Opération « Sauver Sarko » : des images inédites montrent l’ampleur de la manipulation de BFMTV | Mediapart
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Les images parlent d’elles-mêmes. Du contenu de l’interview de Ziad Takieddine, on ne connaissait jusqu’à ce jour qu’un court extrait de 32 secondes, diffusé le 11 novembre 2020 en « exclusivité » sur les antennes de BFMTV. Sur ces images, filmées avec un téléphone portable et coupées à la va-vite, l’architecte des relations entre Nicolas Sarkozy et la dictature de Mouammar Kadhafi revenait sur ses déclarations précédentes pour dédouaner subitement l’ancien président de la République dans l’affaire des financements libyens. Ziad Takieddine apparaissait avachi sur un muret, un micro mal attaché au revers de sa chemise, le propos balbutiant, comme s’il lisait un prompteur, ou tentait de répéter un texte comme on récite un poème à l’école.
Mais ce qui n’a pas été montré à l’antenne était pire encore. Les rushs de l’entretien – que Mediapart a obtenus et diffuse ci-dessous – révèlent que BFMTV a non seulement relayé sans aucune vérification les propos douteux de l’intermédiaire (dont il est aujourd’hui avéré qu’il avait reçu des promesses de contreparties financières pour se dédire), mais que la chaîne a aussi sciemment coupé d’autres passages de l’entretien qui ne collaient pas au narratif du clan Sarkozy.
Dans cette affaire, Nicolas Sarkozy est soupçonné d’avoir reçu des fonds du dictateur libyen Mouammar Kadhafi afin de financer sa campagne présidentielle victorieuse de 2007. Le procès de l’ancien président de la République devrait démarrer en janvier 2025.
L’intégralité des images montre que Ziad Takieddine est très confus et se contredit. Il argue du fait que le juge d’instruction Serge Tournaire, qui fut l’un des magistrats chargés de l’enquête libyenne, lui aurait « fait dire des propos contraires à ce qu[’il a] toujours dit » – alors même que l’intermédiaire a réitéré ses accusations à plusieurs reprises sur procès-verbal ou même en interview. Ce point a d’ailleurs été immédiatement démenti par la propre avocate de Ziad Takieddine ainsi que par le Parquet national financier (PNF), la chaîne n’ayant manifestement pas pris la peine de vérifier ce témoignage auprès de sources extérieures.
La direction de BFMTV, qui travaillait main dans la main avec la chargée de presse de l’ex-président Véronique Waché et la communicante Michèle Marchand, a également coupé de son montage tous les passages dans lesquels Ziad Takieddine soutient que les fonds libyens n’ont pas été versés à Nicolas Sarkozy... mais à son bras droit, Claude Guéant.