Cinq ans de prison avec sursis pour un «  geste d’amour  »

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  • http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/09/16/personne-n-est-proprietaire-de-son-enfant_4759153_1653578.html#fjkpHElMybVA9

    « Personne n’est propriétaire de son enfant. Même s’il est lourdement handicapé, il a une vie autonome. Dire que sa mère n’est pas coupable, c’est affirmer que cet enfant n’est pas comme les autres et le faire sortir de l’humanité. »

    Cette affaire taraude le milieu du handicap depuis cinq ans. Elle vient d’être jugée. Il me semble qu’elle l’ait été avec une justesse remarquable, en dépit de la défense stéréotypée. Et de fait cet article de Pascale Robert-Diard est un excellent article.

    • Je ne sais pas si le procès a abordé la véritable question qui est celle de l’abandon des familles avec des handicaps lourds. Je ne pense pas à un geste d’amour mais plutôt à un geste d’épuisement et de désespoir. Parce que le côté « je reprends la vie que j’ai donné », c’est un peu « la porte ouverte à toutes les fenêtres », comme dirait Les Nuls.
      Par contre, l’absence de solutions collectives, de support, ça c’est un débat clé. Je connais une femme qui élève seule un enfant lourdement handicapé. OK, elle est payé par l’État pour le faire… elle touche par mois ce que cet enfant coûterait par jour dans une institution.
      Mais c’est tout.
      Il y a l’amour et tout le bordel, mais il y a aussi les conditions réelles de vie, effroyables : service 24h/24, 7j/7 365j/an. Surtout que le gosse grandit et devient balèze et a parfois des accès de violence. Là, c’est seule. Il ne dort pas jusqu’à 4h du mat… toi non plus.
      Les courses, le ménage, les démarches administratives, les visites, tout, c’est avec lui, tout le temps, même quand il fait des trucs zarbis qui mettent mal à l’aise les autres gens. Même s’il se met à crier (parce que dans la vie quotidienne, il y a des trucs qui le font chier grave et ça se comprend.)

      Si t’es crevée et pas lui… tant pis pour ta gueule.
      Si t’es malade… ben non, tu n’as pas le droit. Tu as de la fièvre, tu ne peux pas te trainer… ça ne change rien, il a besoin de toi tout le temps.
      D’ailleurs tu as peur de tomber malade.
      Tu as peur de vieillir.
      De ne plus pouvoir arquer.
      Tu ne peux pas trop compter sur la famille et les amis, parce que tout le monde a fui. Parce que c’est lourd, le gamin et tout ça.
      Et tu sais qu’un jour tu vas crever et qu’il va se retrouver dans un de ces endroits où tu ne peux pas le laisser…

    • J’allais rebondir dans ce sens. Non, un enfant (ou un adulte) handicapé n’a pas une vie autonome, si personne ne l’aide dans ses besoins les plus élémentaires, il meurt. Et oui, un handicapé n’est pas vraiment un humain puisqu’"on", l’état en l’occurence, ne lui offre pas les moyens de se développer selon ses capacités. J’ai des amis qui ont un enfant handicapé, il a maintenant 25 ans. Il a pu aller à l’école primaire et apprendre à lire. Ensuite, son handicap s’est aggravé, on l’a refusé dans tous les collèges parce qu’il ne pouvait pas écrire avec un crayon. Il a une barre en ferraille en guise de colonne vertébrale mais les parents ont du se battre des années, ne serait-ce que pour faire reconnaître son handicap par la sécu. Bien évidemment, c’est la mère qui a du arrêter de bosser pour s’occuper de son enfant (heureusement le couple est solide). Le gamin est mentalement en retard mais il est est loin d’être idiot. C’est un fan des Beatles et des Rolling Stones, il épate bien des adultes quand il raconte des anecdotes sur leurs vies. Et pourtant, les parents n’ont trouvé aucun établissement public pour permettre à l’enfant de se développer, comme apprendre l’anglais par exemple. Sa mère s’est littéralement ruinée la santé pour le faire évoluer et le moindre progrès est un petit bonheur qui ensoleille sa vie. Il sait écrire avec un clavier et utiliser les fonctions simples d’un ordinateur. Là, depuis trois ans, le seul centre qu’ils aient trouvé (aussi pour permettre à la mère de souffler trois jours par semaine) est une sorte de garderie ou absolument rien n’est prévu pour quelque apprentissage que se soit. Je crois que s’il y a un procès à faire, c’est celui de l’état qui ne permet pas aux handicapés (et aux parents aussi) de vivre dans la dignité.