Réforme des retraites : ce bien triste avenir économique que nous promet le gouvernement

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  • Réforme des retraites : ce bien triste avenir économique que nous promet le gouvernement
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    De manière à peine voilée, il assume que l’objectif principal de sa réforme est de faire des économies. Et pas qu’un peu : la première ministre s’attend à 10,3 milliards de gains financiers en 2027.

    Rarement aura-t-on vu une baisse de dépense publique aussi rude du fait d’une seule réforme. Baisse de dépense qui, mécaniquement, reposera sur les travailleuses et travailleurs « les moins qualifiés » qui ont commencé à travailler tôt, expliquait l’économiste atterré Benjamin Coriat dans l’émission « C Politique », « car les gens qui sont entrés tard sur le marché du travail, c’est-à-dire les plus diplômés » partent déjà au-delà de 64 ans.

    Si le gouvernement s’aventure sur un tel terrain miné, c’est que ce projet de réforme des #retraites occupe une place centrale dans son plan de réduction du déficit public de 5 % en 2022 à 3 % du PIB en 2027, comme il s’y est engagé auprès de la Commission européenne. Cette réforme des retraites lui permettra concrètement de « financer » les baisses d’#impôts promises de 15 milliards d’euros sur le second quinquennat d’Emmanuel Macron, dont plus de la moitié est liée à la seule suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (#CVAE).

    L’exécutif ne disait pas autre chose dans l’exposé général des motifs du projet de loi de finances 2023. Dans la partie où est détaillée sa stratégie budgétaire pluriannuelle, il est écrit que « les administrations de sécurité sociale participeront à la maîtrise de l’évolution des dépenses, permise notamment par la réforme des retraites ».

    Et que « cette maîtrise de la dépense permettra, sans remettre en cause l’objectif de normalisation des comptes publics, de poursuivre la stratégie de baisses des prélèvements obligatoires engagée sous le mandat précédent [...] notamment avec la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur deux ans, portée par le projet de loi de finances pour 2023 ».

    Pour un exécutif à la recherche d’économies, s’attaquer aux retraites est en fait un moyen efficace de réduire vite et significativement la dépense publique. Elles constituent en effet l’un des postes budgétaires les plus importants : elles représentaient, en 2019, 14,6 % des dépenses publiques, selon Fipeco.

    Aussi, en France, les dépenses publiques dédiées aux retraites pèsent pour 3,4 points de PIB de plus en moyenne que dans les principales économies européennes, selon une étude datant de 2019 de France Stratégie. Le gouvernement estime donc qu’il y a là du gras à aller grignoter. Et peu importe si notre généreux système par répartition permet de maintenir un taux de pauvreté des retraité·es parmi les plus bas de l’Union européenne...

    Dans l’absolu, le gouvernement aurait pu faire un choix politique différent. Car il n’y a pas que dans son système de retraites que la France dépense plus que ses voisins européens. La même note de France Stratégie précise que la France se démarque aussi par un montant plus élevé que la moyenne (1,9 point de PIB) de dépenses publiques consacré aux « subventions et aides diverses à l’économie marchande ».

    Un constat corroboré par une étude économique plus récente de chercheurs lillois qui chiffrent à au moins 157 milliards d’euros par an les aides publiques à destination des entreprises. Une sacrée manne ! Mais pour le gouvernement, il n’est pas question de s’y attaquer en profondeur. Mieux vaut sabrer dans le modèle social et miser sur sa politique de l’offre.