrique de l’Ouest une guerre qui ne dit pas son nom, et sur laquelle les Français n’ont jamais eu leur mot à dire.

  • Enquête sur le 4 août 2020 : aussitôt libéré, le chef de la sécurité du port s’envole pour les Etats-Unis - L’Orient-Le Jour
    https://www.lorientlejour.com/article/1325938/explosions-du-4-aout-2020-aussitot-libere-le-chef-de-la-securite-du-p

    Le chef du département de la sécurité au port de Beyrouth, Ziad el-Aouf, qui faisait partie des 17 personnes encore détenues dans le cadre de l’enquête sur la double explosion du 4 août 2020 et libérées mercredi, a rejoint les Etats-Unis peu après sa libération, a confirmé à L’Orient-Le Jour son avocat Sakhr Hachem. Il aurait quitté le territoire libanais avant qu’une interdiction de voyager ne soit émise à son encontre.

    Ziad el-Aouf fait partie des 17 personnes libérées mercredi sur ordre du procureur général près la Cour de cassation Ghassan Oueidate, aux côtés du directeur des douanes Badri Daher et celui du port Hassan Koraytem. Le procureur Oueidate, qui est lui-même poursuivi dans l’enquête sur le port de Beyrouth, a également engagé des poursuites contre le juge Tarek Bitar, qui refuse d’être dessaisi de l’enquête sur le port, pour « rébellion contre la justice » et « usurpation de pouvoir », tout en le frappant d’une interdiction de quitter le territoire libanais.

    Aucun doute que les USA renverront vers le Liban ce suspect suspect si la Justice le demande !

    • Comment Ziad el-Aouf a pu quitter le Liban pour les États-Unis - L’Orient-Le Jour
      https://www.lorientlejour.com/article/1326029/comment-ziad-el-aouf-a-pu-quitter-le-liban-en-direction-des-etats-uni

      Son principal atout est de détenir un passeport américain. Mohammad Ziad el-Aouf, un Libano-Américain qui faisait partie des 17 personnes encore détenues dans le cadre de l’enquête sur la double explosion au port et libérées mercredi, a été l’une...

      Il n’est donc pas prêt d’être extradé.

    • Faisant suite à : Liban : affrontement entre magistrats autour de l’enquête sur l’explosion dans le port de Beyrouth en 2020
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/27/liban-le-juge-tarek-bitar-engage-un-bras-de-fer-judiciaire-pour-relancer-les

      Le juge Tarek Bitar a rouvert l’enquête, lundi, après treize mois de blocage. En retour, le procureur général, Ghassan Oueidate, l’a inculpé pour « rébellion contre la justice » et « usurpation de pouvoir » et a libéré les dix-sept personnes détenues.

    • Ca continue !

      https://french.almanar.com.lb/2541563
      Dans le face-à-face juridique entre le juge d’instruction Tarek al-Bitar et le procureur général de cassation le juge Mounif Oweidat, les Etats-Unis ont fait fuir le détenu Mohamad Ziad Rateb Auf qui était inculpé dans l’affaire de l’explosion du port de Beyrouth.

      LEBANON-BLAST-JUSTICEDétenant la double nationalité libanaise et américaine, il était chef du Département de la Sécurité et de la Sureté du port de Beyrouth lorsqu’il a été arrêté il y a deux ans et demi ainsi que 16 personnes inculpées dans cette affaire. Sans jugement depuis.

      Sa libération a été arrêtée le mercredi 25 janvier par le procureur général Oweidat, qui a décidé de libérer tous les détenus dans cette affaire au lendemain d’une décision du juge Bitar d’en libérer 5.

      Auf a été vu dans la nuit de mercredi à jeudi 26 janvier, en compagnie de son épouse et de ses deux filles, à l’aéroport de Beyrouth, quittant le Liban à destination des Etats-Unis. Il semble que les membres de sa famille qui vivent aux Etats-Unis sont venus spécialement pour l’escorter.
      Sa libération ainsi que celle des autres était toutefois conditionnée par une interdiction de voyage.

      Certains médias pros américains arguent qu’il a pris la fuite avant que Oweidat ne décrète cette interdiction. Sachant que l’arrêt de l’interdiction de voyage a été rendu public dans la journée du mercredi.

      Des médias libanais ont laissé entendre que sa libération et son évasion semblent avoir été préparées d’avance, d’autant que l’envoyé spécial du président américain pour les Affaires des otages Roger Dean Carstens l’avait réclamée. Ainsi que l’ambassade des Etats-Unis au Liban qui l’a plusieurs fois demandé aux autorités libanaises. L’ambassadrice américaine avait rencontré le juge Bitar pour lui demander de le libérer arguant que son arrestation était arbitraire » assure le site d’information et organe du Courant patriotique libre (CPL).

      Selon ce dernier, les Etats-Unis avaient menacé d’appliquer la loi Recovery and Hostage-Taking Accountability Act Robert Levinson Hostage qui autorise le président américain à imposer des sanctions de blocage de visa et de propriété à toute personne étrangère responsable ou complice de la détention illégale ou abusive d’un ressortissant américain à l’étranger.

      Pour le journal al-Akhbar, le fait que le nom de Auf n’ait pas figuré dans la première liste des 5 personnes dont la libération avait été ordonnée par le juge Bitar n’a été qu’un « mouvement de camouflage » pour faire croire qu’il n’y a pas eu de pression.
      Certains observateurs se sont demandés si cette libération n’était pas concertée par les deux juges, en catimini, pour éviter les sanctions américaines.

      Selon le site d’information libanais aux capitaux qataris al-Modon, des photos de Auf lui ont été publiées lors de son arrivée aux Etats-Unis où un autre ancien détenu libano-américain l’y attendait.

      Nizar Zakka, cet expert en technologies de l’informatique qui était le secrétaire général de l’Organisation arabe pour la technologie des Informations et de communication dont le siège se trouve à Washington avait été arrêté en Iran en 2015, lors de sa participation à une conférence à Téhéran.
      Il a été inculpé pour espionnage pour le compte des Etats-Unis et n’a été libéré qu’en 2019 grâce à une médiation libanaise. Selon la télévision iranienne, il avait des liens étroits avec les milieux militaires et des renseignements américains.

      Depuis, il préside la Hostage Aid Worldwide qui a, elle aussi contribué à la libération de Auf. Zakka a écrit sur sa page Twitter que ce dernier est rentré chez lui parmi les siens, selon al-Modon. Parlant toujours au nom de Auf, Zakka assure qu’il s’est rendu aux USA pour faire des examens médicaux.

      En plus de son évasion, les liens de Auf avec Zakka le rendent encore plus suspect. On ne saura peut-être jamais quel a été son rôle dans l’explosion du port de Beyrouth. Et le rôle des USA…

      Cette évasion n’est pas sans rappeler celle de Amer Fakhoury en mars 2020. Officier au sein de la milice collaboratrice avec l’entité sioniste de l’Armée du Liban du sud, il avait causé la mort d’innombrables libanais au sud du Liban avant la libération en l’an 2000.

  • Emmanuel Macron annonce une enveloppe de 413 milliards d’euros de financement des hôpitaux et des services sociaux.

    Ah non, pardon : « Emmanuel Macron annonce une enveloppe de 413 milliards d’euros de financement des armées pour les sept années à venir » https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/20/emmanuel-macron-annonce-une-enveloppe-de-413-milliards-d-euros-pour-le-finan

    Alors que les populations affrontent déjà les privations et la crise, combien d’hôpitaux ne seront pas construits, combien d’infirmières ou de professeurs ne seront pas recrutés pour permettre de maintenir ce budget militaire ? Combien de services utiles à la population seront encore sacrifiés au bénéfice de Dassault, Thales, Safran, Nexter et Naval Group ?

  • Emmanuel Macron annonce une enveloppe de 413 milliards d’euros pour le financement des armées dans les sept années à venir
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/20/emmanuel-macron-annonce-une-enveloppe-de-413-milliards-d-euros-pour-le-finan

    Emmanuel Macron annonce une enveloppe de 413 milliards d’euros pour le financement des armées dans les sept années à venir

    Le chef de l’Etat a dévoilé vendredi les grandes orientations de la future loi de programmation militaire 2024-2030, placée sous le signe de la « transformation des armées » sur fond de retour de la guerre en Europe.

    L’effort budgétaire consenti est d’ampleur, même s’il risque d’être amputé par l’inflation et l’explosion des coûts de l’énergie. Emmanuel Macron a dévoilé, vendredi 20 janvier, les grandes orientations de la future loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030, alors que la guerre en Ukraine a mis en lumière des faiblesses dans le dispositif militaire français.

    Depuis la base aérienne de Mont-de-Marsan (Landes), le président de la République a notamment annoncé « un effort budgétaire de 400 milliards d’euros, qui permettra de couvrir un total de 413 milliards d’euros de besoins militaires » dans les sept années à venir.

    La prochaine loi de programmation militaire, qui sera présentée au Parlement en mars, promet donc de poursuivre l’effort financier en matière de défense après une LPM 2019-2025 de 295 milliards d’euros, qui avait mis fin à des années de coupes budgétaires dans les armées.

    Ces « efforts seront à proportion des dangers, c’est-à-dire considérables. [...] Nous devons avoir une guerre d’avance », a affirmé Emmanuel Macron, actant la fin des « dividendes de la paix » face à l’émergence de « nouveaux conflits » qui menacent partout dans le monde.

    Le budget alloué au renseignement militaire augmentera ainsi de près de 60 % sur la période 2024-2030, a également annoncé le chef de l’Etat, citant doublement du budget de la Direction du renseignement militaire (DRM) et de la Direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD).

    « On passe d’une logique de réparation à une logique de transformation des armées. On doit pouvoir être plus efficace et performant », soulignait l’Elysée avant ces annonces, alors que la guerre en Ukraine a poussé les Européens les plus rétifs à consacrer plus d’argent à leur défense. L’Allemagne a débloqué l’an dernier 100 milliards d’euros pour moderniser ses armées.

    Le Monde avec AFP

    Eh ben voilà, on indique clairement quelles sont les priorités en matière d’investissement et d’utilisation des ressources.

    #militarisation #armement #investissements_publics

    • Oui, c’est vraiment un principe central de cet illibéralisme totalement assumé : c’est pas juste qu’il faut prendre des décisions dégueulasses (ici annoncer une « enveloppe » monstrueuse pour les bidasses en même temps que la « réforme » des retraites), il faut le faire ostensiblement pour bien montrer que c’est pas la peine de donner ton avis.

    • Sébastien Lecornu : « La loi de programmation militaire permet à la France de rester une puissance mondiale »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/20/sebastien-lecornu-la-loi-de-programmation-militaire-permet-a-la-france-de-re

      La France consacrera 413 milliards d’euros à ses armées entre 2024 et 2030, a annoncé Emmanuel Macron lors d’un déplacement, vendredi 20 janvier, sur la base aérienne de Mont-de-Marsan (Landes). Le ministre des armées, Sébastien Lecornu, détaille les priorités et les enjeux de cette nouvelle loi de programmation militaire (LPM), inédite par son ampleur.

      A quelle ambition correspond cette enveloppe de 413 milliards d’euros sur sept ans ?

      C’est une somme historique. Si l’on devait trouver une comparaison sur cet effort politique, budgétaire, militaire, technologique, il faudrait remonter aux gaullistes dans les années 1960, lorsqu’ils ont transformé notre modèle d’armée et se sont lancés seuls dans la course à l’atome pour faire de la France une puissance dotée. Cette loi a deux objectifs : nous protéger, y compris face aux menaces nouvelles, et nous projeter à l’extérieur, avec nos alliés, pour défendre, le cas échéant, notre sécurité et nos valeurs. Ce budget permet à la France de rester une puissance mondiale. Sans ce choix, nous serions relégués.

      Comment a été prise en compte l’explosion des facteurs, tels que le coût des matières premières et de l’énergie, dont beaucoup d’états-majors redoutent les effets ?

      C’est évidemment intégré. Le débat n’est pas là. Nous parlons désormais d’un doublement du budget annuel des armées entre 2017 – 32,7 milliards sur l’année – et 2030 ! Ces 413 milliards d’euros, c’est plus qu’une enveloppe budgétaire. C’est un effort demandé à la nation, au service d’une stratégie pour garantir la protection du pays.

      Cette enveloppe permettra-t-elle de répondre à toutes les demandes des armées ou devront-elles renoncer à certaines choses ?

      Avec 413 milliards d’euros, on peut difficilement parler de renoncement. En revanche, il faut faire des paris. N’espérons pas gagner une bataille en 2030 avec les équipements de 2020 : les sauts technologiques sont de plus en plus rapides. Ne faisons pas comme ceux qui s’accrochaient à leurs chevaux en repoussant les programmes de chars mécanisés… Il faut être agile.

      Le président utilise le terme de « transformation » pour caractériser cette nouvelle LPM, après que la précédente (2019-2023) a été qualifiée de « réparation ». Que voulez-vous transformer ?

      L’armée française a longtemps été abîmée, avec des ponctions brutales de budget. Notre appareil militaire a pu fonctionner au ralenti en matière d’entraînement, en matière de stocks, ou même parfois évoluer dans un environnement dégradé. Maintenant, il ne s’agit plus tant de réparer, même si cela va se poursuivre, notamment en matière d’infrastructures ou de soutien aux forces. L’évolution du monde nous impose d’adapter pragmatiquement notre modèle de défense : « Dis-moi tes dangers, je te donnerai ton armée. »

    • Vœux aux armées du Président Emmanuel Macron.

      Mesdames les Ministres,

      Monsieur le Président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat,

      Madame la Présidente de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées de l’Assemblée nationale,

      Madame la Présidente au Parlement européen, où j’étais ce matin,

      Mesdames et messieurs les Sénateurs,

      Mesdames et messieurs les députés,

      Mesdames les députés européennes,

      Madame la préfète,

      Monsieur le Président du conseil régional,

      Monsieur le Président de la Collectivité européenne d’Alsace,

      Mesdames et messieurs les maires,

      Mesdames et messieurs les élus,

      Monsieur le chef d’Etat-major des armées,

      Monsieur le délégué général pour l’armement,

      Madame la secrétaire générale pour l’administration,

      Monsieur le directeur général de la Gendarmerie nationale,

      Messieurs les chefs d’Etat-major,

      Mesdames et Messieurs les officiers généraux, officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, marins, aviateurs et personnels civils des armées,

      Mesdames et messieurs,

      [...]
      Vive la République et vive la France !

  • « Je reste humaine », « on peut être empathique mais décisif »... Lisez le discours de démission (surprise) de Jacinda Ardern – Libération
    https://www.liberation.fr/international/asie-pacifique/je-reste-humaine-on-peut-etre-empathique-mais-decisif-lisez-le-discours-d
    https://www.liberation.fr/resizer/l_RVLUT5V41otKE-kEJzI-__F4k=/1200x0/filters:format(jpg):quality(70)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/Q5KMZFAONRAJLA4GXMSSHWDYFM.JPG

    « Nous avons accompli énormément de choses au cours des cinq dernières années. Et j’en suis très fière. En matière de changement climatique, nous sommes dans une position fondamentalement différente de celle où nous étions, avec des objectifs ambitieux et un plan pour les atteindre.

    « Nous avons inversé les statistiques de la pauvreté infantile et procédé aux augmentations les plus significatives de l’aide sociale et du parc de logements publics que nous ayons connues depuis plusieurs décennies. Nous avons facilité l’accès à l’éducation et à la formation, amélioré les salaires et les conditions de travail des travailleurs, tout en nous orientant vers une économie à hauts salaires et à hautes qualifications.

    • La démission surprise de Jacinda Ardern, ou l’art de faire de la politique autrement
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/19/la-demission-surprise-de-jacinda-ardern-ou-l-art-de-faire-de-la-politique-au

      Pour parvenir à ces résultats, la première ministre néo-zélandaise a pu compter sur une solide expérience : diplômée en communication, elle manie parfaitement les codes des réseaux sociaux. Par ailleurs, lorsqu’elle accède au pouvoir, Jacinda Ardern est tout sauf une néophyte et connaît précisément les rouages du monde politique. Entrée au Parti travailliste à l’âge de 17 ans, elle a ensuite été vice-présidente des Jeunes du parti au début des années 2000 avant de continuer son parcours à l’étranger, où elle a notamment travaillé pour le cabinet de Tony Blair. ....

      « Cette décision est stratégiquement pertinente, sa côte de popularité était en baisse ces derniers mois, et elle donne peut-être ainsi une chance à son parti de remporter les élections avec quelqu’un d’autre » ....

    • Le Monde qui réduit les actes de ce dirigeant à de la manipulation et du calcul électoral. Manipulateur, calculateur. Ne manque que le côté hystérique, et on aura bien compris que ce dirigeant est une femme. Même pas certain que Hollande « mon ennemi c’est la finance » ait été un jour décrit avec autant de mauvaise volonté alors qu’il le mérite au centuple.

      La Nouvelle-Zélande, juste pour rappel, est le pays qui est parvenu à gérer la pandémie avec du zéro-covid, de la vaccination massive en phase zéro-covid, et une ouverture, finalement, relativement contrôlée, et relativement protectrice des libertés publiques. A passer au travers d’un attentat raciste sans faire voter des lois racistes destructrices des libertés. Et tous les autres sujets qui sont évoqués, et qui nous sont moins directement compréhensibles.

    • oui, ce n’est pas un éléphant

      « Depuis qu’elle occupe cette fonction, Jacinda Ardern est dans une stratégie de normalisation voire d’humanisation du dirigeant et de la dirigeante politique à travers les codes et les normes qu’elle met en lumière, là où d’autres veulent représenter une supériorité, quelque chose de l’ordre du sacré ou du divin », explique Mérabha Benchikh, docteure en sociologie et spécialiste des questions de genre en politique. Une « façon d’incarner une alternative, une autre voie politique, un exercice du pouvoir différent de Margaret Thatcher, par exemple, qui avait intégré des codes très masculins, voire virilistes », poursuit-elle.

      Jacinda Ardern défend un discours « marqué par une rhétorique féminine, elle se montre empathique, à l’écoute », considère Maud Navarre, sociologue également spécialisée sur le genre et les femmes en politique.

      #femmes #politique

    • Sa justification à elle c’est :

      Je sais ce que ce travail exige et je sais que je n’ai plus assez d’énergie pour le faire honnêtement. C’est aussi simple que cela. Mais je sais qu’il y a d’autres personnes autour de moi qui ont cette énergie.

      Autrement dit que s’occuper d’un pays (mais ça vaudrait pour une région, pour une commune), c’est un travail collectif qui doit tourner, et ne doit pas être la responsabilité d’une seule personne qui a ses hauts et ses bas.

    • Ceci valant bien sûr pour toute activité au service de ses congénères, genre responsabilités dans une asso, qui dans ce cas également nécessite que l’on puisse confier ces responsabilités à d’autres sans se sentir coupable de « jeter l’éponge » (sauf, bien sûr, si on « dispose » d’un ego surdimensionné). C’est hélas un précepte qui est rarement appliqué dans notre sphère nationale. Et à chaque occasion que j’ai eue de militer dans des assos, j’ai rencontré cette fâcheuse disposition d’esprit qui fait croire à tout individu qu’il est irremplaçable et que sa décision de se mettre en retrait serait considérée comme une trahison.

    • @sombre HS mais : à propos de responsabilité dans des assos, la stratégie du gvt actuel avec la hausse de l’âge de départ à la retraite est aussi de détruire le tissu social -et politique- construit par des retraités souvent bénévoles qui s’investissent (un peu trop) dans le #vivre_ensemble_autrement.
      Et oui, ça fait du bien de voir des personnes savoir exercer un pouvoir temporaire et nous aider à mieux penser la place du collectif. On en est loin en france, avec une minuscule pour dire tout mon mépris de ce à quoi on assiste avec la montée des nazis au pouvoir.

    • @touti : hors sujet pas tant que ça : dans bon nombre d’assos, tu as des gens qui s’accrochent comme des tiques à leurs prérogatives et ils ont tendance à considérer la structure collective ainsi que leurs collaborateur·rices comme leurs « choses » (d’où l’analogie avec le monde de la politique). C’est pénible à vivre mais également dommageable pour le bien commun.
      Tout à fait d’accord avec les conséquences de cette réforme des retraites scélérate.
      Sinon, mon investissement dans la vie associative date de l’époque où j’étais en « activité ». J’ai refait quelques tentatives plus tard mais j’ai mal supporté.
      (Mais non, ch’uis pas aigri :-)) juste un peu las) ...

    • petit malentendu levé : ce n’est pas ton post qui était noté HS mais ce que cela m’évoquait ensuite :)
      Et on est d’accord, méfiance envers les ’ancrés du pouvoir’ qui vont vite à imposer leur tyrannie, et c’est parfois pire dans le bénévolat ou lorsque les principes anarchistes mal interprétés permettent de s’affranchir de rendre des comptes ou de donner un cadre sain et explicite au collectif. Il n’empêche, notre psychologie (et notre façon de penser le monde) et nos relations échappent rarement à la grande bouse du capitalisme, au rapport d’argent (le bénévolat est le pire des cas quand il s’emmêle dans pitié et nullité) et à tout ce qui nous rend petit : concurrence, pouvoir. J’ai rêvé moi aussi un jour d’un monde d’entraide où chacun·e effectue temporairement les rôles ingrats.

  • Au Brésil, un ministre de Jair Bolsonaro au cœur de révélations compromettantes
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/13/au-bresil-un-ministre-de-jair-bolsonaro-au-c-ur-de-revelations-compromettant


    L’ex-président du Brésil Jair Bolsonaro et son ministre de la justice, Anderson Torres, à Brasilia, le 27 juin 2022.
    EVARISTO SA / AFP

    Selon le quotidien « Folha de S. Paulo », un document retrouvé chez l’ancien ministre de la justice de l’ancien président brésilien constituerait la preuve d’une éventuelle préparation d’un coup d’Etat par le camp bolsonariste.
    […]
    Le document de trois pages trouvé chez lui prévoit que le gouvernement fédéral prenne le contrôle du Tribunal supérieur électoral (TSE), qui veille à la bonne marche du scrutin, « pour assurer la préservation et le rétablissement de la transparence, et approuver la régularité du processus électoral de la présidentielle de 2022 ». Une mesure considérée comme anticonstitutionnelle par de nombreux juristes. Dans la pratique, cela signifie que l’intention aurait été d’annuler l’élection de Lula, qui a battu le président sortant d’extrême droite, Jair Bolsonaro, d’une courte tête le 30 octobre.
    Selon Folha de S.Paulo, qui a révélé le scandale, ce brouillon pourrait être le premier élément de preuve irréfutable que l’entourage de Jair Bolsonaro préparait un coup d’Etat en cas de défaite. Le décret présidentiel – qui n’a jamais vu le jour – prévoyait la création d’une « commission de régulation électorale » pour remplacer le TSE, avec à sa tête une majorité de membres issus du ministère de la défense (8 sur 17). Le document n’est pas daté, mais le nom de Jair Bolsonaro se trouve à la fin, sur un espace prévu pour sa signature.

  • Brésil : comment l’assaut contre les lieux de pouvoir s’est organisé sur les réseaux sociaux
    https://www.francetvinfo.fr/monde/bresil/assaut-contre-des-lieux-de-pouvoir/bresil-comment-l-assaut-contre-les-lieux-de-pouvoir-s-est-organise-sur-
    https://www.francetvinfo.fr/pictures/PQoCnxaG76JNgQHJ1Jljv6FiovM/1500x843/2023/01/10/phpMdijAx.jpg

    Comme lors de l’assaut contre le Capitole aux Etats-Unis, les appels de ce genre se sont multiplié sur les plateformes quelques jours avant le rassemblement, d’après le Washington Post et des médias brésiliens. Sur la messagerie cryptée Telegram, certains participants ont indiqué préparer la venue de « mille bus » dans le but d’amener « deux millions de personnes à Brasilia » depuis plusieurs États brésiliens vers la capitale fédérale, tout en indiquant la date ou les routes à suivre dans le cadre de « caravanes de la liberté ».

    Préparer mille bus, deux millions de personnes, tout ça sur une « messagerie cryptée » ?

  • Brésil : au lendemain de la tentative d’insurrection, Brasilia entre sidération et répression
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/10/bresil-au-lendemain-de-la-tentative-d-insurrection-brasilia-entre-sideration

    Dans une démonstration d’unité de la République, le président Lula a réuni dans la capitale les principaux chefs des pouvoirs législatif et judiciaire. Au moins 1 500 militants d’extrême droite ont été arrêtés.

    Au Pérou, des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre font dix-sept morts
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/10/perou-des-affrontements-entre-manifestants-et-forces-de-l-ordre-font-12-mort

    Un mois après des heurts déjà meurtriers avec l’armée, le sud du pays a de nouveau été le théâtre d’affrontements, sur fond de protestations concernant la destitution de l’ancien président Pedro Castillo.

    Sauras-tu reconnaître le pays gouverné par la gauche et celui gouverné par la droite ?

    Celui gouverné par la droite, c’est celui où les manifestants affrontent le pouvoir.

    Celui gouverné par la gauche, c’est celui où les manifestants font l’objet de répression de la part du pouvoir.

    Muni de cette grille, tu pourrais te demander ce qu’il en est chez nous ? Exemple de 2016 ci-dessous.

    Violents affrontements à Grenoble pendant une manifestation sauvage anti Loi Travail
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/violents-affrontements-grenoble-manifestation-sauvage-a

    Il était un peu plus de 19 heures ce mardi 5 juillet lorsqu’une manifestation sauvage anti Loi Travail a débuté à Grenoble.

  • Israël poursuit sa ligne dure en interdisant les drapeaux palestiniens dans les lieux publics
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/09/israel-poursuit-sa-ligne-dure-en-interdisant-les-drapeaux-palestiniens-dans-

    Israël poursuit sa ligne dure en interdisant les drapeaux palestiniens dans les lieux publics

    L’ordre du nouveau ministre de la sécurité nationale israélien, Itamar Ben Gvir, d’interdire le drapeau palestinien dans les lieux publics fait suite à une série d’autres mesures punitives contre les Palestiniens, depuis son entrée en fonctions fin décembre 2022.

  • En #Italie, le gouvernement de Giorgia #Meloni s’en prend aux ONG qui sauvent les migrants en mer

    Un nouveau « #code_de_conduite » pour les #navires_humanitaires est entré en vigueur, mardi. Des #amendes allant de 10 000 à 50 000 euros sont notamment prévues à l’encontre du commandant de bord si les règles ne sont pas appliquées.

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    Durant la campagne électorale à la fin de l’été, Giorgia Meloni, la dirigeante du parti d’extrême droite italien Fratelli d’Italia avait relancé l’idée d’un #blocus_naval pour arrêter les bateaux intervenant en mer pour sauver les migrants. Une solution inapplicable dans les faits, mais payante en termes de communication politique. Désormais installé à la tête du pays, le gouvernement de Mme Meloni a néanmoins mis à exécution sa promesse de réguler les flux migratoires avec une mesure qui ressemble à une déclaration de guerre aux ONG engagées dans le sauvetage des migrants. Le 3 janvier, un nouveau « code de conduite » pour les navires humanitaires est entré en vigueur sous forme de #décret.

    Parmi les nouveautés de ce texte figure notamment la fin des #opérations_de_secours « simultanées ». Dès lors qu’un port de débarquement a été attribué par les autorités italiennes à un navire, il doit être atteint sans délai pour que puisse s’achever l’opération de sauvetage. Plus question désormais, sauf demande spéciale des autorités italiennes, qu’un bateau qui vient de recueillir des réfugiés détourne sa route vers une autre embarcation en perdition tant qu’elle n’a pas touché terre. En somme, la nouvelle réglementation du ministère de l’intérieur entérine un glissement qui constitue une menace claire sur le #droit_de_la_mer et les conventions internationales dont l’Italie est signataire.

    Ce tour de vis sécuritaire a provoqué indignation et inquiétude chez les ONG « Plutôt que de nous assigner un rôle clair de sauver des vies en mer, ce décret tente de limiter notre champ d’action sans proposer aucune solution alternative », se désole Juan Matias Gil, chef des opérations de secours en mer de Médecins sans frontières (MSF). « Il faut s’attendre à une baisse dans nos capacités d’opération de sauvetage, et plus de morts à venir. »

    Les ONG dérangent

    Autre nouveauté, le gouvernement impose désormais aux ONG de recueillir les demandes d’asile à bord des navires de sauvetage, de sorte que la procédure administrative soit prise en charge par le pays dont les navires battent pavillon. Une procédure qui promet de nombreux casse-tête juridiques. Si l’on suit les nouvelles normes, qui empêchera des migrants somaliens de demander l’asile à Rome, s’ils sont recueillis par un navire marchand italien au large de Mogadiscio ?

    La crainte de « l’#appel_d'air », rhétorique habituelle des membres de l’exécutif et de la majorité pour justifier les restrictions, a de nouveau été mise en avant par les responsables politiques convaincus que les navires humanitaires sont des « #taxis_de_la_mer ». Les #statistiques démontrent pourtant le contraire : sur près de 100 000 migrants qui ont débarqué en 2022 sur les côtes italiennes, à peine plus de 10 % ont été recueillis par des ONG.

    Installé en Sicile où il suit les questions migratoires pour Radio Radicale, le journaliste Sergio Scandura effectue une veille permanente des embarcations de migrants en approche des côtes italiennes. « Ce décret est inédit, estime-t-il, personne jusqu’ici n’avait jamais adopté un texte qui va à l’encontre des lois internationales mais aussi des lois européennes. » « La réalité est que les ONG dérangent parce que l’on ne doit pas voir ce qu’il se passe au large de la Libye », dénonce le journaliste.

    « Menace de #sanctions_financières »

    L’Eglise catholique italienne a elle aussi vivement réagi. « Ce décret n’est basé sur rien, il est construit sur un faux sentiment d’insécurité », a tonné Mgr Gian Carlo Perego, président de la commission pour les migrations au sein de la conférence épiscopale italienne. Pour l’archevêque de Ferrare-Comacchio (Nord), « la première considération serait de savoir si ce sont les ONG qui posent un problème de sécurité à l’Italie ou bien si ce sont précisément elles dont les bateaux sauvent des vies ».

    Outre les nouvelles normes, le gouvernement italien a également prévu tout un arsenal de #sanctions en cas de non-respect de la part des navires humanitaires. Des amendes allant de 10 000 à 50 000 euros sont prévues à l’encontre du commandant de bord si les nouvelles règles ne sont pas appliquées. En cas de récidive, les autorités s’arrogent le droit de séquestrer les navires. Un recours est possible mais, autre nouveauté, celui-ci devra être déposé devant le préfet dont les pouvoirs sont élargis. « Il est clair que la menace de sanctions financières est préoccupante », souligne Marco Pisoni, porte-parole de SOS Méditerranée, qui affrète le navire Ocean-Viking. « Les opérations de secours demandent des moyens, et ces amendes pourraient nous mettre en difficulté avec nos donateurs, en Italie mais également dans toute l’Europe. »

    Pour les ONG, le message du gouvernement est clair : non seulement entraver les opérations de secours, mais les éloigner de la Méditerranée centrale, là où les besoins sont les plus forts. Le 31 décembre, avant la parution du décret au journal officiel, l’Ocean-Viking a pu faire débarquer 113 personnes dans le port de Ravenne… à 900 milles nautiques du lieu de sauvetage. Pour Maco Pisoni, la nouvelle politique du gouvernement italien signe « la disparition programmée de la présence des navires dans les zones #SAR [régies par la convention internationale sur la recherche et le sauvetage maritimes] internationales et nationales ».

    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/05/en-italie-le-gouvernement-de-giorgia-meloni-s-en-prend-aux-ong-qui-sauvent-l
    #Giorgia_Meloni #sauvetage #Méditerranée #asile #migrations #réfugiés #mer_Méditerranée

    • Italy’s Anti-Rescue Decree Risks Increasing Deaths at Sea

      New Policy Obstructs Lifesaving Work of Rescue NGOs, Violates International Law
      The latest migration decree by Italy’s government represents a new low in its strategy of smearing and criminalizing nongovernmental organizations saving lives at sea. The government’s goal is to further obstruct the life-saving work of humanitarian groups, meaning that as few people as possible will be rescued in the central Mediterranean.

      The decree prohibits vessels of search and rescue organizations from carrying out multiple rescues on the same voyage, ordering that after one rescue their ships immediately go to the port allocated by Italy and reach it “without delay,” effectively requiring them to ignore any other distress cases at sea.

      The rule, which does not apply to other kinds of vessels, breaches the duty on all captains to give immediate assistance to people in distress under multiple international law provisions, including the UN Convention on the Law of the Sea, the International Convention for the Safety of Life at Sea, the Palermo Protocol against the Smuggling of Migrants, and EU law.

      The negative impact of the new rule is compounded by the government’s recent practice of assigning rescue boats very distant ports of disembarkation in northern and central Italy, requiring up to four days of navigation, in breach of the obligation to make available the nearest port of safety. Ordering rescue ships to sail to distant ports prevents them from saving lives in the central Mediterranean for longer periods of time, forces them to incur significant additional costs in fuel, food, and other expenses, and can increase the suffering of survivors on board.

      The decree also imposes on nongovernmental rescue ships the duty to collect data from survivors onboard, including their intent to claim asylum, and share that information with authorities, in breach of EU laws, including the asylum procedures directive .

      As 20 search and rescue organizations pointed out in a joint statement on January 5, the decree risks adding to the numbers of people already dying in the Mediterranean Sea or returned to horrific abuse in Libya.

      The European Commission should call for the immediate withdrawal of this decree and an end to Italy’s practice of allocating distant ports and take legal enforcement action against rules that blatantly disregard EU legal obligations towards migrants and asylum seekers. Above all, it’s time for a state-led European search and rescue mission to prevent further avoidable deaths at sea.

      https://www.hrw.org/news/2023/01/09/italys-anti-rescue-decree-risks-increasing-deaths-sea

    • Migrants : en Italie, la « guerre » du gouvernement contre les ONG

      Les nouvelles règles font exploser les coûts des sauvetages en mer. Reportage à Ancône, où le « Geo-Barents », le bateau de secours en mer de Médecins sans frontières (MSF), a été aiguillé.

      L’homme est masqué, coiffé d’un gros bonnet gris et enveloppé d’une épaisse couverture rouge qui masque sa silhouette. Il vient de sortir du ventre du Geo-Barents, le bateau de secours en mer de Médecins sans frontières (MSF). Descendu de la passerelle, il pose un pied mal assuré sur le quai 22 du port de commerce d’Ancône. Quatre autres hommes le suivent. Masqués aussi, coiffés de gros bonnets gris, enveloppés d’épaisses couvertures rouges ou blanches. Boitant presque sur la terre ferme après des jours de mauvaise mer, les corps aux visages invisibles, affaiblis, de ces rescapés anonymes attirent tous les regards, dans le matin mouillé de ce jeudi 12 janvier.

      Au bout du quai, on les attend. Le préfet de la province et le chef de la police ont fait le déplacement. Ces jours-ci, la frontière de l’Italie, qui est aussi celle de l’Europe, passe aux yeux de tous par leur ville. Les agents de la police aux frontières sont là, comme les hommes de la Guardia di Finanza, les pompiers, les fonctionnaires de la police scientifique et des membres du groupe cynophile des chasseurs alpins. Sur le quai 22 du port de commerce d’Ancône, il y a l’Etat, donc. Mais pas seulement. Des volontaires de la Croix-Rouge et de Caritas, sous-traitants des services publics italiens, sont déployés près d’une tente blanche. Et enfin, tenus à une distance de quelques dizaines de mètres, des journalistes sont parqués dans un enclos formé par des barrières. Une dizaine d’équipes de télévision filment la scène en direct.

      Le navire est arrivé à quai vers 7 h 30, quand, de l’autre côté du port, la sirène des chantiers navals appelait à leurs postes de travail les centaines d’ouvriers immigrés employés par des sous-traitants de la Fincantieri, qui y construisent deux paquebots de croisière de haut luxe dont les masses blanches et brillantes dominent la baie. Près de deux heures plus tard, les cinq anonymes descendus du bateau ont disparu vers le barnum blanc des autorités. A bord du navire, soixante-huit autres attendent de les rejoindre, majoritairement originaires du Soudan et du Nigeria.

      En touchant terre, ce petit groupe d’hommes, bien inférieur en nombre aux effectifs déployés, sur le quai 22 du port de commerce d’Ancône, est en train de traverser une ligne de front invisible. Car ils sont les derniers en date à faire les frais de la guerre judiciaire et politique que l’Etat italien mène depuis 2016 aux ONG de sauvetage opérant en Méditerranée centrale et portant secours aux migrants qui s’élancent des côtes libyennes en direction de l’Europe à bord d’embarcations de fortune. Et s’ils attirent malgré eux tant d’attention, cinq jours après avoir été secourus au large de Tripoli, c’est que, sous l’impulsion du gouvernement dominé par l’extrême droite de Giorgia Meloni, cette vieille histoire vient d’entrer dans une phase nouvelle.

      Une cible claire et identifiée

      Le voyage de 1 200 kilomètres effectué par le Geo-Barents de MSF, depuis le point perdu dans les flots où les migrants en détresse sont montés à bord, et les quatre journées de navigation supplémentaire qu’il a dû affronter, est en effet le résultat d’une politique. Parallèlement à un nouveau décret limitant l’action des ONG, sous peine de sanctions, à des sauvetages uniques, le gouvernement italien assigne désormais aux navires opérant dans la zone des destinations situées loin au nord des ports méridionaux où ils accostent habituellement. Livourne et Ravenne ont organisé des débarquements en décembre 2022, avant qu’Ancône accueille mardi l’ Ocean-Viking de l’ONG SOS Méditerranée avec trente-sept naufragés à son bord, puis le Geo-Barents.

      L’objectif est de répartir l’effort sur tout le territoire, selon le ministre de l’intérieur Matteo Piantedosi, affilié à la Ligue (extrême droite) et proche du vice-président du conseil Matteo Salvini, qui s’était illustré lorsqu’il occupait le même poste entre 2018 et 2019 par la fermeture des ports italiens aux ONG. « Le gouvernement ne veut pas laisser s’installer des mécanismes de routine dans les trajets de migration » , avait précisé pour sa part, à Ancône, la veille de l’arrivée de l’ Ocean-Viking, le président de l’autorité portuaire, Vincenzo Garofalo. Selon les ONG, cependant, l’objectif réel du gouvernement est autre. En complétant les dispositions du décret par ces éloignements vers le nord des côtes italiennes, il entend rogner leur présence en Méditerranée centrale et, surtout, peser sur leurs finances.

      « Nous avons estimé grossièrement que la volonté du gouvernement de nous faire venir jusqu’à Ancône avait provoqué une augmentation de 100 % de nos dépenses en carburant » , indique ainsi Juan Matias Gil, chef des opérations de secours en mer de MSF, présent sur le port d’Ancône au moment de l’arrivée de l’ Ocean-Viking. Pour l’ONG internationale, une marge d’adaptation existe, et de tels coûts peuvent être absorbés. Ce n’est pas le cas pour des organisations comme SOS Méditerranée, consacrée uniquement au sauvetage en mer. « La guerre que nous mène le gouvernement italien entre dans un tout nouveau chapitre dont il espère que le dénouement passera par notre disparition de la Méditerranée centrale » , indique M. Giltandis que les naufragés sortent du bateau par groupes de cinq avant de disparaître sous la tente médicale.

      « On s’attaque à nous, les ONG, car nous sommes la pointe visible d’un phénomène face auquel le gouvernement ne peut en réalité pas faire grand-chose » , ajoute M. Gil. Comme si la présence des ONG offrait aux pouvoirs publics une cible claire et bien identifiée sur la question migratoire et que la contrainte de ces débarquements dans des ports éloignés de la zone de secours devait fournir l’image d’un flux contrôlé. Certes, l’immigration n’est pas la préoccupation première d’une opinion italienne plus inquiète de l’inflation et des conséquences économiques de la guerre contre l’Ukraine. Elle reste un sujet sur lequel un Etat européen peut mettre en scène son action, même si c’est pour quelques heures, au bout du quai d’un port de commerce mineur.

      Galaxie d’associations

      Après avoir débarqué et traversé les premières formalités administratives de leur parcours en Italie, les 73 naufragés descendus du Geo-Barents, escortés par des policiers, sont montés dans des bus de la marine militaire italienne pour être emmenés plus tard quelque part en Lombardie. Ceux qui étaient arrivés trente-six heures plus tôt à bord de l’ Ocean-Viking ont été orientés vers divers centres d’accueil de la région des Marches, gérés par une galaxie de coopératives issues du monde catholique ou de la gauche associative.

      Les rescapés arrivés sur les deux navires des ONG à Ancône entre mardi et jeudi sont au nombre de 110. Selon le ministère de l’intérieur, le nombre total de migrants arrivés par la mer en Italie, incluant les débarquements autonomes et ceux qui ont été organisés par les gardes-côtes italiens dans les eaux territoriales depuis le début de l’année, s’élevait à 3 819 au 13 janvier. D’eux, pourtant, on ne verra pas même les silhouettes, au loin sur une passerelle.

      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/01/15/migrants-en-italie-la-guerre-du-gouvernement-contre-les-ong_6157915_3210.htm