• APPRENTISSAGE QUATRE LEVIERS POUR REPRENDRE LE CONTRÔLE Bruno Coquet
    https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2024/OFCEpbrief135.pdf

    Résumé

    Malgré une conjoncture ralentie et des aides publiques en légère diminution, les entrées en apprentissage sont restées très dynamiques en 2023. Avec 850 000 nouveaux contrats signés, le record de l’année précédente a été battu pour la quatrième fois consécutive. Fin 2023, 1,01 million d’apprentis étaient en cours de formation, 577 000 de plus que fin 2018, ce qui explique 38 % des créations d’emplois salariés marchands sur cette période. Cette hausse a bénéficié aux taux d’activité et d’emploi des jeunes de 15 à 24 ans (+3,7 et +4,3 points respectivement) entraînant la baisse de leur taux de chômage (de 20,9 % à 17,5 %). Mais la hausse de l’apprentissage reposant essentiellement sur une bascule du statut d’étudiant vers celui de salarié, le nombre de jeunes chômeurs a très peu diminué (-26 000). La réforme de 2018 a stimulé la demande et l’offre de travail en apprentissage, tout en solvabilisant une offre de formation élargie. Mais la chronique du développement de l’apprentissage coïncide surtout avec l’introduction de l’aide exceptionnelle à la fois très généreuse et non ciblée dans le cadre du plan de relance de 2020 : 458 000 emplois ont été créés dans son sillage, dont 252 000 n’auraient pas existé sans elle et 206 000 résultent indistinctement du cocktail incitatif combinant la réforme de 2018 et l’aide exceptionnelle. L’image de l’apprentissage a beaucoup bénéficié de cette promotion, notamment dans l’enseignement supérieur. Mais l’évolution du profil des apprentis va de pair avec une très faible efficience du point de vue de l’insertion en emploi, car le coût de cette politique est excessif : en 2023 la dépense nationale pour l’apprentissage aurait atteint 24,9 milliards d’euros, soit 26 000 € par apprenti, environ deux fois plus que ce qui est consacré à chaque étudiant du supérieur. Le resserrement des aides stabiliserait ce coût à 24,6 milliards d’euros en 2024, ce qui est incompatible avec la situation budgétaire actuelle étant donné l’inefficacité de cette dépense. Mais il est délicat de renoncer à ces fortes subventions car l’objectif présidentiel d’atteindre 1 million de nouveaux apprentis par an a conduit à promettre la stabilité des aides jusqu’en 2027, et aussi parce que l’emploi des jeunes et les organismes de formation en souffriraient. Nous proposons ici 4 leviers pour reprendre le contrôle du dispositif, avec à la clé une économie pouvant avoisiner 10 milliards d’euros en année pleine : (1) revenir au ciblage de l’aide unique de 2018, (2) redonner à la taxe d’apprentissage son rôle de financement des coûts pédagogiques, (3) revoir certains niveaux de prise en charge des contrats en les inscrivant dans une stratégie de politique publique et (4) examiner les droits sociaux attachés aux contrats d’apprentissage et la manière dont ils sont financés. Nous y ajoutons quatre pistes complémentaires susceptibles de renforcer l’efficience du dispositif.

    Un coût budgétaire très élevé bien que sous-estimé
    Les dépenses publiques soutenant l’apprentissage ont été très élevées en 2023 et le resteront en 2024. Le dernier bilan officiel évalue à 13,9 milliards d’euros la « dépense nationale » pour l’apprentissage en 202222. Ce chiffre porte cependant sur un périmètre très incomplet. La Cour des Comptes a chiffré le coût des dispositifs d’alternance à 16,8 milliards d’euros23. France Compétences ne publie plus ses dépenses annuelles mais ses « engagements » qui courent sur toute la durée prévue des contrats initiés au cours d’une année et dont la durée moyenne est actuellement de 17,7 mois24, ce qui rend son estimation difficilement comparable avec les deux sources précédentes. La revue des dépenses conduite par l’IGAS et l’IGF (2024) actualise certains chiffrages et apporte de nombreuses informations nouvelles, mais sans en consolider le coût. Compte tenu de ces informations, nous évaluons pour notre part la dépense de 2023 à 24,9 milliards d’euros en incluant les exonérations sociales et fiscales dont bénéficient ces contrats d’apprentissage25 (graphique 8 et tableau 1) et les dépenses d’assurance chômage dont la croissance suit avec un léger décalage celle du stock d’apprentis26. Ce chiffrage reste prudent, notamment parce que, comme tous les chiffrages officiels, il ne prend pas en compte certaines dépenses telles que le coût des trimestres de retraites alloués aux apprentis (12 milliards d’euros par an27), le dispositif prépa apprentissage, etc. À l’opposé, les bourses économisées du fait que certains apprentis n’y sont pas éligibles alors qu’ils l’auraient été en tant qu’étudiants nonapprentis pourraient légèrement abaisser notre estimation28. En 2023, un apprenti générait en moyenne plus de 26 000 € par an de dépenses publiques, soit environ deux fois le coût moyen d’un étudiant du supérieur suivant une voie classique29. En incluant les subventions différées de la protection sociale, ce coût pourrait aller jusqu’à doubler.

    L’efficience du dispositif reste très faible
    L’apprentissage est clairement présenté comme une politique de l’emploi et non une politique d’éducation ou d’enseignement supérieur32. C’est donc à cette aune qu’il faut l’évaluer : or, du point de vue de l’insertion en emploi des apprentis, l’efficience du dispositif est très faible. En effet, la hausse des dépenses a essentiellement bénéficié à des jeunes préparant un diplôme de l’enseignement supérieur (deux tiers des entrants en 2023, contre seulement un tiers en 2017) qui n’ont pas besoin de ce type de coups de pouce financiers étant donné que c’est le diplôme qu’ils obtiennent qui est déterminant pour leur employabilité, et non pas qu’il ait été acquis par la voie de l’apprentissage ou à l’issue d’un cursus classique.

    #apprentissage #déficit #politique_antiredistributive

  • #Apprentissage : l’#arnaque à 25 milliards d’euros d’#Emmanuel_Macron

    Une étude de l’OFCE (https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2024/OFCEpbrief135.pdf) montre que l’#alternance vantée par le président de la République a surtout permis d’arroser, sans contrepartie, les entreprises d’#argent_public, avec un effet limité sur l’accès à l’emploi.

    L’apprentissage est le totem d’Emmanuel Macron, sa baguette magique pour l’#emploi de #jeunes. Problème, cela coûte un pognon de dingue et ce n’est pas très efficace pour lutter contre le #chômage. C’est ce qui ressort d’une étude publiée le 12 septembre par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

    Son auteur, l’économiste #Bruno_Coquet, dénonce, dans un entretien à la Tribune, un « #effet_d’aubaine gigantesque » pour les #entreprises qui embauchent via ce dispositif. Il rappelle que « jamais en France un emploi n’a été aussi soutenu, que ce soit dans le secteur public ou privé ».

    (#paywall)

    https://www.humanite.fr/societe/aides-publiques/apprentissage-larnaque-a-25-milliards-deuros-demmanuel-macron
    #macronisme #Macron #coût

  • Bruno Coquet / X
    https://x.com/b_coquet/status/1834209530403561601

    #Apprentissage après « le bilan des années folles », la saison 2 « 4 leviers pour reprendre le contrôle » est là. Préserver ce dispositif du rabot #budget => le maîtriser Gain=jusqu’à 10Md€/an
    #WorldSkills2024 #WSC2024 ofceparis @CRAPS @AlterEco

    https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2024/OFCEpbrief135.pdf