Starship Troopers, par jean_no

#message195691

  • — Gosseyn, vous nous placez devant un dilemme. Nous sommes prêts à déclencher l’action sur une échelle inconnue depuis la Troisième Guerre mondiale. Nous avons reçu neuf mille transports, quarante millions d’hommes et d’immenses usines de munitions ; et tout ceci n’est qu’une fraction de la puissance militaire du plus grand empire qui ait jamais existé. Gosseyn, nous ne pouvons perdre... (Il s’interrompit, puis reprit :) Néanmoins, nous ne voulons pas courir de risques. Nous aimerions vous proposer à vous l’inconnu, de vous joindre aux chefs du système solaire. (Il haussa les épaules :) Mais vous comprenez bien que ce serait inutile d’entamer même ce genre de discussion si vous vous refusez à admettre la réalité de notre position. Nous sommes forcés de tuer, Gosseyn. Nous sommes forcés d’être sans merci. Tuer convainc les gens mieux que n’importe quoi d’autre.

    Un instant, Gosseyn pensa qu’on voulait tuer Amelia Prescott et il eut une faiblesse, puis il se rendit compte qu’il avait mal compris.

    -- Tuer ? dit-il. Tuer qui ?

    -- Environ vingt millions de Vénusiens, répondit X.

    Assis dans son fauteuil à roulettes, il avait l’air d’un cancrelat de cauchemar en plastique.

    -- Comme vous devez le savoir, continua-t-il, la seule différence entre la destruction de vingt systèmes nerveux humains et la destruction de vingt millions de Vénusiens est la résultante émotive produite chez les survivants. Une bonne propagande liquidera ça.

    Gosseyn avait l’impression d’être au fond d’un puits et de s’enfoncer, de s’enfoncer...

    -- Que deviendront les deux cent vingt millions restants ? s’entendit-il dire d’une voix creuse.

    -- La terreur ! dit X de sa voix de violoncelle. Terreur sans merci, contre tous ceux qui résistent. L’histoire montre qu’il n’a jamais été difficile de contrôler la masse d’une population décapitée de ses chefs. Or, la tête de Vénus est une tête fort collective, d’où la nécessité d’un nombre élevé d’exécutions.

    Il agita son bras plastique, impatient.

    -- Alors, Gosseyn, dit-il brièvement, décidez-vous. Nous vous laisserons accomplir une grande partie de la réorganisation, mais il faut nous laisser préparer le terrain. C’est d’accord ?

    La question troubla Gosseyn. Il ne s’était pas rendu compte qu’on lui tenait un discours destiné à le persuader. Au meilleur sens non-A du terme, c’était un parfait exemple de plan d’abstraction. Ces gens concevaient l’exécution en masse. Pas lui. La barrière était infranchissable, car chaque partie regardait comme illogique le point de vue de l’autre. Il sentit le durcissement de son refus courir dans ses nerfs, dans son corps, et il était parfaitement, définitivement fixé. Il dit d’une voix tranquille mais claire :

    -- Non, monsieur X. Pas d’accord. Et puissiez-vous tous flamber dans l’enfer chrétien des premiers âges pour avoir osé concevoir un tel meurtre.

    A.E. VAN VOGT, Le monde des À
    https://www.tousvoslivres.com/doc2015/TousVosLivres%20-%20VanVogt-Le%20monde%20des%20non%20A.pdf

  • Il y a un mois, on a le scandale d’un massacre sur le parking d’un hôpital palestinien, et illico Israël produit une fausse vidéo pour prouver que c’est pas eux (illico débunkée), et ensuite toute la communication médiatique se met en branle pour expliquer qu’en fait, c’est une roquette du Hamas.

    Maintenant on a toute la communication médiatique qui produit des faux en continu, non plus pour explique que ce n’est pas Israël qui bombarde les hôpitaux, mais pour expliquer qu’Israël est dans son bon droit en bombardant les hôpitaux.

    • Quelque chose qui me marque, à chaque fois, dans le surgissement de ces éléments de langage, ce n’est pas seulement leur incohérence (« non on ne cible pas les civils, mais faites gaffe, les Libanais, on va vous faire la même chose »), que le fait qu’ils surgissent partout dans les médias occidentaux en quelques heures seulement.

      Les gens qui s’« informent » en regardant la téloche, et les éditorialistes qui vivent dans leur entre-soi moisi et qui croivent qu’ils sachent des choses, peuvent s’illusionner qu’on a en France des analystes super-pointus, originaux, qui nous révèlent le vrai fond des choses… alors que n’importe qui ayant Internet et un minimum de compétence en anglais, se rend compte qu’à chaque fois, leur argumentaire super-original et pointu a surgi en même temps, « spontanément », aux États-Unis, en Angleterre, et que ce sont de simples talking points devenus des banalités en l’espace de quelques heures.

      Depuis 30 ans, ce spectacle sans cesse répété de cette nullité médiatique, alors que toute une partie de la population voit ça en temps réel sur les internets, est toujours sidérant. Ce commentariat nullissime qui reste dans cette attitude surplombante d’apporter la bonne parole aux derniers gens qui regardent encore la télévision me semble d’ailleurs de plus en plus âgé. La plupart sont de vieilles merdes qu’on traîne depuis le début des années 2000, et qui doivent encore galérer pour allumer un ordinateur.

    • J’expliquais ça en 2013, à propos de la polémique autour de Starship Trooper en 1997 :
      https://seenthis.net/messages/195653#message195691

      Du coup Starship Troopers, c’est le clivage entre les connectés (déjà tout de même vachement nombreux) qui sont prévenus, et le reste de la population, à commencer par les journalistes, qui continuent de balancer leurs jugements à deux balles et à alimenter les polémiques, alors qu’une bonne partie de leurs lecteurs considèrent que la question est déjà réglée depuis longtemps. La question de l’uniforme SS des héros, quand on a le Web à l’époque, c’est plus vraiment une question morale originale ou compliquée.

      Le critique de cinéma qui, en 1997, n’a jamais entendu parler du second degré de Verhoeven, c’est vraiment quelqu’un qui se faisait un devoir de ne pas savoir utiliser un modem et de ne pas faire son boulot. Et comme on peut le lire dans certains extraits de Jean-No : ce sont ceux-là qui balançaient les jugements définitifs non seulement sur le film, mais sur ses spectateurs. Les mêmes reprenaient en cœur les velléités anti-internet de Val et Finkye.

      Dans mon souvenir, Starship Trooper, c’est une de ces (nombreuses) situations où, dès 1997, du simple fait d’avoir un accès internet, tu constates avec sidération le fossé entre les gens connectés et les professionnels de la profession qui écrivent dans le journal et passent à la télé. (Pareil, évidemment, pour les politiciens et les experts médiatiques de tout crin – notamment les économistes.)

    • Mes voisins du dessus avec qui je dois vivre alternent entre BFM et Cnews, ils suivent une fiction à épisodes en vidant le congélateur qu’ils remplissent toutes les deux semaines, ils sont à la retraite et s’ennuient profondément alors ils ne bougent plus de devant leur télé. Ils ne comprennent rien ou font semblant, mais pas question de critiquer ou de voir aucune manipulation (puisque tout le monde ment) ils me disent qu’ils tiennent à leur position d’ignorants et ce qui semble leur importer c’est d’être divertis. Quand ils éteignent le poste ils jouent à candy crush toute la nuit.

      #beaufs

    • Pour les musulmans français qui regardent la télé, c’est très violent.
      Ils se sentent stigmatisés.

      Et ils s’inquiète pour leurs enfants aussi.

      A l’école, pour un geste ou une parole anodins mais mal interprétés, mon enfant pourra avoir des problèmes.

    • Shifa à Gaza [le 9 novembre] : les images pointent la responsabilité des Israéliens
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/15/tir-d-obus-a-l-hopital-al-shifa-a-gaza-les-images-pointent-la-responsabilite

      Dans la soirée du 9 novembre, un projectile plonge au dessus du plus grand hôpital de Gaza. Quelques instants plus tard, deux hommes sont blessés, dont un très gravement. Un reste d’obus est retrouvé à leurs pieds. « Le Monde » est en mesure d’affirmer qu’il s’agit d’un obus éclairant israélien.

      https://archive.ph/MIdcS