• Patrick Viveret : « La paix et la démocratie sont menacées » | Mediapart
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    Il y a un formidable travail de déconstruction et d’éducation populaire à faire pour savoir qui sont ces fameux marchés financiers à rassurer. Le seul fait de se poser la question du « qui ? » permet de saisir à la fois le rôle considérable des automates et la psychose maniaco-dépressive dans laquelle les financiers sont engagés.

    Le Wall Street Journal, qui n’est pas l’incarnation d’une pensée alternative, écrivait, au moment du krach de 1987, mais cela reste valable aujourd’hui, que les marchés ne connaissent que deux sentiments : l’euphorie ou la panique. C’est exactement ce qui caractérise la psychose maniaco-dépressive. C’est-à-dire un état où les personnes perdent le contact avec le réel, notamment économique, et peuvent dilapider l’argent. C’est une des raisons pour lesquelles on préconise tutelle et curatelle. Il ne s’agit donc pas seulement de réguler les marchés financiers, mais aussi de les soigner. Les marchés financiers constituent aujourd’hui un problème de santé internationale.

    Un bon exemple, donné par Bernard Lietaer, un des anciens responsables de la Banque centrale de Belgique, est celui de la construction des cathédrales. Cela n’a été possible que si la valeur du bien que l’on construit à long terme paraît plus intéressante que la valeur de la monnaie qu’on utilise à court terme. Chartres bénéficie encore de cet investissement à long terme de la collectivité, parce qu’on a considéré que cet investissement de long terme avait plus de valeur que celle de son équivalent monétaire immédiat, parce que la détention de monnaie liquide n’était pas aussi importante et intéressante à court terme qu’elle ne l’est aujourd’hui. Si, à l’époque, la ville de Chartres avait pu avoir des placements financiers qui lui rapportaient 15% en un an, elle aurait joué la carte des placements financiers plutôt que des cathédrales.

    Il faut reprendre le chemin européen, sur les bases initiales des trente années d’après guerre, en y ajoutant l’enjeu écologique qui était alors le grand impensé.