L’Arabie Saoudite face à la menace intérieure de l’Etat islamique

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  • Opération anti-terroriste visant l’EI : l’Arabie Saoudite annonce l’arrestation de 431 suspects, 37 morts, 120 blessés - Libé

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    Dans un communiqué, le ministère de l’Intérieur a ainsi annoncé le démantèlement d’une organisation liée au groupe radical sunnite et l’arrestation de 431 de ses membres présumés, en majorité des Saoudiens. Il a aussi affirmé que de nouvelles attaques visant des mosquées et une mission diplomatique –qui n’a pas été nommée– avaient été mises en échec. Pas moins de 37 personnes ont été tuées durant ces arrestations, dont des membres des services de sécurité et des civils, et 120 autres blessées. Cette opération d’envergure survient après un attentat perpétré à Riyad, revendiqué par l’organisation d’Abou Bakr al-Baghdadi.

    En mai, deux attentats suicides avaient été perpétrés deux vendredis successifs contre des mosquées de la minorité chiite, à Qatif et Dammam dans la Province-Orientale faisant 25 morts. L’EI s’est également attribué un attentat sans précédent en juin contre une mosquée chiite au Koweït voisin qui a causé la mort de 26 personnes. Si l’on en croit les autorités, le réseau démantelé était constitué de « petites cellules » qui opéraient « sur un scénario préparé depuis des zones agitées à l’étranger, dans le but d’attiser une sédition confessionnelle et d’étendre le chaos ». Figurent parmi les personnes appréhendées 190 suspects qui, toujours selon le ministère de l’Intérieur saoudien, planifiaient de nouvelles attaques, à la fois contre d’autres mosquées chiites et les forces de sécurité. Ce n’est pas la première fois que Riyad doit faire face à un défi sécuritaire important : de 2003 et 2006, Al-Qaeda avait lancé une campagne d’attentats et d’attaques sanglantes dans le royaume avant d’être terrassée par une répression des plus violentes. Pourchassés sans relâche, les survivants avaient dû se réfugier au Yémen où ils ont créé, avec la branche yéménite de l’organisation, une nouvelle structure : Al-Qaeda dans la péninsule arabique (AQPA).

    Cette fois, la stratégie de l’EI est double. D’une part, il cherche à frapper les forces de sécurité saoudiennes et les missions diplomatiques, comme le faisait Al-Qaeda dans les années 2000. D’autre part, il s’attaque aux mosquées chiites. Par fanatisme, comme il le fait en Irak et en Syrie, mais aussi pour pousser cette minorité (environ 20% de la population), qui s’estime déjà discriminée par le pouvoir saoudien, à se radicaliser et à se rebeller contre lui au prétexte qu’elle n’est pas assez protégée. Le défi de l’EI s’annonce donc encore plus radical que celui d’Al-Qaeda, d’autant plus que l’organisation d’Al-Bagdadi occupe à présent un tiers de l’Irak, pays avec lequel Riyad a une frontière de plusieurs milliers de kilomètres qu’il lui est impossible de contrôler. C’était déjà le prince Mohammed ben Nayef qui avait personnellement dirigé, durant ses longues années passées au ministère de l’Intérieur, la lutte contre Al-Qaeda. Cible de quatre attentats, il avait survécu par miracle à celui d’août 2009 perpétré par un kamikaze lié à AQPA. Devenu prince héritier et ministre de l’Intérieur, c’est encore lui qui est en première ligne contre l’EI. Il y joue aussi son avenir politique. On peut prévoir que la répression qu’il dirige sera terrible.

    Cette offensive de l’EI tombe à un mauvais moment pour le royaume saoudien, dont l’attention est déjà accaparée par la situation au Yémen et aux suites de l’accord nucléaire iranien conclu la semaine dernière. La situation à Aden, certes, apparaît tourner à l’avantage des forces gouvernementales que soutient Riyad mais, en même temps, les provinces limitrophes saoudiennes du Najran et de l’Assir –qui furent longtemps yéménites avant d’être conquises par la force par le roi Ibn Séoud– commencent à s’agiter.