Révolutions précaires, essai sur l’avenir de l’émancipation, de Patrick Cingolani (la découverte)…

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  • « Notre rapport au travail est en train de changer »
    http://www.lemonde.fr/emploi/article/2016/01/29/notre-rapport-au-travail-est-en-train-de-changer_4856081_1698637.html

    Le sociologue Patrick Cingolani, auteur de Révolutions #précaires (La Découverte, 2014), invite à réfléchir aux articulations entre #salariat et indépendance.

    Vous affirmez que le terme précaire est porteur d’une multiplicité de sens. C’est-à-dire ?

    Patrick Cingolani.- Sans vouloir monter en épingle la figure du précaire, liée à des formes d’exploitation du #travail, on ne peut pas non plus réduire ce terme à la simple dimension de pauvreté. Ce mot a renvoyé historiquement à autre chose : dès les années 1980 le mot précaire est mis en avant par certains mouvements.

    Dans L’Exil du précaire (Méridiens Klincksieck, 1986), j’évoque des jeunes issus de milieux populaires qui essaient d’échapper au travail et se servent de l’intermittence comme mode de vie alternatif. Le mot précaire est alors l’expression d’une aspiration à l’autonomie et à l’autoréalisation.

    Qu’en est-il aujourd’hui de ces précaires revendiqués ?

    Paradoxalement, on pouvait plus facilement échapper à la contrainte salariale dans les années 1980. Les jeunes risquaient alors plein de choses, mais ils avaient une grande probabilité de retrouver un emploi. Aujourd’hui, les conséquences du travail précaire sont beaucoup plus graves. C’est pourquoi dans mon dernier livre, Révolutions précaires – Essai sur l’avenir de l’émancipation, je m’intéresse aux travailleurs des industries culturelles. On sent chez eux l’ambivalence entre l’aspiration à l’autonomie et la confrontation à de nouvelles formes d’exploitation. Car à travers cette aspiration à l’indépendance, la classe moyenne se précarise.

    J’ai interrogé des personnes qui, à 50 ans, étaient encore dépendantes de leurs parents. Si la résistance à la #précarité dans la société salariale s’appuyait sur des formes de protection sociale et de prise en charge par les institutions, elle tend à reposer aujourd’hui sur l’héritage familial. Mais cette transformation n’en reste pas moins fondamentale. Elle est d’autant plus importante qu’elle se développe à travers les nouvelles technologies : on peut penser aux développeurs ou designers Web qui travaillent irrégulièrement sur une plate-forme, et produisent une valeur intellectuelle et culturelle fondamentale, captée par les entreprises.

    Aujourd’hui, le travail flexible, les espaces de co-working se développent. S’agit-il là d’une des manifestations de cette révolution précaire ?

    La flexibilité existait déjà dans les années 1960 et elle se faisait à l’avantage des ouvriers ! Changer d’usine pour eux était un moyen d’augmenter leur #salaire. Aujourd’hui, ce sont les entreprises qui cherchent à imposer et contrôler la flexibilité. Dans Le Nouvel Esprit du capitalisme (Gallimard), Luc Boltanski explique que le capitalisme a récupéré les idées de 1968. Je pense plutôt que le capitalisme cherche à contrôler la mobilité.

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    #contrôle_de_la_mobilité #émancipation #Patrick_Cingolani

  • #Chômage : ces « nouveaux » précaires prêts à travailler gratuitement - L’Express
    http://www.lexpress.fr/emploi/chomage-ces-nouveaux-precaires-prets-a-travailler-gratuitement_1702279.html

    Après avoir mené une enquête auprès de graphistes, guides de musées, scénaristes ou encore pigistes, Patrick Cingolani esquisse le visage de ces nouveaux #précaires, mus par un « désir d’autonomie ». Ils « aspirent à trouver dans le #travail une place pour la créativité et l’expressivité », « quitte à diminuer leurs exigences salariales, voire à travailler gratuitement, et à en payer le prix en termes d’incertitude et d’instabilité ». 

    Le sociologue évoque un « sous-salariat chronique », qui se développe en France mais aussi aux Etats-Unis ou en Amérique latine, en réaction à « un mode de vie standardisé ». Il voit en ces nouveaux travailleurs, qui cumulent souvent de faibles revenus avec des allocations chômage ou le RSA, les héritiers des premiers « précaires », qui vivaient dans des squats au milieu des années 1980 et « cherchaient à échapper au monde ouvrier ». 

    Trouver du sens
    Patrick Cingolani note au passage que les dispositifs de protection sociale se sont adaptés pour devenir des compléments de revenus salariaux. Loin d’apparaître comme un stigmate, « le mot ’précaire’ devient porteur d’alternative et de différence ». On peut désormais se revendiquer « précaire », « une revendication d’indépendance face au caractère délétère d’une forme de travail », selon le sociologue. 

    Mais, pour pouvoir faire, au moins une partie de leur temps, « quelque chose qu’ils aiment, qui a du sens et de la valeur », ces travailleurs jonglent souvent in fine entre les petits #boulots_alimentaires. Et ne comptent plus le temps passé au travail. Parmi les particularités de ce nouveau rapport à l’emploi, « une mutualisation des lieux de travail et des réseaux professionnels » : en témoigne le développement des espaces de coworking, où ces travailleurs indépendants partagent bureaux, matériel et plans boulot. 

    Mais ce désir d’autonomie a son revers : « une disparition des frontières entre vie privée et vie professionnelle, et une nouvelle forme d’assujettissement au travail favorisée par les nouvelles technologies, qui mène parfois à l’épuisement », relève Patrick Cingolani. 

    Pour le chercheur, il existe « désormais plusieurs #précariats ». A ses yeux, « il n’y a rien à voir entre les classes moyennes confrontées à la précarité, et les classes populaires qui subissent des conditions de travail dégradées », notamment de temps partiel subi dans les métiers peu qualifiés.

    un extrait du livre de Cingolani
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