La France rentre dans la course au pactole iranien

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  • les propos d’un diplomate français qui reflète les positions américaines alors qu’il a négocié l’accord sur le nucléaire iranien

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    Quarante-huit heures après la visite à Téhéran de Laurent Fabius, les propos d’un de ses anciens collaborateurs, aujourd’hui conseiller diplomatique du président de la République, Jacques Audibert, sont venus troubler le nouveau climat de « respect » et de « relance » qui doit, officiellement, caractériser désormais les relations entre les deux pays. Selon l’agence d’informations économique américaine Bloomberg citant deux parlementaires américains, Loretta Sanchez et Mike Turner, qui venaient de rencontrer le diplomate français, Jacques Audibert aurait estimé, tout en exprimant son soutien à l’accord de Vienne, que si le Congrès américain votait contre l’accord, « il y aurait un peu d’intimidation et de chaos pendant un an ou deux, mais à la fin, rien ne changerait et l’Iran reviendrait à la table des négociations et cela serait à notre avantage ».

    Selon Loretta Sanchez, Jacques Audibert aurait même précisé que dans cette hypothèse, « nous pourrions obtenir un meilleur accord ». En Israël, où Netanyahou tient l’accord de Vienne pour « une grave erreur aux conséquences d’ampleur historique », et parmi les conservateurs iraniens qui accusent Zarif de laxisme, voire de trahison, comme au sein du Congrès américain, radicalement hostile à l’accord, cette déclaration d’un conseiller du président français a été accueillie comme une preuve supplémentaire de l’imprudence de Barack Obama. D’autant que Jacques Audibert, avant de rejoindre l’Élysée, avait dirigé la délégation française aux négociations des « 5 + 1 » avec l’Iran.

    Jacques Audibert lors de négociations sur le nucléaire iranien en octobre 2013 à Genève. © Reuters
    Dès la publication de ces propos explosifs par Bloomberg, l’ambassade de France à Washington a « démenti formellement le contenu de l’article ». Jacques Audibert a affirmé dans un tweet qu’il « n’avait jamais dit ou suggéré qu’un vote non du Congrès pourrait être utile et conduire à un meilleur accord ». « Évidemment, je n’ai jamais dit une chose pareille », confirme-t-il à L’Obs. Mais deux autres parlementaires américains, les républicains Paul Cook et Tom Marino, qui participaient à la rencontre avec Jacques Audibert, affirment dans un communiqué que le compte-rendu livré par leur collègue est exact. Le doute subsiste, donc, fondé sur les positions assumées jusque-là par le conseiller du président.

    Comme d’autres diplomates français, souvent impliqués dans les négociations sur le nucléaire iranien, Jacques Audibert est proche des néoconservateurs américains qui jugent, comme Israël, que l’Iran n’est pas un partenaire fiable et qui considèrent comme prioritaire au Proche-Orient le renforcement des alliances avec l’État hébreu et les monarchies du Golfe. En 2013, à Genève où il dirigeait la délégation française, il avait bloqué le texte d’un accord intérimaire qui avait l’agrément des autres négociateurs mais que Paris jugeait trop imprécis. Une nouvelle rédaction avait été adoptée, deux semaines plus tard.