Gayfriendly – ou Comment repenser l’acceptation de l’homosexualité à gauche

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    Cette réponse pourrait signer la fin de l’interrogation que semble annoncer ce livre : l’acceptation de l’homosexualité est-elle plus avancée à Paris ou à New York ? La banalisation qui règne dans la célèbre ville étasunienne, les droits qui ont été conquis, et plus encore l’ardente célébration d’une certaine gayfriendliness contrastent, non seulement avec le mouvement réactionnaire de la Manif pour tous de 2012-2013, mais aussi avec les hésitations plus grandes, le moindre enthousiasme et la moindre institutionnalisation dont la cause des gays et des lesbiennes fait l’objet de l’autre côté de l’Atlantique. À leur manière pourtant les Parisiens sont aussi ga-friendly et le sont sans doute de plus en plus, comme le montrent, par exemple, les chaussées des quelques rues du quartier gai du Marais où des arcs en ciel ont été peints par la mairie. Dans les deux villes en effet, on retrouve, au niveau des institutions comme chez de nombreux habitants, une condamnation de l’homophobie qui semble mettre fin à des décennies de stigmatisation, de haine, de traque.

    Plutôt qu’établir un palmarès, ce livre a donc un autre objectif : comprendre les voies particulières empruntées dans les deux pays pour arriver à ce progrès social, en dégageant deux manières, en somme, d’être tolérant. Mais je ne propose pas seulement une comparaison ; ma recherche vise à interroger l’ambiguïté profonde dudit progrès, dont on semble ne pouvoir se réjouir que pour, immédiatement, l’interroger. Dès les années 1990 en effet, alors que les revendications liées aux unions, à la famille ou encore à l’intégration dans l’armée commençaient à être entendues, certains auteurs ont attiré l’attention sur les effets pervers de ces victoires.

    C’est dans les termes de la « normalisation » ou encore de l’« homonormativité » (Duggan 2002) qu’un feu de critiques a ciblé l’évolution des modes de vie gais et la fin de la subversion qui les caractériserait. Finie la contestation radicale de la société, en conjonction avec les mouvements noirs, féministes et anticapitalistes. Invisibles, désormais, les lieux de rencontre dédiés à la sexualité récréative et aux sociabilités alternatives. Des associations mainstream soutenues, grâce à d’importantes opérations de fundraising, par des gays blancs aisés réclameraient désormais, via l’accès au mariage et à la famille, l’intégration sociale (Warner 2000), tandis que des opérations d’ampleur, qualifiées d’« homonationalisme » ou de pinkwashing, viendraient récupérer la cause LGBT à des fins commerciales ou impérialistes (Puar 2002).

    #lgbt #homosexualité #homophobie