Après le 49.3, Emmanuel Macron plus que jamais seul

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  • Après le 49.3, Emmanuel Macron plus que jamais seul
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    POLITISCOPE. La mise en oeuvre de l’article 49.3 met en jeu l’avenir de la Première ministre à Matignon comme le sort de la réforme des retraites. Plus que jamais contesté dans la rue, le report à 64 ans de l’âge de départ dépend de la motion de censure LIOT qui sera débattue lundi.

    Marc Endeweld
    18 Mars 2023, 7:45

    La semaine dernière, j’annonçais dans ma dernière chronique le scénario d’un « crash test politique » porté par Emmanuel Macron sur le vote de son projet de loi retraites. Et il faut bien le dire, jusqu’au bout, le président a été tenté par un coup de poker sur le vote de la loi. Jusqu’au bout, le locataire de l’Élysée a tenté d’user de tous les stratagèmes pour trouver une majorité à l’Assemblée Nationale. Convocation des députés, des ministres, des responsables de la majorité, alertes multiples dans les médias, dramatisation de l’événement, coups de pression personnels... Emmanuel Macron s’est retrouvé en première ligne jusqu’à la dernière minute.

    Macron a inventé la majorité minoritaire !
    Sauf que... ce chemin était bien plus risqué que les « éléments de langage » venus de Matignon ou de l’Élysée, et repris en masse par les commentateurs des chaînes d’info, ne pouvaient le présenter. « Macron a inventé la majorité minoritaire ! », s’esclaffe un opposant. De fait, à quelques heures du vote de la loi, l’exécutif s’est retrouvé face au mur de la réalité politique, en s’apercevant un peu tard qu’il lui manquait un sacré paquet de voix, surtout pour contrer la motion (surprise) de rejet préalable déposée par le groupe indépendant LIOT. Jeudi, cette motion avait ainsi de grandes chances de passer, ce qui aurait provoqué une plus grande humiliation encore du président Macron.

    « La Première ministre est parfaitement consciente qu’elle était minoritaire, rappelle à juste titre le député centriste Charles de Courson, fin connaisseur des arcanes parlementaires et ardent défenseur des libertés publiques. Je devais défendre, d’ailleurs, une motion de rejet qui aurait été adoptée. Tous les pointages le montraient. C’est pour ça qu’ils ont eu recours au 49.3. Ce qui est une pure folie, car le déni de démocratie continue. Et maintenant, c’est la rue. C’est ce que disaient depuis des semaines les syndicats au gouvernement qui ne voulait pas entendre. Il y a un rejet massif de ce texte et par des moyens d’artifices de procédures, on veut faire voter un texte qui est rejeté par la majorité des députés et l’immense majorité de nos concitoyens. »
    Ça va mieux en le disant, car une fois encore, la macronie, la claque passée, a continué à s’enfermer dans le déni de la situation politique, en rejetant un peu facilement la faute sur les députés LR, comme si ces derniers faisaient réellement partie intégrante d’une majorité, un doux rêve à cette heure, tant les incompréhensions ne cessent de monter entre les élus de droite et ceux fidèles au président de la République.

    Pour Emmanuel Macron, cette journée de jeudi fut donc un crash tout court. Imposant un 49.3 à sa Première ministre à la dernière minute après une énième réunion d’urgence. Une claque monumentale. Pire, le président Macron se retrouve être la risée des médias internationaux qui s’interrogent aujourd’hui quant à sa capacité à préserver la cohésion nationale. Les images des forces de l’ordre usant des charges, des gaz lacrymogènes et des coups de matraque pour disperser les foules rassemblées dès la fin d’après midi sur la place de la Concorde comme dans les grandes villes universitaires en région ne sont pas du meilleur effet à moins de 500 jours des Jeux Olympiques... Ni les images des nombreux feux de poubelles dans les rues de la capitale.

    Hier, vendredi, l’ensemble des ministres ont d’ailleurs annulé leurs déplacements. Sur le site internet de l’Élysée, l’agenda présidentiel s’est retrouvé indisponible « pour les jours suivants ». Un observateur en lien avec la macronie s’en amuse : « Il nous fait sa fuite à Baden Baden ! » De fait, dans les heures qui ont suivi l’annonce de ce 49.3, on pouvait ressentir une certaine panique dans les rangs macronistes. Si certains, comme le député Karl Oliven, n’hésitent pas à tout mettre sur le dos des Républicains, d’autres osent désormais à publiquement exprimer leurs doutes et leurs critiques : « On a peut-être manqué d’audace » en utilisant le 49.3, juge par exemple Eric Bothorel, le député Renaissance des Côtes-d’Armor, ajoutant que le gouvernement « devait » un vote « aux oppositions et aux opposants » sur le projet du gouvernement sur les retraites. D’autres, engagés à l’origine aux côtés d’Emmanuel Macron, et aujourd’hui en rupture, se font encore plus sévères. C’est le cas de Jean-Bernard Gaillot-Renucci, cofondateur en 2016 de « la droite avec Macron » : « le président peut être en colère contre Alexis Kohler qui a imposé Élisabeth Borne. Avec Catherine Vautrin [présidente LR de la communauté d’agglomération de Reims], on aurait eu un projet tout autant à droite mais elle aurait été beaucoup plus adroite pour le faire passer ». Cette faute originelle du second quinquennat est bien connue des lecteurs de La Tribune qui avaient pu en découvrir les coulisses à travers cette enquête.

    La motion LIOT maintient le suspense
    Mais ce n’est pas la seule faute d’Emmanuel Macron depuis le début de son second quinquennat. Résultat, mois après mois, un véritable malaise s’est emparé de la majorité à l’Assemblée. Certains, d’adorateurs sont passés à quasi frondeurs (en off pour l’instant). Au point que lundi, rien ne dit que la motion de censure transpartisane sera effectivement rejetée. « Selon les derniers comptages, il manque aujourd’hui 10 voix, cela fait peu. Certains députés LR ont annoncé qu’ils allaient la voter, mais d’autres chez Horizons ou même à Renaissance pourraient être tentés de la voter tellement ils en ont ras le bol d’être pris pour des idiots par ce président », décrypte un initié de l’art parlementaire.

    Manifestement, ce ne sont pas les seuls. En quelques heures, on a vu ainsi Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, « confier » aux journalistes qu’il avait tenté jusqu’au bout de convaincre Emmanuel Macron de ne pas utiliser le 49.3, quitte à perdre. De son côté, le jeune Gabriel Attal, qui ne cache plus ses ambitions, a clairement pris ses distances (et son envol ?). Interrogé vendredi matin sur les motions de censure, le ministre a répondu : « tout peut arriver ». On l’a connu plus combatif pour défendre le gouvernement. À cette heure, Emmanuel Macron apparaît, plus que jamais, seul.

    • Le skud de jeudi aura peut-être fini de fissurer la macronie. Bien joué Manu !

      Gilles Finchelstein dans https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-grand-face-a-face/le-grand-face-a-face-du-samedi-18-mars-2023-6970790 disait que Macron a probablement simplement calculé que les modalités de vote du 49-3 (majorité absolue nécessaire pour un rejet) étaient plus avantageuses pour sa réforme. La tête du gouv ou même sa macronie ont visiblement moins d’importance que son égo.

      Emmanuel Macron s’est retrouvé en première ligne jusqu’à la dernière minute.

      Macron à la manœuvre - des pantins - bien sûr, Palpatine ; mais en 1ere ligne, c’est Borne. Et elle va se faire sépuku comme une bonne samouraï, puisqu’elle a échoué à faire passer la réforme de l’empereur ; lui buvait des binches à Kinshasa, en cas d’éclaboussures. Et il ne perds jamais.

      La macronie est fissurée !!! (en off)
      Et prête à trahir.
      L’odeur du sang - lundi.

    • plus que jamais seul, peut-être ; seul avec un gouv à sa botte qui a tenu et une certe courte mais absolue nonobstant majorité à l’assemblée ; et en attendant, pour l’instant, il a gagné.

      les jours prochains devraient permettre d’évaluer la largeur de la lame du bulldozer qu’il va utiliser pour normaliser la situation.