(...) Joint par téléphone jeudi soir, l’avocat de Catherine Graciet, Me Eric Moutet, invoque le respect de la présomption d’innocence : « Nous n’avons pour le moment que très peu d’éléments sur le dossier mais tout cela sent le coup monté. » Contactés, le ministère de l’intérieur et la police judiciaire parisienne ne souhaitent faire aucun commentaire sur cette affaire hautement sensible. Et le parquet de Paris n’a pas pu être joint vendredi matin.
Incrédulité
La nouvelle de l’arrestation a provoqué l’incrédulité dans l’entourage des journalistes. Ils ont coécrit en 2012 une enquête accusatrice sur le roi du Maroc. Intitulé Le Roi prédateur. Main basse sur le Maroc, le livre dénonçait un système de prédation économique exercée par le monarque et son entourage. Les éditions du Seuil ont confirmé jeudi à l’AFP qu’Eric Laurent et Catherine Graciet avaient un nouveau projet de livre sur le Maroc « pour une sortie en janvier-février ».
« Je vois Catherine régulièrement et je savais qu’elle avait ce projet de livre. Quand on la connaît, ça paraît sidérant. C’est une journaliste indépendante, rigoureuse », souligne le journaliste Nicolas Beau, qui a coécrit plusieurs livres avec elle, dont La régente de Carthage : main basse sur la Tunisie en 2009 sur Leïla Trabelsi, l’épouse de l’ex-président tunisien Ben Ali. Même incompréhension au Maroc. « Nous nous sommes connus dans les années 2002-2003 au Journal hebdomadaire. Nous sommes sous le choc, et jusqu’à ce que l’on en sache plus, c’est la présomption d’innocence qui s’applique », souligne le journaliste marocain Omar Brouksy.
Eric Laurent a lui aussi déjà écrit sur le Maroc, signant en 1993 un livre d’entretien avec l’ancien roi Hassan II, père de Mohammed VI (La mémoire d’un roi). Il est l’auteur de plusieurs livres d’enquête : Aux banques les milliards, à nous la crise, qui doit sortir le 9 septembre, La face cachée du pétrole (Plon, 2006), Bush, l’Iran et la bombe (Plon).
Paris et Rabat ont connu une brouille diplomatique de plusieurs mois à cause d’une enquête menée à Paris sur des accusations de tortures au Maroc contre le patron du contre-espionnage (DGST) Abdellatif Hammouchi. La réconciliation a été permise notamment grâce à une nouvelle convention d’entraide judiciaire, qui a suscité l’inquiétude des organisations de défense des droits de l’Homme.