Harry Potter contre l’enfant roi

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  • Harry Potter contre l’enfant roi (Sciences Humaines)
    http://www.scienceshumaines.com/harry-potter-contre-l-enfant-roi_fr_22172.html
    http://enfants.paradis.free.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=1132&Itemid=79

    La littérature de jeunesse a toujours promu à son insu un modèle d’enfant, révélateur des valeurs d’une société et de sa conception, non seulement de l’enfance, mais aussi de l’âge adulte.
    […]
    Ainsi, dans le Pinocchio de Carlo Collodi (1883), […] se donne à lire ici la mission civilisatrice que s’assigne la société moderne : prendre des sauvageons et les contraindre à devenir des hommes éclairés.

    […] c’est de cette tension que naît la littérature enfantine ; l’enfance y est toujours à la fois ce qu’il faut forcément quitter et ce que l’on veut à tout prix retenir.
    Cette nostalgie de l’enfance atteint son apogée avec le Peter Pan de James Barrie (1904). […] Grandir est devenu un aveu de défaite, une capitulation devant le monde des adultes.
    En fait, J. Barrie est un précurseur ; c’est après la Seconde Guerre mondiale, lorsque les valeurs de la modernité sont remises en cause, qu’apparaît chez l’homme occidental ce « syndrome de Peter Pan » analysé en 1983 par le psychologue Dan Kiley. Découvrir que l’enfant est une personne, valoriser l’enfance pour elle-même et non comme une simple antichambre de l’âge adulte est un progrès qui a son revers : la conviction que la vie n’a rien de mieux à offrir, voire la disparition collective d’un vouloir-être adulte, marquée entre autres par l’apparition significative du concept de « postadolescence » (tout est bon pour ne pas être adulte)…
    Peter Pan pourtant ne propose pas un idéal ; l’œuvre fait plutôt le constat d’un monde sans issue.
    […]
    Le vrai sujet de Harry Potter est donc la difficulté nouvelle de grandir dans un monde qui survalorise l’enfance. […] Quand, à l’orée du xxie siècle, le refuge dans l’enfance devient collectif, il n’est plus réaction contre le sérieux désolant des grandes personnes ; la société de consommation offre désormais parmi ses loisirs et ses gadgets bien des ersatz d’enfance. Grandir, ce n’est donc plus comme au temps de Pinocchio se plier aux valeurs de la société, mais renoncer aux facilités de la « magie », comprenons de la richesse et de la toute-puissance d’un monde où, technologie aidant, les choses ne demandent aucun effort, où l’on vit selon le principe de plaisir, […]
    [Harry Potter] est ainsi invité à identifier en lui ce qui relève de l’infantile et à désirer le voir disparaître, à reconnaître en son ennemi mortel son double et son semblable, en quelque sorte, la part de lui qui est victime du syndrome de Peter Pan.
    […] Car la situation est inédite : grandir, ce n’est plus s’efforcer de ressembler aux adultes existants, mais au contraire les dépasser pour atteindre la lucidité qu’ils ont refusée et l’acceptation de la condition de mortel qui n’a pas cessé de leur faire peur.

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