Simon, survivant de « Charlie Hebdo » : « un corps qui se soulève » - Bibliobs

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  • La revue Lignes consacre son prochain numéro au terrorisme et aux transformations politiques récentes.

    Les attentats en France, en Europe : quelle situation nouvelle créent-ils pour la pensée ? Laquelle pour la mondialisation ? Laquelle pour ce qui s’oppose (pour le capitalisme et l’anti-capitalisme) ? L’évidence est que les anciennes oppositions, justes au demeurant, n’y suffisent pas. Qui doivent être repensées.

    Lignes , n°48, Les attentats, la pensée :
    http://www.editions-lignes.com/LES-ATTENTATS-LA-PENSEE.html

    Georges Didi-Huberman y signe notamment un texte, Survivant, soulevé, dont des extraits circulent :
    http://bibliobs.nouvelobs.com/idees/20151016.OBS7778/simon-survivant-de-charlie-hebdo-un-corps-qui-se-souleve.html

    Mouvements : mouvements qu’il faut arracher à cette pauvre moelle épinière traumatisée. Ce qu’il faut d’abord ? Simon me le dit lui-même constamment : il faut imaginer. Imaginer bouger, imaginer vivre, imaginer marcher. Se dire qu’un jour on pourra, miracle, pisser de soi-même et, il le faut absolument, recommencer de bander comme le jeune homme qu’il est. C’est de la physiologie superlative – notre pensée n’étant en aucun cas séparée de notre corps –, ou bien c’est du Spinoza en pratique quotidienne, patiente, douloureuse, mais guidée depuis les tréfonds par un formidable désir. C’est-à-dire une joie fondamentale. C’est la paradoxale joie du survivant, fût-elle nouée d’angoisses, de culpabilités, de désespoirs.

    Comment est-ce possible ? Simon se concentre. Il imagine qu’il « bouge sa jambe » : bien avant que sa jambe ne bouge elle-même, il lui faut donc un exercice de pensée imaginative où c’est l’image elle-même, l’image de sa jambe, qui se met en mouvement (elle, l’image) pour la mettre en mouvement (elle, la jambe). Simon me donne une leçon de courage, c’est évident. Mais il se permet de me donner, en plus, une leçon sur les puissances de l’imagination, domaine que je croyais, tout à fait à tort, être de ma spécialité.