– Vous avez déjà pensé à la ligature des trompes ?
– Oui, et je ne suis pas contre. J’avais commencé les démarches, mais mes interlocuteurs médicaux n’ont pas été réceptifs, ça m’a paru être un sacré parcours de combattante, alors j’ai laissé tomber.
– Vous savez, ici, on peut vous le faire, avec la méthode Essure, c’est sans souci.
– Ah, ok, c’est intéressant, j’y réfléchirai.
– Je vous assure, pensez-y. Il faut juste être sûre de ne pas le regretter. Et bien sûr, il faut que votre conjoint aille consulter un urologue, pour qu’on s’assure qu’il a été informé de la possibilité de faire une vasectomie, c’est obligatoire.
– Pardon ? Le conjoint ? Mais non…
– Si, si. Et ce qui est bien c’est que comme vous avez plus de 40 ans et que vous avez déjà des enfants, la stérilisation vous est autorisée.
– Mais euh… Non, en fait…
– Écoutez (le ton se durcit), je sais quand même mieux que vous de quoi je parle : la loi de 2003 interdit de pratiquer une stérilisation chez une femme si le conjoint n’a pas consulté un urologue pour qu’on lui propose au moins la vasectomie.
– Euh… Je n’ai jamais entendu parler de cette loi, je suis super surprise, la stérilisation c’est la loi de 2001 non ? (et réellement, je n’en avais pas entendu parler, de cette loi de 2003, et je ne savais plus trop. Après tout, peut-être ?) Et puis, il n’est pas nécessaire d’avoir eu des enfants, ni d’avoir plus de 40 ans. Je suis mal renseignée pour la loi de 2003, ça c’est fort possible, mais…
– J’en ai rien à foutre ! s’écrie-t-il, furieux. Je ne sais pas pourquoi vous êtes si agressive, c’est incroyable ça ! Bon, il faut que vous soyez sûre. Je vais vous raconter l’histoire d’une patiente : elle avait 40 ans passées, du diabète, elle avait claquer au cours de sa troisième grossesse, elle était obèse, bref, je lui ai ligaturé les trompes. Eh bien elle me l’a reproché ensuite, parce qu’elle s’était dégoté un petit jeune, d’ailleurs je ne sais pas comment il faisait, parce qu’elle ressemblait à tout sauf à une femme…
– Euh… Pardon mais… C’est un peu déplacé, ce commentaire.
– Quoi ? Mais je sais de quoi je parle tout de même !
– Euh non, mais les remarques sur son physique, là, « je ne sais pas comment il faisait, parce qu’elle ressemblait à tout sauf à une femme ». Ca ne se dit pas, c’est insultant.
– Mais je ne sais pas ce que vous avez, vous ! Ecoutez, j’interromps cette consultation, c’est à peine croyable un truc pareil, j’ai 40 ans d’expérience, et je connais quand même mieux les femmes que vous, on s’arrête là, mais je peux vous dire une chose, c’est qu’agressive et en opposition comme vous l’êtes, personne ne pourra s’occuper de vous ! »