#BALLAST • Les #mémoires #manouches d’Anna Lagrené Ferret
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Il y a trois ans, nous publiions le témoignage qu’#Anna_Lagréné_Ferret avait livré à l’ethnologue #Lise_Foisneau dans le cadre d’une série d’articles sur les luttes voyageuses. Celle qui est née en 1942 alors qu’un #génocide touchait les siens, racontait sa vie quotidienne sur une « #aire_d’accueil » après être passée, des décennies durant, d’un « terrain désigné » à un autre. Elle signe ces jours-ci son premier livre, #Mémoires_manouches — Les miettes oubliées de la #Seconde_Guerre_mondiale, qui paraît aux éditions Pétra. Dans cet extrait, elle revient sur ses jeunes années et se rappelle les marques laissées par la #guerre et les camps de concentration dans son histoire familiale.
Les parents ne parlaient pas de la guerre. Mes parents jouaient de la #musique, ils nous faisaient chanter, c’était tout, pour oublier. Des fois, ils parlaient entre eux des souffrances qu’ils avaient eues, et j’entendais. Dans les caravanes, on ne pouvait pas être séparés des parents. On était couchés, mais on avait toujours ce contact. Alors, quand l’hiver les parents parlaient doucement entre eux, on écoutait et j’ai été traumatisée par tout ce que j’ai entendu. C’est terrible. Ils parlent de ma tante Mirela. Elle était dans la ligne pour aller au four, pour être gazée, et il y avait des musiciens. Il y avait l’orchestre pour les amener. Et elle, elle était dans le rang, mais il y a eu un débordement et elle n’est pas rentrée dans la #chambre_à_gaz. Ses parents et sa famille étaient dedans, eux. Elle était toute jeune. Elle a eu un garçon qui a réussi à s’échapper. J’ai entendu cette histoire enfant. Cette fille-là était jeune dans les camps et elle racontait son histoire. On n’écoutait pas tout parce que mes parents ne voulaient pas, mais j’ai écouté, des petites fuites. J’étais curieuse : je comprenais qu’il y avait quelque chose d’important que nos parents ne voulaient pas nous faire savoir.