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  • Le transporté - AnarSonore
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    Le transporté
    anonyme, vers 1912

    C’est Jean fagot qu’on me surnomme,
    J’suis un ancien.
    Oui, j’ai vu tomber plus d’un homme
    Qu’était malin.
    Maintenant que je sens que je calanche,
    J’veux vous conter
    Ce que j’ai vu depuis qu’sur la planche
    J’suis l’transporté.

    Il faut nous voir quand on turbine
    A s’faire crever,
    Le Corse armé d’sa carabine
    Pour nous braver.
    L’insulte aux lèvres, il nous bouscule.
    Fatalité !
    Coucher la tête sous la férule,
    V’là l’transporté.

    La faim qui nous poursuit sans cesse,
    O sort hideux !,
    Fait naître plus d’une bassesse
    Parmi les gueux.
    Le ventre creux fait la bourrique,
    Quel sale métier !
    Il vendrait son père pour une chique,
    Le transporté.

    Même le plus fort fait des courbettes,
    C’est effrayant.
    Car pour dresse les fortes têtes,
    Y a le repoussant !
    Pour un seul mot, on nous terrasse
    Sans hésiter.
    C’est comme ça qu’on se débarrasse
    Du transporté.

    Faut pas songer à sa misère.
    Ah ! Quel tableau !
    Comme tout l’monde est célibataire,
    On cherche la peau
    D’un gars qui bientôt s’abandonne
    A volupté.
    C’est pour un mâle qu’il se passionne
    Le transporté.

    Plus d’un forçat, quand la nuit tombe,
    Triste et rêveur,
    Voudrait voir s’entrouvrir la tombe
    De sa douleur.
    Pourquoi ainsi souffrir sans cesse ?
    Humanité !
    Supprim’le donc ! Vaut mieux qu’il crève !
    Le transporté.

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