auto-droit de réponse | TANX

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  • @raspa
    Ça, c’est pour compléter ta lecture de Beauté Fatale :

    Un invincible été » Rencontre avec Diglee, illustratrice et féministe
    http://uninvincibleete.com/2018/02/rencontre-diglee

    La BD « girly », ça n’existe pas !

    J’ai l’impression que c’est un peu passé, mais il y a véritablement eu cette vague d’appellation « girly », ses figures de proue malgré elles étant donc des dessinatrices comme Diglee, Pénélope Bagieu et Margaux Motin, et ce qu’a dit Diglee d’une manière extrêmement percutante, c’est que la définition de la BD « girly », c’est quand même un drôle de concept. En effet, ça voulait dire quoi ?

    « Ça voulait dire que des femmes partageaient des anecdotes de leur vie sur un ton humoristique en BD. Exactement comme Boulet, et on n’a jamais dit qu’il faisait de la BD pour mecs. »

    C’est encore une fois une histoire de référentiel, que je retrouve beaucoup dans la littérature en ce moment, tout comme au cinéma. Pendant des décennies — voire des siècles ? — on a considéré que l’être humain par défaut était l’homme, de préférence blanc, hétéro, cisgenre. Parce que ce sont ces voix qu’on a privilégiées, ces hommes ont pu raconter leurs histoires de leur propre manière, imposer leur vision du monde, et il est hyper difficile d’imprimer un autre mouvement à la narration. Si une femme écrit une histoire d’amour, on va dire que c’est de la littérature féminine, et c’est tout de suite déconsidéré : il n’y a qu’à voir comment les soeurs Brontë ont galéré, comme peu d’hommes lisent Jane Austen, comme la saga Outlander est considérée comme un truc de minette (alors que bon, pas du tout !), comme on a conseillé à Joanne Rowling de devenir J.K. Rowling pour cacher son genre au premier abord.

    Pourtant, il me semble qu’on n’a jamais dit de Stendhal que son Le Rouge et le Noir était une littérature « de bas étage » (car c’est souvent dégradant, de faire des choses féminines, vous avez remarqué ?), qu’il écrivait des choses neuneu sans profondeur. De mon côté, ça me pose beaucoup de questions, parce que quand j’écris de la fiction, c’est en général des histoires d’amour et pendant un moment je me suis dit que ce n’était pas de l’écriture légitime, parce que j’étais une femme et que c’était neuneu. Et puis en y réfléchissant, des classiques écrits par des hommes qui sont des histoires d’amour, il y en a pléthore !

    Ça me fait dire qu’il faut trouver un autre terme pour désigner ces BD qui tendent à renforcer les clichés sur le genre de leur auteur⋅e. Je suis incapable de signaler des blogueurs-auteurs de BD hommes dans ce cas-là, mais il y en a sûrement. Côté femmes, certaines citées dans l’article sont dans ce cas pour moi, Margaux Motin et Soledad Bravi notamment pour ce que je connais (il y a une liste de plein d’autrices plus loin dans l’article). Les sujets sont des anecdotes dites féminines dont il y a clairement des choses à tirer (relations de couple, garde alternée des enfants, gestion quotidienne d’une famille et d’un logement...) mais sans que ça soit "travaillé" ou "bien vu" (de mon point de vue, vu que des milliers de lectrices adorent). Du coup ça se traduit en "hihihi je suis pestouille avec mon mec", "je suis trop bien sapée en toute circonstances (tout en prétendant ne pas l’être)", le tout sur fond de modèles féminins parfaitement inaccessibles (corps parfaitement parfait inexistant dans la réalité, vêtements à la mode, pratiques culturelles inatteignables socialement ou économiquement pour plein de gens). Avant je trouvais ça inintéressant (sous l’étiquette girly, en me disant "encore un truc gnangnan de magazines féminins", maintenant ça me met en colère, tellement je trouve que ça fait passer les femmes pour des débiles (sans contribuer 1 seconde à légitimer ces sujets qui n’ont pas voix au chapitre). Et je peux plus appeler ça girly. Zut alors (mais c’est très bien).
    C’est d’autant plus dommage que ça n’est absolument pas corrélé aux talents de ces dessinatrices. En regardant les productions des deux que j’ai cité, je me rends compte que je trouve le trait de Soledad Bravi vraiment chouette, avec une capacité à transmettre des émotions tout en épure que j’aime beaucoup...

    Bref, je vais continuer à lire des autrices de BD qui abordent des sujet pas spécialement féminins, et celles qui les abordent de façon intéressante (Aude Picault <3, Marjane Satrapi <3 ou Marguerite Abouët <3 pour ne citer qu’elles)

    • @georgia peut-être qu’on peut réserver le terme « girly » à des bd non pas faites « par » des femmes mais « pour » les femmes, et qui promeuvent une vision très consensuel de la femme (ou de la fille) telle qu’on l’attend. Des BD qui jouent et renforcent les stéréotypes de genre. Même pas anti-féminisme, mais juste pas du tout questionné.
      A vrai dire, c’est comme ça que j’ai toujours compris le terme. Et pour son équivalent masculin, ou plutôt... « viriliste », du coup, il y a Marsault dans un genre totalement assumé, mais aussi beaucoup d’autres je pense, y compris des BD qu’on ne se verrait pas critiquer. Le stéréotype masculin est peut-être encore plus répandu que le stéréotype féminin, vus le nombre de héros grand public qui le diffusent. Titeuf pourrait être du lot...

    • @raspa Ton exemple de Titeuf me fait penser à un autre bon exemple du genre : Le Petit Spirou.
      Validation à longueur de « gags » que les petits garçons sont en droit de passer leur temps à faire des bêtises, à regarder des filles nues et à lorgner sur leur institutrice, à acheter des magazines érotiques en douce, à faire tourner en bourrique les adultes... Pendant que leurs copines de classe sont soit inexistantes, soit des objets sexuels.
      Mais bon, c’est de « l’humouuuuur »...

  • Sexisme dans la BD : 147 dessinatrices s’insurgent - Culture / Next
    http://next.liberation.fr/culture-next/2015/09/08/sexisme-dans-la-bd-147-dessinatrices-s-insurgent_1378207

    Cette idée leur est venue en 2013 lorsque Lisa Mandel a contacté une trentaine d’auteurs « pour recueillir toutes les questions qui leur ont été posées "sur le fait d’être une femme dans la bd" et ce dans le but de préparer l’événement parodique "Les hommes et la bd" (depuis culte !) pour le FIBDI 2014 [le festival d’Angoulême, ndlr]. » En 2015, quand une autre dessinatrice, Julie Maroh, est approchée pour participer une expo collective pour la « BD des filles », c’est la goutte d’encre qui fait déborder le flacon. Elles décident de s’organiser plus sérieusement, d’où le lancement de ce site web.
    Contre le sexisme ordinaire et le marketing genré

    Les nombreux témoignages publiés montrent le « sexisme ordinaire » subi par les auteures, de la part des libraires, des éditeurs, des lecteurs, des journalistes, etc. Les témoignages sont très variés, plus ou moins longs. « J’en ai marre des expos et prix pour « la BD de femme ». Ça fait expo ou prix « handisport ». […] Ça crée un fossé. Ça différencie encore plus, nous éloigne de nos confrèreS, appuie sur les différences, au lieu de voir les similitudes. Nous sommes auteurs point barre », juge ainsi Marion Montaigne. « J’ai accepté une fois d’être exposée parmi une sélection purement féminine, ils avaient baptisé ça « Bulles de femmes ». J’ai été mal à l’aise tout le week-end, tellement l’exposition n’avait ni queue ni tête (ah, tiens…) vu que nos styles et les thèmes abordés n’avaient rien à voir », ajoute de son côté Aude Picault.

    Reste maintenant à changer vraiment les mentalités et notamment le « marketing genré ». « Le marketing genré connaît des jours extrêmement fertiles, et l’édition y trouve son compte, reconnaît en effet Oriane Lassus. Pas nous, c’est clair et c’est une bonne chose de le faire savoir. »

    #genre #femmes #femme #féminisme #BD