Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre rendent publics des faits graves commis par l’abbé Pierre.

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    Le Mouvement Emmaüs rend publics des faits qui peuvent s’apparenter à des agressions sexuelles ou du harcèlement sexuel, commis par l’abbé Pierre, entre la fin des années 1970 et 2005. Ces faits ont concerné des salariées, des volontaires et bénévoles de certaines de nos organisations membres, ou des jeunes femmes dans l’entourage personnel de l’abbé Pierre. Le Mouvement a mandaté un cabinet expert de la prévention des violences, le groupe Egaé, pour mener un travail d’écoute et d’analyse. Ce travail a permis de recueillir les témoignages de sept femmes. L’une d’entre elles était mineure au moment des premiers faits. D’après les informations recueillies, plusieurs autres femmes ont subi des faits comparables, mais n’ont pas pu être entendues. Un dispositif de recueil de témoignages et d’accompagnement, strictement confidentiel, s’adressant aux personnes ayant été victime ou témoin de comportements inacceptables de la part de l’abbé Pierre, a été mis en place.

    • Sur l’abbé Pierre, se souvenir qu’il était mandaté par le Vatican en France lors du début de la purge des prêtres ouvriers durant les années 50. Le choix ’carte des pauvres’ façon activiste venant faire oublier l’opulence de l’église et sa bureaucratie sacerdotale.

      C’est peu après qu’il a été connu en tant qu’agresseur sexuel par l’église

      Révélations sur l’abbé Pierre : « La compulsion sexuelle du clerc catholique paraît indubitable »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/07/20/revelations-sur-l-abbe-pierre-la-compulsion-sexuelle-du-clerc-catholique-par

      Les archives du Centre national des archives de l’#Eglise de France contiennent des documents des années 1950-1960 sur les compulsions sexuelles de l’abbé Pierre, déjà présentées par Axelle Brodiez-Dolino, dans son livre _Emmaüs et l’abbé Pierre (Presses de Sciences Po, 2009). L’angle des violences invite à lire de manière différente ces données et certains épisodes de la vie de l’abbé. A partir de 1954-1955, des informations reviennent aux oreilles épiscopales sur son comportement.

      [...]

      Les évêques des années 1950 n’ont pris aucune sanction canonique, et il y aurait lieu de rechercher si les informations furent transmises ou connues au-delà de 1961. Les témoignages de la Ciase ont conduit l’un d’entre nous à interroger le diocèse de Grenoble, dont dépendait l’abbé Pierre. Il a reconnu disposer de données, sans les avoir communiquées. Les dirigeants d’Emmaüs se sont contentés de mettre en garde de manière officieuse et elliptique des femmes travaillant pour Emmaüs.

      https://justpaste.it/fetfz

      #Ciase

    • Abbé Pierre : réagissant à une tribune parue dans « Le Monde », les évêques se défendent d’avoir « voulu étouffer » les accusations d’agressions sexuelles
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/07/26/abbe-pierre-reagissant-a-une-tribune-parue-dans-le-monde-les-eveques-se-defe

      « Je ne peux laisser sans réponse de telles assertions, a fortiori dans un quotidien de référence », a déclaré le président de la Conférence des évêques de France, Eric de Moulins-Beaufort.

      La Conférence des évêques de France s’est défendue, vendredi 26 juillet, « d’avoir voulu étouffer » l’affaire d’agressions sexuelles dont est accusé l’abbé Pierre, estimant qu’une tribune récemment publiée dans Le Monde avait porté atteinte à « l’honneur de milliers de prêtres ».

    • Révélations sur l’abbé Pierre : « Certains savaient, mais n’ont rien dit, car l’icône rendait davantage service sur son piédestal », Axelle Brodiez-Dolino, historienne.
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/08/01/revelations-sur-l-abbe-pierre-certains-savaient-mais-n-ont-rien-dit-car-l-ic

      Après l’« affaire #Roger_Garaudy » [écrivain et politique français mort en 2012, à l’âge de 99 ans, qui avait conservé l’amitié et le soutien de l’abbé Pierre, malgré sa condamnation pour négationnisme], qui était de nature politique, l’icône abbé Pierre vient de chuter une deuxième fois, sur des comportements privés qui s’étalent, selon le rapport du cabinet Egaé, entre la fin des années 1970 et 2005.

      Sa mort, en 2007, désormais lointaine, le scandale des violences sexuelles commises par des #prêtres sur des mineurs dans l’Eglise catholique, ainsi que le vaste mouvement #metoo, ont libéré la parole des victimes.
      Comprendre implique de distinguer les deux grandes phases médiatiques de la vie de l’abbé Pierre : celles qui ont suivi l’appel de 1954 et les années 1980-1990.

      Après l’immense succès de l’appel, l’ancien résistant et ancien député (1945-1951) devient une icône, prophète des temps modernes, renouvelant la figure du prêtre engagé au moment même de la condamnation par Rome des #prêtres_ouvriers. « Des mains innombrables le touchent comme s’il s’agissait d’un totem aux pouvoirs magiques (…). D’autres vierges folles tombent en extase devant lui (…). Il éprouve de plus en plus de peine à résister (…) aux tentations », rapportaient déjà, en 1969, Gérard Marin et Roland Bonnet dans La Grande Aventure d’Emmaüs (Grasset). Dès février 1954, « des femmes harcèlent le père » et son entourage, sa secrétaire Lucie Coutaz en tête, « s’épuise à le faire suivre, à encadrer ses déplacements pour le protéger contre lui-même », écrivait encore Pierre Lunel dans L’Abbé Pierre. L’insurgé de Dieu (Stock, 1989).

      Quelles « tentations » ? Ceux qui savaient n’ont jamais voulu détailler. Ils exprimaient cependant, quand on les interrogeait [l’autrice de cette tribune a notamment réalisé une série d’entretiens en 2005 et en 2006, en partie publiés dans un livre, Emmaüs et l’abbé Pierre, aux Presses de Sciences Po en 2009], une souffrance (plusieurs se sont effondrés en larmes), des mots très durs contre l’abbé et une lourde déception. Il est possible qu’il se soit plutôt agi d’attouchements ou de relations sexuelles consentis – face à une icône, la frontière du consentement est néanmoins difficile à établir.

      Personne n’a alors parlé, par peur du scandale. A #Emmaüs, une étroite direction voulait sauver l’édifice encore fragile. L’#Eglise, dont ce prêtre redorait l’image et la popularité, a, de son côté, opté, fin 1957, et avec le concours de la direction d’Emmaüs, comme le montrent des courriers conservés dans les archives [de l’association Emmaüs, devenue Emmaüs Solidarité], pour l’exfiltration de l’abbé en Suisse, dans une clinique psychiatrique pour personnalités. Son internement durera plus de six mois ; à partir de son retour, il ne dirigera plus jamais aucune structure Emmaüs. Le #ministère_de_l’intérieur et certains #journalistes savaient aussi, comme l’a montré Pierre Lunel, mais l’icône rendait davantage service sur son piédestal.

      Pulsions répréhensibles

      Son attrait pour les femmes semble ensuite n’avoir jamais cessé. Il redevient cependant facilité par son regain de célébrité à partir des années 1980, sur fond de médiatisation des « nouveaux pauvres », du chômage de masse et d’une nouvelle crise du logement. Le héros, en 1989, du film Hiver 54, l’abbé Pierre sera quinze fois élu personnalité préférée des Français.

      Du début des années 1980 à la fin des années 1990, les personnes chargées à Emmaüs de l’entourer rapportent qu’elles devront continûment lutter pour écarter des femmes qui lui font des avances. A partir de 1982, il déclare en outre la maladie de Parkinson, dont le traitement est connu pour activer fortement la libido. Les témoignages aujourd’hui connus montrent qu’avant comme durant ce traitement, il avait des pulsions répréhensibles qu’il peinait à contrôler. Mais qui savait alors, à part de petits cercles à Emmaüs qui tentaient de s’en protéger, et de l’en protéger comme ils pouvaient, en particulier en ne le laissant pas seul ? Je ne sais pas.

      Au soir de sa vie, il a finalement confié à l’essayiste Frédéric Lenoir avoir « cédé de manière passagère » à « la force du désir » et avoir « connu l’expérience du désir sexuel et de sa très rare satisfaction » (Mon Dieu… Pourquoi ?, Plon, 2005). Après ces révélations, la hiérarchie ecclésiastique – par le biais, selon des témoins d’alors, de Mgr Lustiger, archevêque de Paris, et de Mgr Simon, futur vice-président de la Conférence des évêques de France – viendra lui intimer l’ordre de ne pas en dire davantage.

      Remettre chaque acte dans son contexte

      L’abbé Pierre a toujours clamé qu’il n’était pas un saint. Il s’est livré à des actes consentis mais aussi non consentis. Son entourage à Emmaüs savait. L’Eglise a, quant à elle, tenté d’étouffer d’abord ses actes, puis ses paroles. Et que savaient les présidents de la République, qui l’ont décoré de la #Légion_d’honneur jusqu’au plus haut grade, celui de grand-croix ?
      Il faudra remettre chaque acte dans son contexte : avant ou après sa maladie de Parkinson mais également selon la sensibilisation aux violences sexuelles et à la nécessité du consentement – les temps ont à cet égard, en soixante-dix ans, radicalement changé.

      Il n’empêche [science pipo oblige] qu’Emmaüs reste une extraordinaire organisation, remarquablement inventive, pionnière dans l’articulation du social et de l’écologique, qui se bat sur tous les fronts. L’abbé Pierre a été un vrai résistant, un vrai pacifiste, un inlassable héraut de la guerre contre la pauvreté, dont il a considérablement fait avancer la cause. Il continuera d’appartenir à l’histoire. Il en reste encore des zones d’ombre ; et les vivants peuvent en parler en toute liberté.

      Axelle Brodiez-Dolino, historienne, directrice de recherche au CNRS, est l’autrice d’« Emmaüs et l’abbé Pierre » (Presses de Sciences Po, 2009).
      Axelle Brodiez-Dolino (historienne)
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